Santorin

Santorin (en grec moderne : Σαντορίνη / Santoríni), aussi appelée Théra ou Thira (Θήρα / Thíra), est une île grecque située en mer Égée. C'est l'île la plus grande et la plus peuplée d'un petit archipel volcanique comprenant quatre autres îles, auquel on donne parfois son nom (archipel de Santorin).

Théra

Pour les articles homonymes, voir Santorin (homonymie) et Théra.
Cet article traite de l'île de Santorin. Pour l'archipel dans son ensemble voir Archipel de Santorin.

Santorin
Théra
Σαντορίνη (el)
Θήρα
 (el)

Image satellite de l'archipel de Santorin, avec l'île de Santorin à droite.
Géographie
Pays Grèce
Archipel Santorin (Cyclades)
Localisation Mer Égée (mer Méditerranée)
Coordonnées 36° 23′ 17″ N, 25° 27′ 35″ E
Superficie 76,19 km2
Point culminant Mont Profítis Ilías (el) (567 m)
Géologie Île volcanique
Administration
Périphérie Égée-Méridionale
District régional Thíra
Dème Théra
Démographie
Plus grande ville Fira
Autres informations
Découverte env 1600 av. J.-C.[1]
Fuseau horaire UTC+02:00
Site officiel http://www.thira.gov.gr
Géolocalisation sur la carte : Grèce
Santorin
Théra
Îles en Grèce

Cette île et celles de Thirassía et Aspronissi sont les vestiges d'une ancienne île partiellement détruite vers 1600 av. J.-C. au cours de l'éruption minoenne[2].

Santorin constitue l'un des principaux lieux touristiques de la Grèce, avec ses villages blancs à coupoles bleues perchés au sommet des falaises, ses panoramas sur les autres îles et ses sites archéologiques, notamment ceux de la ville antique de Théra et d'Akrotiri où furent retrouvées des ruines minoennes.

Toponymie

Le nom antique de l'île est Théra, de même que la ville antique fondée à l'époque archaïque. Selon les auteurs anciens[3],[4],[5], son premier nom aurait été Kallisté, en français « la très belle » ou « la plus belle ». Elle aurait été rebaptisée Théra à l'époque archaïque, en l'honneur du colonisateur dorien Théras, fils d'Autésion, héros thébain mythique et descendant de Cadmos[6].

Selon une tradition locale[7] d'ancienneté inconnue, elle aurait aussi été appelée Strongylé (en grec ancien Στρογγύλη / Strongýlê, « la ronde », en raison du grand cercle que forme l'archipel de Santorin).

Le nom de Santorin, dérivé de celui de sainte Irène, est attesté dès le milieu du XIIe siècle (la première mention connue du nom est faite par le géographe Al Idrissi vers 1154)[8].

Après l'indépendance de la Grèce , l'île reprend officiellement le nom antique de Théra mais le nom de Santorin est toujours largement utilisé. Le nom officiel (depuis 1940[9]) d'une des anciennes capitales de l'île, Pyrgos Kallistis, en français « Tour-de-Kallisté » fait référence à l'ancien nom de Kallistē.

Géographie

Vue de Oia (au fond à gauche) et Fira (à droite).

Santorin est située dans le sud de la mer Égée, dans l'est de l'archipel de Santorin, à 186 kilomètres au sud-est du cap Sounion (Attique) et à 113 kilomètres au nord-nord-est d'Héraklion, en Crète.

L'île de Santorin a la forme d'un croissant ouvert vers l'ouest et un profil dissymétrique : son littoral occidental est constitué de falaises et l'altitude décroit progressivement vers la côte orientale qui est généralement basse.

Administration

Santorin est incluse dans la périphérie d'Égée-Méridionale. Jusqu'à la réforme Kallikratis de 2010, l'île dépendait de l'ancien nome des Cyclades et était divisée depuis 1997 entre le dème de Théra, sur sa majeure partie, et la dème d'Oia à l'extrême Nord. Depuis, les deux anciennes circonscriptions ont été fusionnées et sont devenues des districts municipaux du dème de Théra, qui comprend donc la totalité de l'île ainsi que celle de Thirassía et des îlots inhabités.

La municipalité de Santorin est divisée en 14 choriá (χωριά) locales :

Histoire

Fresque du pêcheur aux coryphènes datant de 1500 av. notre ère.
Autre fresque minoenne représentant des lys et des hirondelles.
Clocher à Oia.

L'île actuelle de Santorin est, avec les îles de Thirassía et Aspronissi, un des fragments d'une ancienne île volcanique partiellement détruite vers la fin du XVIIe siècle av. J.-C. par l'effondrement de la caldeira, suite au vide créé dans la chambre magmatique par l'éruption minoenne[10].

D'après Hérodote[11], l'île était habitée par les Phéniciens lorsque le héros Théras fonda la colonie dorienne de Théra, à l'époque archaïque. Par la suite, l'île appartint successivement à la ligue de Délos, à l'Égypte ptolémaïque et à l'Empire romain devenu byzantin.

Comme le reste des Cyclades, l'île fut conquise par les Latins après la conquête de Constantinople (1204) ; elle dépendait alors vraisemblablement du duché de Naxos dirigé par la famille vénitienne Sanudo (l'assertion de Karl Hopf selon laquelle elle aurait été conquise par Jacopo Barozzi n'étant pas confirmée par les documents contemporains, elle est généralement rejetée par les historiens récents)[12],[13]. Elle fut reconquise vers 1275 pour les Byzantins par Licario. La guerre vénéto-byzantine (1296-1302) offrit aux Vénitiens de prendre leur revanche : en août 1301 le duc de Naxos Guglielmo Sanudo passa ainsi un contrat avec un corsaire anconitain en vue de la reconquête de l'île, mais il fut devancé par un membre de la colonie vénitienne de Crète, Jacopo II Barozzi, ce qui déclencha un conflit entre les deux familles se terminant par l'annexion des Sanudo vers 1335.

En 1318 elle fut attaquée par les Turcs des émirats côtiers (Menteshe ou Aydin), alliés des Catalans du duché d'Athènes avec lesquels Venise était en conflit[14], puis en 1345 par la flotte d'Umur Bey depuis Theologo[15].

En 1423, un procès opposa Maria Sanudo et sa fille Fiorenza au beau-frère de cette dernière, le duc Giovanni II Crispo ; Fiorenza, qui revendiquait l'île en vertu du testament de son défunt époux (entre autres litiges), fut déboutée par les tribunaux vénitiens sur ce point[16]. En 1479 le duc Giacomo III Crispo la donna en dot à sa fille, une autre Fiorenza, mariée à Domenico Pisani ; cependant l'ile fut occupée par le frère et successeur de Giacomo, Giovanni III, et un autre procès l'opposa aux époux Pisani jusqu'en 1486[17].

L'île passa progressivement sous domination ottomane à partir du milieu du XVIe siècle et rejoignit la Grèce au cours de la guerre d'indépendance en 1821.

La dernière éruption de l'archipel eut lieu à Néa Kaméni du 10 janvier au 1er février 1950. Assez faible, elle produisit un petit dôme de lave. Cet événement faisait suite à une série d'explosions phréatiques de type faible à modéré qui ouvrirent deux évents à l'emplacement des fissures développées durant les éruptions précédentes. La surface totale des nouvelles laves atteignit 7 312 m2[18],[19].

En 1956, l'île fut touchée par un séisme qui fit une cinquantaine de victimes et détruisit plus de 2 000 habitations.

En 1970 furent mises au jour les fresques d'Akrotiri dont les plus connues sont celles dites des "enfants-boxeurs", du "pêcheur aux coryphènes" et des "singes bleus", témoins de la civilisation minoenne remontant au IIe millénaire avant notre ère. D'importantes collections de céramiques ont été aussi dégagées du champ de fouilles. Ces œuvres d'art ont été ensevelies sous les cendres volcaniques et la ponce qui les ont préservées de l'éruption minoenne, des séïsmes ultérieurs et de l'érosion. Une fois dégagées, elles ont été conservées dans des musées et le site est protégé par une toiture.

Durant l'année 2011, l'île a subi une activité sismique liée au gonflement de la chambre magmatique située à km de profondeur, détecté par 20 stations GPS installées depuis 2006[20]. Ce gonflement traduit un remplissage qui pourrait provoquer de nouvelles éruptions.

Hypothèse de localisation de l'Atlantide

L'archéologue grec Spyridon Marinatos et son compatriote le sismologue Angelos Galanopoulos ont proposé dans les années 1960 l'« hypothèse minoenne » selon laquelle la destruction de l'île, passée dans la mémoire collective sous forme de mythe, aurait inspiré à Platon son récit de l'Atlantide[21],[22]. Cette hypothèse est de nos jours discutée car la persistance dans la mémoire collective d'un souvenir, même mythifié, sans qu'aucun texte antique ne nous soit parvenu à ce sujet, et ce durant neuf siècles (durée que Platon multiplie par dix en évoquant une Atlantide ayant existé « neuf mille ans avant le règne de Solon »), semble peu probable[23],[24] ; Platon n'évoque d'ailleurs aucun cataclysme volcanique et sa topographie, l'orographie et la luxuriance qu'il décrit ne correspondent pas à la géographie de l'ancienne île[25]. Même les preuves du méga-tsunami destructeur sont actuellement remises en question[26].

Grappe de raisin Assyrtiko.
Santorin vue d'avion, avec la brume de mer.
Animation représentant Santorin en trois dimensions.

Milieu naturel

L'eau douce est précieuse sur cette île quasi-désertique qui n'a que très peu de réserves et aucune source naturelle. Jusqu'au XIXe siècle, les habitants récupéraient dans des citernes l'eau de pluie tombée sur les toits. Aujourd'hui, une usine de dessalement d'eau de mer produit l'essentiel de l'eau courante, maintenant potable.

La sécheresse du sol recouvert d'une épaisse couche de cendres, et son acidité ne permettent que peu de cultures (agrumes, fourrage, vignes).

Économie

Santorin abrite une variété spécifique et très ancienne de vigne, l'Assyrtiko, au rendement très faible (10 à 20 % du rendement de la vigne française ou californienne) mais naturellement très résistante au phylloxéra. Poussant à même le sol sans aucun tuteur, les pieds sont plus espacés que partout ailleurs à cause de la sécheresse du sol (leur principale source en eau est celle de la rosée et la brume d'origine marine). Les branches sont seulement disposées en anneau spiralé, et les grappes pendent au centre à l'abri du vent. Elle donne un vin recherché très sec, à l'acidité prononcée (liée à la nature du sol), l'Assyrtiko aux arômes citronnés, ainsi qu'un vin doux, le Vinsanto.

La tomate cerise de Santorin (appelée Tomataki Santorinis) a obtenu de l'Union européenne en décembre 2013 une appellation d'origine protégée[27].

L'exploitation de la mine de pierre ponce qui était auparavant exportée, a été suspendue en 1986 pour préserver les sols et l'environnement naturel fragile de l'île.

Haut lieu du tourisme en Grèce, l'archipel de Santorin et son île principale sont accessibles par des navires de tous gabarits qui peuvent mouiller dans la baie, mais seul le port d'Athinios, où accostent la majorité des visiteurs, permet le débarquement de véhicules. En 2007, le navire de croisière Sea Diamond coule à une grande profondeur dans la caldeira et son épave constitue depuis un risque permanent de pollution.

Les villages situés sur la falaise (Fira, Oia), disposent chacun d'un petit port dans la caldeira, auxquels ils sont reliés par un chemin escarpé permettant de les rejoindre à pied ou à dos d'âne, ou encore par un petit téléphérique à Fira. Un service d'autocars permet de relier les différents villages. Depuis la construction de l'usine de dessalinisation de l'eau de mer, de nombreuses piscines ont été construites pour le développement touristique.

Un aéroport construit dans l'est de l'île, près des plages de Kamari et de Périssa, permet aux petits porteurs de s'y poser et assure l'été une relation quasi permanente avec Athènes et Héraklion.

Données touristiques dans diverses îles des Cyclades[28]
Amorgos Naxos Paros Mykonos Santorin
Nombre de lits (2006)[29] 298 4 239 6 616 9 274 9 789
Lits/km2 (1997) 11,2 17,9 81,8 154,2 253,4
Lits/habitants (1997) 0,71 0,43 1,25 1,36 1,6
Nuitées/habitants (1997) 2,9 8,5 47,2 127,2 20,6
Nuitées/superficie (1997) 41,5 351,9 3 102,8 14 374,3 3 264,3
Transport aérien[29]
Naxos Paros Mykonos Santorin
Nombre de vols (atterrissages et décollages) 2004 926 1 680 6 136 6 971
Nombre de vols (atterrissages et décollages) 2006 886 1 641 6 466 8 344
Nombre de départs (2004) 15 000 15 000 168 000 283 000
Nombre de départs (2006) 15 000 16 000 199 000 352 000
Nombre d'arrivées (2004) 13 000 18 000 166 000 265 000
Nombre d'arrivées (2006) 13 000 21 000 198 000 326 000

Notes et références

  1. Date de sa formation lors de l'éruption minoenne.
  2. R. Treil et al, Les Civilisations égéennes, p. 296.
  3. Hérodote, Histoires [détail des éditions] [lire en ligne], Livre 4, CXLVII.
  4. Apollonius de Rhodes, Argonautiques, IV.
  5. Pausanias le Périégète la nomme Kallisté, qui est devenue Théra, dans le Livre VII, « Voyage de l'Achaïe », chapitre II.
  6. Hérodote, Histoires [détail des éditions] [lire en ligne], Livre IV - CXLVIII.
  7. P. Pègues, Histoire et Phénomènes du volcan et des îles volcaniques de Santorin (1842), p. 98.
  8. A. Savvides, s.v. Santurin Adasi̊ in Encyclopaedia of Islam, Second Edition, volume IX, 1997, p. 20.
  9. « Jusqu'où faut-il croire la Bible ? », article du quotidien belge L’Écho.
  10. Histoire, IV - CXLVII (lire en ligne).
  11. Marina Koumanoudi, « The Latins in the Aegean After 1204: Interdependence and Interwoven Interests », in Urbs capta. The Fourth Crusade and its Consequences, 2005, p. 263.
  12. Louise Buenger Robbert, « Venice and the Crusades », dans Kenneth M. Setton, Harry W. Hazard, Norman P. Zacour, A History of the Crusades, Volume 5 : The impact of the Crusades on the Near East, Univ of Wisconsin Press, (ISBN 0-299-09140-6, lire en ligne) p.432, citant les travaux de Silvano Borsari et de R-J Loenertz
  13. Elizabeth A. Zachariadou, « The Catalans of Athens and the Beginning of the Turkish Expansion in the Aegean Area », in Studi medievali, vol. 21, 1980, p. 827, d'après une lettre du duc de Candie datée de juin 1318.
  14. Elizabeth A. Zachariadou, Trade and Crusade. Venetian Crete and the Emirates of Menteshe and Aydin (1300-1415) p.51 et 94
  15. David Jacoby, La féodalité en Grèce médiévale. : Les « Assises de Romanie », sources, application et diffusion, Paris, La Haye, Mouton & Co, (lire en ligne) pp. 303-304
  16. Jacoby 1971, p. 305.
  17. Smithsonian Institution - Global Volcanism Program - Information géologique sur l'île de Santorin - Site Internet: http://volcano.si.edu/volcano.cfm?vn=212040
  18. VolcanoDiscovery - Les volcans actifs en Europe - L'éruption de 1950 à Santorin - Site Internet: https://www.volcanodiscovery.com/fr/santorini/1950-eruption.html
  19. « À Santorin, un volcan sous haute surveillance », .
  20. (en) Angelos G. Galanopoylos, « On the Origin of the Delnge of Deukalion and the Myth of Atlantis » [PDF], sur ir.lib.uth.gr, University of Thessaly Institutional Repository, (consulté le )
  21. (en) John V. Luce, « The changing face of the Thera problem », Classics Ireland, Classical Association of Ireland, Dublin, vol. 1, (lire en ligne)
  22. (en) Sturt W. Manning, « Eruption of Thera/Santorini », dans Eric. H. Cline (dir.), The Oxford Handbook of The Bronze Age Aegean, Oxford, Oxford University Press, (ISBN 978-0199873609), p. 458
  23. (en) Richard Ellis, Imagining Atlantis, Knopf Doubleday Publishing Group, , 336 p. (ISBN 978-0-307-42632-1, lire en ligne), p. 140-141
  24. Guy Kieffer, « A la recherche des sources de l'Atlantide », dans Éric Foulon, Connaissance et représentations des volcans dans l'antiquité: actes du Colloque de Clermont-Ferrand, Université Blaise-Pascal, Centre de recherche sur les civilisations antiques, 19-20 septembre 2002, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal, (ISBN 9782845162372, lire en ligne), p. 85-92
  25. {en}{pdf} « D. Dominey-Howes, « The Late Minoan tsunami in the eastern Mediterranean : a re-examination », Tsunami Symposium, 28-30 mai 2002, Honolulu www.sthjournal.org
  26. (en) e-Kathimerini 19 décembre 2013.
  27. Ioannis Spilianis, Tourisme et Développement durable en Méditerranée. La Grèce., université de l'Égée, 2003.
  28. Office national grec de la statistique.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Phyllis Young Forsyth, Thera in the Bronze Age, Peter Lang, 1997, XVI-201 p., ill. (ISBN 0-8204-3788-3)

Articles connexes

Autres liens

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