Romanisation (histoire)

La romanisation est un concept historique qui désigne un processus d'acculturation par l'adoption de la langue latine et de la culture romaine dans l'aire d'influence de l'Empire romain.

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Le phénomène de municipalisation, l'intégration à l'armée ou encore l'adhésion aux cultes romains  en particulier les cultes impériaux  en apparaissent comme les vecteurs. L'historiographie de la Rome antique a interrogé cette notion pour comprendre quelles pouvaient être sa validité et sa profondeur en fonction des régions et des milieux sociaux observés.

La romanisation, objet de débats

En Afrique du Nord

La notion a fait l'objet d'un débat chez les historiens en particulier dans le monde africain romanisé à la suite de la publication de l'ouvrage de Marcel Bénabou, La Résistance africaine à la romanisation. Les thèses de l'auteur ont été dès la publication de l'ouvrage remises en perspective pour suggérer une interprétation différente du processus de romanisation perçu non comme un ensemble de valeurs et de faits culturels imposés mais comme acceptés et intégrés volontairement par les populations de l’Empire romain ou de ses confins. Ainsi, pour Yvon Thébert, la Grèce n’hellénise pas, Rome ne romanise pas, car « l’évolution des cultures est avant tout un processus interne aux régions concernées »[1].

En Orient

La romanisation des Illyriens a produit la culture et la langue dalmate, disparues au XIXe siècle ; celle des Thraces et des Daces a produit les Thraco-Romains qui sont à l’origine des langues romanes orientales dont les locuteurs sont appelés au cours de l’histoire Istriens, Roumains, Aroumains, Valaques ou Moldaves (et parfois « Moldo-Valaques »). Devenue enjeu politique à partir du XVIIIe siècle entre les revendications des roumanophones luttant pour leur émancipation (en s’appuyant, pour la légitimer, sur leur latinité) et l’historiographie des Empires au sein desquels ils vivaient (Autriche-Hongrie, Russie), cette romanisation n’a pas été contestée en elle-même, mais controversée quant à la zone géographique où elle s’est produite. L’historiographie austro-hongroise et russe la situe exclusivement au sud du Danube, dans les Balkans, afin de conférer aux roumanophones vivant au nord du Danube (actuelles Roumanie et Moldavie) le rôle d’« immigrants tardifs » dans les territoires qu’ils revendiquaient. En revanche, l’historiographie des États balkaniques comportant des minorités aroumaines (Serbie, Bulgarie, Grèce) réfute l’idée que la romanisation ait pu se produire dans les Balkans, et considère que ces minorités romanophones sont, elles aussi, des « immigrantes tardives » venues du nord du Danube. En somme, il y a certes eu romanisation (impossible à nier puisque les langues romanes orientales existent) « mais pas chez nous »[2].

Enjeu sémantique

Par confusion avec la romanisation (liturgie), c’est-à-dire avec la transformation des rites liturgiques de certaines églises chrétiennes pour qu’ils soient plus conformes au rite romain, on a aussi parlé de « romanisation » à propos de l’Empire latin de Constantinople, État fondé sur le territoire de l’Empire byzantin à la suite de la quatrième croisade et de la chute de Constantinople aux mains des « Latins ». Mais l’emploi de ce terme dans ce contexte est impropre pour deux raisons :

  • la langue latine n'est pas sortie des chancelleries de l’État « latin » de Constantinople et des autres États dits « latins » d’Orient et ne s’est pas étendue aux populations soumises ;
  • à cette époque et politiquement, l’« Empire romain », identifié et perçu comme tel par tous (même si sa langue usuelle était le grec) était bien celui que l’Occident nomme « byzantin » depuis 1557 (Hieronymus Wolf), mais qui ne s’est jamais appelé ainsi durant sa longue existence (mais Imperium Romanorum, en grec Βασιλεία Ῥωμαίων / Basileía Rhômaíôn), tandis que l’État dit « latin » de Constantinople ne s’identifiait pas ainsi mais était perçu et identifié comme un « Empire franc » et non romain (Imperium Francorum, en grec Βασιλεία ϕράγγων / Basileía frángôn). L'enjeu de ces joutes sémantiques entre historiens ultérieurs, est de dénier aux Grecs « byzantins » la position d’héritiers de l’Empire romain, pour la transférer aux États successeurs de Charlemagne, à la papauté et aux États fondés par les croisés[3].

Notes et références

  1. « Royaumes numides et hellénisme », p. 30 cité par Igor Moullier, « Les dynamiques de la colonisation romaine », in: Revue Afrique et histoire, 2005
  2. Claude Karnoouh, L’invention du peuple, chroniques de la Roumanie, Paris, Arcantère, 1990.
  3. Georg Ostrogorsky, Histoire de l'État byzantin, Payot, 1998 (978-2-228-90206-9).

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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