Paul Van Zeeland

Le vicomte Paul Guillaume van Zeeland, né le à Soignies et mort le à Bruxelles, est un avocat, politicien catholique et homme d'État belge. Juriste, économiste, professeur, banquier, conseiller politique, il fut à l'origine de nombreuses réformes économiques et de structures. Il présida les deux premiers gouvernements de Rénovation nationale dans lesquels il exerça le rôle de Premier ministre et de ministre des Affaires étrangères de 1935 à 1937. Plus tard, il exercera à nouveau le rôle de ministre des Affaires étrangères uniquement de 1949 à 1954.

Paul van Zeeland

Paul Van Zeeland en 1937.
Fonctions
Premier ministre de Belgique
Monarque Léopold III
Gouvernement Van Zeeland I et II
Coalition Catholique - libéral - POB
Prédécesseur Georges Theunis
Successeur Paul-Émile Janson
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Soignies (Belgique)
Date de décès
Lieu de décès Bruxelles (Belgique)
Nationalité Belge
Parti politique Parti catholique
Profession Avocat et politicien
Religion Catholicisme
Premiers ministres belges

Origines, études et carrière professionnelle

Paul van Zeeland est issu d’une famille aisée dont les ascendants sont originaires du Brabant-Septentrional aux Pays-Bas. Son grand-père vint s’installer en Belgique, à Soignies, pour des raisons religieuses au cours du XIXe siècle. Il est un des fils de l’union de Louis-Léopold van Zeeland et de Marie-Félicie Ynaert et le septième d’une fratrie de huit frères et sœurs.

Ses parents (en particulier sa mère) lui transmettent le goût de l’ambition et de la réussite, si bien que celui-ci devient un élève brillant et modèle. En effet, il effectue ses études au collège Saint-Vincent où il termine en tête de classe avec une moyenne de plus de 96 %. Il poursuit son parcours universitaire de manière tout aussi admirable que son parcours scolaire en suivant un bachelier en philosophie tomiste et en décrochant la plus grande distinction des études de philosophie et lettres qu’il suivait simultanément.

Ses études sont interrompues par l’avènement de la Première Guerre mondiale lors de laquelle il fait partie de la « compagnie universitaire de Louvain » et lors de laquelle il est fait prisonnier de guerre pendant plus de 4 ans et est déporté dans plusieurs villes en Allemagne. Il tentera de s’échapper trois fois.

La fin de la Première Guerre mondiale lui permet de reprendre ses études là où il les avait laissées et d’obtenir un doctorat en droit avec la plus grande distinction en 1920. Il poursuit ensuite une formation en sciences politiques et diplomatiques. Ses compétences pluridisciplinaires et sa faculté à briller dans tous les domaines seront les facteurs de la réussite de son futur parcours en politique. Il saisit sa chance pour partir étudier à l’étranger en obtenant une bourse de la Commission for relief of Belgium (CRB) ce qui lui donne le privilège de se rendre à Princeton aux Etats-Unis pour présenter sa thèse consacrée à la réforme monétaire, sous la direction du professeur Edwin Kemmerer. Ses connaissances du système monétaire américain constituent pour celui-ci un atout incontestable vu l’importance des États-Unis et de leur monnaie, le dollar, à la sortie de la guerre. Léon Dupriez, un professeur de van Zeeland, mesure combien l’Amérique est désormais destinée à jouer un rôle important dans la vie internationale et à quel point, dès lors, les connaissances de ce dernier lui seront utiles sur la scène internationale.

Après la théorie vient la pratique, Paul van Zeeland effectue alors un stage dans une banque, ce qui lui permet d’observer de près le fonctionnement du système bancaire. Lorsque van Zeeland revient en Europe, il a gagné en reconnaissance et est considéré comme un spécialiste de l’économie (en particulier de l’économie américaine de toute évidence). Il fait figure de pionnier dans la littérature sur l’économie en publiant en 1922 « La réforme bancaire aux Etats-Unis d’Amérique de 1913 à 1921. Le système de réserve fédérale ». Par le biais de cette publication, il en profite également pour critiquer certains aspects de cette structure économique américaine, mais également d’autres structures économiques étatiques, qui lui déplaisent telle que la trop grande dépendance à son goût de la finance à la politique.

Il entre à la Banque nationale en 1924 et en sera nommé directeur en 1926 puis « vice-gouverneur » en 1931. Ses compétences dans les questions économiques et monétaires dans les relations internationales lui permettent de faire partie des délégations belges aux grandes conférences économiques européennes et internationales.

Paul van Zeeland se marie le avec la baronne Renée Dossin de Saint-Georges, fille du lieutenant-général baron Émile Dossin de Saint-Georges, commandant de la 2e division d’armée en 1914-1918[1].

Paul Van Zeeland durant son service militaire à Louvain

À partir de 1928, il décide de partager ses savoirs avec les étudiants belges en enseignant le cours d’analyse financière à l’université de Louvain. Il participe également à la création de l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES) dont il devient le directeur. Son réseau de relations et le nombre de ses expériences, notamment internationales, ne cessent de croître au fil des années, de même que sa réputation.

Vie politique

Début dans la vie politique

Jamais dans ses jeunes années Paul Van Zeeland n'avait conçu des ambitions politiques jusqu'au jour ou le Roi Albert Ier le convoqua pour un entretien afin de discuter de problématiques monétaires. Petit à petit au fil des rendez-vous et des sujets de conversations, le roi, en tant que professeur, enseigna à Paul Van Zeeland les rouages de la vie politique.

C'est en , à la suite de l'alliance temporaire des jeunes socialistes et libéraux que, le gouvernement ayant été mis en minorité, Charles de Broqueville dut démissionner et ce en vue charger de constituer un nouveau gouvernement. À la suite du retrait de la vie politique de grandes figures comme Hymans, Janson, Lippens, Gustave Sap obtint le poste de ministre des Finances. Gustave Sap ayant une personnalité forte se vit imposer deux ministres sans portefeuille : Jules Ingenbleek et Paul van Zeeland. Six semaines après la formation du gouvernement, Paul van Zeeland déposa sa démission ne pouvant plus supporter de voir adopter des mesures économiques opposées à celles préconisées par le plan de redressement économique et monétaire qu'il avait établi dès son arrivée au cabinet[2]

Van Zeeland I

Van Zeeland I du au , coalition catholique-libérale-socialiste

Le le gouvernement De Broqueville est démissionnaire. Georges Theunis est alors chargé de composer une nouvelle équipe composée de libéraux et de catholiques. Celle-ci démissionnera le . Le , Paul van Zeeland se voit confier par le jeune souverain Léopold III la lourde charge de former un gouvernement tripartite. Le , est donc annoncée la composition de son gouvernement comptant quinze membres dont trois ministres sans portefeuille.

Durant son mandat, le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères eut pour seul objectif le redressement économique de la Belgique. Pour ce faire, son programme comprenait notamment la prolongation des pouvoirs spéciaux, la stabilisation du franc par une dévaluation (qui permet à la Belgique de voir ses exportations reprendre et entraîne une reprise de l'activité économique[3]), le contrôle du crédit bancaire et la création d'un Institut central hypothécaire. Sur le plan des Affaires étrangères il annonçait la reconnaissance de l'Union soviétique.

La première grande réforme du gouvernement Van Zeeland fut la dévaluation de 28 % de sa valeur du franc belge afin de mettre un terme à la crise de déflation dont souffrait la Belgique.[4] Cette opération fut considérée comme un succès par la majorité.

La deuxième réforme fut le , la création de l'Office de Redressement Économique (OREC). La troisième réforme importante fut la conversion des rentes et l'instauration du contrôle bancaire.[5]

Van Zeeland II

Van Zeeland II du au , coalition catholique-libérale-socialiste

À la suite des élections législatives du 24 mai 1936, un nouveau mouvement avec à sa tête Léon Degrelle , sous le nom de Rex, rencontre une ascension fulgurante. Dans ce contexte politique difficile le Roi Léopold III, à la suite du refus de Van Zeeland, charge Émile Vandervelde de former un gouvernement mais il échoue. Le Roi réitère sa demande auprès de Van Zeeland qui accepte et le Paul Van Zeeland forme son second gouvernement en laissant tomber la double casquette de premier ministre et de ministre des Affaires étrangères. Il présente son gouvernement le .

Durant son second mandat, il met sur pieds une série de mesures issues de la Conférence nationale du Travail du menant notamment à la création des premiers congés payés de six jours ouvrables par an, l'assurance obligatoire contre les maladies et l'invalidité et le prolongement de la scolarité obligatoire. De plus il entreprend la création de nouvelles structures afin d'améliorer le fonctionnement du travail parlementaire comme le Conseil d’État et d'un Centre d’Étude pour la Réforme de l’État.

Van Zeeland contre Degrelle

La campagne électorale de l'élection partielle du 11 avril 1937 est tumultueuse. Elle oppose principalement Paul Van Zeeland, dont les soutiens s’étendent du Bloc catholique au Parti communiste de Belgique contre Léon Degrelle représentant les rexistes. Soutenu par le parti catholique, le parti ouvrier belge, le parti libéral et le parti communiste, il remporte l'élection avec une écrasante majorité de 76 % des voix contre seulement 19 % pour Degrelle[6]. Le , après à sa défaite, Degrelle porte une série d'accusations relatives à l'affaire de la cagnotte évoquée par Sap en pleine campagne électorale. Sap accuse le premier ministre d'avoir perçu une rémunération de la Banque nationale alors qu'il était premier ministre, accusation que Van Zeeland dément vigoureusement. Le gouvernement charge donc Henri de Man alors ministre des Finances de mener une enquête sur ce sujet. Ce dernier dépose son rapport d'enquête, le , défavorable à Van Zeeland confirmant que le premier ministre a bien perçu 330 000 francs. Même si cette contribution était légale, cette affaire porte atteinte à la légitimité de Van Zeeland. Il démissionne le .

Même s'il s'est retiré de la vie publique, il ne quitte pas la politique pour autant. Il reste député jusqu'aux élections anticipées du .

Seconde Guerre mondiale

Paul van Zeeland part pour les États-Unis en 1940 afin de présider la Coordinating Foundation for Refugees.

En 1940, van Zeeland s'est déclaré auprès de Leo Pasvolsky assistant spécial de Cordell Hull, ministre des Affaires étrangères de Franklin Delano Roosevelt favorable à un fort leadership américain capable de créer un nouvel ordre international[7].

En 1941, il accepte la présidence de la Commission pour l'étude des problèmes d'après-guerre créée par le gouvernement belge de Londres.

Juste après la guerre, en , Paul Van Zeeland se voit confier par Paul-Henri Spaak, le poste de Commissaire au rapatriement au titre d'ambassadeur extraordinaire, poste qu'il occupera jusqu'en , satisfait du travail accompli.

En 1946, il devient sénateur coopté par les membres de la Haute Assemblée.

Il ne cessera durant ces années de mener des missions de conseiller à travers le monde.

Retour aux Affaires étrangères

Le 11 aout 1949, Paul Van Zeeland devient ministre des Affaires étrangères du gouvernement dirigé par Gaston Eyskens. Il restera en place jusqu'en 1954.

Durant cette période, il joue un rôle majeur dans la construction européenne notamment en contribuant à la mise sur pieds de la CECA et la CED. Il signera au nom de la Belgique l’adhésion à la CECA et représentera la Belgique au sein de l'OTAN.

Il participa également à la création du groupe Bilderberg[8].

Retrait de la vie publique et fin de vie

Le , Paul van Zeeland se retire pour de bon de la vie politique en rendant son mandat de sénateur. Il devient conseiller général de la Banque de Bruxelles et est nommé à la présidence de la Banque belge d'Afrique. Le roi Baudouin, le lui donne le titre de vicomte, transmissible par ordre de primogéniture, pour service rendu.

À partir des années soixante son état de santé se détériore jusqu'en 1967 ou il est victime de sa première embolie. Fort affecté par le décès de sa femme en 1972, il décède le .

Ouvrages

  • Van Zeeland, Paul. Regards sur l'Europe : 1932, Office de publicité: Bruxelles, 1933. 252 p.
  • Van Zeeland, Paul; VanLoock, Louis. Petits pays et organisation internationale (Radar),Ed.de la Cité: Bruxelles, 1945. 48 p.

Bibliographie

  • Michel Dumoulin et Vincent Dujardin, Paul van Zeeland - 1893-1973, Éditions Racine, Bruxelles, 1997 (ISBN 978-2-87386-114-8)
  • Donald Markwell, 2006, John Maynard Keynes and international relations, Oxford University Press
  • Nouvelle Bibliographie nationale, tome 6, Académie Royale de Belgique, 2001
  • P. Janssens et L. Duerloo, Armorial de la noblesse Belge, Crédit Communal, Bruxelles 1992, p. 901
  • Van Zeeland, Paul. Regards sur l'Europe : 1932, Office de publicité: Bruxelles, 1933. 252 p.
  • Van Zeeland, Paul; VanLoock, Louis. Petits pays et organisation internationale (Radar),Ed.de la Cité: Bruxelles, 1945. 48 p.
  • Noville, Jean Albert. Au service de son temps : Paul van Zeeland et la politique étrangère en Belgique, De Meyer: Bruxelles, 1954. 253 p.

Notes et références

  1. Revue des deux mondes, Au Bureau de la Revue des deux mondes, 1936
  2. Dujardin, Vincent, 1972-, Paul van Zeeland, 1893-1973, Racine, (ISBN 2873861142, OCLC 39756741, lire en ligne)
  3. CROMBOIS J.-F., (1998), « Finance, économie et politique en Belgique à la veille de la Seconde Guerre mondiale, 1939-1940 », in Cahiers d’Histoire du Temps présent, 5, p. 171-206.
  4. nbb.be
  5. Guy VANTHEMSCHE: L'élaboration de l'arrêté royal sur le contrôle bancaire (pdf, 49 p.), BTNG | RBHC (en:Journal of Belgian History), XI, 1980, 3, pp. 389-437
  6. Pascal Delwit La vie politique en Belgique de 1830 à nos jours, Bruxelles, Éditions de l'Université de Bruxelles, 2010, p. 109.
  7. Donal Markwell, 2006, p. 213
  8. Benoît Collombat et David Servenay (dir.) avec Frédéric Charpier, Martine Orange et Erwan Seznec, Histoire secrète du patronat de 1945 à nos jours., La Découverte, 2009, (ISBN 9782707157645), p. 84-85.

Liens externes

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