Möngke

Möngke, également retranscrit en Mongka ou Möngke (mongol : ᠮᠥᠩᠬᠡ, VPMC : Möngqe, cyrillique : Мөнх, MNS : Mönkh : « éternel »), aussi appelé Mangu Khagan (mongol : ᠮᠥᠩᠬᠡ
ᠬᠠᠭᠠᠨ
, VPMC : Möngqe qaɣan, cyrillique : Мөнх xaan, MNS : Mönkh khaan), également retranscrit en Mangu Khan, né en 1209 et mort en 1259, petit-fils de Gengis Khan, est le khagan (khan suprême) des Mongols à partir de 1251.

Biographie

Origines familiales

Il est le fils aîné de Tolui[1], lui-même, quatrième et dernier fils de Gengis Khan et de son épouse principale Börte (1209-1259). Sa mère est Sorgaqtani. L'élection de Möngke marque la mise à l'écart de la branche d'Ögedeï, troisième fils de Gengis Khan, khagan après la mort de son père en 1227.

L'élection

audience, représentation de 1438 dans le Tarikh-i Jahangushay (en)

À la mort de Güyük (fils d'Ögödei), en 1248, Oghul Qaïmich son épouse, prend la régence, elle voudrait faire attribuer le trône à un prince de la lignée d'Ögödei, soit à son propre fils, Qoutcha, qu'elle avait eu avec Güyük, mais il est trop jeune, soit à Chirämön, neveu de Güyük. Batu, alors doyen de la famille gengiskhanide est résolu à écarter les Ögödaïdes et accepte la proposition de Sorgaqtani, veuve de Tolui d’élever son fils ainé Möngke qu'elle avait eue avec Tolui, à la dignité de grand khan[2].

Batou convoque un quriltay en 1250, dans son campement dans la région d’Alamag, au nord du lac Yssyk Koul. Les représentants des branches d’Ögedeï et de Djaghataï n’y participent pas ou le quittent avant le terme, seules les maisons de Djötchi et de Toloui sont donc représentées[2].

Plus tard, ce résultat voit l’opposition à la désignation de Möngke des deux branches non présentes, lorsqu'ils apprirent la nouvelle; disant que l'assemblée s'était passée trop loin des lieux saints genghiskhanides, et qu'elle était trop incomplète. Batu juge alors nécessaire de convoquer un deuxième quriltay, sur l'Onon ou le Kéroulèn. Les opposants refusèrent de s'y rendre[3].

Passant outre ces oppositions, Batu charge son frère, Berké de convoquer une assemblée à Ködä’ä-aral (ou Kötö’ü-aral), sur le Kéroulèn. Malgré l'opposition de la maison d’Ogödaï et celle Yissou-Mangou, khan de l’oulous de Djaghataï, soutenant ces derniers, Berké réunit le quriltay et proclame Möngke grand Khan, le [3].

Les Ogodaïades écartés du pouvoir, Chirämön (ou Chiremune), se rend après coup au quriltay finissant, prétendant vouloir rendre hommage au nouveau khan tout en voulant le surprendre et le détrôner avec ses troupes. Leur intention découverte, ses troupes sont désarmées, celui-ci est arrêté et ses conseillers, dont Qadaq et Tchinqaï, sont exécutés. Mongke punit sévèrement ses cousins, Oghoul Qaïmich qu'il hait (il la décrit à Rubrouck comme une « femme plus vile qu’une chienne »), est dénudée pour être interrogée, cousue dans un sac et noyée entre mai et . Khubilai emmène Chirämön à l'armée chinoise pour le sauver, mais Möngke le noya également plus tard. Qoutcha, fils de Güyük, est relégué à un canton à l'Ouest de Qaraqoroum. Qada’an qui se soumet spontanément et Qaïdou sont épargnés et conservent l’oulous ogodaïde de l’Imil. Yissou-Mangou, chef de l’oulous de Djaghataï, qui s'était monté contre lui est également exécuté et remplacé par Qara-Hulägu, autre Djaghataï, puis par sa veuve, la princesse Orghana (1252). Büri, autre petit-fils de Djaghataï qui avait offensé Batu lors de la campagne d'Europe, est mis à mort par ce dernier[4].

Le règne

Durant son règne, Möngke rétablit en partie l’unité de l’empire (seul Batu reste quasiment indépendant) et en restaure le mécanisme administratif. Sous son règne, il cède en 1266 des parts de la péninsule de Crimée, à la République de Gênes, qui y fonde la Gazarie. Le Khanat de Crimée sera installé plus tard sur la péninsule par la Horde d'or et existera aux côtés de la colonie génoise[réf. nécessaire].

Les conquêtes

Empire mongol sous Möngke en 1259
Möngke et sa horde
Bataille de Mohi, en Hongrie en 1241, à laquelle Möngke a pu participer[5].

En 1253, Möngke tient un quriltay à la source de l’Onon où il donne à ses frères l’ordre d’aller conquérir le monde. Il charge le cadet Hülegü d’annexer au Turkestan le califat de Bagdad et la Mésopotamie et à Kubilay de conduire une expédition contre la Chine des Song du Sud[réf. nécessaire].

Conquête du Tibet

La deuxième invasion mongole du Tibet a lieu entre 1251 et 1253, décidée par Möngke, voit d'une part Qoridai (5e fils de Kubilai Khan, qu'il eut avec Qoruchin Khatun[6]), le commandant des troupes mongoles, soumettre à la domination mongole toute la région jusqu'à Damxung (Dangquka), au nord-est de Lhassa, d'autre part une armée commandée par Dupeta (ou Dobeta) pénètre dans le pays jusqu'à Dam, tuant, pillant, incendiant des maisons, détruisant des temples[7],[8].

Selon Hugues-Jean de Dianous, Möngke khaan n'envoie des troupes au Tibet qu'en 1253, qui est alors intégré à l'Empire[9].

Dans les écrits tibétains, il est nommé tibétain : བོད་ཀྱི་མོན་མཁར་མགོན་པོ་གདོང, Wylie : Bod kyi-mon-mkhar-mgon-po-gdong, THL : bö kyi mönkhar gönpo dong[10]

Conquêtes en Asie du Sud-Est

C'est sous le règne de Möngke que débute la conquête du sud-est asiatique :[réf. nécessaire]

Le Royaume de Dali (correspondant à peu près à l'actuel Yunnan) dont la capitale, Dali, située au bord du lac Erhai se trouve sur les contreforts du plateau du Tibet, conquis par Kubilai Khan en 1253[11].

Le Tonkin en 1257. Cette dernière conquête reste toutefois, selon Jean-Paul Roux, « incertaine et précaire », empêchant une véritable domination de la région[12].

La campagne d'Houlagou en Asie occidentale (1255-1259)

Möngke charge son frère Houlagou d'établir « les coutumes (rusum va yusum) et la loi (yasa) » des Mongols de l'Oxus à l'Égypte[13], ce qui implique notamment : l'assujettissement des Lors, un peuple du sud de l'Iran ; la destruction de la secte des Nizârites (dits « Haschichim », « Assassins ») ; la destruction du califat des Abbassides à Bagdad, c'est-à-dire le cœur du monde musulman de cette époque ; la conquête des territoires dirigés par les Mamelouks d'Égypte, qui incluent la Syrie.

L'armée d'Houlagou part en 1255 ; elle prend facilement le contrôle des Lors, et sa réputation effraye tant les Assassins qu'ils capitulent et livrent leur forteresse d'Alamut sans combat en 1256[réf. nécessaire][14].

Bagdad est prise lors de la bataille du 10 février 1258. L'événement eut un retentissement et une portée symbolique énormes : "Il y avait cinq cent quinze ans que cette ville avait englouti le monde entier" en dira le chroniqueur arménien Kirakos de Gandzak[15]. Houlagou s'empare ensuite de la Syrie, et s'apprête à envahir l'Égypte lorsque la mort de Möngke entraîne l'arrêt momentané de la campagne. Les Mamelouks reprennent la Syrie peu après avoir écrasé les Mongols lors de la bataille d'Aïn Djalout, et tué leur chef, Ketboga.

Aspects religieux

Le deuxième Karmapa, Karma Pakshi, reconnu Möngke comme un ancien disciple.

Tuluy père de Möngke et fils préféré de Gengis Khan, épousa la princesse Soyughaqtani et conserve auprès d'elle une église nestorienne, leurs fils Möngke, Kubilai, Houlagou et Ariq Boqa sont élevés dans l'esprit de la foi chrétienne, mais la yassa mongole leur interdit d'être baptisé[16]

Les Mongols lors de leur conquêtes s'adaptent à la religion de la région conquise, c'est une façon de conserver le pouvoir sur leur colonies. Ils ont donc adopté le bouddhisme en Chine orientale et au Tibet, Ariq Boqa le frère de Mongke a adopté l'islam en Perse qu'il a conquise[réf. nécessaire].

Le deuxième Karmapa, Karma Pakshi (1206-1283) voyage beaucoup et notamment en Mongolie et devient un célèbre enseignant. Il est particulièrement honoré par Möngke Khan, reconnu par le Karmapa comme un ancien disciple[17].

Épouses et descendance

* Qututai Khatun, fille de Manggechen, chef onggirat, fils de Che, frère de Börte, l'épouse de Gengis Khan
  • Yesuder Khatun, aussi fille de Manggechen, ensuite remariée à Yobuqur, fils d'Ariq Boqa, fils de Tolui
  • Qutuqtai Khatun, fille d'Uladai, chef ikire, fils de Bötu, et de la princesse Antu, petite-fille d'Ögödei Khan, dont il eut :
    • Baltu (premier fils)
    • Urüng Tash (second fils), père d'Olzai, prince de Wei, lui-même père de la princesse Nülün, mariée à Albadai, fils d'Aibuqa, chef Ongut
  • Bayalun Khatun, mariée à Qurin, fils de Jaqurchin, fils de Bötu, chef ikire
  • Oghul Qaimish Khatun, fille de Qutuqa beki, chef des Oirat, dont il eut :
    • Shirin Khatun, mariée à Chochimtai, fils de Taichu, chef des Olqunu’ut
    • Bichqa Khatun, mariée à son beau-frère Chochimtai
  • Bayaujin, concubine, de la tribu des Bayaut, dont il eut :
    • Shiragi (troisième fils)
  • Küiteni, concubine, de la tribu des Eljigin, dont il eut :
    • Asutai (quatrième fils)
[réf. nécessaire]

Mort et succession

En 1259, Möngke part lui-même en campagne aux côtés de Kubilai, laissant la régence à son frère Ariq Boqa à Karakorum. Il meurt peu après pendant le siège de forteresse de Diaoyu (钓鱼城), (dans l'actuel District de Hechuan à Chongqing dans l'empire des Song du sud[réf. nécessaire].

Il meurt soudainement le . Chaque chronique donne une cause différente pour sa mort. Du choléra selon les Chinois, de dysenterie selon les Perses, ou d'une flèche lors d'une bataille selon d'autres[Qui ?][18].

La succession est difficile, opposant Ariq Boqa et Kubilai dans ce que l'on nomme aujourd'hui la guerre civile toluid[n 1].

En 1260, Khubilaï est élu cinquième et dernier khan[réf. nécessaire] mais ce n'est qu'en 1264 qu'il parvient à soumettre Ariq Boqa à Xanadu.

Citations

Edward Conze rapporte dans son ouvrage sur le bouddhisme deux mots de Möngke, qui, alors qu'il favorisait nestoriens, bouddhistes et taoïstes au nord de l'Inde, vers 1250, montre l'ouverture de son esprit politicien. Au Franciscain Guillaume de Rubrouck, il déclara : « Nous croyons qu'il n'y a qu'un seul Dieu […]. Mais, comme Dieu a donné à la main plusieurs doigts, Il a donné de même aux hommes plusieurs voies »[19][réf. incomplète], alors qu'il disait aux bouddhistes que leur mouvement était comme la paume de cette main dont les doigts étaient les autres religions.

Notes et références

Notes

  1. Houlagou a aussi dû jouer un rôle, puisqu'il cesse sa campagne contre les Mamelouks et ramène l'armée mongole vers l'Asie centrale.

Références

  1. (Grousset, p. 348)
  2. (Grousset, p. 348-349) (Chapitre : Régence d’Oghoul Qaïmich)
  3. (Grousset, p. 349)
  4. (Grousset, p. 350)
  5. John Man-Kublai Khan, p.32
  6. (en) Rashid Al-Din (trad. du persan par John Andrew Boyle), The Successors of Genghis Khan, Université de Colombia, coll. « UNESCO Collection of Representative Works » (lire en ligne), p. 243
  7. (en) Luciano Petech, Tibetan Relations with Sung China and with the Mongols, p. 173-203, in China among Equals. The Middle Kingdom and its neighbours, 10th-14th centuries, Morris Rassaki (ed.), University of California Press, Berkeley, Los Angeles, London 1983, p. 182.
  8. Hugues-Jean de Dianous, « Le Tibet et ses relations avec la Chine », Politique étrangère, p.45 : « En 1253, l'empereur Mongkou (Hien Tsong) de la dynastie impériale mongole des Yuan, qui régnait alors sur la Chine, envoya une armée au Tibet, qui fut incorporée à l'empire Yuan. Ainsi qu'on l'a vu, il y avait eu antérieurement des rois au Tibet ; mais à partir de 1275, le pouvoir politique et l'autorité suprême religieuse ne firent plus qu'un dans ce pays, quand l'empereur mongol Koubilaï eut reconnu le chef de la secte bouddhiste sa-skay-pa, Phagspa, comme chef du Tibet ».
  9. (de Dianous 1962, p. 45)
  10. (en) János Szerb, « Glosses On The Oeuvre Of Bla-Ma 'Phags-Pa: II. Some Notes On The Events Of The Years 1251—1254 », Acta Orientalia Academiae Scientiarum Hungaricae, Budapest, Akadémiai Kiadó, vol. 34, nos 1/3, , p. 263-285 (lire en ligne)
  11. (Shih 2009, p. 54)
  12. Jean-Paul Roux (2002) p. 47
  13. Denise Aigle (2004) p. 4.
  14. (Grousset 1965, p. 444)
  15. Roux (2002) p. 47 et 54
  16. L. N. Gumilev (1966) p. 48
  17. Dzogchen Ponlop Rinpoché et Michele Martin, Une Musique venue du ciel : Vie et œuvre du XVIIe Karmapa, Claire Lumière, (2005) — Série Tsadra — (ISBN 2-905998-73-3), p. 360-362
  18. (en) Jack Weatherford, Genghis Khan and the Making of the Modern World, p. 188.
  19. Guillaume de Rubrouck[réf. incomplète]

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

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