Joseph Vantini

Joseph Vantini, dit « Yusuf[1] », né en 1808 à l'île d'Elbe et mort le à Cannes, est un général français.

Biographie

Origines et jeunesse

Le Général Yusuf n'avait conservé aucun souvenir de sa famille, se rappelant seulement avoir vu Napoléon Ier en 1814[2]. Il semble qu'il soit né d'un grenadier corse au service de Napoléon Ier et qu'il ait été élevé par la sœur de l'empereur, Pauline Bonaparte, jusqu'à l'âge de trois ans[3]. Vers cette époque, il fut embarqué pour Florence où on l'envoya poursuivre ses études ; mais le navire qui le transportait ayant été capturé par un pirate barbaresque[4], conduit à Tunis, il échut en partage au Bey. Devenu musulman temporairement, et placé dans le sérail, il ne tarda pas à se concilier l'affection de ses maîtres[2].

Ayant appris en peu de temps le turc, l'arabe, l'espagnol[2], il gagna, par son adresse dans tous les exercices militaires, l'amitié du Bey[2] mais, engagé dans une intrigue avec une des filles du Prince et surpris, un jour, dans un de ses rendez-vous, par un gardien, il conçut aussitôt l'audacieuse résolution de le suivre dans les jardins et de s'en défaire. Il jeta le corps dans une piscine profonde, n'en conservant que la tête et, le lendemain, pendant que la jeune princesse l'entretenait des vives terreurs auxquelles elle était en proie, il la conduisit, pour toute réponse, dans la chambre voisine, et lui montra, dans l'une des armoires, la tête de l'esclave dont il avait arraché la langue. Comme cette aventure pouvait néanmoins finir par s'ébruiter, il ne songea plus dès lors qu'à quitter Tunis, prépara son évasion et reçut pour cela l'aide de Jules de Lesseps[3], fils du consul de France, ainsi que d'Amédée Van Gaver, important négociant français de Tunis[5].

Pendant quelques jours, feignant d'être malade, il obtint la permission de sortir du sérail, et, trompant la vigilance de ses surveillants, il put aisément concevoir les moyens de s'échapper. C'était au mois de . Le brick français l'Adonis était à l'ancre dans la rade ; un canot devait l'y conduire, mais cinq Turcs étaient postés là pour s'opposer à son embarquement. Yusuf, qui les avait vus de loin, remarqua qu'ils avaient laissé leurs fusils en faisceau sur un rocher : il s'élança de ce côté, jeta les armes à la mer, se débarrassa de deux de ces hommes, mit les autres en fuite, et gagna l'embarcation[6], qui avait l'ordre de rallier la flotte française à Alger. Peu de jours après, il débarquait à Sidi-Ferruch[4].

Campagne de 1830 en Algérie

Placé comme interprète militaire auprès du commissaire général de police, il accomplit plusieurs missions auprès des chefs des diverses tribus éloignées, qui lui ouvrirent la carrière des armes. Nommé capitaine[4] dans le 1er régiment des chasseurs d'Afrique le , il fut ensuite promu aux fonctions de khalifa auprès de l'agha des Arabes[7].

Désigné par le duc de Rovigo pour faire partie de l'expédition de Bône, il assiste le capitaine d'artillerie d'Armandy, et son rôle dans l'investissement de la citadelle lui vaut la croix de chevalier de la Légion d'honneur. Il contribua plus tard à conserver cette conquête à la France[8]. Depuis huit jours, la poignée d'hommes à laquelle avait été confiée la défense de la ville, était enfermée dans la casbah : Yusuf, averti par un de ses gens que les Turcs avaient formé le complot de l'assassiner pendant la nuit, de massacrer les Français et de s'emparer du fort, va trouver le capitaine d'Armandy qui commandait la garnison, lui fait connaître l'imminence du danger, et lui déclare qu'il ne sait qu'un moyen d'y échapper[9].

« II faut, que je sorte avec mes Turcs, ajoute-t-il. — Mais ils te tueront, répond l'officier français. — Que m'importe, répond Yusuf ; j'aurai le temps d'enclouer les pièces qui sont à la marine. Je succomberai, je le prévois, mais tu seras sauvé, et le drapeau français ne cessera pas de flotter sur Bône[9]. »

À peine a-t-il prononcé ces mots qu'il sort, suivi de ses Turcs. La porte de la casbah est aussitôt murée derrière lui ; parvenu au bas de la ville, Yusuf s'arrête, et s'adressant à sa troupe :

« Je sais, dit-il, qu'il y a parmi vous des traîtres qui ont résolu de se défaire de moi dans la nuit prochaine. Je les connais, qu'ils frappent d'avance ceux qui ne craindront pas de porter la main sur leur chef[9]. »

Puis se tournant vers l'un d'eux : « Toi, tu es du nombre » , lui dit-il, et il l'étend mort à ses pieds. Cet acte de résolution déconcerte les conjurés ; ils tombent à ses genoux, et lui jurent une fidélité à laquelle ils n'ont pas manqué depuis[9].

Autres campagnes en Algérie

Yusuf se fit encore remarquer pendant les campagnes de 1832 et 1833, et fut nommé, le , chef d'escadron dans le corps des spahis réguliers du « colonel-agha » Marey.

À l'époque de l'expédition du maréchal Clausel sur Mascara, Youssouf arriva à Oran, après avoir traversé plus de vingt lieues de pays, accompagné seulement de quelques cavaliers ; le maréchal lui confia alors le beylik de Constantine. Il fut nommé officier de la Légion d'honneur, le . Sa conduite distinguée en 1836 et 1837 lui valut, le , le grade de lieutenant-colonel, et il fit, à la tête de son corps de spahis, les campagnes de 1838 à 1841. Il a été nommé colonel de la cavalerie indigène d'Afrique le , et promu au grade de maréchal de camp après la bataille d'Isly[10]. Le général Yusuf continua à se montrer glorieusement dans la lutte contre Abd el-Kader : lors de la prise de la smala d'Abd el-Kader par le duc d'Aumale, le , le premier échelon est composé des spahis et du goum, commandé par le colonel Yusuf ; le , il battit l'émir à Tenda dans un combat de cavalerie. Le , il l'atteignit de nouveau, le battit, lui enleva tous ses bagages et fut sur le point de l'enlever lui-même.

Le , il prend l'oasis de Laghouat, avec le général Aimable Pélissier[11].

La guerre de Crimée

En 1854, durant la guerre de Crimée, le général Yusuf fut chargé, en Bulgarie, d'organiser en spahis quatre régiments de spahis d'Orient, ou bachi-bouzouk, qui n'épargnaient pas plus les Turcs que les Bulgares et qui, à la suite de grosses pertes, furent licenciés au bout de deux mois[12].

Création du corps des spahis

C'est Joseph Vantini qui crée le le corps des spahis dans l'armée française. Ce sera également lui qui sera chargé de recruter ces nouveaux régiments. Ce corps militaire va par la suite se développer et être à l'origine de nombreux faits d'armes spahis.

Vie privée

Mariage

Au faîte des honneurs, il retrouve ses parents à qui il répond "Je suis le fils de mes œuvres et de mon sabre". Il se rappelle avoir été baptisé, et abjure la religion musulmane, en 1836, pour se faire catholique et se marier avec Mademoiselle Weyer qui est sœur du maréchal des logis Gustave Weyer, qu'il a décoré pour fait de guerre après la charge d'Isly[3].

Notes et références

  1. https://www.persee.fr/doc/outre_0399-1377_1931_num_19_80_1050_t1_0197_0000_3
  2. Robert Christophe, Napoléon, Empereur de l'île d'Elbe, Paris, Arthème Fayard, 1959, 318 p., p. 236.
  3. « Valentini Joseph dit Le Général Yusuf », sur babelouedstory.com (consulté le )
  4. « Joseph Vantini », dans Charles Mullié, Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, [détail de l’édition], p. 205-6.
  5. Charles Marcotte de Quivières, Deux ans en Afrique, ¨Paris, (lire en ligne), pages 281-282
  6. Philippe Le Bas, France : Dictionnaire encyclopédique, t. 12, Paris, Firmin Didot frères, 1845, p. 1 002-3.
  7. Corneille Trumelet, Le Général Yusuf, t. 1, Paris, Paul Ollendorff, 1890, p. 529.
  8. L'Univers : histoire et description de tous les peuples, Paris, Firmin Didot frères, 1845, p. 1 003.
  9. P. Clausolles, Histoire de la régence d'Alger, depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, Toulouse, J.-B. Paya, 1843, p. 152.
  10. Gabriel Esquer, Les débuts de Yusuf à l'armée d'Afrique, d'après des documents inédits (1830-1838), Paris, A. Jourdan, 1910, 300 p., p. 225-282.
  11. Pierre Montagnon, La conquête de l'Algérie : Les germes de la discorde, , 470 p. (ISBN 978-2-7564-0877-4, lire en ligne), p. 450.
  12. Le Spectateur militaire : recueil de science, d'art et d'histoire militaires, Paris, Direction du spectateur militaire, 1856, p. 203.

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

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