Philippe Le Bas

Philippe Le Bas, né le à Paris où il est mort le , est un helléniste, épigraphiste, archéologue et traducteur français. Maître de conférences à l’École normale supérieure, responsable de la bibliothèque de la Sorbonne, membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, président de l'Institut de France, il est surtout connu comme le précepteur de Napoléon III.

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Biographie

Fils unique de Philippe Le Bas et d’Élisabeth Duplay, fille cadette de Maurice Duplay, le logeur de Maximilien de Robespierre, rue Saint-Honoré à Paris, Philippe Le Bas n’avait que six semaines lorsque son père se suicida d’un coup de pistolet lors de la chute de Robespierre, le 9 thermidor. Écroué avec sa mère à la Petite-Force puis à la prison Talaru, rue de Richelieu, il passa avec elle à Saint-Lazare et au Luxembourg, avant d'être libéré, cinq mois plus tard[1].

Élevé dans le culte de son père, de Robespierre et de Saint-Just, Le Bas entra à douze ans au collège de Juilly[2], où sa mère le confia au père Balland, que son père avait sauvé[1]. En 1810, il s'engagea, à l'âge de seize ans, comme novice dans la marine impériale et servit sur le lougre le Vigilant puis le vaisseau le Diadème. Promu aspirant de 2e classe le [3], il passa en 1813 dans l'armée de terre, où il devint maréchal des logis dans la garde impériale, au troisième régiment des gardes d’honneur, et participa aux campagnes de 1813 et de 1814. Employé sous la Restauration au bureau des hospices de la Préfecture de la Seine, comme commis principal puis sous-chef de bureau[2], Le Bas, qui avait appris le grec avec Boissonade, fut remarqué, en , par Hortense de Beauharnais, qui lui proposa de devenir le précepteur de son fils Louis Napoléon Bonaparte, futur Napoléon III. Quittant Arenenberg, où était installée sa mère, celui-ci rejoignit Le Bas et son épouse à Augsbourg, où il suivit les cours du gymnasium. En 1823, Le Bas accompagna son pupille à Marienbad, où Louis Bonaparte prenait les eaux. Puis, à la fin d'octobre, ils quittèrent, sur les instances d'Hortense, Augsbourg pour Rome, où ils arrivèrent à la mi-novembre. Ce séjour fut interrompu au printemps 1824 par le décès d'Eugène de Beauharnais, qui les obligea à rentrer en Bavière pour assister à ses funérailles. Le , Hortense le congédia brutalement, sous prétexte d'économies. En fait, il semble que leurs divergences de vue en matière d'éducation, le républicanisme prononcé de Le Bas et son austère puritanisme aient fini par la lasser[4].

Au cours de ce séjour à Rome à titre de tuteur au sein de la famille de la reine Hortense, Le Bas fit la connaissance d’archéologues italiens et allemands. De retour en France, il obtint, à la faculté des lettres de Paris, les grades de licencié () et de docteur (), fut reçu premier au concours d'agrégation de lettres ()[2] et devint, la même année, professeur au lycée Saint-Louis, puis maître de conférences d’histoire à l’École normale supérieure en 1830, titre qu’il échangea, quatre ans plus tard, contre celui de maître de conférences de langue et littérature grecques à la même école (1834-1860).

Chargé, le , par Abel Villemain, alors ministre de l’Instruction publique, d’une mission scientifique en Grèce et en Asie Mineure, il s’y rendit à la tête d’une expédition scientifique, au cours de laquelle il dirigea des fouilles dans la région.

Les deux années de sa mission, essentiellement épigraphique, qui devait durer un an, mais fut prolongée de onze mois, jusqu’en , furent consacrées à la collecte de dessins de monuments anciens et d’inscriptions encore inédites, en restituant d’après un examen sur les lieux celles qui sont mutilées, en recherchant dans les îles les moins explorées jusqu’alors tout ce qu’il y avait de monuments épigraphiques non seulement inédits, mais même inconnus.

Le Bas revint chargé d’un butin énorme : ayant pu emmener un dessinateur, il ramena 450 dessins et 5 000 inscriptions, presque toutes grecques, dont 2 000 au moins copiées et estampées à Athènes, et 3 000 autres recueillies dans les autres parties du monde grec. Il a, de surcroît, raconté les diverses expériences qu’il vécut lors de cette mission dans un ouvrage publié en 1847-1848 : Voyage archéologique en Grèce et en Asie mineure.

Au retour de sa mission, Le Bas entra à la bibliothèque de la Sorbonne comme conservateur adjoint le , avant d'être nommé le administrateur, fonctions qu'il remplit jusqu'en 1860[5].

Sous la Deuxième République, il fut élu conseiller municipal de Paris le [6]. Vice-président de l'Association démocratique des amis de la Constitution (pro-Cavaignac) et opposé au coup d'État du 2 décembre 1851 de Napoléon III, il resta, malgré tout, en bons termes avec son ancien et illustre élève, refusant néanmoins toute faveur de sa part. À partir de 1856, une subvention annuelle de 6 000 francs lui fut versée[7].

Élu le à l'Académie des inscriptions et belles-lettres[8], il devint président de l’institut de France en 1858. Il fut également membre du Comité des travaux historiques et scientifiques (1848-1849)[9], membre ()[10] puis président de la Société nationale des antiquaires de France[9] et l'auteur de traductions du grec ancien et de l’allemand en français.

Famille

Philippe Le Bas s'est marié avec sa cousine Edmée-Louise-Clémence Duplay, petite-fille de Maurice Duplay née à Paris le 27 floréal an VII () et décédée en 1875[6],[11].

Il a eu deux enfants naturels avec Marie-Madeleine-Adèle Grujon : Léon Grujon Le Bas (1834-1907)[12],[13], directeur de l'hôpital de la Salpêtrière et chevalier de la Légion d'honneur, et Clémence-Charlotte-Élisabeth Grujon Le Bas (née en 1836), mariée le à Eugène Dauzon (1824-1894), avocat, préfet et conseiller général de Lot-et-Garonne, avec lequel elle eut deux fils, Philippe Jean Michel Dauzon (1860-1918), avocat, député radical de Lot-et-Garonne, conseiller général de Lot-et-Garonne, président du Conseil général, chevalier de la Légion d'honneur, et Jean-Georges-Philippe Dauzon[14], propriétaire-rentier à Layrac et Paris[6],[15],[16].

Publications principales

  • Explication des Inscriptions grecques et latines recueillies en Grèce, par la commission de Morée, in-8° ; Paris, 1er cahier, 1835 ; 2e cahier, 1837 ;
  • Explication de quelques inscriptions latines trouvées par l’armée d’Afrique à Tlemcen ; Paris, 1836, in-8° (extrait du Journal général de l’Instruction publique) ;
  • Commentaire sur Tite-Live ; Paris, grand in-8° à 2 col. ; 1840 ;
  • Restitution et explication des inscriptions grecques et latines de la grotte de la Vipère de Cagliari, avec quelques observations sur les inscriptions latines du même monument ; Paris, 1840, in-8° ;
  • Historiens occidentaux des Croisades, t. 1er : Guillaume de Тут ;
    Le texte latin a été revu et annoté par Le Bas, depuis le cahier 105 jusqu’à la fin du volume ; Paris, 1844.
  • Voyage archéologique en Grèce et en Asie Mineure ; Paris, 1847 et ann. suiv. ;
  • Mémoire sur une Inscription métrique trouvée, à Athènes vers la fin du siècle dernier, près le temple d’Érechthée, dans les Mémoires de. l’Acad. des Inscript. et Belles-Lettres, t. XXI1I, 2e partie ;
  • « Explication d’une Inscription grecque de l’île d’Égine, et Sur deux bas-Reliefs provenant, l’un de Gortyne dans l’ile de Crète, et l’autre d’Athènes », Nouvelles Annales de l’Institut de Correspondance Archéologique de Rome, t. II et t. XVIII ;
  • Fragments inédits de deux romans grecs, Bibliothèque de l’École des Chartes (1841) ;
  • Articles archéologiques et historiques dans la Revue de l’Instruction publique, Dictionnaire de la Conversation ;
  • Aventures de Hysminé et Hysménias, par Eumathe le Macrombulite, trad. du grec avec remarques ; Collection des Romans grecs : 1828, in-8° ;
  • Aventures de Drusitla et Chariclès, par Nicétas Eugenianus, trad, du grec, avec des remarques et variantes ; 1841, in-8° ;
  • Édition collationnée sur dix-sept manuscrits se trouvant à Munich, à Milan et à Paris, Bibliothèque des Auteurs grecs, Amb.-Firmin Didot, 1856 ;
  • Suède et Norvège, l’Univers pittoresque, 1838, 1 vol. in-8° ;
  • Allemagne, l’Univers pittoresque, 1838, 2 vol. in-8° ;
  • États de la Confédération Germanique, l’Univers pittoresque, 1842, in-8° ;
  • L’Asie Mineure, l’Univers pittoresque, l vol. in-8°.

Le Bas est l’un des auteurs du Dictionnaire encyclopédique de l’Histoire de France ; l’Univers pittoresque ; 12 vol. in-8°. Il a publié pour l’usage des classes plusieurs ouvrages historiques, qui ont eu un grand succès : Précis de l’Histoire Ancienne ; 2 vol. in-12 ;

  • Précis d’Histoire Romaine ; 2 vol. in-12 ;
  • Histoire du Moyen Âge, 2 vol. in-1 2 ;
  • Plusieurs éditions (texte grec et trad, franc.) d’historiens, orateurs et poètes tragiques grecs. Il a également composé, en collaboration avec Ad. Régnier, plusieurs ouvrages pour l’enseignement de la langue allemande, qui devinrent des classiques.

Pour approfondir

Bibliographie

  • Georges Bordonove, Les Grandes Heures de l’Histoire de France - Napoléon III, Paris, Pygmalion, 1998.

Source partielle

  • Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des contemporains, contenant toutes les personnes notables de la France et des pays étrangers, L. Hachette et cie, 1858, 1802 pages, p. 1048, [lire en ligne]

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. G. Lenotre, Paris révolutionnaire. Vieilles maisons, vieux papiers, t. 3, Perrin et cie, , série : Trois femmes, chapitre trois (Babet).
  2. Monique Lefrançois, « Philippe Le Bas, fils de conventionnel et administrateur de la bibliothèque de la Sorbonne, 1846-1860 », Mélanges de la Bibliothèque de la Sorbonne, vol. 3, , p. 89-109.
  3. Frédéric Masson, Napoléon et sa famille, t. 12, Albin Michel, , p. 455.
  4. Frederick Arthur Simpson, The Rise of Louis Napoleon, Routledge, , 400 p. (ISBN 0-7146-1359-2, lire en ligne), p. 44-47.
  5. Claude Jolly, La Bibliothèque de la Sorbonne, Bibliothèque de la Sorbonne, , 94 passage=12 p..
  6. Vincent Wright et Éric Anceau, Les Préfets de Gambetta, Presses Paris Sorbonne, , 482 p. (ISBN 978-2-84050-504-4 et 2-84050-504-5, lire en ligne), p. 159.
  7. Catherine Granger, L'Empereur et les arts : la liste civile de Napoléon III, Librairie Droz, , 866 p. (ISBN 2-900791-71-5, lire en ligne), p. 112.
  8. Ernest Desjardins, Comptes rendus des séances de l'année, t. IV, Académie des inscriptions & belles-lettres, Auguste Durand, (lire en ligne), p. V.
  9. Fiche prosopographique de Philippe Lebas (CTHS)
  10. Mémoires de la Société nationale des antiquaires de France, t. 8-18, C. Klincksieck, (lire en ligne), p. 488.
  11. Bulletin des lois de l'Empire Français, vol. 16, Imprimerie de la République, (lire en ligne), p. 672
  12. Marié, il laisse deux filles : Elisabeth-Clémence (qui aura elle-même deux filles : Marcelle et Marie-Aimée Coutant), et Eugénie-Jeanne (qui aura deux enfants : Yvonne et Georges Grandpierre).
  13. Léon Grujon a fait changer son nom le . Voir Louis Paris, État présent de la noblesse française, Bachelin-Deflorenne, (lire en ligne), p. 148.
  14. Il aura une fille, Marguerite.
  15. Dauzon (Philippe, Jean, Michel)
  16. Monique Lefrançois, op. cit., p. 108, note 6.


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