Jean de Brienne

Jean Ier de Brienne, né vers 1170-1175[1] et mort le à Constantinople[2], est un roi de Jérusalem de 1210 à 1225, puis un empereur latin de Constantinople de 1229 à 1237.

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Jean de Brienne

Couronnement de Marie de Montferrat et de Jean de Brienne, le 3 octobre 1210 à Tyr.
Histoire d'Outremer, XIIIe siècle
Titre
Roi de Jérusalem
avec Marie de Montferrat
Prédécesseur Marie de Montferrat
Successeur Frédéric II du Saint-Empire
et Isabelle II de Jérusalem
Empereur latin de Constantinople
avec Baudouin II de Constantinople
Prédécesseur Robert de Courtenay (empereur latin de Constantinople)
Successeur Baudouin II de Constantinople
Biographie
Dynastie Maison de Brienne
Date de naissance vers 1170/1175
Date de décès
Lieu de décès Constantinople
Père Érard II de Brienne
Mère Agnès de Montfaucon
Conjoint
Enfants

Biographie

Armoiries de Jean de Brienne : d'azur au lion d'or armé et lampassé de gueules

Jean de Brienne est le fils cadet d'Érard II, comte de Brienne et d'Agnès de Montfaucon ou de Montbéliard (vers 1150-après 1199). Son père le destinait à une carrière ecclésiastique, mais il avait la passion des armes et s'enfuit à Clairvaux, où l'un de ses oncles le prend en charge. Il devient chevalier et se couvre d'honneur en participant à de nombreux tournois. Il est rapidement considéré comme le chevalier le plus valeureux de son époque. Ayant probablement pris part le au tournoi d'Ecry-sur-Aisne, il rejoint la quatrième croisade avec son frère Gautier III de Brienne. Jean de Brienne participe à la prise de Constantinople en 1204[3].

Mais cette participation à la quatrième croisade est remise en cause, car Gautier III de Brienne, marié en 1200 avec Elvire, fille de Tancrède de Lecce, revendique le royaume de Sicile face aux Hohenstaufen et les combat de 1201 à sa mort en 1205, et l'on comprend mal pourquoi il aurait abandonné ce combat et laissé le champ libre aux Hohenstaufen. Après 1205, Jean de Brienne doit céder face à Frédéric II de Hohenstaufen et rentre en France avec son neveu Gautier IV de Brienne. Peut-être fit-il comme son cousin Gautier de Montbéliard, qui rejoint la quatrième croisade avant de la quitter pour soutenir Gautier III. Selon la Chanson de la Croisade, il participe à la croisade des Albigeois et est présent au siège de Béziers en 1209[4],[5].

Roi de Jérusalem

En 1208, Marie de Montferrat reine de Jérusalem est âgée de dix-sept ans et le régent Jean d'Ibelin et également son oncle songe à lui trouver un mari. Après en avoir délibéré à Saint-Jean-d'Acre, le conseil des barons décide de demander conseil à Philippe Auguste, roi de France. Gautier de Florence, évêque d'Acre, et Aymar de Lairon, seigneur de Césarée sont envoyés auprès du roi, lequel leur propose Jean de Brienne. L’Estoire d’Eraclée suggère que le roi voulait se séparer d’un chevalier dont Blanche de Castille, épouse du prince héritier, était éprise, et relate le désappointement des barons à la venue d’un seigneur ayant atteint la quarantaine, mais la suite montre que le choix du roi de France est malgré tout avisé. Il avait auparavant montré ses qualités de sagesse et de bravoure, et son impécuniosité est compensée par les dons de Philippe-Auguste et du pape Innocent III qui lui donnent chacun quarante mille livres tournois. Arrivé à Acre en septembre 1210, il épouse Marie de Montferrat le et est sacré roi avec son épouse le 3 octobre[6].

Peu avant, en septembre, la trêve négociée en 1204 entre Al-Adel et Amaury II arrive à échéance et les Templiers décident de reprendre les hostilités. Sans le soutien d’une croisade, les Latins d’Orient ne peuvent pas résister aux forces musulmanes, qui viennent incendier les abords de Saint-Jean-d'Acre. Mais Jean de Brienne réussit à refréner l’ardeur belliqueuse des Templiers et négocie une nouvelle trêve avec Al-Adel en pour une durée de six ans, pendant lesquels les templiers vont combattre pour le prince d’Antioche pour reprendre leur citadelle de Baghrâs que Saladin avait prise. De leur côté, les Hospitaliers vont prêter main-forte au roi Léon II d'Arménie contre le sultanat seldjoukide de Roum. Marie de Montferrat meurt peu après avoir donné naissance à une fille Isabelle, mais les barons acceptent Jean de Brienne comme bayle du royaume, c'est-à-dire régent[7].

En Occident, le pape Innocent III commence à prêcher une cinquième croisade, dès le IVe concile de Latran en 1215. Il meurt le , mais son successeur Honorius III continue ses projets. Une croisade part sous la conduite du roi André II de Hongrie et du duc Léopold VI d'Autriche, et débarque à Acre en . L’objectif choisi est une citadelle que le sultan Malik al-Adel vient de construire sur le Mont Tabor et qui contrôle la Galilée et la Samarie. La citadelle est assiégée en vain du au . Il semble que les Croisés aient alors manqué de persévérance. À la tête d’un petit détachement, un prince hongrois tente ensuite de prendre le château de Shaqîf Arnûn (Beaufort) dans le Marj Ayoun, bien que le comte de Sidon lui déconseille une telle entreprise, et son armée est taillée en pièces par les montagnards. Puis l’armée hongroise retourne dans son pays en . De son côté, Jean de Brienne fait fortifier Césarée[8].

Le delta oriental du Nil.

D’autres Croisés, venant de royaumes plus occidentaux, continuent à arriver en Terre sainte et Jean de Brienne, qui a compris l’inutilité d’attaquer et d’assiéger directement Jérusalem, décide de s’attaquer à des ports égyptiens, Alexandrie ou Damiette, pour ensuite négocier l’échange de ce port contre Jérusalem. La flotte franque débarque devant Damiette le , réussit à forcer le passage sur le Nil le . Malik al-Adil meurt le . Ses fils lui succèdent, Malik al-Kamil en Égypte et Malik al-Mu’azzam en Syrie[9].

Le , Al-Mu'azzam tente de faire diversion en prenant et détruisant Césarée, mais sans succès. À la fin du mois de septembre, le légat Pélage arrive à Damiette et demande la direction de la croisade. Le , Al-Kamil tente une attaque du camp croisé mais est repoussé. À la suite d'un complot, il abandonne son camp le , et son armée se disperse. Prévoyant la cession de Jérusalem aux croisés, Al-Mu'azzam entreprend en de démanteler les fortifications de la ville. Par deux fois, en mai et en septembre, Al-Kamil propose aux croisés la ville de Jérusalem contre la levée du siège de Damiette, mais Pélage repousse à chaque fois l'offre par fanatisme. Damiette est prise par les croisés par le . Jean de Brienne refuse de continuer la croisade et quitte Damiette avec son armée en . En l'armée décide de marcher sur le Caire ; mais elle est paralysée par la crue du Nil, et doit livrer Damiette en échange de sa liberté[10]

Après l’échec de cette cinquième croisade, Jean de Brienne conclut avec Al-Kamil un trêve de sept ans. Il décide de se rendre en Italie afin de discuter avec les principaux souverains du sort des états latins d’Orient. Débarqué à Brindisi en , il va à Rome pour rencontre le pape Honorius III, auquel il se plaint du comportement du légat Pélage qui a fait échouer la croisade par son intransigeance. Le pape lui donne raison, puis Honorius III influencé fortement par le Grand Maitre des Chevaliers Teutoniques Hermann Von Salza lui propose le mariage de la jeune fille de Jean De Brienne, Isabelle II, princesse et héritière du royaume de Jérusalem à l’empereur Frédéric II. Ce dernier est intéressé par le projet, qui lui permet d’ébaucher un empire méditerranéen, tandis que Jean de Brienne apprécie la possibilité de bénéficier des troupes germaniques. Philippe Auguste, à qui Jean de Brienne vient ensuite rendre visite, apprécie moins et reproche à Brienne de s’être fait manipuler. Jean de Brienne ne tardera pas à le regretter amèrement. Une escadre impériale vient chercher la fiancée en , et le mariage est célébré à Brindisi le . Le lendemain, Frédéric dépossède Jean de Brienne de la baile du royaume de Jérusalem. Scandalisé par cette manœuvre que les négociations du mariage ne laissaient pas présager, et aussi par les viols dont Frédéric II s’est rendu coupable, d'abord sur sa jeune épouse de 14 ans la fille de Jean de brienne, puis auprès d’une des cousines d’Isabelle. L' Empereur Germanique banni, ensuite, Jean de Brienne qui doit quitter définitivement le royaume de Jérusalem[11]. Jean de Brienne dira qu'il reproche à cet Empereur l'outrage qui a été fait sur sa fille, et qu'il l'aurait tué de ses mains s'il n'avait pas été empereur.

Soutenu par le pape Grégoire IX, il tente d’envahir le royaume de Sicile, mais est vaincu par son gendre et doit accepter la paix en [12]

Empereur latin de Constantinople

L'Empire Latin en 1230.

La mort de Robert de Courtenay en , place sur le trône un enfant de onze ans, Baudouin II de Courtenay. Les barons songent d'abord à confier la régence à Ivan Asen II, tzar des Bulgares, mais changent d'avis, craignant la puissance de ce dernier. Ils proposent ensuite la régence à Jean de Brienne, qui l'accepte, à la condition d'être associé au trône. Il est couronné empereur à son arrivée à Constantinople en 1231. L'empire latin se réduit alors à Constantinople et ses environs, et sous la triple menace de l'empire de Nicée, du despotat d'Épire et des Bulgares. En 1235, l'empereur de Nicée et le tzar bulgare assiègent Constantinople, alors qu'il n'y a que 160 chevaliers. Mais les Vénitiens, craignant la perte de leurs avantages commerciaux, lui prêtent main-forte et la ville résiste. La flotte vénitienne domine sur la mer, et les assiégeants finissent par se décourager. Jean de Brienne meurt l'année suivante, le [13].

Ascendance

Mariages et enfants

Il épousa en 1210 (vers l'âge de quarante ans) Marie de Montferrat (1191 - † 1212), reine de Jérusalem, fille de Conrad de Montferrat et d'Isabelle de Jérusalem, roi et reine de Jérusalem, qui donna naissance à :

Veuf, il se remaria en 1214 avec Rita d'Arménie (ap. 1195 - † 1220), fille du Léon II, roi d'Arménie et d'Isabelle, qui donna naissance à :

  • Jean (1216 - † 1220).

De nouveau veuf, il se remaria en 1224 avec Bérengère de Léon, fille du roi Alphonse IX de León et de Bérengère de Castille. De ce troisième mariage, il eut :

Notes et références

  1. Initialement, sa date de naissance était située vers 1148 (Prévost 1956) (Grousset 1936, p. 223), mais elle a fait plus récemment l’objet d’une réévaluation à 1170.
  2. Généalogie de Jean de Brienne sur le site Medieval Land
  3. Prévost 1956, p. 299
  4. Prévost 1956, p. 296-7.
  5. Early Blazon : siège de Béziers.
  6. Grousset 1936, p. 222-4.
  7. Grousset 1936, p. 220-1 et 224-6.
  8. Grousset 1936, p. 226-236.
  9. Grousset 1936, p. 236-240.
  10. Grousset 1936, p. 240-266.
  11. Grousset 1936, p. 293-9
  12. Prévost 1956, p. 299.
  13. Grousset 1949, p. 464

Voir aussi

Bibliographie

  • René Grousset, Histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem - III. 1188-1291 L'anarchie franque, Paris, Perrin, (réimpr. 2006), 902 p.
  • René Grousset, L'Empire du Levant : Histoire de la Question d'Orient, Paris, Payot, coll. « Bibliothèque historique », (réimpr. 1979), 648 p. (ISBN 978-2-228-12530-7)
  • M. Prévost, « Brienne (Maison de) » et « Brienne (Jean de) » dans Dictionnaire de biographie française, vol. 7, Paris, [détail des éditions] , col. 296-300
  • (en) Guy Perry, John of Brienne: King of Jerusalem, Emperor of Constantinople, c.1175-1237, Cambridge University Press, 2013.

Articles connexes

Liens externes

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