Guillaume Tardif

Guillaume Tardif[1], en latin Guillermus Tardivius Aniciensis, né au Puy-en-Velay vers 1436/40, mort peu après 1492, est un humaniste français, l'un des premiers représentants de ce mouvement à Paris.

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Éléments biographiques

Il était professeur de grammaire latine et de rhétorique à Paris vers 1467, peut-être au collège de Navarre[2],[3]. En 1473, Johannes Reuchlin, accompagnant à Paris le fils du margrave de Bade, Frédéric (futur évêque d'Utrecht), suivit les cours de grammaire de Jean Heynlin et les cours de rhétorique de Robert Gaguin et de Guillaume Tardif[4]. La réputation de ce dernier était grande dès cette époque[5].

Vers la fin de 1469, Tardif composa une « grammaire élémentaire » (Grammatice basis) que dans une épître datée du il dédia à son élève Charles Mariette, fils du lieutenant criminel du Châtelet et filleul de Charles de France, le frère cadet du roi Louis XI ; dans cette épître, il se prévaut d'avoir eu également pour élève le prince Charles lui-même. Son Rhetorice compendium (ouvrage qui date de 1474) contient un éloge de ce même prince, en deux distiques, composé par Louis de Rochechouart, évêque de Saintes[6]. Il fut ensuite choisi vers 1476 comme précepteur du Dauphin, futur roi Charles VIII, qui après son avènement, en 1483, lui commanda différents ouvrages et fit de lui son « liseur ».

Entre 1485 et 1490, il eut un conflit fameux, à Paris, avec l'Italien Girolamo Balbi, arrivé dans la capitale en 1484 : ce dernier s'en prit d'abord à l'œuvre du respecté Tardif, puis la querelle dégénéra en un échange de libelles et en plaintes devant les instances de l'Université. Balbi s'en prit également à son compatriote Fauste Andrelin, arrivé à Paris en 1488. Finalement on en vint à des imputations réciproques d'hérésie, et Balbi fut obligé de fuir Paris sous l'accusation de sodomie.

Dans les années 1460 et 1470, il fut avec Guillaume Fichet et Robert Gaguin l'un des chefs de file de la renaissance de l'enseignement des lettres à Paris. Sa Rhétorique (1re édition : 1474) fut la seconde publiée en France, après celle de Fichet (). Son œuvre comprend des traductions du latin en moyen français (notamment de Pétrarque, des Facéties de Lorenzo Valla[7], de celles de Poggio Bracciolini et de l'Ars bene moriendi de Matthieu de Cracovie), et une compilation sur l'art de la chasse, réalisée pour Charles VIII. Il avait aussi composé un livre d'heures pour le roi, avec des prières en moyen français, en partie originales, en partie traduites du latin ; certaines figurent dans les Grandes heures royales, volume réalisé par l'imprimeur Antoine Vérard. Mais ses ouvrages les plus importants sont ceux qu'il a consacrés à la grammaire et à l'art oratoire latins.

Il s'est également occupé d'une édition imprimée du De mirabilibus mundi de Solin, qui n'est pas datée, mais comporte en guise de préface deux petits poèmes de Louis de Rochechouart, évêque de Saintes jusqu'en 1492, et de Simon de Roquemadour, son secrétaire (« Arte nova pressos... libellos », « livres imprimés grâce à un art nouveau », écrit ce dernier).

Œuvres

  • Grammaticæ basis (1470) ;
  • Rhetoricæ artis et oratoriæ facultatis compendium (1474) ;
  • Eloquendi bene dicendique scientiæ compendium (1481/83), dédié au Dauphin ;
  • L'Art de faulconnerie et des chiens de chasse (1492), traduction et compilation du Livre du roi Dancus (XIIe siècle) et du De scientia venandi per aves de Moamin[8] ;
  • Les Apologues et Fables de Laurent Valle (publiées par Antoine Vérard le ) ;
  • Les facecies de Poge (vers 1492, dédiées à Charles VIII) ;
  • Les Ditz des sages hommes, traduction partielle des Rerum memorandarum libri de Pétrarque ;
  • L'art de bien mourir (traduction de Matthieu de Cracovie) ;
  • Antibalbica sive recriminatio in Balbum ;
  • In invidiosam falsamque detractationem ubicunque gentium responsio ac defensio.

Éditions

  • Charles Rocher (éd.), Les Apologues de Laurent Valla translatés du latin en françois et suivis des Ditz moraulx par Guillaume Tardif du Puy-en-Velay, Professeur au Collège de Navarre, Maistre-liseur du Roy Charles huictiesme de ce nom, Le Puy, M.-P. Marchessou, et Paris, Didier et Champion, 1876.
  • Ernest Jullien (notice et notes), Le livre de l'art de faulconnerie et des chiens de chasse, reproduction de l'édition du par Antoine Vérard, Paris, Librairie des bibliophiles (Cabinet de vénerie 4), 1882, 2 vol. ; réimpr. Slatkine, 1980, 1 vol.
  • Pierre Ruelle (éd.), Les Apologues de Guillaume Tardif et les Facetiæ morales de Laurent Valla, Genève-Paris, Éditions Slatkine, 1986.
  • Frédéric Duval et Sandrine Hériché-Pradeau (éds.), Les Facecies de Poge (traduction du Liber facetiarum de Poggio Bracciolini), Genève, Droz (Textes littéraires français 555), 2003.

Bibliographie

  • Evencio Beltrán, « L'humaniste Guillaume Tardif », Bibliothèque d'Humanisme et Renaissance 48, 1986, p. 7-39.
  • Alex L. Gordon, « Au service de l'argumentation. Le classement des figures chez Guillaume Tardif », Études littéraires, vol. 24, n°3, 1992, p. 37-47.
  • Mary Beth Winn, « Guillaume Tardif's Hours for Charles VIII and Vérard's Grandes heures royales », Bibliothèque de Humanisme et Renaissance 56, 1994, p. 347-383.
  • Evencio Beltrán, « Un manuscrit autographe de la Grammatice basis de Guillaume Tardif », Bibliothèque d'Humanisme et Renaissance 61, 1999, p. 495-508.

Notes et références

  1. Également Tardivi ou Tardieu chez d'anciens auteurs.
  2. « Floruit ab anno circiter millesimo quadringentesimo septuagesimo », « Il a fleuri à peu près à partir de 1470 », écrit César Égasse du Boulay, historien de l'Université de Paris.
  3. Francesco Florio, un dominicain natif de Florence, ayant séjourné à Paris de 1464 à 1467 avant de partir pour Tours, s'est lié alors d'amitié avec Tardif et lui dédie une nouvelle en latin dont il achève la rédaction à Tours, Historia de amore Camilli et Emiliæ Aretinorum, imitation de l'Historia de duobus amantibus (Euryale et Lucrèce) d'Æneas Sylvius Piccolomini. Il lui écrit dans l'épître liminaire : « Quia in Veneris Martisque palestra jamdiu te exercitatum et in rhetorica facultate peritissimum esse novi », « Parce que je te sais entraîné depuis longtemps aux combats de Vénus et de Mars et très expert en rhétorique ».
  4. Lettre à Jacques Lefèvre d'Étaples du 31 août 1513.
  5. « En ce temps-là (vers 1475) flourissoit et estoit en bruyt en ladicte ville du Puy maistre Guillaume Tardivi, natif de ladicte ville, qui moult scientificque homme estoit et de singuliere eloquence, lequel composa certain livret de grammaire, lequel j'ay vu en mes tendres jours en impression et se intituloit ainsi : Grammatica Guilhermi Tardivi Aniciensis, et en d'autres sciences fut approuvé et elegant et de noble engin et tres agu en disputacion » (Chroniques d'Étienne Médicis, bourgeois du Puy (v. 1475-v. 1565), publiées par Augustin Chassaing au nom de la Société Académique du Puy-en-Velay et de la Haute-Loire, Le Puy, Marchessou, 2 vol., 1869-74, t. I, p. 260).
  6. Henri Stein, Charles de France, frère de Louis XI, Paris, Auguste Picard, coll. « Mémoires et documents publiés par la Société de l'École des Chartes » (no X), , IX-87l p. (présentation en ligne, lire en ligne), p. 13, n. 4.
  7. C'est-à-dire la version latine donnée par Lorenzo Valla de trente-trois fables d'Ésope.
  8. « [...] lequel livret ay translaté en françois des livres en latin du roi Danchus, qui premier trouva et escrivit l'art de faulconnerie, et des livres en latin de Moamus, de Guillinus et de Guicennas, et colligé des autres bien sçavans et expers en ladicte art ».
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