Grands Magasins Dufayel

Les Grands Magasins Dufayel sont un ancien grand magasin ouvert en 1856 boulevard Barbès à Paris par Jacques François Crespin sous l'enseigne Palais de la Nouveauté. Tourné vers les classes populaires, il est repris au décès de son fondateur par un de ses employés, Georges Dufayel. Le grand magasin, qui occupe des bâtiments monumentaux, est réputé être le plus important du monde dans sa catégorie à la veille de la Première Guerre mondiale. Il ferme ses portes en 1930. Les Grands Magasins Dufayel jouent un rôle de pionnier dans le développement du crédit à la consommation en France.

Les Grands Magasins Dufayel, Paris, 26, rue de Clignancourt (carte postale de 1904).

Développement des Grands Magasins Dufayel

Le magasin est spécialisé dans la vente à crédit d'articles d'ameublement et d'équipement de la maison. À la mort de son fondateur, en 1888, le magasin est repris par Georges Dufayel.

Entre 1874 et 1913, des bâtiments conçus par les architectes Marcel Lebègue[1] et Gustave Rives sont progressivement construits sur le quadrilatère d'un peu plus d'un hectare délimité par le boulevard Barbès, la rue de Clignancourt, la rue Christiani et la rue de Sofia. En 1895, l'entrée principale du magasin, située au 26, rue de Clignancourt, est aménagée de manière monumentale avec Le Progrès entraînant le Commerce et l'Industrie, un haut-relief ornant le fronton par Jules Dalou et des sculptures d'Alexandre Falguière. L'entrée est coiffée d'un dôme qui supporte un phare éclairant Paris.

Pour attirer la clientèle, le grand magasin abrite un théâtre de grande taille et un jardin d'hiver. En 1912, les Grands Magasins Dufayel emploient 15 000 personnes et se targuent d'être l'établissement le plus important de ce type dans le monde. Le peintre Jean Dupas réalise pour eux des affiches publicitaires.

Pionnier du crédit à la consommation

La clientèle des Grands Magasins Dufayel, qui sont implantés dans un quartier ouvrier, dispose de revenus modestes. Le magasin est le premier à développer en France le crédit à la consommation moderne. Pour inciter ses clients à effectuer des achats, il propose un crédit après avoir collecté des informations sur ceux-ci auprès des concierges. Un collecteur passe chaque semaine au domicile des emprunteurs pour percevoir le remboursement du crédit[2].

La reconversion des locaux

Le 15 septembre 1918, durant la Première Guerre mondiale, une bombe explose sur les bâtiments des magasins Dufayel situés au 13, boulevard Barbès, lors d'un raid effectué par des avions allemands[3].

Façade de l'ancienne entrée des Grands Magasins Dufayel, rue de Clignancourt (fronton de Jules Dalou). Aspect en 2010, le dôme surmonté d'un phare coiffant l'ensemble a été détruit en 1957.

Georges Dufayel meurt en 1916. Le grand magasin ferme ses portes en 1930. Pendant la Seconde Guerre mondiale et l'occupation allemande de la capitale, les nazis se servent des locaux comme entrepôt. Puis la Croix-Rouge américaine y emmagasine des médicaments et des cigarettes. Après la guerre, la Banque nationale de Paris (BNP) installe ses services centraux (6 000 personnes) dans les anciens bâtiments du grand magasin, dont le dôme surmontant l'entrée monumentale est démoli en 1957[4].

Dans les années 1990, l'informatisation entraîne une suppression de cinq sixièmes de ses effectifs, qui s'amenuisent à 1 000 personnes. La banque, qui n'a plus besoin d'autant de locaux, lance un grand programme immobilier à l'esthétique façadiste : l'intérieur des bâtiments est entièrement remodelé et seules les façades sont conservées. En 2002, la BNP occupe toujours les bâtiments donnant sur la rue de Sofia tandis que 280 logements sont commercialisés et plusieurs grands distributeurs occupent les bâtiments donnant sur le boulevard Barbès.

Dans la culture populaire

Une chanson réaliste du début du XXe siècle, La Complainte des places de Paris[5]  paroles de Lucien Boyer et musique d'Adolphe Stanislas  décrit l'ascension puis la déchéance d'une prostituée. Alors qu'elle est temporairement modèle puis maîtresse d'un rapin (nom donné aux peintres désargentés de la butte Montmartre), la chanson contient ce quatrain qui situe bien le statut social des Grands Magasins Dufayel dans l'imaginaire de la Belle Époque :

« La peinture c'est beau mais c'est triste
Car ça manque un peu d'essentiel.
Faut pas compter sur un artiste
Pour se meubler chez Dufayel. »

Les Grands Magasins Dufayel sont par ailleurs évoqués dans l’épisode fantastique des morts de la fin du 33e chapitre du Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline. Le passage de morts volant la nuit dans le ciel a lieu dans un cadre réel : la place du Tertre, l’église Saint-Pierre de Montmartre, le cimetière du Calvaire et, plus bas, « à l’est par conséquent », les « Galeries Dufayel » « juste au-dessus » desquelles les morts « passaient »[6].

Notes et références

  1. Et non Alfred Le Bègue, mort en 1881.
  2. Anaïs Albert et al., « Le crédit à la consommation des classes populaires à la Belle Époque. Invention, innovation ou reconfiguration ? », Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 2012, no 4, , p. 1049-1082 (lire en ligne).
  3. Excelsior du 8 janvier 1919 : Carte et liste officielles des bombes d'avions et de zeppelins lancées sur Paris et la banlieue et numérotées suivant leur ordre et leur date de chute
  4. « Les Grands Magasins Dufayel disparus, Paris 18e », paris1900.lartnouveau.com (consulté le 4 février 2019).
  5. « Ballade des places de Paris », www.paris-a-nu.fr (consulté le 4 février 2019).
  6. Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit, Gallimard, coll. Folio, (ISBN 978-2-07-036028-4), pages 450-454.

Annexes

Liens externes

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