Glenn Curtiss
Glenn Hammond Curtiss ( à Hammondsport, État de New York – à Buffalo, États-Unis) est un pionnier de l’aviation.
Biographie
Fabricant de biplans
Le , Glenn Curtiss, coureur cycliste, fonde une fabrique de bicyclettes. En 1901, il se met à s'intéresser aux motocyclettes lorsque les moteurs à combustion interne deviennent disponibles.
Il se passionne pour les moteurs à explosion, de plus en plus accessibles, et dès 1902, passe à la construction de vélomoteurs. Il conçoit lui-même son propre carburateur, où l'essence remonte par capillarité vers le circuit d'allumage : cette idée lui a été inspirée par un mécanisme similaire, utilisé par une marque de conserves de soupe de tomate[1],[2],[3]. Il obtient son premier record mondial de vitesse à moto, avec une Curtiss V-2 (103 km/h, au Yonkers New York).
En 1906, après une rencontre avec les frères Wright, il devient constructeur d’avions qu’il fabrique en deux mois. Il fonde la première firme de construction aéronautique américaine le .
En 1907, il établit un deuxième officieux record de vitesse absolue air-terre-mer sur sa moto Curtiss V-8 motorcycle (en)[4] à Ormond Beach en Floride, battu le par Bob Burman sur l'une des six Blitzen Benz 200HP.
Il crée également la Herring-Curtiss Company au capital initial de 360 000 dollars avec le pionnier Augustus Herring le .
Le , à la « Grande Semaine d’aviation de la Champagne » de Reims-Bétheny, il remporte le premier trophée Gordon-Bennett en volant avec son Curtiss-Herring no 1, Reims Racer, à une vitesse de 75,774 kilomètres par heure, repartant avec la coupe en argent d'une valeur de 12 500 francs et avec 2 000 francs de prix[5].
Le , après avoir passé des examens sous le contrôle du gouvernement le de l'année précédent, il obtient le brevet no 2 décerné par l'Aéro-Club de France (le premier étant attribué à Louis Blériot). Le , c'est au tour de l'Aero Club of America de lui décerner ensuite son brevet, le no 1[6].
Le , Glenn Curtiss remporte le Prix du New York World en volant d'Albany jusqu'à l’île de Governor’s Island, soit 225 kilomètres couverts avec un biplan. Il empoche alors 50 000 francs pour cette performance[7].
Le , à San Diego, il décolle de la surface de l'océan et vient amerrir à côté du cuirassé Pennsylvania. Hissé à bord puis remis à l'eau, il rejoint la côte par la voie des airs. Curtiss fait dresser un acte officiel stipulant qu'il est le premier à avoir volé à bord d'un hydravion.
Cependant, le , le Français Henri Fabre a réalisé le même exploit sur l'étang de Berre.
Pionnier de l'aéronavale
Le , le pilote d'essai Eugene Ely fit décoller un Curtiss d'une plate-forme de fortune montée sur l'avant-pont du croiseur USS Birmingham. Le succès de cet envol et de l'atterissage sur la plage a marqué le début de la collaboration entre Curtiss et l'US Navy, collaboration qui allait se poursuivre pour des décennies. À la fin de 1910, Curtiss installa un camp de formation à San Diego pour le personnel de l'Armée et de la Marine : il y eut pour stagiaires le lieutenant Theodore Ellyson, premier pilote de l'US Navy, et trois autres officiers : Paul W. Beck, George E. M. Kelly et Lt. John C. Walker, Jr. ; Chikuhei Nakajima, fondateur de la Nakajima Aircraft Company, y fut élève-pilote en 1912. Le site fait aujourd'hui partie de la Naval Air Station North Island et l'US Navy y voit le berceau de l'aéronavale.
Au cours de ce même hiver, Curtiss parvint à mettre au point un ponton flottant pour décoller et amerrir. Le , il fit décoller de l'eau le premier hydravion des États-Unis[8]. Si la Marine américaine s'intéressa de près à ce prototype, elle se trouvait encore davantage concernée par l'atterrissage étonnant d'Eugene Ely (avec l'avion même qui avait décollé précédemment du Birmingham) sur une plate-forme de fortune montée sur le pont arrière de l'USS Pennsylvania. C'était le premier atterrissage sur vaisseau, réalisé grâce à un brin d'arrêt, et le précurseur des opérations aéroportées modernes. Le , Ellyson décolla à bord d'un Curtiss (malicieusement baptisé « tondeuse à gazon », grass cutter) et devint ainsi le premier aviateur de porte-avions.
Curtiss adapta des flotteurs sur le fuselage d'un Curtiss Model D pour lui permettre d'amerrir. Le , il en fit une première démonstration amphibie à North Island en décollant et en atterrissant à la fois sur terre et sur eau. De retour à Hammondsport, six mois plus tard (), Curtiss vendit les premiers appareils A-1 Triad à l'U.S. Navy. L’A-1, qui était au départ un hydravion, était équipé d'un train rétractable, ce qui en fait le premier avion amphibie. Son utlilité parut telle qu'il recçut des commandes de Russie, du Japon, d'Allemagne et de Grande-Bretagne. Curtiss remporta le Trophée Collier pour la conception de cet appareil[9],[10]
Vers cette époque, Curtiss rencontra un officier en retraite de la Royal Navy, John Cyril Porte, qui cherchait un associé pour construire un appareil et concourir pour le prix du Daily Mail de la première traversée de l'Atlantique. En 1912, Curtiss construisit un biplace, le Flying Fish, que sa taille fit classer comme hydravion à coque ; il comportait une innovation : un redan (appelé "marche") pratiqué dans la coque, dont Porte pensait qu'il écartait l'eau au décollage. Curtiss eut l'intuition correcte que cette configuration convenait mieux à un avion moyen-courrier, capable de d'opérer sur de longs parcours, et qu'un appareil plus lourd serait aussi plus stable sur une mer agitée. Avec le soutien financier de Rodman Wanamaker, Porte et Curtiss mirent au point l'America en 1914, un bimoteur capable de franchir l'Atlantique[11].
Pendant la Grande Guerre
Lorsqu'éclata la Première guerre mondiale, John Porte reprit du service auprès de la Royal Navy, qui racheta à Curtiss plusieurs modèles de l’America, baptisés appareils H-4,. Porte breveta et mit en fabrication de nouveaux hydravions longs-courriers à la base expérimentale de Felixstowe, et l'amélioration qu'il apporta aux coques de ces appareils bénéficia en retour à Curtiss[12]. Les derniers modèles britanniques furent vendus à l'armée américaine, ou assemblés par Curtiss sous le nom de F5L. L'usine Curtiss construisit un total de 68 avions Large Americas, qui aboutirent au modèle H-12, le seul avion de conception et de fabrication américaine à avoir véritablement combattu pendant la Grande Guerre[13],[14].
Vers la fin de 1915, l'opinion publique américaine appréhendait l'entrée en guerre avec l'Allemagne[15]. En prévision de cette décision, l'U.S. Signal Corps passa commande d'un avion biplace pour l'entraînement de nouveaux pilotes. Curtiss mit au point deux appareils simples à piloter, le JN-4 Jenny pour l'Armée de Terre, et l'hydravion Curtiss N-9 pour la Marine. Ces deux appareils furent d'énormes succès commerciaux : ils furent vendus par milliers aux militaires américains, canadiens et britanniques ; la demande de l'aviation civile doubla les bénéfices, si bien qu' finit par employer 18 000 ouvriers à Buffalo et 3 000 ouvriers à Hammondsport.
En 1917, la Marine américaine chargea Curtiss de concevoir un hydravion quadrimoteur long-courrier long-range capable d'embarquer cinq hommes d'équipage : ce fut le Curtiss NC. Trois des quatre NC furent affectés à la première traversée de l'Atlantique en 1919, et le NC-4 acheva effectivement la traversée moyennant une halte aux Açores ; les deux autres appareils, le NC-1 et le NC-3, furent toutefois immobilisés par des avaries dans ce même archipel. Le NC-4 est depuis exposé au National Museum of Naval Aviation de Pensacola.
L'Après-guerre
L'armistice mit un terme aux juteux contrats d'armement, si bien qu'au mois de , il fallut réorganiser la production de Curtiss Aeroplane and Motor Co. Glenn Curtiss réalisa ses actifs et retira de cette opération 32 millions de dollars[16]. Toujours directeur en titre de la société, il n'exerçait plus cependant que le rôle de conseiller technique, et se retira en Floride. Il passa les rênes de l'entreprise au financier Clement M. Keys (1876–1952) qui en fit le noyau de Curtiss-Wright Corporation[17].
Curtiss se lança, lui, dans de vastes programmes immobiliers : membre de diverses commissions régionales, il afferma terrains et forages d'eau potable, aménageant les lotissements de Hialeah (en association avec James Bright), d'Opa-locka et de Miami Springs, où il établit une pension de famille : Glenn Curtiss Mansion[18], de style Pueblo Revival. Cet édifice, délabré et vandalisé pendant des décennies, a été réaménagé en musée de l'inventeur[19].
Pour ses parties de chasse dans les Everglades, Curtiss inventa un prototype de camping-car, baptisé du nom de son beau-frère et associé : l'Adams Motor « Bungalo ». Il en fit ensuite une version grand-public, pouvant être tractée par une voiture, l’Aerocar[20]. Peu avant sa mort, il dessina les plan d'un avion à train d'aterrissage tricycle, qu'il pensait commercialiser au prix d'une caravane[21].
Références
- August Post, « The Evolution of a Flying-Man », The Century: A Popular Quarterly, vol. 81, , p. 13–14.
- Glenn H. Curtiss et August Post, The Curtiss Aviation Book., New York, Frederick A. Stokes Company, (ISBN 0-559-64105-2).
- « Glenn Curtiss. », Popular Science, , p. 130 (ISSN 0161-7370).
- Top 10 Weirdest Custom Motorcycles - Dimensionally challenged motorcycle mavericks, par Paul Garson sur Motorcycle (15 septembre 2010).
- Le 28 août 1909 dans le ciel : Curtiss s’empare de la coupe Gordon-Bennett Air-journal.fr 28 août 2011
- Ottello Dominique, « Les cent premiers brevets », sur aviatechno.net (consulté le )
- Le 29 mai 1910 dans le ciel : Glenn Curtiss relève le défi du New York World
- C.R. Roseberry, Glenn Curtiss: Pioneer of Flight, Garden City (New York), Doubleday & Company, (réimpr. Syracuse University Pr., 1991) (ISBN 0-8156-0264-2), p. 314.
- "The Curtiss Company." US Centennial of Flight Commemoration, 2003. COnsulté le 28 janvier 2011.
- « Taft Believes in Aeroplanes; Other "Bird" News », The Baltimore Sun, Baltimore (Maryland), , p. 15 (lire en ligne)
- « Hammondsport, N.Y. Launching of Rodman Wanamaker's trans-Atlantic flyer "America." », sur British Pathé, (consulté le )
- « Aircraft of the Month Archive : Felixstowe F2 », sur Tangmere Military Aviation Museum,
- Thierry Le Roy, La Guerre sous-marine en Bretagne - 1914-1918 : Victoire de l'aéronavale, à compte d'auteur, (ISBN 2950507409)
- (en) Kenneth Munson, Bombers 1914-1919, Bounty Books, , 188 p. (ISBN 0753721716)
- (en) Charles Chatfield, For peace and justice : pacifism in America, 1914–1941, Knoxville, University of Tennessee Press, (réimpr. 1973), 448 p. (ISBN 0870491261), « 1 ».
- Roseberry, Glenn Curtiss: Pioneer of Flight op. cit. p. 429.
- , Clara Studer, Sky Storming Yankee: The Life of Glenn Curtiss, New York, Stackpole Sons, , p. 352.
- (en) « The Life and Times of Glenn Hammond Curtiss. », sur aviation-history.com (consulté le ).
- (en) « The Glenn Curtiss House. », sur Aviation: From Sand Dunes to Sonic Booms: A National Register of Historic Places Travel Itinerary. (consulté le ).
- (en) C.V. Glines, « Aviation Pioneer Glenn Curtiss – Enduring Heritage. », Aviation History, (lire en ligne, consulté le )
- « V-Shaped Plane Has Low Landing Speed. », Popular Science, .