Palais de Blenheim

Le palais de Blenheim (en anglais : Blenheim Palace) est une monumentale résidence de campagne anglaise située à Woodstock dans l'Oxfordshire. Il s'agit de la seule résidence de campagne non royale d'Angleterre à bénéficier du titre de « palace » (palais). Le palais de Blenheim, un des plus grands du pays, fut construit entre 1705 et 1731.

Cet article concerne le palais ducal. Pour la résidence royale disparue, voir Palais de Woodstock.

Pour les articles homonymes, voir Blenheim.

Palais de Blenheim *
Coordonnées 51° 50′ 31″ nord, 1° 21′ 41″ ouest
Pays Royaume-Uni
Subdivision Woodstock, Oxfordshire
Type Culturel
Critères (ii) (iv)
Numéro
d’identification
425
Zone géographique Europe et Amérique du Nord **
Année d’inscription 1987 (11e session)
Géolocalisation sur la carte : Angleterre
* Descriptif officiel UNESCO
** Classification UNESCO

Il est construit sur le domaine où était le palais de Woodstock, résidence royale détruite au temps de la guerre civile. Il doit son nom au village bavarois de Blenheim, qui fut en 1704 le théâtre de la bataille de Höchstädt (ou bataille de Blenheim), et qui vit la victoire de la Grande Alliance menée par John Churchill, premier duc de Marlborough, contre le royaume de France, durant la guerre de Succession d'Espagne.

L'édifice était en effet à l'origine un cadeau destiné au duc, de la part du royaume d'Angleterre, en récompense de sa victoire militaire[1]. Le palais devint toutefois vite la source d'intrigues politiques, lesquelles entraînèrent l'exil de Marlborough, la disgrâce de la duchesse et un dommage irréparable pour la réputation de l'architecte, Sir John Vanbrugh. Conçu dans un style baroque typiquement anglais et pour cette raison très rare, le palais fait aujourd'hui l'objet d'appréciations aussi divergentes que dans les années 1720. La combinaison qu'il opère entre maison de famille, mausolée et monument national est en effet unique à plus d'un titre. Winston Churchill, petit-fils du septième duc de Marlborough, y naquit en 1874.

Le palais est classé depuis 1987 au patrimoine mondial de l'UNESCO.

John Churchill (1er duc de Marlborough)

John Churchill, 1er duc de Marlborough par Godfrey Kneller.

John Churchill naquit dans le Devon. Sa famille était issue de la petite noblesse anglaise. En 1678, il épousa Sarah Jennings et en avril de la même année, il fut envoyé par Charles II à La Haye pour des négociations sur le déploiement de l'armée anglaise en Flandres : la mission échoua. En mai, il fut nommé temporairement général de brigade, mais la possibilité de mener campagne échoua avec le traité de Nimègue. Quand Churchill rentra en Angleterre, le complot papiste venait de provoquer l'exil pour trois ans du duc d'York. Le duc obligea les Churchill à le suivre, d'abord à la Haye, puis à Bruxelles. Pour service rendus durant la crise, John fut fait en 1682 lord Churchill d'Eyemouth par la Pairie d'Écosse, et l'année suivante nommé colonel du 1er régiment de Dragons royal.

Sarah Churchill, duchesse de Marlborough. Portrait attribué à Godfrey Kneller.

À la mort de Charles II en 1685, le duc d'York lui succéda sous le nom de Jacques II. John Churchill fut alors nommé gouverneur de la Compagnie de la Baie d'Hudson, en avril gentleman of the Bedchamber et en mai baron Churchill de Sandridge du comté de Hertfordshire. À la suite de la Rébellion de Monmouth Churchill fut promu major-général et devint colonel du troisième régiment des Life Guards. Quand Guillaume d'Orange envahit l'Angleterre en , Churchill et ses 400 hommes se joignirent à lui à Axminster. Quand le roi s'aperçut de la trahison de Churchill, longtemps son fidèle allié, il s'enfuit en France. En récompense, Guillaume nomma Churchill Comte de Marlborough, le fit entrer au Conseil Privé et le nomma Gentleman of the King's Bedchamber.

Durant la guerre de Succession d'Espagne, Churchill se forgea une solide réputation militaire en remportant une série de victoires (Blenheim en 1704, Ramillies en 1706, Audenarde en 1708 et Malplaquet en 1709). Il devint un héros national et récolta de nombreux honneurs et récompenses, comme le duché de Marlborough. À la même période, il était, avec sa femme, très proche de la reine Anne et il se murmurait que c'est lui qui dirigeait vraiment le pays[réf. nécessaire]. Il n'est pas surprenant, dans ces conditions, que la reine décidât, honneur suprême, de faire don aux Churchill du manoir royal de Hensington (situé sur le site de Woodstock) pour construire un nouveau palais, avec un apport financier voté par le parlement.

La femme de Marlborough, Sarah Jennings, était, aux dires de tous, une personne acariâtre, mais dotée d'un grand charme. Elle devint très tôt une amie proche de la future reine Anne et, plus tard, maîtresse de la garde-robe, exerçant une grande influence sur elle, aussi bien sur sa vie personnelle que publique. L'amitié entre la reine et Sarah cessa lors d'une querelle en 1711, et de ce fait, l'apport financier à la construction de Blenheim s'arrêta. Les Marlborough furent contraints à l'exil et ne revinrent qu'à la mort de la reine en .

Site

Gravure du Palais de Blenheim.

Le site donné aux Marlborough pour la construction du palais est le manoir de Woodstock, appelé aussi Palais de Woodstock. Il faisait partie du domaine royal. Le roi Henri Ier le fit entourer pour qu'il devînt un parc à cerfs. Il semble que le pavillon de chasse ait été reconstruit plusieurs fois. Henri II y a hébergé sa maîtresse, Rosemonde Clifford. Plus tard la future reine Élisabeth y fut brièvement emprisonnée entre 1554 et 1555 par sa sœur Marie. Puis le manoir tomba dans l'oubli avant d'être détruit par les troupes d'Oliver Cromwell durant la Première Révolution anglaise. Quand le parc fut remanié des années plus tard par Sarah Jennings pour construire son palais, elle souhaitait que les ruines de l'ancien palais fussent démolies, alors que l'architecte John Vanbrugh voulait les intégrer au paysage. La duchesse, comme souvent dans ses conflits avec l'architecte, gagna et les ruines du manoir furent démolies.

Architecte

Sir John Vanbrugh par Godfrey Kneller

L'architecte choisi pour le projet fut objet de controverse. La préférence de la duchesse allait à Christopher Wren, architecte, entre autres, de la Cathédrale Saint-Paul de Londres. Cependant, après avoir rencontré par hasard John Vanbrugh au théâtre, le duc le choisit séance tenante comme architecte. Dramaturge populaire et architecte autodidacte, Vanbrugh collaborait avec Nicholas Hawksmoor. Le duo avait récemment livré les premiers plans du Château Howard. Cette résidence située dans le Yorkshire fut l'une des premières de style baroque construite en Angleterre. Marlborough, impressionné, souhaitait donner le même style à son palais.

Blenheim n'apporta pas la renommée à son architecte. Les polémiques autour de son financement, son extravagance, les accusations des Whigs, alors au pouvoir, ne furent pas contrées par la duchesse. Vexée de n'avoir pu obtenir Wren comme architecte, elle redoubla de critiques envers Vanbrugh à toutes les étapes de la construction. Les problèmes découlaient des demandes faites à l’architecte. La nation (qui payait la facture), souhaitait faire du palais un monument, mais la duchesse voulait non seulement un hommage à son mari, mais aussi une maison confortable, deux exigences difficilement compatibles. Finalement, dans les premiers temps de la construction du palais, le duc était fréquemment absent pour ses campagnes militaires et laissait la duchesse en pourparlers avec Vanbrugh. Plus consciente que son mari de la précarité de leur aide financière, elle tenta de refréner les idées grandioses de l'architecte d'une manière arrogante, plutôt que de lui expliquer clairement la situation.

Façade ouest de Blenheim.

Après une ultime altercation, Vanbrugh fut renvoyé, et c'est Nicholas Hawksmoor qui acheva les travaux En 1719, lors de l’absence de la duchesse, il revint sur les lieux en secret[réf. nécessaire]. Cependant, quand avec sa femme et le comte de Carlisle il voulut voir le palais achevé en 1725, on leur refusa l'entrée, même dans le parc.

Le style sévère de Blenheim n'a jamais vraiment plu, et fut vite remplacé par le Palladianisme. La réputation de Vanbrugh fut définitivement endommagée, et il ne reçut que peu de reconnaissance. Pour sa dernière construction, Seaton Delaval Hall, il employa un style baroque plus raffiné qu'à Blenheim. Il mourut peu de temps avant son achèvement.

Quand au tournant du XXe siècle, Consuelo Vanderbilt, épouse Spencer-Churchill, y réside, le paysagiste Achille Duchêne redessine le parc.

Financement

Gravure du XVIIIe montrant la Grande cour.
Le Grand Pont de Blenheim.
Plan de Blenheim Palace et de son parc, Thomas Pride, 1789.

La responsabilité précise du financement du palais est un sujet discuté et non résolu à ce jour. Donner le palais comme récompense fut discuté quelques mois après la bataille de Blenheim, à une époque où Marlborough remportait victoire sur victoire pour la gloire du pays. Que la nation reconnaissante et représentée par sa reine eût l'intention de donner une maison à la hauteur de son héros est indiscutable, mais la nature et la taille de cette récompense sont sujettes à caution. Un document datant de 1705, signé par le trésorier Sidney Godolphin, désigne Vanbrugh comme architecte et décrit ses attributions. Malheureusement pour les Churchill, ce document ne mentionne nulle part la Reine ou la Couronne. Cette erreur a servi de clause pour suspendre le financement quand le coût financier et la polémique commencèrent à augmenter.

Au début des travaux, en 1705, le duc de Marlborough apporta 60 000 £ au coût initial de la construction, complété par le parlement pour lui permettre de construire un palais monumental. Le parlement vota des fonds pour la construction, mais la somme exacte n'est mentionnée nulle part. Depuis le début des travaux la distribution des fonds fut sporadique. La reine Anne en paya certains, mais avec une réticence croissante et de fréquents écarts, à cause de ses fréquentes altercations avec la Duchesse. Le financement cessa en 1712, après une nouvelle dispute entre Anne et Sarah, entraînant l'arrêt des travaux. 220 000 £ avaient déjà été dépensées, et 45 000 encore dues aux ouvriers. Les Marlborough furent contraints à l'exil et ne revinrent qu'après la mort de la reine en 1714.

À leur retour, ils obtinrent les faveurs du nouveau roi, George Ier, qui décida de financer lui-même le reste des travaux. La construction reprit en 1716, mais les travaux furent restreints par les ressources financières limitées du duc. En 1717, il fut victime d'une attaque sévère et c'est sa femme, bien plus économe que lui, qui contrôla les finances. Elle s'en prit à l'architecte sur le coût croissant du palais, sa prodigalité, son style qu'elle n'aima jamais. Après une ultime altercation, l'architecte quitta le site en colère, trouvant les nouveaux ouvriers employés par Sarah inférieurs à ceux qu'il employait. Ses maîtres artisans habituels, comme Grinling Gibbons, avaient refusé de travailler au tarif que leur proposaient les Marlboroughs. Les artisans employés par la duchesse, sous la direction de James Moore, et de l'assistant de Vanbrugh, Hawksmoor, finirent pourtant le travail en imitant parfaitement les grands maîtres, prouvant ainsi que l'intransigeance de la duchesse valait bien celle de Vanbrugh.

Après la mort du duc en 1722, l'achèvement des travaux devint la principale ambition de sa femme. Hawksmoor dessina en 1723 l'arc de triomphe situé à l'entrée du parc et inspiré de l'Arc de Titus. Il acheva aussi la décoration de la bibliothèque, des plafonds, et diverses pièces annexes et dépendances. En baissant les salaires des ouvriers et en employant des matériaux de moins bonne qualité à certains endroits peu visibles du public, la duchesse parvint à achever la maison, hommage rendu à son mari. On ne connaît pas la date finale d'achèvement des travaux, mais la duchesse marchandait encore en 1735 avec Rysbrack le coût d'une statue de la reine Anne dans la bibliothèque. En 1732, elle écrivit : « La chapelle est finie et l'autre moitié du tombeau est prête à être commencée. »

Architecture

Plan du palais, XVIIIe siècle.

Vanbrugh conçut Blenheim comme pouvant être admiré à distance. C'était une nécessité étant donnée la grandeur du site (28 000 m2). De près, les façades peuvent paraître intimidantes avec leurs très nombreuses ornementations.

Le plan de Blenheim est basique, un grand bloc rectangulaire (voir plan), avec, derrière la façade sud, les principaux appartements. Sur le côté est se trouvent les appartements du couple Churchill, et à l'ouest une grande galerie, conçue à l'origine comme une galerie de peintures. La partie centrale est reliée à deux autres de fonction, s’articulant autour de cours carrées (non visibles sur le plan). La cuisine, les blanchisseries, et d'autres pièces domestiques s'ouvrent sur la cour est, tandis que la cour ouest donne sur la chapelle, les écuries et l'école d'équitation. Ces trois ensembles délimitent la « Grande cour », destinée à impressionner le visiteur arrivant au palais. Les nombreux pilastres et piliers, les toits ressemblant à ceux d'une petite ville, les statues inspirées de celles de la Basilique Saint-Pierre, regardent le visiteur d'en haut, pour lui faire prendre conscience de son inconsistance. D'autres statues représentant des trophées martiaux, tel le lion anglais dévorant le coq français, décorent les toits. La plupart ont été conçues par des maîtres tel que Grinling Gibbons.

Grille d'entrée du palais, depuis les jardins.

Au XVIIIe siècle, la magnificence primant sur l'aspect pratique et le confort, Blenheim n'échappe pas à cette règle. Cette prédominance est d'autant plus importante que les dossiers de l'architecte montre qu'il avait pour consigne de faire de la maison un monument national reflétant la puissance de l'Angleterre. Pour créer cet effet imposant, l'architecte choisit une forme sévère du baroque, avec d'imposantes masses de pierres, et se sert des ombres pour la décoration.

Le portique massif et énorme, situé à l'entrée nord, ressemble plus à celui d'un panthéon que d'une maison familiale. Vanbrugh aime employer ce qu'il appelle castel air, des tours basses aux quatre coins du bloc central, couronnées d'énormes belvédères en pierre et d'amortissement pour cacher les cheminées. Ces tours accentuent l'aspect héroïque et monumental du bâtiment.

Œuvres conservées à Blenheim Palace

Blenheim au cinéma et télévision

Films et séries

Les films et séries télévisées suivants ont des scènes tournées au château ou dans son parc :

Documentaires

Notes et références

  1. Hollande reçu par Cameron sur fond de « French bashing », Le Figaro, 30 janvier 2014.
  2. Alexis Merle du Bourg, Antoon Van Dyck : Portraits, Fonds Mercator, (ISBN 978-90-6153-839-4), p. 119
  3. « Numéro inédit de Secrets d'Histoire consacré à Sir Winston Churchill ce mardi soir », sur Blogtvnews, (consulté le )

Annexes

Articles connexes

Liens externes

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