Antisthène

Antisthène, en grec ancien Ἀντισθένης / Antisthénês (Athènes vers 444[1]- 365 av. J.-C.), est un philosophe grec, considéré comme le fondateur de l'école cynique vers 390 av. J.-C.

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Biographie

Bronze d'Antisthène, Musée archéologique provincial Ribezzo de Brindisi.

Il naît d'une mère d'origine thrace[1], ce qui ne lui permet pas d'avoir la pleine citoyenneté athénienne, et d'un père citoyen athénien du même nom que lui. Il fut d'abord l'élève de Gorgias et enseigna comme sophiste avant de suivre les leçons de Socrate, dont il retient surtout la leçon de frugalité et l'endurance. Disciple zélé, il faisait partie des imitateurs de Socrate, à l'instar d'Apollodore de Phalère. Sa famille habitait le Pirée, et il parcourait 8 kilomètres [40 stades] pour suivre son enseignement. Après la mort de ce dernier, il s'installe dans un gymnase, le Cynosarge (Κυνόσαργες / Kynósarges), où sont acceptés les demi-citoyens. C'est l'une des raisons pour lesquelles ses élèves portent ensuite le nom de « Cyniques » (Κυνικοί / Kynikoí).

Diogène de Sinope, grâce à sa persévérance, fut le disciple d’Antisthène, qui avait dit ne vouloir aucun disciple. Un jour où Antisthène le menaçait d’un bâton pour qu'il s'en allât, Diogène tendit sa tête et lui dit : « Frappe, tu n’auras jamais un bâton assez dur pour me chasser, tant que tu parleras ! »

Philosophie

Antisthène enseignait que la seule philosophie à cultiver est éthique, et que la vertu s’enseigne et suffit au bonheur du sage. Elle se manifeste dans les actions, elle se passe des discours et des théories. En conséquence, il faut mener une vie aussi simple et morale que possible, et se détacher des conventions sociales. Ce n’est pas un hasard si Antisthène se référait à Héraclès, le héros admis parmi les dieux après avoir surmonté les travaux qui avaient mis sa vertu à l’épreuve. Car l’effort est un bien et conduit à la vertu. Selon son dialogue Héraclès, Chiron fut le seul Centaure épargné par Héraclès ; c’est accidentellement qu’une flèche du carquois atteignit Chiron, qui en mourut.
Polémiquant contre les Idées de Platon, il déclarait « qu’il apercevait bien le cheval mais non la caballéité », rejetant ainsi l’ontologie platonicienne. Il niait la possibilité de définir ce qu’est une chose, « to ti estin », (« Ce que c'est ») à partir de ce qui serait sa forme générale idéale ou son eidos (Idée), parce que la définition n’est autre qu’un logos étendu ; mais il admettait la possibilité d’enseigner comment est une chose, « poion ti estin »[2]. Il niait aussi la possibilité de contredire, « ouk estin antilegein »[3], au motif que rien ne peut être désigné autrement que par son logos propre, et il n’y a qu’un seul logos par chose.
Antisthène a énoncé le fondement logico-moral du stoïcisme, à savoir que le bonheur se trouve dans le bon usage des représentations, autrement dit dans ce qui dépend de nous. Il professait que seul le plaisir lié à l’effort et résultant d'une ascèse personnelle peut contribuer au bonheur : « le plaisir est un bien, et il ne faut pas s'en culpabiliser »[4] ; « il faut rechercher le plaisir résultant à l'effort et non celui qui le précède »[5].

Influences

Il imite l'endurance de Socrate, emprunte son mépris des hommes à Héraclite, ce qui se traduit par la reprise quasi à l'identique de formules héraclitéennes. Cicéron, dans De la nature des dieux, écrit qu’Antisthène fut l'un des premiers philosophes grecs à défendre le monothéisme. Antisthène est le seul des philosophes socratiques qu’a loués Théopompe[6]. Phanias raconte, dans le traité Sur les Socratiques, que quelqu’un ayant demandé à Antisthène ce qu’il fallait faire pour devenir homme de bien, il répondit : « Apprendre de ceux qui savent à corriger ce qu’il y a de mal en toi ».

Œuvres

Ses œuvres philosophiques, s'il faut en croire Diogène Laërce[7], remplissaient dix volumes, dont ne sont conservés que de maigres fragments. Il semble avoir privilégié la forme du discours, en témoignent deux déclamations mineures, l’Ajax et l’Ulysse à propos de la lutte pour les armes d'Achille, sujet académique tiré de l’Odyssée. Ses œuvres les plus célèbres, La Vérité, Protreptique, Héraclès, étaient écrites sous la forme du dialogue[8]. Son style est considéré comme un modèle de pureté, et on le rapproche de ceux de Xénophon et de Platon, ce qui semble confirmer qu’Antisthène figurait au nombre des auteurs étudiés dans les classes. Selon Athénée, Antisthène a publié un dialogue intitulé Sathon sur la discussion dialectique : sous ce titre en forme de sobriquet (Σάθων)[9], il estropiait le nom de Platon[8] ; dans les deux ouvrages socratiques intitulés Le Banquet, Antisthène n'est présent que dans la version de Xénophon[10], mais celui écrit par Platon se réfère à un banquet différent.

Pasiphon d’Érétrie, autre disciple de Socrate, était l’auteur de plusieurs dialogues qu’il avait insérés parmi ceux d’Antisthène, et d’un dialogue intitulé Alcibiade[11], qu’il avait publié sous le nom d’Antisthène. Xénophon dit qu'il était fort doux dans la conversation, et fort modéré sur tout le reste, et on prétend qu’Antisthène passe aussi pour avoir fait bannir Anytos, et condamner Mélétos à mort[12].

Références

  1. Gouirand 2005, p. 108.
  2. Pellegrin 2014, p. 1864.
  3. Pellegrin 2014, p. 308.
  4. Athénée, Deipnosophistes [détail des éditions] (lire en ligne), Livre XII
  5. Thierry Gontier 1998[réf. incomplète]
  6. Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres, Livre VI, art. Antisthène [14].
  7. Diogène Laërce, Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres [détail des éditions] (lire en ligne), VI, 1-19 et 103-105.
  8. Fernanda Decleva-Caizzi, « Antisthène », in Jacques Brunschwig et Geoffrey Lloyd (en), Le Savoir grec, Flammarion, 1996, p. 584.
  9. Voir le magazine belge "Soirmag".
  10. Xénophon, Banquet, IV.
  11. Athénée, Deipnosophistes [détail des éditions] (lire en ligne), XI, 506 c.
  12. Diogène Laërce, Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres [détail des éditions] (lire en ligne), VI, 13.

Annexes

Bibliographie

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