Anis Naccache

Anis Naccache, né en juin 1951 à Beyrouth[1] et mort le à Damas, est un militant et terroriste libanais condamné à la réclusion criminelle à perpétuité en 1982 pour la tentative d’assassinat contre Chapour Bakhtiar, ancien Premier ministre d'Iran, au cours de laquelle deux citoyens français ont été tués. Il reçoit une grâce exceptionnelle après la prise d'otage de citoyens français par l'Iran.

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Biographie

Parcours et contexte

Anis Naccache est un Libanais chrétien maronite converti au chiisme, après le succès de la "révolution islamique" en Iran qui a suivi le retour de l'Ayatollah Khomeini à Téhéran le 1er fevrier 1979. Il est architecte-décorateur de profession.

Après la guerre de 1967, de nombreux Palestiniens sont accueillis par le roi Hussein de Jordanie qui promet de les aider et d'améliorer leurs conditions de vie. Néanmoins, après une série d'attaques de grande ampleur puis deux tentatives d’assassinat contre le roi Hussein, la Jordanie décide de les expulser. Des affrontements sanglants éclatent alors entre l'armée jordanienne et les Palestiniens lors de Septembre noir. La plupart des pays arabes qui ont observé ce qu'il s'est passé en Jordanie refusent de les accueillir, les jugeant dangereux, et ils partent vers le Liban.

Prise d'otage en Autriche

Anis Naccache décide de s’engager auprès de la cause palestinienne au cours des années 1970.

Il est envoyé par l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) pour superviser la logistique d'une opération dirigée par Wadie Haddad qui souhaite prendre en otages les diplomates de grands pays arabes. C'est la prise d’otage de l'OPEP à Vienne en Autriche en 1975 dirigée par Carlos. En 1975, le Liban plonge dans une guerre civile après des affrontements entre maronites chrétiens et les Palestiniens qui exigeaient un changement radical de système politique.

Attaque en France et condamnation

En 1979 a lieu la révolution islamique iranienne, l'ayatollah Khomeini, autrefois réfugié politique en France, arrive au pouvoir. Anis Naccache se rapproche de lui, le considérant comme le meilleur porte-parole de la lutte palestinienne contre Israël. Il y reçoit l'ordre personnel de l'ayatollah Khomeini d'aller tuer Chapour Bakhtiar, ancien Premier ministre du Shah, lui aussi réfugié politique en France.

Le , à Neuilly-sur-Seine, trois hommes lourdement armés dirigés par Anis Naccache, se présentent à l'immeuble où loge Chapour Bakhtiar, boulevard Bineau. Se présentant comme des journalistes avec du matériel, le commando parvient à entrer dans l'immeuble, qui est surveillé par plusieurs policiers français.

Pris d'un doute, le policier Bernard Vigna, 22 ans, rattrape les individus. Alors qu'il les rejoint, Bernard Vigna est abattu de plusieurs balles tirées avec des pistolets munis de silencieux. Arrivés au quatrième étage, le commando tue un autre policier, Jean-Michel Jamme, 23 ans, puis ils blessent grièvement un troisième policier, Georges Marty, 23 ans. Se trompant de porte, le commando rentre dans le mauvais appartement et exécute une voisine, Yvonne Stein, 45 ans.

Ils tirent ensuite sur la sœur d'Yvonne, laissée grièvement blessée dans une mare de sang. Trouvant finalement l'appartement recherché, leurs bruits finissent par alerter un autre policier, lequel découvre alors les corps de ses collègues. Une fusillade s'ensuit et l'un des hommes est blessé par le policier. Après plusieurs tirs de sommations, les deux autres finissent par se rendre. Cinq personnes, dont deux hommes qui surveillaient l'extérieur de l'immeuble, sont finalement interpellés par la police nationale. L'affaire fait la une de tous les médias en France.

Quatre des cinq terroristes, dont Anis Naccache, sont condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité le .

Tensions entre la France et l'Iran

Les autorités de la République islamique d'Iran sont en colère à la suite de l'arrestation d'Anis Naccache et du soutien français au dictateur irakien Saddam Hussein dans le contexte de la guerre Iran-Irak.

En décembre 1985 a lieu une double attaque au Printemps et aux Galeries Lafayette.

Début février 1986 une autre attaque a lieu avenue des Champs-Élysées dans la galerie marchande du Claridge. Le même jour, un engin explosif est désamorcé au troisième étage de la Tour Eiffel. Le lendemain, c'est la clientèle de la librairie Gibert, place Saint-Michel à Paris, qui est frappée. Puis ensuite le Forum des Halles et un TGV entre Paris et Lyon.

Toutes ces attaques sont revendiquées par un mystérieux groupe, le Comité de solidarité avec les prisonniers politiques arabes et du Proche-Orient, un mouvement inconnu qui réclame la libération d'Anis Naccache et de Georges Ibrahim Abdallah. Plusieurs français sont pris en otage au Liban par des groupes armés comme le Hezbollah sur ordre de l'Iran.

Mi-mars, le juge Marsaud ordonne des arrestations dans les milieux intégristes chiites. Plusieurs dizaines de militants sont interpellés, interrogés, puis expulsés. On apprendra plus tard que se trouvaient parmi tous ces hommes les membres du réseau qui est venu ensanglanter la capitale française.

En , à la veille d’une visite à Téhéran du ministre des Affaires étrangères, Roland Dumas, il demande à l'Iran de « rappeler à la France ses engagements », reliant sa libération à l'affaire des otages français au Liban[2].

Maître Jacques Vergès encourage Anis Naccache à mener une grève de la faim et reçoit alors le surnom d'« avocat de la terreur »[réf. nécessaire]. Naccache fait partie de la négociation globale de la France avec l’Iran. Le , graciés par le président François Mitterrand, les cinq terroristes sont libérés après seulement dix ans de prison et expulsés[3].

Le policier Bernard Vigna, paralysé toute sa vie, passe le reste de ses jours dans un fauteuil roulant. Il reçoit la proposition de dédommagement de 2 millions de francs en échange de la libération d'Anis Naccache, chose qu'il refuse catégoriquement, qualifiant l'argent de « sale ». Il décède en des suites des blessures causées en 1980.

En 2015, l'ancien terroriste fait partie des bénéficiaires de l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien qui prévoit qu'environ 150 personnes dont Anis Naccache ne seront plus visées par les sanctions internationales adoptées contre l'Iran à partir de 2006[3].

Vie postérieure

Après sa libération, Anis Naccache devient homme d'affaires et conseiller en communication, vivant entre Téhéran et Beyrouth. Il intervient régulièrement au sein de la télévision libanaise et est considéré comme très proche du Hezbollah. Il affirme ne rien regretter.

Atteint du Covid-19, il meurt le au matin à Damas, où il était hospitalisé depuis plusieurs jours[4].

Notes et références

  1. « Disparition. Anis Naccache, mort d’un terroriste militant », sur Courrier international, (consulté le )
  2. « Libération d’Anis Naccache » dans L'Humanité du .
  3. Yves-Michel Riols, L’ex-terroriste Anis Naccache, bénéficiaire de l’accord iranien, lemonde.fr, 28 août 2015
  4. « Décès d'Anis Naccache, le Libanais qui avait tenté d’assassiner l'ex-Premier ministre du Chah d'Iran », sur L'Orient Le Jour, (consulté le ).

Articles connexes

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