Alexander Archipenko

Alexander Porfyrovych Archipenko est un sculpteur américain d'origine ukrainienne, né à Kiev le et mort à New York le .

Biographie

Fils d'ingénieur, Alexander Archipenko a lui aussi étudié les mathématiques. L'artiste est d'ailleurs passionné par les relations entre art et science. Il se forme à la peinture et à la sculpture à Kiev et à Moscou de 1902 à 1906. Cette période lui a permis de se passionner pour les icônes byzantines, les fresques et les mosaïques de Kiev. Après un séjour à Moscou, il s'installe à Paris en 1908 où il entre en contact avec les courants d'avant-garde, en particulier le groupe des cubistes. Il est installé à La Ruche, 2, passage de Dantzig, un ancien pavillon des vins de l'Exposition universelle de 1889 aménagé en ateliers d'artistes. Il travaille en solitaire, préférant aller au musée du Louvre pour étudier la sculpture archaïque grecque plutôt que de se rendre aux Beaux-Arts dont il dédaigne l'enseignement académique. Un reproche que l'artiste a déjà adressé à ses professeurs de l'école d'art de Kiev qui ont fini par le renvoyer. Influencé par Rodin jusqu'à ses travaux présentés à Moscou en 1906, il s'affirme dès ses travaux parisiens à 24 ans comme l'un des chefs de file de la sculpture d'avant-garde.

En 1910, il expose au Salon des indépendants à Paris. Le vendredi au XXVIIe Salon des indépendants, les œuvres de Albert Gleizes, Jean Metzinger, Robert Delaunay, Henri Le Fauconnier, André Lhote, Joseph Csaky et Archipenko font l'objet de critiques incendiaires dignes de celles provoquées par l'exposition des fauves. Envisagés comme des « maîtres-cubes », même Guillaume Apollinaire est déconcerté par cette exposition. On leur reproche le dévoiement du cubisme, sa caricature voire son anti-académisme. L'absence de Picasso et Braque (qui exposent exclusivement avec la galerie de Daniel-Henry Kahnweiler) à cette exposition est regrettée.

Sa première exposition en solo se déroule en Allemagne au musée Folkwang Hagen en 1912. Cette année, il ouvre à Paris une école d'art et rejoint la Section d'Or et produit ses premières peintures en relief : les sculpto-peintures. Au mois d', à la galerie de la Boétie, est organisée la première exposition du groupe de la Section d'Or, avec Léger, Gleizes, Metzinger, Gris, Marcel Duchamp, Raymond Duchamp-Villon, Jacques Villon, Lhote, La Fresnaye, Marcoussis et Archipenko. Trente et un artistes avec deux-cents tableaux sans la présence de Picasso. Cette exposition présente un caractère didactique : le cubisme est entré dans une phase théorique quatre ans après sa naissance. L'exposition du groupe Section d'Or déclenche des critiques acerbes contre ces œuvres révolutionnaires : Apollinaire le défend dans ses rubriques de L'Intransigeant ou dans des préfaces de catalogues.

Le Gondolier (1914). L'inspiration du cubisme et du futurisme se fait ressentir

En 1913, quatre de ses œuvres sont présentées à l'Armory Show à New York. Il réalise ses premières gravures qui ont été reproduites dans la publication italienne futuriste Lacerba en 1914. Il participe au Salon des indépendants en 1914 et à la Biennale de Venise en 1920. Pendant les années de guerre, l'artiste réside à Cimiez près de Nice. De 1919 à 1921, il voyage à Genève, Zurich, Paris, Londres, Bruxelles, Athènes et d'autres villes européennes pour exposer ses œuvres. Sa première exposition en solo aux États-Unis a eu lieu en 1921 à New York à la Société Anonyme. En 1923, il quitte Berlin pour les États-Unis où au fil des ans il va ouvrir plusieurs écoles d'art à New York, Woodstock, Los Angeles, Chicago. Les trente années suivantes, il enseigne aux États-Unis dans les écoles d'art et dans les universités, même dans l'éphémère Nouveau Bauhaus. Il est devenu citoyen américain en 1928.

En 1933, il expose au pavillon Ukrainien à Chicago dans le cadre du Century of Progress World's Fair. De 1937 à 1939, il est instructeur associé à la New Bauhaus School of Industrial Arts de Chicago. La plupart des œuvres de l'artiste présentes dans les musées allemands ont été confisquées par les nazis dans l'intention de purger l'art dégénéré. En 1947, il crée des sculptures qui sont illuminées de l'intérieur. Il a accompagné une exposition itinérante de ses œuvres à travers toute l'Allemagne en 1955 et 1956. Il commence à écrire son livre intitulé : Archipenko : 50 années de création 1908-1958 qui sera publié en 1960. Dans ce livre, sont réunis une contribution de cinquante historiens d'art avec des textes d'Archipenko sur la création artistique. Il est élu à l'Académie américaine des arts et des lettres en 1962.

Techniques de l'artiste

Pour Archipenko, « il est difficile de classer l'œuvre d'un artiste en périodes ». Il ajoute : « Je n'ai jamais appartenu à des écoles : j'ai été renvoyé des écoles. J'ai fait des recherches, j'ai inventé et expérimenté, ensuite on m' a imité... Pour chaque artiste, l'art est un courant créateur ascendant vers la découverte individuelle de la vérité dans les formes de la nature et les périodes ne constituent que des cases dans l'esprit des critiques. »

La problématique soulevée par la sculpture selon Archipenko, est le volume et la liaison des masses entre elles. Il est en cela encore plus extrémiste que les sculpteurs modernes tels Brancusi ou Duchamp-Villon qui sont membres comme lui du groupe de la Section d'or. Son enjeu principal est celui du vide qui a la force de l'objet absent et crée par là-même le volume. La simplification, l'évidemment des volumes tout en maintenant l'aspect figuratif sont les principes de sa sculpture. Son art caractérisé par une grande rigueur mathématique laisse une place prépondérante au corps féminin. Il aime rappeler l'omniprésence des idoles de pierre des anciens Slaves dans son enfance.

Picasso avait élaboré les premières règles de cette grammaire sculpturale : polychromie, intégration des matériaux les plus divers, utilisation rythmique des plans, apparitions de formes en claire-voie. Comme la peinture, la sculpture cubiste se préoccupe principalement des relations entre les objets et l'espace, des volumes et des vides qui les séparent ou dans lesquels ils s'insèrent. L'influence du futurisme italien, surtout par le biais de Boccioni qu'Archipenko a rencontré en 1912, a entraîné à la formation de formes dynamiques. Archipenko a plus spécialement exploré la dialectique des formes concaves et convexes.

Il a développé un style personnel avec des masses corporelles simplifiées d'une façon stéréométrique, des figures dressées dans l'espace, des formes en biseau, des angles aigus, des fractures cristallines issues de l'inventaire formel du cubisme et s'inspire aussi du maniérisme.

Excepté Boccioni, aucun sculpteur n'a posé autant que lui comme un absolu l'analyse de l'espace, le problème central de cette décennie. Aucun artiste a poussé l'interaction entre volume et vide d'une façon aussi personnelle vers des domaines expressifs et lyriques, dynamiques et statuaires. Il a réussi union entre rigueur formelle et attrait ludique. Il a unifié en une forme les quatre insaisissables : l'espace, la transparence, la lumière et le reflet avec comme conséquence une sculpture moderne avec une forme concave.

Œuvres

Torse (1909) est sa première sculpture a tendance cubiste. Il met en ouvre la manière dont il désarticule les volumes et les troue afin d y faire pénétrer l'espace.

En 1909, et l'année suivante, il ne sait encore rien du cubisme et il s'inspire des sculptures repliées sur elles-mêmes de Barlach ou de Köllwitz (Femme et chat en 1910 ou Femme au chat en 1911). En 1911-12, elles se déploient, et l'on pressent l'influence cubiste dans ses cuisses et ses bras gonflés ou au contraire, un éticisme (Femme marchant en 1912). Dès 1911, il participe activement au mouvement cubiste. Les problèmes plastiques qu'aborde alors sa sculpture sont résolument neufs : volumes pleins, rapports entre les vides et les pleins volumes en creux. Il souhaite symboliser « la réalité absente ». Avec Femme qui marche en 1912, il épargne pour la première fois une tête en négatif. En 1912, il identifie son thème de prédilection : interpénétration du corps et de l'espace, développement des courbes concaves et convexes de sorte que la forme sculpturale devient en quelque sorte perceptible par sa matrice. Il développe sa propre théorie des formes complémentaires : tout vide génère son antithèse imaginaire.

Avec Medrano réalisé en 1912, il crée un premier assemblage de divers matériaux peints (verre, bois et métal). En constante recherche artistique, il met au point des méthodes de création inédites et crée une interaction entre peinture et sculpture. Avec Medrano I Le Jongleur, en 1912, il utilise du bois, du verre et du fil métallique. Medrano sont des poupées articulées ressemblant à des arlequins de bois en utilisant du verre, une feuille métallique du fil de fer, des cônes cylindres et des disques dynamisés par une peinture de polychrome. Par cette libération de la forme, Archipenko rompt avec la sculpture traditionnelle et s'affirme comme un des maîtres de l'avant-garde. Il renoue avec un genre négligé depuis le XVIIe siècle par la sculpture occidentale, la polychromie.

Ses sculpto-peintures créés en 1912 sont des reliefs en plâtre peint. Entre la peinture et la sculpture, il étudie le rapport réciproque entre forme et couleur, l'une accentue ou diminue l'autre. Ces deux arts sont unifiées ou contrastées sur le plan visuel et spirituel, tout dépend du but recherché.

De 1913 à 1916, la forme prédomine la réalité. Avec La danse en 1912, il définit un espace intérieur ascendant empreint de légèreté grâce à l'arabesque formée par un couple. Il organise cette sculpture autour du vide. En réalisant ce travail sur le vide et le plein, il se garde d'achever les corps dont il arrête les membres quand la plastique le lui commande en introduisant le vide comme partie prenante, comme dans Femme en 1915, dont la tête est dessiné autour d'un manque.

En 1913, il crée une sculpture en fil de fer qu'Apollinaire baptise « en baleine de parapluie ». Plus tard, son traitement du cubisme s'orientera vers le constructivisme.

Avec La Boxe en 1913, l'artiste tente de traduire l'énergie brutale du sport par des formes abstraites. Les boxeurs sont réduits à des formes aigües imbriquées les unes dans les autres et s'entrechoquent violemment, les muscles sont remplacés par des énergies rythmiques.

Tête constructiviste (1913) est faite d'un assemblage de plans. Le Gondolier en 1914 est composé en sections légèrement décalées de manière à donner, dans la perspective futuriste le sens du mouvement. Avec Nature morte (1915), ce novateur donne aussi une de ses rares peintures en relief.

À son arrivée aux États-Unis au début des années 1920, il s'engage dans la tradition : le lisse prévaut, parfait et détendu. Avec Femme (1920), il reprend aussitôt la sculpture avec haute figure en métal sur panneau peint. Il devient traditionnel.

De 1924 à 1928, il élabore l'Archipentura. L'archipeintura en 1924 sont des toiles mises en mouvement par des moteurs habilement dissimulés : un mécanisme électrique à la base de l'appareil imprime un mouvement de va-et-vient au cadre central et des milliers de fragments peints qui se succèdent apparaissent à la surface pour constituer un tableau complet. Cette invention a été mise en œuvre à New York. Sa recherche a toujours été l'animation visuelle de ses œuvres, soit en les trouant dans la masse pour que l'espace les pénètre, soit en utilisant des matières telles que le verre, le bois ou le métal et même pour ses sculpto-peintures en ajoutant de la couleur.

En Famille (1935) est une œuvre à la fois concentrée et influencée par le constructivisme.

Dans les deux dimensions, se glissent aussi un œuvre exceptionnelle comme cette figure féminine à la gouache, dont les masses brunes et blanches alternés créent le relief du corps (Moonlight en 1937).

Dans les années 1940 et 50, il continue ses explorations artistiques en utilisant des matériaux et des techniques. Ainsi, pour Figure assise, il emploie du plastique taillé et éclairé. Il reprend ses formes initiales, pour la plupart disparues dans des formats gigantesques (Figures d'acier en 1951, Cléopâtre en 1957). Il s'aperçoit, dans les années 1950 et pour quelque temps, de son erreur d'orientation et s'attache à pasticher ses débuts ou à les reconstituer, puisque nombre de ses œuvres n'ont pas survécu à la première guerre mondiale.

À compter de la fin de ces années 1950, il revient à son style cubo-constructiviste, avec des figures très géométrisées, conservant les vides signifiants, et le plus souvent symétriques (Kimono en 1961 ou Roi Salomon en 1963).

Sources

  • L'art au XXe siècle, Rurhberg, Schneckenburger, Honnef Fricke, Éditions Taschen, 2002, Bonn, (ISBN 3-8228-5731-9)
  • Petit dictionnaire des artistes modernes, Pascale Le Thorel-Daviot, Larousse, 1999, Paris, (ISBN 2-03-508021-5)
  • Encyclopédie de l'art, La Pochothèque/Garzanti

Notes et références

    Annexes

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