Alexandre Nikolaïevitch Iakovlev

Alexandre Nikolaïevitch Iakovlev ou Yakovlev (en russe : Александр Николаевич Яковлев), né le et mort le , est le principal architecte de la perestroïka jouant ainsi un rôle historique[1].

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Origine et Formation

Alexandre Iakovlev, né dans une famille paysanne très pauvre du gouvernement de Iaroslavl, combat dans l'Armée rouge pour la défense de Léningrad (1941-1943) puis est démobilisé à la suite d'une blessure. Il étudie à la faculté d'histoire de Université pédagogique de Iaroslavl en 1943-44, puis à l'Ecole du Parti communiste. En 1958, il passe un an à l'Université Columbia, aux États-Unis.

Un apparatchik hétérodoxe

Entré au département de l'Idéologie et de la Propagande du Parti en 1969, il en est exclu en 1973 pour des positions jugées trop éloignées de la ligne du Parti. Il est envoyé comme ambassadeur au Canada pendant 10 ans. En 1983, il reçoit Mikhaïl Gorbatchev en visite au Canada et a avec lui un entretien au cours duquel il insiste sur la nécessité de réformes radicales pour sauver l'Union soviétique. Andropov, nouvellement élu Secrétaire général du Parti, le rappelle pour le nommer directeur de l'Institut de l'Économie et des Relations internationales. Il est élu secrétaire du Comité central du Parti communiste de l'Union soviétique, puis rentre au Politburo au milieu des années 1980 ; il est à l'origine de la politique d'ouverture lancée par le dernier président de l'Union soviétique Mikhaïl Gorbatchev pour libéraliser la société soviétique et exposer les crimes des gouvernements passés. Devenu éminence grise, des vétérans du KGB accusaient Iakovlev d'avoir « hypnotisé » Gorbatchev.

Iakovlev portait, dans le sérail soviétique des années 1980, le surnom que la France révolutionnaire et napoléonienne avait attribué à Talleyrand : « le Diable boiteux ». Au moment de la réunification allemande, Vladimir Krioutchkov, chef du KGB, présenta à Mikhaïl Gorbatchev un dossier sans fondement qui accusait Iakovlev d'être manipulé par la CIA, ce qui eut pour résultat une brouille entre le numéro un soviétique et son principal inspirateur[2].

Le , Iakovlev âgé de 67 ans, annonce son départ de conseiller en déclarant sobrement au journal d'informations « Vestî » de la télévision soviétique « J'ai donné une lettre de démission ». Cependant, sa démission pourrait être provoquée par le désaccord qui l'oppose à Mikhaïl Gorbatchev au sujet du décret pris par Boris Eltsine, président de la fédération de Russie. Ce dernier interdit aux communistes de pouvoir exercer une activité politique au sein des entreprises d’État et des administrations[1].

Alexandre Iakovlev est décédé le à Moscou à l'âge de 81 ans.

Ami de Pierre Elliott Trudeau, il était l'inspirateur du prénom d'un des fils Trudeau, Alexandre.

Un fossoyeur du communisme

Dans le domaine politique, il préconisait une transformation totale du système. Son but n'était pas de préserver le système communiste, mais de sauver le pays d'un chaos sanglant inévitable s’il n’arrivait pas à sortir du totalitarisme.

Le plan prévoyait en conséquence des élections libres, le multipartisme, la liberté de la presse et introduisait le parlementarisme et l'indépendance des juges. Certes, les idées y étaient plus vagues en matière économique, grand point d'interrogation de la pensée de la perestroïka. Il proposait néanmoins d'en finir avec le monopole d'État du commerce extérieur et de donner beaucoup plus d'indépendance aux entreprises dans le cadre de l'économie de marché. Les communistes orthodoxes ont souvent dit de Iakovlev qu’il était le « messager du mal ». L’un des apports majeurs de son action fut d'apporter au pays une parole de liberté.

On ne peut pas présenter Iakovlev comme un « homme de l'ombre », car ce qualificatif convient plutôt à ses adversaires du KGB, cette armée des ténèbres qui tétanisait le pays. On le compare volontiers, en revanche, à un starets. Dostoïevski décrivait ainsi ces vieux sages de l’orthodoxie en quête de spiritualité absolue, qui vivaient en marge de la hiérarchie ecclésiastique.

Notes et références

  1. « Gorby perd son éminence grise : Iakovlev quitte l'équipe des conseillers du président », L'Express, Neuchâtel, RERO, no 173, , p. 4 / 24 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
  2. « Le jour même de la réunification allemande, [Kryuchkov] est allé voir Gorbatchev pour lui annoncer qu'il détenait la preuve, dossier à l'appui, que Iakovlev était un agent américain. Le dossier était un vrai « faux-dossier », bien sûr, bourré de témoignages sur mesure d'agents dormants, mais dénués de tout fondement. De tels dossiers étaient monnaie courante à l'époque. […] [Gorbatchev] a [cru cette information] ou a fait semblant de la croire. Lui et Iakovlev ont été en froid pendant plusieurs années. Pourtant, Iakovlev n'avait guère le profil d'un espion. C'était un intellectuel, un idéaliste, un penseur, pas un agent », in Vladimir Fédorovski, entretien dans Le Spectacle du Monde no 561, novembre 2009.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Abel Aganbegi︠a︡n et Alexandre N. Yakovlev, Perestroika 1989, New York, Charles Scribner's Sons, , 346 p., trade paperback (ISBN 978-0-684-19117-1)
  • (en) Alexandre Yakovlev, USSR : The decisive years, Toronto USSR, Key Porter Books Novosti, , hardcover (ISBN 978-1-55013-410-0)
  • Alexander Yakovlev et Catherine A. Fitzpatrick, The Fate of Marxism in Russia, Yale University Press (1993), hardcover, (ISBN 0-300-05365-7); trade paperback, Lightning Source, UK, Ltd. (17 november 2004) (ISBN 0-300-10540-1)
  • (en) A. N. I︠A︡kovlev et Paul Hollander (trad. Anthony Austin), A century of violence in Soviet Russia, New Haven, CT, Yale University Press, , 254 p., hardcover (ISBN 978-0-300-10322-9);
  • A. N. I︠A︡kovlev et Paul Hollander (trad. Johan-Frédérik Hel Guedj), Le cimetière des innocents, Paris, Calmann-Lévy, , 283 p. (ISBN 978-2-7021-3675-1);
  • (en) Alexander N. Yakovlev, Digging out : How Russia liberated itself from the Soviet Union, San Francisco, Encounter Books, , 375 p. (ISBN 978-1-59403-055-0)

Liens externes

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