Abbaye de Marche-les-Dames

L'abbaye de Marche-les-Dames (ou encore abbaye Notre-Dame du Vivier) se trouvait autrefois dans la section Marche-les-Dames, en Belgique, dans la Province de Namur. Fondée en 1103, la communauté de moniales se rallia à l'ordre cistercien un siècle plus tard. L'abbaye fut officiellement supprimée en 1796. Ses bâtiments furent ensuite utilisés par différentes œuvres ou associations de l'Église. De à , l'ancienne abbaye abritait des prêtres de la Fraternité des Saints Apôtres et de futurs prêtres en formation.

Ancienne abbaye de Marche-les-Dames

Vivier et église de l'ancienne abbaye.
Présentation
Culte Catholique
Type Abbaye de moniales
Rattachement Ordre cistercien au début du XIIIe siècle
Début de la construction 1103
Fin des travaux Désaffectée en 1796
Géographie
Pays Belgique
Région  Région wallonne
Province Province de Namur
Ville Namur
Section Marche-les-Dames
Coordonnées 50° 29′ 20″ nord, 4° 57′ 24″ est
Géolocalisation sur la carte : Province de Namur
Géolocalisation sur la carte : Belgique

Origine (légende ?)

  • Un chronique sérieuse mais non authentifiée fait remonter l’origine de l’abbaye à un groupe de dames, épouses de chevaliers partis en croisade à la suite de Godefroid de Bouillon (1095). Sur le conseil du comte de Namur[1], ces dames se rassemblent dans une simple chapelle de Marche-sur-Meuse qu’elles font rapidement reconstruire en une église plus adéquate. Pendant deux ans elles y prient pour le retour victorieux de leurs maris. À la fin de la croisade (1099) celles dont le mari n’est pas revenu s’installent à demeure à Marche - qui devient ‘Marche-les-Dames’ - et y fondent la première communauté monastique. La fondation est richement dotée par les chevaliers de Godefroid, remerciant ainsi la Vierge Marie pour leur retour victorieux au foyer.
  • L’église du monastère est consacrée en 1103, date qui marque la fondation officielle de l’abbaye. Puisque, durant des travaux de fondations, on découvre une statue de la Vierge Marie datée du XIIIe siècle[1] dans une pièce d’eau, le monastère est consacré à Notre-Dame du Vivier. À la suppression du monastère, en 1796, cette statue est conservée à Namur jusqu'en 1880, année où elle revient au monastère[1].

Géographie

L’abbaye de Marche-les-Dames se trouve dans la section Marche-les-Dames de la ville de Namur, en Belgique, à une dizaine de kilomètres en aval du Chef-lieu de la Province de Namur, sur la rive gauche d'un ruisseau qui se jette directement dans la Meuse. À vol d'oiseau, Marche-les-Dames est située à km à l'Est de Namur.

Histoire

XIIe et XIIIe siècles

  • Peu de chose est connu du développement de la communauté primitive. Les premiers documents que l’on en possède datent du XIIIe siècle. Le passage de saint Bernard dans la région en 1146 (lors de la prédication de la deuxième croisade) a sans doute encouragé les moniales à adopter la règle cistercienne. En 1236, en tous cas, le monastère fait partie de l’ordre cistercien, et la première abbesse cistercienne s’appelle Ivette.

Abbaye cistercienne

Des personnalités - quelques noms seulement - émergent de ces temps obscurs de l’histoire :

  • Une abbesse Marie en 1273
  • 1291 : abbesse de Helwy
  • 1330 : abbesse Clarisse de Bawegny
  • 1340 : abbesse Marie de la Malaise
  • 1392 : abbesse Ponche de Modave
  • 1402 : abbesse Marguerite de Boen

Réforme du XVe siècle

  • Après une période de décadence (à l’instar de tout le mouvement monastique) et de grande précarité l’abbaye revient à une discipline religieuse plus stricte grâce à l’abbesse Marie de Bervier (+1447) et de son groupe. Marche-les-Dames acquiert une réputation de ferveur et de réforme. L’abbaye essaime et soutient le renouveau, entre autres, à Soleilmont près de Fleurus.
  • Marie II de Tournai, mourut en 1460.
  • Marie III de Herstal (1460-1486) modernise l’abbaye en y installant un système de circulation des eaux. En 1480 elle obtient également la protection solennelle de l’archiduc Maximilien d’Autriche et Marie de Bourgogne (acte du ).
  • Marie IV de Hustin (1486-1504) dirige l’abbaye durant une période trouble faite de conflits entre les ducs de Bourgogne et la principauté de Liège. L’abbaye n’échappe pas aux conséquences de la guerre.

XVIe et XVIIe siècles

  • Catherine de Hodeige (1504-1531)
  • Jacqueline de Houtain (1531-1565) dont la pierre tombale est conservée.
  • Marie V de Dave (1565-1579)
  • Jeanne Baduelle (1579-1602) a de l’influence auprès de la cour d’Espagne et obtient de Philippe II une importante exemption de taxes qui devaient être payées sur des fermes (Tillier, Namêche, Wartet) dont elles n’obtiennent plus de revenus car saccagées par des troupes de passages. Cela a peut-être sauvé l’abbaye de l’insolvabilité. La splendide pierre tombale de Jeanne Baduelle est préservée dans le cloître de l’abbaye.
  • Clémence de Castro (1602-1635), d’origine espagnole, fait beaucoup pour le développement de la vallée. Les nouvelles techniques de forge à battre le fer et moulins à eau amènent la prospérité. Sur une vasque en pierre (de 1620) près du vivier, une inscription lui rend hommage : « Clémence, mère et dame de ce noble couvent, a rendu nouvelle vie à ce ruisseau d’argent ».
  • Anne de Jamblinne (1635-1658)
  • Christine de Hinnisdael (1658-1682)
  • Catherine Woot de Trixhe (1682-1706) dirige l’abbaye durant la difficile fin de siècle. Le siège de Namur en 1692 fut particulièrement dévastateur pour toute la région des alentours. Les vivres se font rares. Charles II d'Espagne répond généreusement aux suppliques des moniales qui sont au bord de la disette.

XVIIIe siècle

  • Le long abbatiat de Marguerite de Bulley (1706-1722) est une période de renaissance. Le monastère est restauré et embelli. L’église est rénovée et enrichie de magnifiques ornements, chandeliers et vases sacrés.
  • Constance de Bulley succède (par élection) à sa sœur (1722-1743)
  • Louise de Fumal (1743-1769) continue la restauration, comme en témoigne l’épitaphe de sa pierre tombale qui est conservée et peut se voir dans le cloître. En 1750, de nouvelles stalles sont installées dans le chœur de l’église.
  • Dame Marie-Joseph de Boron est la dernière abbesse de Marche-les-Dames (1769-1809). Ses armes sont encore visibles près de la porte d’entrée. Le bassin d’eau que l’on voit devant l’entrée des bâtiments - dernier embellissement - porte son nom et la date de 1772.

Suppression et expulsion

  • Un premier orage fut la suppression de l’abbaye sous le régime autrichien, en 1783. Les ordres contemplatifs étant alors considérés comme inutiles à la société, les moniales partent en exil en Westphalie, à Essen, où elles fondent un couvent. Elles rentrent cependant à Marche-les-Dames après la période autrichienne, mais la tentative de restauration du monastère est vaine[1].
  • En 1796, en application du décret du 1er septembre, elles sont expulsées par les révolutionnaires et leurs biens sont confisqués[note 1]. L’abbaye est vendue comme bien national.
  • Des amis rachètent l’abbaye pour permettre aux religieuses d’y revenir. Les quelques survivantes s’éteignent l’une après l’autre. La dernière, sœur Scholastique Baudhuin, meurt en 1856, à l’âge de 87 ans.
  • En 2018, les frères Bouvier rachètent l’abbaye de Marche-les-Dames et initient de grandes restaurations des bâtiments avoisinants.

Différents occupants successifs

Les bâtiments passent au diocèse de Namur qui en gère les occupations successives :

  • Après le décès de la dernière moniale cistercienne les sœurs de Saint Vincent de Paul occupent, pendant quelques années, les locaux de l’ancienne abbaye.
  • En 1875, les ursulines de Cologne leur succèdent. Elles arrivent d’Allemagne chassées par le Kulturkampf, et ouvrent à Marche-les-Dames un pensionnat pour jeunes filles. Les religieuses allemandes rentrent dans leur pays au début de la Première Guerre mondiale (1914).
  • Des carmélites françaises (non-cloîtrées) les remplacent, en 1919[1], en y ouvrant une institution pour jeunes filles orphelines de guerre. Une formation professionnelle est donnée à partir de 1924. Les activités d’enseignement cessent en 1965, et l’ancienne abbaye devient une maison de repos et d’accueil pour dames convalescentes. En 1969, l’abbaye et son site sont classés.
  • De 1972 à 1980, l'IATA de Namur (Institut d’enseignement des arts, techniques et de l’artisanat) y a son internat.
  • En 1981, des moniales de la Famille monastique de Bethléem, de l'Assomption de la Vierge et de saint Bruno s'y installent. Elles quittent les lieux pour se rendre à Opgrimbie en 2000.
  • En 2000, l’abbaye devient une des Maisons Notre-Dame faisant partie un mouvement d’apostolat laïc fondé au Canada, mais de caractère international. L’endroit devient un centre d’écoute et une maison d’accueil. Cela ne dure pas, cependant. En 2008, le diocèse de Namur était de nouveau à la recherche de locataires qui pourraient donner une nouvelle vie à cette ancienne et belle abbaye.
  • En , la Fraternité des Saints Apôtres y pose ses valises. Inspirée par le père Michel-Marie Zanotti-Sorkine, curé à Marseille, et fondée par Mgr André-Joseph Léonard, archevêque de Malines-Bruxelles, elle regroupe des prêtres et futurs prêtres en formation.

Le , Monseigneur de Kesel, successeur de Monseigneur Léonard en tant qu'archevêque de Malines-Bruxelles, prend la décision de dissoudre la Fraternité des Saints Apôtres, considérant que « l’initiative pose problème lorsque l’on constate que la plupart des séminaristes de la Fraternité des Saints Apôtres viennent de France où de nombreuses régions connaissent un manque cruel de prêtres. Il se pourrait que le nombre de séminaristes belges, tant néerlandophones que francophones, augmente au fil du temps. Mais, dans ce cas de figure, ils pourraient provenir également d’autres diocèses belges alors qu’ils relèveraient tous de l’Archidiocèse. Cette perspective n’est dès lors pas à promouvoir dans les circonstances actuelles car elle manifeste un grave manquement à la solidarité entre évêques, tant avec ceux de notre pays qu’avec nos voisins français. »[2]

Patrimoine architectural et culturel

  • Le chœur de l'abbatiale date du XIIe siècle, église agrandie au XIVe siècle. On y trouve une antique vierge romane du XIIIe siècle et une « vierge à l'enfant » du XVIIe siècle, ainsi qu'une série intéressante de pierres tombales d'abbesses[1],[3].
  • Au moment de l'installation des Ursulines de Cologne, les bâtiments du XVIIIe siècle subirent d'importantes restaurations : c'est un bel ensemble de constructions mosanes de proportions modestes mais très harmonieux[1].
  • Un miroir d'eau égaye le jardin monastique, entretenu, au milieu du XXe siècle, par des Carmélites « mitigées »[3].
  • Une ferme située à proximité, appelée encore « des Dames », appartenait à l'abbaye. Cette ferme est d'architecture assez curieuse, avec tourelle en poivrière et chapelle[3].
  • Un jésueau[note 2] en argent partiellement doré, repoussé, ciselé et gravé, mesurant 12,5 × 11,5 × 8 cm et provenant de l'abbaye est conservé à Namur au musée des Arts anciens du Namurois[4].

Films tournés à l'abbaye de Marche-les-Dames

Notes et références

Notes

  1. Pour contrer une propagande républicaine qui veut faire croire que les moniales avaient reçu dans la joie cette libération de leur chaînes, elles rédigent une protestation solennelle : « Unanimement devant le ciel et la terre nous déclarons que nous avons en horreur la suppression dont on nous menace et que nous n’aimons rien tant que de pouvoir observer les saints et rigides engagements que nous avons contractés par notre profession et de pouvoir vivre et mourir dans notre état… ».
  2. Pièce d'orfèvrerie apparut à la fin du XIVe siècle associé à la dévotion féminine de la fin du Moyen Âge. Le jésueau est un berceau miniature dans lequel est disposé une petite figurine de l'Enfant Jésus. Il était conservé dans la cellule de la moniale ou la chambre de l'abbesse, quelquefois exposé dans le chœur de l'église. Les jésueaux tombèrent en désuétude vers le début des années 1500.

Références

  1. Émile Poumon, Abbayes de Belgique, Office de Publicité, S. A., éditeurs, Bruxelles, 1954, p. 100.
  2. « Communiqué relatif à la Fraternité des saints apôtres | Catho-Bruxelles », (consulté le )
  3. Joseph Delmelle, Abbayes et béguinages en Belgique, Rossel Édition, Bruxelles, 1973, p. 67.
  4. Archéologia, n°570, novembre 2018, p.71.

Pour approfondir

Articles connexes

Bibliographie

  • Chanoine Toussaint, Histoire de l'abbaye de Marche-les-Dames, Namur, 1888.
  • Joseph-Marie Canivez, L'Ordre de Citeaux en Belgique, Forges-lez-Chimay, 1926.
  • R.-F. Poswick et al., Le patrimoine de l'abbaye Notre-Dame du Vivier à Marche-les-Dames, Agence Wallonne du patrimoine, coll. « Carnets du patrimoine » (no 79), , 64 p. (ISBN 978-2-87522-056-1)


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