Église mariavite

L'Église mariavite est une Église issue du catholicisme, membre de la famille des Églises vieilles-catholiques (aux côtés des Églises vieilles-catholiques de l'Union d'Utrecht). Elle est née d'un schisme dans l'Église catholique de Pologne au début du XXe siècle[1] et a reçu la succession apostolique des évêques de l’Église vieille-catholique de Hollande (Union d'Utrecht) avec laquelle elle est en pleine communion[2]. Elle maintient des relations régulières avec les autres Églises de l'Union d'Utrecht sans en être, à ce jour, membre à part entière[3]. Membre du Conseil œcuménique des Églises depuis 1969, elle regroupe aujourd'hui près de 30 000 membres répartis en quatre diocèses dont trois en Pologne et un en France[4]. Le siège de son évêque primat, actuellement Mgr Maria Karol Babi (pl), est situé à Płock (Pologne). L’Église entretient un dialogue œcuménique régulier et renforcé avec l'Église catholique depuis 1997[5].

Description

À l'origine, il s'agissait d'un mouvement intérieur visant à une réforme du clergé catholique polonais, mais après un conflit avec des évêques polonais et l'excommunication des fidèles, religieuses et clercs qui se revendiquaient du mariavitisme, ce groupe est devenu une Église séparée, membre de la famille des Églises vieilles-catholiques. Elle compte actuellement 30 000 membres environ dont quelques centaines en France.

L’Église mariavite est un des mouvements religieux qui se sont développés en Pologne ou parmi des communautés polonaises à l'étranger. L'autre exemple est l'Église catholique nationale polonaise fondée aux États-Unis. Les raisons qui ont conduit à l'établissement de ces deux Églises sont différentes. Les dirigeants de l'Église nationale polonaise se sont battus pour l’égalité de traitement des immigrants polonais dans l'Église catholique des États-Unis qui était à cette époque entre les mains des Irlandais et des Allemands. Les dirigeants du mouvement mariavite visaient à une réforme spirituelle du clergé et des communautés catholiques en Pologne, pays qui était alors divisé entre trois États[6].

Histoire

Situation de l’Église catholique en Pologne sous l’Empire russe

L'histoire du mouvement mariavite remonte à la deuxième moitié du XIXe siècle. En 1887, Maria Franciszka Kozłowska (pl) fonda une congrégation de clarisses, ordre qui fut appelé plus tard l'Ordre des Sœurs mariavites, mais au début ce n'était qu'une communauté religieuse catholique parmi bien d'autres. Feliksa était auparavant, en 1883, entrée dans un autre ordre catholique créé par un frère capucin, le bienheureux Honorat Koźmiński. Toutes ces organisations religieuses étaient illégales selon les lois de l'Empire russe. C'est dans cette partie de la Pologne, divisée entre les trois pays voisins, que la situation de l'Église catholique était la plus mauvaise. Après le Soulèvement de janvier 1863 les autorités impériales avaient interdit l'établissement d'organisations nationales polonaises, y compris dans le domaine religieux. Beaucoup de couvents avaient été dissous. Le clergé catholique en secteur russe n'avait pas une bonne instruction, contrairement aux prêtres des secteurs autrichien et prussien. L'unique université de théologie était à Saint-Pétersbourg. C'est dans cette situation difficile qu'est apparu le mouvement mariavite.

Révélation de Feliksa Kozłowska - 1893-1903

En 1893 Feliksa Kozłowska, en religion sœur Maria Franciszka, reçut sa première révélation. On donne la date du comme celle de la fondation du nouveau mouvement religieux du « mariavitisme », qui devait par la suite devenir une Église séparée et indépendante. Le nom de « mariavite » vient des mots latins : Mariae vitam (imitans) - ([celui qui imite] la vie de Marie). Plusieurs visions de sœur Maria Franciszka entre 1893 et 1918 furent recueillies en 1922 dans le volume intitulé Dzieło Wielkiego Miłosierdzia - (L’Œuvre de la Grande Miséricorde), qui est considérée par les mariavites les la source religieuse la plus importante à côté de la Bible. D'après cette révélation la fondatrice a reçu l'ordre de se battre contre le déclin moral du monde, particulièrement contre les péchés du clergé. Sa première vision lui ordonna d'organiser un ordre des prêtres, les mariavites, qui chercherait à promouvoir le renouvellement de la vie spirituelle du clergé. Le but le plus important était d'étendre l'adoration perpétuelle du saint sacrement et le culte de Notre-Dame du Perpétuel Secours. Dans leur vie quotidienne ils revenaient à la tradition franciscaine d'une vie ascétique - jeûnes, modestie et simplicité dans les vêtements. Ils recommandaient aux fidèles la confession fréquente et la communion.

Tentatives pour légaliser le mouvement - 1903-1906

Pour sœur Maria Franciszka et les prêtres mariavites, le mouvement qui venait de se créer devait être le moyen de fonder une mission intérieure destinée à réformer l'Église. On ne se proposait pas de créer une Église différente. Les évêques polonais préféraient ignorer les activités des mariavites, surtout par crainte des autorités russes. Jusqu'à 1903, l'existence du mouvement n'a pas été officiellement reconnue par les autorités catholiques dans la Pologne divisée et occupée. C'est cette année-là que les provinciaux de l'ordre des mariavites décidèrent de présenter les textes des révélations et l'histoire du mouvement aux évêques de trois diocèses concernés : Płock (où sœur Maria Franciszka vivait), Varsovie et Lublin. Les deux derniers refusèrent ces documents. Seul l'évêque de Płock, craignant un développement rapide et anarchique du mouvement, les accepta et commença le processus canonique. Les chefs du mouvement furent interrogés et les documents envoyés au Saint-Siège. Un mois plus tard, la délégation de mariavites se rendit à Rome pour convaincre le pape de reconnaître l'ordre. Ils durent attendre le conclave et l'élection d'un nouveau pontife. Pendant ce temps, ils choisirent comme Minister Generalis (Ministre Général) de l'ordre, Jan Maria Michał Kowalski, qui était alors la personne la plus en vue dans le mouvement. Finalement, après deux semaines d'attente, ils présentèrent leur requête au Pape Pie X.

En une deuxième délégation se rendit à Rome pour convaincre la Curie romaine de l'importance de leur mission. Le pape les bénit à nouveau et leur promit une suite favorable[réf. nécessaire]. La décision finale fut prise par la Congrégation du Saint-Office, devenue la Congrégation pour la doctrine de la foi. La décision, prise en août, un mois après l'audience du pape fut annoncée en , : les révélations de Feliksa Kozłowska étaient écartées comme de simples « hallucinations ». Le mouvement était dissout et tout contact était interdit entre les prêtres et la fondatrice. Tous les historiens actuels reconnaissent que c'est la hiérarchie polonaise à son sommet qui a joué le rôle le plus important pour aboutir à une telle décision, car elle était très hostile au mouvement mariavite. L'évêque de Płock s'était rendu à Rome peu avant la décision du Saint Office. Après cette annonce deux autres délégations mariavites furent envoyées au Vatican. La première, avec le prêtre mariavite Skolimowski, demanda au pape de permettre aux mariavites de se réunir une fois par mois pour leurs exercices spirituels. La deuxième délégation qui représentait le « peuple mariavite », (c'est-à-dire les paysans des paroisses où les prêtres étaient mariavites) fit l’éloge du clergé mariavite en se plaignant du clergé ordinaire qui se souciait si peu des pauvres.

Avec le temps l'attitude des mariavites changea. Au lieu d'obéir aux recommandations du Saint-Siège ils se rebellèrent contre elles. Feliksa se résigna à couper tout contact avec les autres religieuses et les prêtres et elle se plia à toutes les décisions des évêques et du pape. En , ils informèrent le Saint-Siège qu'ils se séparaient de leurs évêques, parce qu'ils s'estimaient persécutés par eux. Réprimandés par le pape qui les reçut ils promirent de se soumettre, mais de fait leur situation resta imprécise pendant longtemps. D'une part ils gardaient l'espoir que leur cause finirait par aboutir à Rome ; d'autre part les autorités catholiques du pays commençaient à mettre en œuvre la décision du Saint-Office. Comme le conflit avec les évêques s'aggravait, les prêtres mariavites décidèrent de se séparer de la structure religieuse en Pologne, mais ils espéraient toujours une décision de Vatican en leur faveur. Pour la première fois l'évêque de Płock les appela hérétiques, quoique le Vatican n'eût pas encore prononcé une telle condamnation. Ce fut le commencement d'un grand nombre d'actions contre les mariavites avec des moqueries contre eux et leur fondatrice Kozłowska, sans parler de violences plus grandes. Un grand nombre de leurs prêtres furent suspendus. Néanmoins nombre de partisans décidèrent de les soutenir, se séparant ainsi de la structure catholique. Les mariavites s'arrangeaient d'ailleurs pour renouer des contacts fréquents entre eux.

Dans leur dernière lettre à l'archevêque de Varsovie, en , les mariavites demandèrent l'annulation de toutes les décisions qui avaient été prises contre eux. Mais la réponse finale de Rome fut négative. En , le pape Pie X prépara l'encyclique Tribus circiter (il y a environ trois ans) où il approuvait la décision du Saint-Office. Il critiquait sévèrement Feliksa Kozłowska et l'attitude des prêtres envers elle, voyant qu'ils la traitaient comme une sainte et presque à l'égal de Notre-Dame. Cette fois-ci les mariavites décidèrent de désobéir au pape. En , Feliksa Maria Franciszka Kozłowska et Jan Maria Michel Kowalski furent excommuniés avec tous leurs disciples, prêtres et fidèles. De toute l'histoire de l'Église, Kozłowska a été la première femme à avoir été personnellement excommuniée par le Saint-Siège[réf. nécessaire] (par opposition aux femmes qui auparavant ne l'avaient été que pour leur adhésion à des groupes déclarés hérétiques).

L'Église mariavite - Première période (1906-1921)

Le mouvement fut légalisé par les autorités russes en tant que « secte tolérée » en , alors que le conflit avec la hiérarchie catholique était à son comble. Six ans plus tard elle était officiellement reconnue comme une Église particulière et indépendante. En 1906, on comptait de cinquante à soixante mille mariavites regroupés en seize paroisses. Cinq ans plus tard, des sources historiques font état de 160 000 partisans. Ce mouvement n'avait aucun précédent dans l'histoire de l'Église catholique romaine en Pologne. Cette conversion massive était aussi le résultat paradoxal de la politique des évêques qui, par mesure disciplinaire, avaient exilé beaucoup de mariavites comme curés de campagne, leur permettant ainsi de se créer beaucoup de partisans, ce qu'ils n'auraient pu faire s'ils étaient demeurés dans les centres urbains. C'est la raison pour laquelle l'Église mariavite a pu tellement se répandre dans une grande partie de la Pologne et possède de nombreux centres.

L'organisation de l'Église mariavite donne à chaque membre le droit de parler des problèmes de la communauté, comme dans les communautés protestantes. Les mariavites ne s'occupèrent pas seulement de questions religieuses, mais ils étendirent leurs activités à la culture, à l'éducation et aux œuvres sociales. Ils eurent bientôt leurs propres écoles, leurs jardins d'enfants, leurs bibliothèques, leurs magasins, leurs maisons d'édition, leurs restaurants et leurs asiles pour les pauvres, leurs orphelinats et leurs ateliers. Très rapidement ils construisirent un grand nombre de nouveaux lieux de culte, ce qui accrut les soupçons et l'hostilité de l'Église romaine. En 1911, ils achevèrent leur église principale à Płock, qu'ils appelèrent le Sanctuaire de la Pitié et de la Charité. Ils achetèrent aussi km2 de terrain près de Płock qu'ils appelèrent Felicjanów d'après le nom de Feliksa Kozłowska. Une autre chose qui les rapprocha de la tradition protestante fut le choix de la langue locale comme langue liturgique, ici le polonais depuis 1906. Séparés de l'Église catholique, ils souhaitèrent se réintégrer dans la succession apostolique et avoir leur propre évêque légitime. Ils entrèrent en contact avec l'Église vieille-catholique d'Utrecht par l'entremise du général Kireïev. En 1909, le premier évêque mariavite reçut à Utrecht la consécration épiscopale. En 1919, ils adoptèrent officiellement le nom d'Église vieille-catholique des mariavites.

La mort de Feliksa Kozłowska en 1921 marqua la fin de la première époque du mouvement mariavite, quand le mouvement de réforme intérieur s'est transformé en création d'une Église nouvelle. Cependant, graduellement le nombre des adhérents diminua et en 1921 il ne restait plus officiellement que 43 000 mariavites.

Sous l'administration de l'archevêque Kowalski (1921-1935)

Après la mort de sa fondatrice l'Évêque Kowalski (plus tard il prit le titre d'archevêque) devint le chef de l'Église mariavite. Il était l'associé le plus proche de Kozłowska, qui jusqu'à sa mort exerça sur lui une forte influence. Le respect envers « Mateczka » passa à Kowalski et très rapidement il devint la seule et unique autorité sur les mariavites. Il introduisit dans son Église un grand nombre de changements, qui tendaient à la faire différer du catholicisme romain. Ses innovations relevaient – dans un sens très large – du modernisme théologique et dogmatique, mais elles suscitèrent de vives controverses, non seulement de la part des catholiques, mais chez les mariavites eux-mêmes. L'introduction des mariages entre prêtres et religieuses (1924) et le sacerdoce de femmes (1929) furent les points les plus discutés. Ces changements allèrent jusqu'à perturber les relations avec les Vieux-Catholiques. Dans les années 1920 et les années 1930 Kowalski chercha à établir un dialogue œcuménique avec d'autres Églises. Il proposa d'abord une union avec l'Église catholique polonaise nationale, ensuite il voulut approfondir les contacts avec l'Église orthodoxe et d'autres Églises de Tradition orientale. Au début des années 1930, il envoya même aux évêques catholiques des lettres où il proposait une réconciliation. Aucune de ces tentatives n'aboutit.

Après la crise de 1935

Les changements décidés et mis en œuvre par Kowalski, mal acceptés par une fraction importante des religieux et des fidèles, aboutirent à un schisme au sein de l'église mariavite.

Avec ses partisans, l'archevêque Kowalski se retira de Płock à Felicjanów, village qui devint le quartier général de l'Église catholique des mariavites laquelle compte peut-être dans les 3 000 fidèles. L'archevêque Kowalski confirme toutes les décisions et introduit le culte public de Feliksa Kozłowska, la « Mateczka » (Petite Mère), l'« épouse du Christ » et la « nouvelle Rédemptrice du monde » ! Cette doctrine est fort éloignée du catholicisme apostolique et romain qui était la religion de la fondatrice et c'est un repli sur soi sectaire qui isole ces mariavites du mouvement œcuménique. L'archevêque Kowalski mourut à Dachau pendant la Seconde Guerre mondiale. Son successeur fut son épouse, la femme-évêque Izabela Wiłucka. Après 1946, le chef de cette Église a été l'évêque Józef Maria Rafael Wojciechowski, qui est mort en et auquel a succédé une femme-évêque Beatrycze Szulgowicz.

L'opposition menée par l'évêque Feldman a réuni la majorité des mariavites. Ils ont décidé d'abandonner la plupart des innovations de Kowalski et de revenir aux idées et aux règles qui existaient à l'origine et jusqu'à la mort de Kozłowska. Cette branche de l'Église mariavite est la plus importante et elle compte environ 25 000 adeptes en Pologne et plusieurs centaines en France (surtout à Paris)[réf. nécessaire] ; contrairement à l'Église catholique en Europe, le clergé est encore jeune et les deux tiers des prêtres ont entre 25 et 45 ans[7]. L'Église vieille-catholique des mariavites s'est montrée très active dans le mouvement œcuménique de l'après-guerre. Avec d'autres Églises, elle a créé le Conseil Œcuménique Polonais et renoué des contacts avec d'autres Églises vieilles-catholiques.

Relations entre les mariavites et les catholiques

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Depuis les années 1970, on peut observer des efforts et un processus de réconciliation entre l'Église et les Vieux-Catholiques mariavites. Les évêques polonais se sont excusés des incompréhensions qui s'étaient produites au début du mouvement mariavite. Également leur attitude envers Kozłowska a changé et ils ont reconnu qu'elle était une femme profondément religieuse et d'une grande piété. En 1972 le jésuite Stanisław Bajko, secrétaire de la Commission épiscopale polonaise pour l'œcuménisme, a fait une étude théologique sur les révélations de Kozłowska et n'y a trouvé aucune trace de discordance avec la doctrine catholique. Les mariavites ont voulu aussi se servir du fait que le Saint-Siège a reconnu comme vraie la révélation de Faustyna Kowalska de la Grâce du Seigneur, ce qui est pour eux un signe évident que Dieu a adressé ce message aux hommes.

Le changement dans l'attitude de l'Église catholique polonaise est en relation avec les réformes de Vatican II. L'Église a reconnu les fautes passées de certains de ses évêques. Quelques érudits soulignent que ce qui est arrivé avec le mouvement mariavite au début du XXe siècle n'aurait pas été possible après Vatican II, l'Église étant alors plus conservatrice qu'aujourd'hui. Les réformes ne pouvaient pas venir « d'en dessous », proposées par les croyants, les simples prêtres ou les religieuses, mais seulement d'en haut. C'était le pape qui seul pouvait entériner des réformes suggérées par la base, comme pour la communion des jeunes enfants sous Pie X, ou la réforme du chant liturgique. Bien que de nos jours il soit difficile de comprendre beaucoup de décisions prises par la hiérarchie de l'Église catholique dans la première décennie[réf. nécessaire] du XXe siècle, nous devrions aussi tenir compte de la situation en Pologne à cette époque. Les évêques étaient tenus en bride par les Russes. Et puis l'insuffisance du système éducatif du clergé et le sentiment d'insécurité était également un facteur important dans l'hostilité qu'ont rencontrée les mariavites.

Nombreux sont les commentateurs qui expliquent l'attitude hostile envers le mouvement mariavite par le rôle joué par Feliksa Kozłowska. Elle était souvent victime d'attaques violentes (on l'appelait souvent l'incarnation du diable, comme dans l'article satirique de 1906 « Là où le diable ne peut pas aller, il enverra une femme »). Dès 1897 ses activités avaient commencé à être critiquées par l'évêque de Płock. On s'en prenait surtout au fait que de son vivant elle fut vénérée par beaucoup de mariavites comme une sainte. Cette accusation n'est pas tout à fait sans fondement, car les mariavites la regardaient comme une personne très bonne et très pieuse, même avant la condamnation du pape, mais une telle situation était loin d'être unique dans les annales du christianisme. Il est vrai aussi que sa biographie a été rédigée dans un style hagiographique par l'archevêque Kowalski, et qu'il a fini par l'appeler l'« incarnation de l'Esprit Saint sur terre ».

Les premières mesures contre le mouvement et son développement furent prises en 1903, après la présentation officielle de son existence. L'archevêque de Varsovie interdit en son sein l'observation de certaines dévotions pourtant tolérées par la tradition catholique, comme l'adoration du Saint-Sacrement et le culte de Notre-Dame du Perpétuel Secours ; on trouvait que ces dévotions y étaient célébrées de manière exagérée.

Après son apparition le mouvement fut bien vite la cible d'un grand nombre d'attaques. Les journaux publiaient des articles satiriques contre les mariavites et les chansonniers se moquaient d'eux. Il en résulta des actions violentes contre les églises et les chapelles mariavites. L'année la plus difficile fut 1906, quand par endroits on assista à certaines émeutes et que des mariavites furent assassinés.

La situation de l'Église pendant l'entre-deux-guerres fut d'autant plus pénible que les catholiques étaient largement majoritaires en Pologne. Il se produisit même de véritables « pogroms » contre les mariavites. À cette époque les chefs de l'Église furent très souvent poursuivis en justice. L'archevêque Kowalski dut comparaître vingt fois ; entre autres il fut accusé de blasphèmes contre Dieu, la Bible, l'Église et les Sacrements, de trahison envers son pays, de socialisme, de communisme, de vol, de fraudes, de mensonges, etc. On lui reprocha des abus sexuels qui auraient eu lieu dans le couvent de Płock. En 1931, il fut arrêté et resta en prison un peu plus d'un mois, sur la base du concordat entre la Pologne et Rome, qui interdisait aux prêtres catholiques de se marier, leur mariage étant considéré comme un « outrage aux bonnes mœurs » et une condamnation à une peine de prison étant prévue. Les autorités catholiques utilisèrent cet article du code pour porter plainte contre lui et le faire enfermer, après que toutes les autres tentatives aient échoué[7]. Des articles parurent en nombre dans la presse réclamant la condamnation judiciaire de l'Église mariavite.

Très souvent, on accusait les mariavites d'être pro-russes et pro-socialistes. Leur légalisation par les autorités tsaristes était pour leurs accusateurs une preuve manifeste qu'ils collaboraient avec « les occupants ». Les deux côtés, raidis dans leur position, finirent par devenir complètement inflexibles. Par la suite, le mouvement perdit une grande partie de son enthousiasme initial et certains des croyants l'abandonnèrent – un grand nombre d'entre eux pendant la crise en 1935.

L'histoire des relations entre mariavites et catholiques pourrait se diviser en deux périodes. La première quand l'Église mariavite est née et s'est peu à peu constituée. Cette période a été remplie de méfiance réciproque, de soupçons et d'insultes. Les passages les plus difficiles se situent entre 1906 et 1911, peu de temps après la séparation des mariavites, et entre 1923 et 1937, quand le nationalisme polonais était le plus exalté. La deuxième période fut l'après-guerre, affectée par deux événements : la situation difficile de toutes les Églises dans la Pologne communiste et les décisions de Vatican II. Ces circonstances favorisèrent l'ouverture d'un dialogue et de relations moins tendues entre les dénominations chrétiennes. Le progrès dans la réconciliation œcuménique entre l'Église vieille-catholique mariavite et l'Église catholique de Pologne est maintenant un fait incontestable, même si la dénomination dite de Felicjanów reste intransigeante et rejette toute possibilité de rapprochement avec les catholiques. Les mariavites restent méfiants et soupçonneux. Ils considèrent les déclarations catholiques comme des gestes dénués de signification et qui ne changent vraiment rien, comme le rappellent encore quelques incidents désagréables, quand par exemple, dans l'Encyclopédie catholique publiée récemment, on a appelé les mariavites « la seule hérésie polonaise » ; les éditeurs ont présenté leurs excuses et promis de corriger dans les éditions ultérieures. Il reste beaucoup à faire pour réconcilier les deux Églises.

Il faut signaler que dans la résidence du pape à Castel Gandolfo se trouve un observatoire réputé. Or, dans les années 1980 on a permis de faire des observations à un astronome polonais, qui était en même temps un prêtre et un professeur de l'Église vieille-catholique mariavite, le révérend Konrad Maria Pawel Rudnicki, et le pape Jean-Paul II - fait sans précédent – lui a permis de célébrer la messe mariavite dans sa chapelle privée.


Notes et références

  1. Frédéric Luz, Le soufre et l'encens : enquête sur les Églises parallèles et les évêques dissidents, Paris, C. Vigne, , 319 p. (ISBN 2-84193-021-1, OCLC 681486089, lire en ligne)
  2. « Œcuménisme », sur mariavite.fr (consulté le )
  3. « Utrecht Union »
  4. « Ã‰glise vieille-catholique mariavite de Pologne — Conseil Å“cuménique des Églises », sur www.oikoumene.org (consulté le )
  5. « Kościół Starokatolicki Mariawitów », sur www.mariawita.pl (consulté le )
  6. Voir : Partages de la Pologne.
  7. Renseignement communiqué par les Mariavites de France

Voir aussi

Bibliographie

  • Frédéric Luz, Le soufre & l'encens : Enquête sur lés Eglises parallèles et les évêques dissidents, Paris, Claire Vigne, coll. « La Place Royale », , 319 p. (ISBN 978-2-84193-021-0), p. 50-59
  • (en) Lukas Liniewicz, Mariavitism : Mystical, Social, National. A Polish religious answer to the challenges of Modernity (Mémoire de master en théologie soutenu en 2013 à l'Université de Tillburg sous la direction du professeur G.A.F Hellemans) (lire en ligne)

Articles connexes

  • Églises catholiques indépendantes
    Les Églises vieilles-catholiques de l'Union d'Utrecht et l’Église vieille-catholique mariavite n'appartiennent pas à cette catégorie mais certains groupes non canoniques, définis comme Eglises parallèles par Bernard Vignot, spécialiste de cette question de sociologie religieuse, se prévalent de l'appellation vieille-catholique ou d'autres appellations (orthodoxes etc.). Voir l'analyse qu'en donne Bernard Vignot qui place les Églises vieilles-catholiques et le mouvement lefebvriste dans la catégorie des ruptures liées à un évènement historique et dont les manifestations prétendent à une certaine universalité. La reconnaissance par les autres Églises de l'historicité et du caractère canonique des Églises vieilles-catholiques de l'Union d'Utrecht et de l’Église mariavite de même que l'engagement œcuménique de ces Églises (existence de commissions théologiques de dialogue avec les autres Eglises) les différencient nettement de groupes plus marginaux relevant des Églises parallèles
    Françoise Lautman, « Vignot (Bernard) Les Eglises Parallèles », Archives de Sciences Sociales des Religions, vol. 74, no 1, , p. 302–303 (lire en ligne, consulté le ).


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