Cœlioscopie

La cœlioscopie (prononcer cé-lio-, de cœlio- « cavité abdominale », et -scopie « regarder »), appelée également laparoscopie (du grec laparos « creux », et -scopie « regarder »), est une technique d'endoscopie médicale utilisée pour le diagnostic (cœlioscopie proprement dite) ou l'intervention chirurgicale (cœliochirurgie) sur la cavité abdominale.

Vésicule biliaire humaine vue à l'aide de cœlioscopie.
Instruments pour une opération cœlioscopique.

L'instrument utilisé, appelé endoscope, est composé d'un tube optique muni d'un système d'éclairage et d'une caméra vidéo retransmettant l'image sur un écran.

Historique

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La cœlioscopie est née en France en 1944 avec Raoul Palmer (en), chirurgien gynécologique qui eut l'idée de faire pénétrer dans l'abdomen une optique éclairée.

Une nouvelle méthode de diagnostic était née, permettant de voir précocement et en toute sécurité un certain nombre de pathologies. La cœlioscopie permet d'opérer à l'intérieur du corps grâce à des outils du diamètre d'une grosse aiguille.

En 1972, Maurice Antoine Bruhat et Hubert Manhes tentèrent avec succès, pour la première fois au monde à la polyclinique de l'Hôtel-Dieu de Clermont-Ferrand, le traitement conservateur cœlioscopique d'une grossesse extra-utérine. Une dizaine d'autres premières mondiales allaient suivre, notamment l'exsanguino-transfusion d'un fœtus in utero par les professeurs Jacquetin et Meyer (1982), suivi de l'invention, par ces équipes, d'outils chirurgicaux spécifiques et aujourd'hui largement répandus comme les cœlioscopes porteurs de laser CO2, conçus en collaboration avec les laboratoires Chibret.

Des succès qui ont fait de Clermont-Ferrand un centre mondial en la matière. De nombreux praticiens du monde entier, chirurgiens, infirmières, viennent se former à Clermont-Ferrand au Centre international de chirurgie endoscopique (CICE) créé en 1990 sur le site du CHU par le professeur Bruhat. Près de 20 000 étudiants de toute la planète sont ainsi venus s'y perfectionner depuis sa création.

La première ablation de la vésicule biliaire par cœlioscopie est réalisée en 1987 par le chirurgien français Philippe Mouret à la clinique de la Sauvegarde (Lyon)[1].

Des techniques comparables ont été développées en chirurgie thoracique (la thoracoscopie), en orthopédie (l'arthroscopie), en chirurgie viscérale, en gynécologie et en urologie.

Principes

La cœlioscopie consiste à accéder à la cavité abdominale sans ouvrir la paroi abdominale. Elle est possible grâce à plusieurs artifices :

  • Un endoscope est introduit dans la cavité abdominale à travers une cicatrice que le chirurgien pratique dans l’ombilic. L'endoscope est reliée à un écran que le chirurgien regarde en opérant.
  • Du dioxyde de carbone (CO2) est ensuite introduit dans la cavité abdominale. La pression positive exercée par ce gaz va soulever la paroi abdominale, créant ainsi un espace entre la paroi et les viscères où le chirurgien peut regarder et où il peut introduire ses instruments pour opérer.
  • Des trocarts (sortes de grosses aiguilles de 5 à 12 mm) sont enfin introduits à travers la paroi ainsi soulevée, par lesquels le chirurgien va passer des instruments de 5 à 12 mm de diamètre pour opérer (pinces, ciseaux, instruments de coagulation et de suture, etc.).

Le choix du dioxyde de carbone se justifie par sa présence dans le corps humain, par le fait que les tissus sont capables de l'absorber et que le système respiratoire peut l'évacuer. Il n'est également pas inflammable, ce qui est important car des instruments électro-chirurgicaux sont fréquemment utilisés.

La cœlioscopie (et, a fortiori, la cœliochirurgie) exige une formation spécifique et une certaine expérience.

Dans certains cas, il est recommandé de pratiquer une cœlioscopie « à ciel ouvert », ou open cœlioscopie : le premier trocart est introduit après incision, et donc sous contrôle direct de la vue.

Intérêts

Les intérêts de la cœliochirurgie sont multiples, et ils ont été maintes fois prouvés par des études comparatives, notamment en chirurgie gynécologique et digestive :

  • diminution de « l’agression » chirurgicale sur le corps du patient, d’où une moindre douleur en post-opératoire ;
  • diminution du risque infectieux ;
  • diminution du risque de complications « pariétales » (abcès de paroi, éventration), ceci étant particulièrement intéressant chez le sujet obèse ;
  • diminution du risque d’adhérences dans le péritoine ;
  • pour certaines interventions : diminution de la durée opératoire ;
  • diminution de la durée d’hospitalisation ;
  • diminution de la durée d’arrêt de travail et reprise plus rapide des activités ;
  • et enfin : intérêt esthétique, puisque les cicatrices sont de très petite taille.

Contrairement à la laparotomie, la cœlioscopie fait partie des techniques chirurgicales mini-invasives qui se combinent idéalement avec le concept de récupération rapide après chirurgie popularisé par le Pr Henrik Kehlet.

Inconvénients et risques

Inconvénients

La difficulté pour le chirurgien réside en trois points :

  1. Il est privé de la vision en trois dimensions (puisque l’optique ne lui restitue qu’une vision en deux dimensions ; il n’a donc pas la notion du relief et est obligé de le déduire mentalement).
  2. Il est également privé de la possibilité de toucher les viscères avec les mains (il n’a donc pas d’information tactile directe, mais seulement un retour de force qu’il perçoit à travers les instruments).
  3. Il doit introduire ses instruments par deux ou trois orifices (les trocarts), perdant ainsi la mobilité des instruments qu’il aurait en chirurgie classique.

Pour le patient subsiste pendant quelques jours le désagrément dû au CO2 résiduel. Cela se traduit par des sensations de ballonnement au niveau abdominal et des douleurs sous les clavicules en position debout, le gaz remontant alors dans l'organisme qui agit comme un niveau à bulle. Tout cela disparaît progressivement au bout d'une semaine.

L'investissement lourd généré par l'équipement en fait une technique peu utilisée dans les pays émergents.

Risques

Comme pour toute intervention chirurgicale, la cœlioscopie comporte des risques opératoires et anesthésiques, et des complications post-opératoires. Et ceci quel que soit le type d’intervention réalisée, quelle que soit l’équipe chirurgicale et quel que soit le lieu d’intervention ou le pays.

Ces risques et ces complications sont essentiellement représentés par :

  • hémorragie par blessure d’un vaisseau sanguin en cours d’intervention, obligeant parfois à ouvrir la cavité abdominale ;
  • hémorragie secondaire dans les heures ou les jours qui suivent l’intervention, obligeant souvent à réintervenir ;
  • complications infectieuses (infections urinaire, de la paroi — abcès de paroi —, ou du site opératoire péritonite) ;
  • occlusion intestinale, obligeant parfois à réintervenir ;
  • plaie ou obstruction anormale d'organes abdominaux (vessie, uretère, rectum, intestin grêle), obligeant à réintervenir ;
  • fistule urinaire ou digestive, obligeant à réintervenir ;
  • thrombose veineuse profonde (phlébite) et embolie pulmonaire ;
  • hypercapnie ;
  • embolie[2].

Ces risques sont limités (le risque de complication grave est moins d’un cas sur 500, et la mortalité est moins d’un cas sur 10 000).

Indications

Indications validées

La liste qui suit recense les indications pour lesquelles il a été démontré une supériorité de la cœlioscopie par rapport à la laparotomie ou à d'autres voies chirurgicales, en termes de service médical rendu au patient : équivalence de l'efficacité de la technique cœlioscopique par rapport à la laparotomie ou à d'autres voies chirurgicales, réduction de la douleur, réduction de la durée opératoire, moindre risque infectieux, réduction de la durée d'hospitalisation, reprise plus rapide des activités, réduction du coût de l'intervention :

  1. appendicectomie ;
  2. cholécystectomie (ablation de la vésicule biliaire) ;
  3. traitement des occlusions intestinales liées à des adhérences ou à des brides péritonéales ;
  4. cure de reflux gastro-œsophagien (hernie hiatale) ;
  5. cure des hernies de la paroi abdominale (hernies inguinales, crurales, de la ligne blanche médiane, ombilicales, hernies obturatrices[3]) ;
  6. gastroplastie (pose d'anneau gastrique dans le traitement de l'obésité) ;
  7. sigmoïdectomie (ablation de la partie terminale du gros intestin (le sigmoïde) pour lésions bénignes.
  1. traitement de la grossesse extra-utérine, en conservant ou pas la trompe utérine ;
  2. traitement des salpingites et des péritonites pelviennes ;
  3. traitement chirurgical de la stérilité tubaire (néosalpingostomie, fimbrioplastie, adhésiolyse tubaire) ;
  4. stérilisation tubaire, par pose d'anneaux ou de clips sur les trompes utérines ;
  5. traitement des kystes bénins de l'ovaire, et des pathologies bénignes de l'ovaire ;
  6. traitement de l'endométriose ;
  7. myomectomie (ablation de fibromes utérins), à condition que le (ou les) fibrome(s) soi(en)t peu profond(s) dans le muscle utérin (le cas idéal est celui des fibromes « sous-séreux pédiculés ») ;
  8. prélèvement de ganglions lymphatiques pelviens (« curage » ganglionnaire pelvien) dans le cancer de l'endomètre, avant de pratiquer une hystérectomie par voie vaginale.
  1. prostatectomie radicale dans les cancers limités de la prostate de bon pronostic.

Indications non validées

La liste qui suit recense les indications pour lesquelles la cœlioscopie n'a pas, pour l'instant, démontré sa supériorité par rapport à la laparotomie ou à d'autres voies chirurgicales, pour des raisons telles qu'une durée opératoire trop longue, un risque de complications plus important, un coût trop élevé, ou une technique non reproductible (c'est-à-dire une technique chirurgicale dont la complexité est telle qu'elle ne peut être effectuée que par des équipes chirurgicales très entraînées, en nombre restreint).

Ces indications non validées pour l'instant continuent d'être le sujet d'évaluations médicales et statistiques, et certaines d'entre elles pourraient, à l'avenir, démontrer leur supériorité et devenir ainsi des indications validées :

  1. colectomies (droite ou gauche) pour cancer[4] ;
  2. splénectomie (ablation de la rate) ;
  3. gastrectomie (ablation de l'estomac ; en totalité ou en partie, pour un cancer de l'estomac ou opération réductrice de l'estomac, sleeve gastrectomie).
  1. hystérectomie pour maladie bénigne de l'utérus (cette indication est actuellement en voie de validation, mais il lui est essentiellement reproché de ne pas avoir d'intérêt clairement démontré par rapport à l'hystérectomie par voie vaginale) ;
  2. traitement des prolapsus génitaux (cette indication est actuellement en voie de validation, mais il lui est encore reproché un temps opératoire trop long, et une non-reproductibilité (difficulté d'apprentissage)).
  3. myomectomie sur des fibromes de trop grand volume, ou trop profonds dans le muscle utérin (car il existe un risque de suture incorrecte du muscle utérin après ablation des fibromes, l'utérus devenant ainsi trop fragile lors d'une grossesse ultérieure — risque de rupture utérine au moment de l'accouchement) ;
  4. hystérectomie pour cancer de l'endomètre, bien que cette indication soit reconnue et validée par la Société française d'oncologie gynécologique (SFOG), elle n'est pas validée par la Fédération française des centres de lutte contre le cancer (FFCLCC) ;
  5. hystérectomie élargie pour cancer du col utérin, dont la technique associe en fait la cœlioscopie à la voie vaginale, bien que cette indication soit reconnue par la Société française d'oncologie gynécologique, elle n'est pas validée par la Fédération française des centres de lutte contre le cancer. Le principal frein à la diffusion de cette technique reste la rareté des cancers du col utérin qui pourraient en bénéficier, et la difficulté technique de cette intervention, qui reste réservée à des équipes très entraînées ;
  6. chirurgie du cancer de l'ovaire (le cancer de l'ovaire est même, pour la plupart des équipes chirurgicales, une contre-indication à l'usage de la cœlioscopie).
  1. néphrectomie élargie pour cancer du rein ;
  2. traitement de la maladie de la jonction pyélo-urétérale ;
  3. traitement des varicocèles du testicule.
  1. traitement des anévrismes de l'aorte ;
  2. pontages aorto-iliaques ou aorto-fémoraux par cœlioscopie.

Contre-indications

Il existe peu de contre-indications à la réalisation d'une cœlioscopie. Ces contre-indications sont essentiellement représentées par un état général défaillant du patient, par une maladie contre-indiquant l'anesthésie générale, ou par un trop jeune âge du patient (l'innocuité de la cœlioscopie n'ayant pas été démontrée à cet âge-là).

On peut citer ainsi : le jeune âge (enfant de moins de 3 ans), l'insuffisance respiratoire et l'insuffisance cardiaque. L'obésité morbide (indice de masse corporelle > 40) qui était jusqu'à une date récente considérée comme une contre-indication à la cœlioscopie, est au contraire une bonne indication à la cœlioscopie (moins de risque infectieux, moins de risque d'éventration), à condition de respecter certaines précautions anesthésiques.

Notes et références

  1. Philippe Mouret, pionnier de la cœliochirurgie .
  2. Arrêt de la 1re Chambre civile de la Cour de Cassation[Laquelle ?] du , Consorts G. C/ Mme L. L. : patiente victime d'une embolie gazeuse mortelle dans les vaisseaux cérébraux lors de l'intervention.
  3. (en) J. Cahais, R. M. Lupinacci et A. Valverde, « Laparoscopic treatment for stranguled obturator hernia (with video) », Journal of Visceral Surgery, (ISSN 1878-7886, PMID 29037964, DOI 10.1016/j.jviscsurg.2017.08.008, lire en ligne).
  4. (en) Emad H. Aly, « Laparoscopic colorectal surgery: summary of the current evidence », Annals of The Royal College of Surgeons of England, vol. 91, no 7, , p. 541-544 (PMID 19833012, DOI 10.1308/003588409X464757).

Liens externes

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