Ultracrépidarianisme

L’ultracrépidarianisme est un comportement consistant à donner son avis sur des sujets à propos desquels on n’a pas de compétence crédible ou démontrée[1]. Il peut être rapproché de la cuistrerie[2].

Étymologie

Ce mot est dérivé de la locution latine Sutor, ne supra crepidam, qui signifie littéralement : « Cordonnier, pas plus haut que la chaussure » et équivaut à l’expression moderne « À chacun son métier, les vaches seront bien gardées ».

Historique

Selon le dictionnaire Orthodidacte, le nom anglais ultracrepidarianism est attesté pour la première fois en 1819 dans un texte de l'écrivain William Hazlitt (1778-1830) à propos du critique littéraire britannique William Gifford (1756-1826). La forme française serait apparue seulement en 2014[3].

En 2019-2020, la notion connaît un regain d'intérêt avec l'apparition de la Covid-19[4], une maladie initialement peu connue du grand public, mais rapidement commentée avec assurance par nombre de non-spécialistes, prodigues en opinions et injonctions. Le physicien et philosophe des sciences Étienne Klein a souligné dans plusieurs écrits[5] et interviews[6] cette tendance, naturelle mais accrue dans le contexte de la crise sanitaire, à parler de choses qu'on ne connaît pas plutôt que de reconnaitre son ignorance devant les medias[7], souvent en introduisant le propos par la formule : « Je ne suis pas médecin, mais je pense que... » Il rappelle que le biais cognitif qui conduit les moins qualifiés dans un domaine à surestimer leur compétence a été étudié à la fin du XXe siècle par les psychologues américains David Dunning (en) et Justin Kruger. Ce biais est connu sous le nom d'« effet Dunning-Kruger ».

Analogie avec l’argument d’autorité

L’ultracrépidarianisme peut relever, dans certains cas, de l'utilisation d’un argument d'autorité. Par exemple, la « maladie du Nobel », cas particulier d’ultracrépidarianisme, consiste pour un lauréat du prix Nobel à sortir imprudemment de son champ réel de compétence, au risque de défendre publiquement des théories infondées, voire pseudo-scientifiques.

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Ultracrepidarianism » (voir la liste des auteurs).
  1. « Les ultracrépidariens  : des personnes qui donnent leur avis sans avoir de connaissances sur le sujet », sur Nos Pensées, .
  2. « Définition de cuistre », sur universalis.fr, Encyclopædia Universalis (consulté le ).
  3. Que veut dire le mot ultracrépidarianisme ? Dictionnaire Orthodidacte
  4. Nicolas Villain, « Ultracrépidarianisme, biais cognitifs et Covid-19 », Revue de neuropsychologie, 2020/2, p. 216-217, [lire en ligne]
  5. Étienne Klein, Le goût du vrai, Collection Tracts, Gallimard, 2020, 64 p.
  6. Étienne Klein, « L'ultracrépidarianisme, l'art de parler de ce qu'on ne connaît pas », Brut, 7 septembre 2020, 3 min 51 s
  7. Etienne Klein - "Il faut distinguer la recherche et la science …" youtube LCI, 5 août 2020

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Stephen M. Perle, « Quomodocunquize, Ultracrepidarian, Boundary Violation », Dynamic Chiropractic, vol. 24, no 21, (lire en ligne)
  • (en) David H. Kaye, « Ultracrepidarianism in Forensic Science: The Hair Evidence Debacle », Washington & Lee Law Review Online, vol. 72, , p. 227-254 (lire en ligne)
  • Nicolas Villain, « Ultracrépidarianisme, biais cognitifs et Covid-19 », Revue de neuropsychologie, 2020/2, p. 216-217, [lire en ligne]

Articles connexes

Liens externes

  • (en) Art Essay par Hazlitt à propos de William Gifford.
  • Portail des sciences humaines et sociales
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