Sommet de Taba

Le sommet de Taba de 2001 s'est tenu du 21 au à Taba (Égypte) dans la péninsule du Sinaï, en présence de Bill Clinton, Président des États-Unis, de Ehud Barak, Premier Ministre de l'État d'Israël et de Yasser Arafat, Président de l'Autorité palestinienne. Clinton convoqua les deux dirigeants sur la base de nouveaux paramètres de négociations pour résoudre dans l'urgence les différents points du conflit israélo-palestinien, après l'échec du sommet de Camp David II en juillet 2000 et le déclenchement de la seconde intifada. Ce sommet ne parvint pas aux résultats espérés.

Pour une lecture chronologique du processus de paix, lire l'article général conflit israélo-palestinien.

Contexte

Le précédent sommet de Camp David II en avait été un échec par rapport aux compromis qui n'avaient pas pu être trouvés. Avant de commencer toutes nouvelles discussions, il fallait que les négociateurs s'entendent sur des nouveaux éléments qu'ils pourraient être prêts à concéder et à mettre en balance pour obtenir la paix.

Le contexte diplomatique est tendu au moment de ce sommet. Lors d'une patrouille conjointe, deux gardes frontières israéliens sont assassinés par leurs homologues palestiniens. Antérieurement avait été déclenchée la seconde intifada, juste après la visite le d'Ariel Sharon, parlementaire, chef du Likoud, sur l'esplanade des Mosquées/mont du Temple. Pour Clinton, il s'agissait de sa dernière chance d'obtenir une victoire politique importante à la veille de la fin de son mandat et ce dans le contexte de scandales qui l'affectaient aux États-Unis et avant la nomination de George W. Bush, le .

Déroulement des discussions

Clinton invita d'abord à Washington les négociateurs israéliens et palestiniens du 19 au . Il leur y présenta de nouvelles propositions. Puis Yasser Arafat rencontra dans un premier temps Shlomo Ben Ami, ministre israélien des affaires étrangères, au Caire en Égypte. Puis les discussions se déplacèrent à Taba, au bord de la mer Rouge en .

Sujets des différends

Les négociations de Taba furent relatées en détail dans un rapport non officiel de l'Union européenne que les deux parties reconnurent comme assez fidèle à ce qui s'était produit. Ce rapport insiste sur le travail et les efforts qui ont été réalisés pour tenter de résoudre ensemble les différents points de blocage. Il note toutefois que des différends importants demeurent mais qu'ils doivent être surmontés dans de futures négociations:

Les concessions territoriales

Les discussions sur les futures frontières israélo-palestiniennes s'appuyèrent sur la base des résolutions 242 (1967) et 338 (1973) du Conseil de sécurité de l'ONU ainsi que sur la base des frontières à la date du . Les Israéliens ramenèrent à 6 % les annexions dont il avait été question l'année précédente au sommet de Camp David II et proposaient ainsi un État palestinien sur 97 % du territoire revendiqué. Voir Cartes : Propositions israéliennes, de Camp David (2000) à Taba (2001)

Il fut implicitement admis par les négociateurs que la totalité de ce territoire serait sous souveraineté palestinienne. Toutefois, si les Palestiniens considéraient que l'évacuation des colonies de la bande de Gaza pouvait être réalisée sous un délai de six mois, les Israéliens jugeaient ce délai trop court. Par ailleurs, les deux parties s'accordèrent pour envisager que les deux territoires palestiniens devraient être reliés par un passage sécurisé entre Beit Hanoun au nord de Gaza et le district de Hébron.

Pour la première fois, les discussions sur ce territoire s'appuyèrent sur deux cartes fournies par les Israéliens et sur une carte des Palestiniens illustrant leur compréhension des intérêts israéliens en Cisjordanie. Toutefois, Palestiniens et Israéliens ne s'entendirent pas sur la compréhension des propositions Clinton quant à l'annexion de blocs d'implantations israéliennes qui auraient impliqué l'abandon de certains intérêts palestiniens, notamment concernant les populations arabes vivant autour de ces blocs d'implantations. Les Israéliens proposèrent de restituer 94 % de la Cisjordanie et de céder 3 % du territoire israélien. Mais les Palestiniens refusèrent car un certain nombre de villages palestiniens auraient été annexés par Israël. Ils demandèrent 97 % de la Cisjordanie et 3 % du territoire israélien.

Le statut de Jérusalem

Les deux parties acceptèrent la suggestion de Bill Clinton d'avoir une « ville ouverte », avec une souveraineté palestinienne sur les quartiers arabes et une souveraineté israélienne sur les quartiers juifs de Jérusalem. Les Israéliens concédèrent pour la première fois que la ville puisse être la capitale de deux États: « Yerushalaim », capitale d'Israël, et « Al-Qods », capitale de la Palestine. Contrairement à Camp David, les Israéliens acceptèrent la souveraineté palestinienne sur les quartiers intérieurs de Jérusalem-EST et les Palestiniens acceptèrent la souveraineté israélienne sur les quartiers juifs de Jérusalem-OUEST.

Sur le contrôle des lieux saints, les deux parties acceptèrent le principe que chacun devrait avoir la souveraineté sur ses lieux saints. Toutefois, même si la souveraineté israélienne sur le mur occidental (mur des Lamentations) fut admise, le problème demeura sur la zone attenante au mur, à savoir qui aurait le contrôle des lieux saints du mont du Temple/esplanade des Mosquées, lieux partagés par le judaïsme et l'islam.

Ce problème concernait en fait les sous-sols du mont du Temple/esplanade des Mosquées qui sont constitués des restes archéologiques du mont du Temple et la surface du Mont du Temple où se trouvent actuellement le Dôme du Rocher et la Mosquée Al Aqsa. Clinton avait proposé dans ses paramètres la souveraineté palestinienne sur la surface et la souveraineté israélienne dans le sous-sol. Les Palestiniens rejetèrent cette proposition refusant tout partage de souveraineté sur le lieu ; Barak rappela à ses négociateurs qu'il fallait conserver une parcelle de souveraineté sur la surface.

La Question des réfugiés

Les discussions sur ce point tournèrent autour de la nécessité de sortir les réfugiés palestiniens de leur situation précaire. La résolution 194 (1964) du Conseil de sécurité des Nations unies fut évoquée avec un programme de réinstallation des réfugiés soit en Israël, soit dans les territoires échangés par Israël contre des annexions, soit dans le futur État palestinien, soit dans leurs pays d'accueil pour les réfugiés dans les pays voisins, soit enfin dans des pays tiers (voir diaspora palestinienne). Il fut accepté que cela soit planifié sur 5 ans. Israël accepta outre le retour de 30 000 réfugiés palestiniens au titre de la réunion des familles le retour de 40 000 autres réfugiés. Selon Shlomo Ben Ami, les Palestiniens parlaient du retour de 150 000 réfugiés palestiniens par an pendant dix ans ce qui équivaudrait à 1 500 000 personnes ce qui n'était pas acceptable pour Israël.

Les Israéliens demandèrent que la question des compensations aux réfugiés juifs des pays arabes soit reconnue, bien que ne relevant pas d'une responsabilité palestinienne ni de cet aspect bilatéral du conflit.

Les Palestiniens demandèrent la restitution de leurs anciennes propriétés aux réfugiés palestiniens. Israël rejeta cela catégoriquement mais ce ne fut finalement pas là la fin du sommet.

Question de Sécurité

La tension au moment du sommet mit en avant cette question essentielle pour Israël.

  • Les Israéliens demandèrent 3 postes d'alerte avancés dans les territoires palestiniens.
  • Comme proposé par Bill Clinton, l'État palestinien devrait rester démilitarisé. Les Palestiniens n'acceptèrent qu'une limitation dans leurs importations d'armes.
  • Les Israéliens acceptèrent l'idée d'une souveraineté aérienne des Palestiniens au-dessus de leurs territoires.
  • Les Palestiniens acceptèrent uniquement un maximum de 2 sur les 5 postes militaires de sécurité demandés par les Israéliens sur leur territoire (le long de la vallée du Jourdain) et ils y imposèrent un délai dans le temps pour les désinstaller. Ils refusèrent d'accorder un droit de redéploiement de Tsahal en cas d'urgence, mais considéraient des moyens d'employer des forces internationales dans le cadre d'une coopération régionale sur la sécurité.
  • Les deux parties s'engagèrent à promouvoir la coopération sécuritaire et la lutte contre le terrorisme.
  • La communauté internationale aurait assurément reconnu la souveraineté palestinienne sur son territoire et sur les points de passage reconnus par cet accord.
  •  !Point à éclaircir: la souveraineté des Palestiniens sur la « sphère électromagnétique » et son utilisation commerciale fut reconnue. Les Palestiniens acceptaient d'être conciliants pour les futurs besoins israéliens dans ce domaine.

Fin des négociations

Le sommet de Taba se termina sur le constat des efforts des deux parties et de la difficulté à trouver des arrangements sur tous les sujets. La confiance mutuelle semblait presque retrouvée et les aides de l'Union européenne et du Président égyptien Hosni Moubarak furent saluées.

Une semaine après le sommet de Taba, le , au Forum économique mondial de Davos, Yasser Arafat déclara que le peuple palestinien était victime d'une agression "fasciste" de la part du gouvernement israélien. Il chercha plus tard en vain à ce que George W. Bush reprenne les propositions Clinton. Après les déclarations de Yasser Arafat, Ehud Barak, en pleine campagne électorale, refusa de le rencontrer à nouveau à Stockholm[1]. Ehud Barak fut battu aux élections par Ariel Sharon et ne chercha pas à poursuivre les négociations. Cependant, celles-ci furent poursuivies par un groupe informel composé des mêmes négociateurs qui étaient présents à Taba, et débouchèrent sur l'Initiative de Genève.

Pour une lecture chronologique du processus de paix, lire l'article général Conflit israélo-palestinien.

Notes et références

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