Esplanade des Mosquées

L'esplanade des Mosquées est une appellation française de l'espace situé dans la vieille ville de Jérusalem, connu comme le Mont du Temple (ou désignée en arabe par l'appellation historique Bayt al-Maqdis et par celle contemporaine al-Ḥaram aš-Šarīf signifiant « Noble Sanctuaire »).

Vue aérienne de l'esplanade des Mosquées ; le dôme du Rocher est au centre et la mosquée al-Aqsa en bas à gauche de l'image (vue depuis l'est).

Sur cette esplanade, s'élèvent aujourd'hui plus de 200 monuments dont le dôme du Rocher et la mosquée Al-Aqsa, la plus grande mosquée de Jérusalem. Antérieurement à leur construction, selon une tradition musulmane, Mahomet se serait élevé au ciel lors du voyage nocturne depuis cet endroit. L'esplanade marque une forme presque rectangulaire et s'élève à 743 mètres au-dessus du niveau de la mer.

Cette esplanade se situe sur le « mont du Temple », le plus sacré des lieux saints du judaïsme, sur lequel se situait le Temple de Jérusalem.

L'importance de Bayt al-Maqdis (en) pour Mahomet ne fait pas consensus entre spécialistes[1] et la littérature arabe des débuts de l'islam (638-1099) n'en fait pas mention[2]. Cependant la première trace d'une tradition associant le lieu à l'Isra et Miraj date de la période omeyyade, sans que celle-ci semble avoir eu une importance islamique[2]. De plus, le lieu aurait été la première qibla avant que celle-ci soit la Kaaba[1].

De nos jours, l'esplanade des Mosquées est généralement considérée comme un « troisième lieu saint de l'islam », mais elle ne fait pas partie des lieux saints du hajj.

Situation

L'esplanade des Mosquées se situe dans la vieille ville de Jérusalem gouvernée par Israël depuis 1967, mais comme les autorités israéliennes l'avaient proposé à cette date, son accès est régi par le statu quo qui la place sous l'administration du Waqf relevant de la Jordanie, Israël ne se réservant que les questions de sécurité.

L'esplanade est aussi appelée le mont du Temple car s'y dressait dans l’Antiquité le Temple de Jérusalem, le plus haut lieu saint du judaïsme. De cette rivalité, il résulte des tensions et parfois des émeutes de musulmans contre le pouvoir israélien ou contre des Juifs qui veulent y prier, notamment le jour du jeûne de Tisha BeAv qui commémore les destructions du Temple en 587 avant J.-C. par le roi Nabuchodonosor II puis en l’an 70 par l'empereur Titus[3],[4].

Description

L'esplanade des Mosquées se trouve sur une hauteur calcaire qui domine la vieille ville de Jérusalem. Elle a une forme trapézoïdale de 150 000 m2 de superficie. Ses dimensions sont de 470 (côté est) à 488 mètres (côté ouest), sur 280 (côté sud) à 315 (côté nord) mètres, pour une altitude de 740 mètres.

Sur l'esplanade, outre le dôme du Rocher et la mosquée al-Aqsa, on trouve une centaine d'édifices de différentes périodes dont certains sont des œuvres d'art remarquables : des lieux de prière musulmans, des arches et des portiques, des écoles religieuses musulmanes (madrassas), des minarets, des fontaines pour boire et d'autres pour les ablutions rituelles[5].

Le site dans sa totalité peut accueillir plusieurs centaines de milliers de personnes. Le , ce sont ainsi plus de 400 000 musulmans qui y avaient assisté à la prière du vendredi[6].

Lieux hiérosolymitains dans la tradition islamique

C'est après la conquête de Jérusalem par les Arabes en 637 que le lieu, abandonné depuis la destruction du Temple, va faire l'objet de constructions islamiques :

  • Vers le début du VIIIe siècle, la mosquée al-Aqsa est édifiée. Elle subira de nombreuses destructions et sa dernière grande reconstruction date du XIIIe siècle. Il s'agit de la plus grande mosquée de Jérusalem, où 5 000 fidèles peuvent prier. Selon la tradition musulmane, la mosquée a commencé à être bâtie en 637 par le deuxième calife Omar ibn al-Khattâb,[10]. C'est l'endroit d'où Mahomet serait arrivé depuis La Mecque, lors de l'Isra (voyage nocturne), et d'où il serait monté au paradis, lors du Miraj, en chevauchant sa monture Bouraq.
  • Une autre tradition rapportée par écrit au XIVe siècle par Ibn Furkah raconte que le Bouraq, monture mythique de Mahomet, a été attachée au lieu identifié comme le Mur des Lamentations, lors du voyage en songe du Prophète à Jérusalem[11]. À l'endroit précis où il attacha le Bouraq, une petite mosquée fut construite et nommée « mosquée du Bouraq »[12]. Elle se situe au coin sud-ouest de l'Esplanade.

Utilisation de l'appellation

Selon Jérôme Bourdon[13], l'expression « esplanade des Mosquées » est une appellation[N 1] seulement utilisée par la presse française, qui n'a pas d'équivalent dans d'autres langues qui n'emploient que l'expression « mont du Temple » ou « Haram al-Sharif » pour désigner ce lieu.

C'est la visite d'Ariel Sharon - alors chef de l'opposition israélienne - le jeudi qui a contribué à accentuer la polémique sur l'appellation, surtout lorsqu'on lie cette visite à l'origine de la Seconde Intifada. Le Monde, par exemple, va alors quelquefois ajouter « Mont du Temple pour les Juifs » à côté de l'expression « Esplanade des Mosquées ». Au total, de 1987 (date à partir de laquelle une recherche sur l'internet est possible) à , plus de 400 articles incluent l'expression « Esplanade des Mosquées », et le « Mont du Temple » figure 14 fois. En télévision, ce type de double appellation reste rare, l'expression « Esplanade des Mosquées » restant privilégiée[14].

En 2017, Radio-Canada rappelle que « tous les grands médias francophones dans le monde nomment ce lieu "esplanade des Mosquées", de sorte qu’il s'agit donc du terme le plus communément admis dans la presse francophone, sans qu'il faille y voir une prise de position »[15].

Pour les Juifs, c'est le mont du Temple, pour les musulmans le Haram al Sharif, c'est-à-dire le Noble Sanctuaire[13]. La presse anglophone utilise plutôt « mont du Temple » (Temple Mount) ou plus récemment « Haram al-Sharif ». Un exemple de cette différence d'appellation entre anglophones et francophones est donné par l'ouvrage de Bill Clinton My Life qui évoque le « Mont du Temple » (Temple Mount) quand la traduction française, Ma vie, dit « esplanade des Mosquées »[N 2]. Généralement, l'utilisation choisie de telle expression instruit sur l'esprit du locuteur dans la guerre des mots liés au conflit israélo-palestinien[13].

Annexes

Documentation

Liens externes

Notes et références

  • Notes
  1. Voir par exemple L'État du Monde, F. Maspero, (lire en ligne), page 262
  2. Voir Bill Clinton, My Life, Random House, (lire en ligne), pages 728, 729, 911, 923 ; et Bill Clinton, Ma vie, Odile Jacob, (lire en ligne), page 965
  • Références
  1. (en) Abdallah Ma’rouf Omar, Jerusalem in Muhammad’s Strategy: The Role of the Prophet Muhammad in the Conquest of Jerusalem, Cambridge Scholars Publishing, (ISBN 978-1-5275-3735-4), p. 119
  2. (en) Amikam Elad, Medieval Jerusalem and Islamic Worship: Holy Places, Ceremonies, Pilgrimage, BRILL, (ISBN 978-90-04-10010-7)
  3. « Le Waqf veut empêcher les Juifs de visiter le mont du Temple pour le jeûne de Tisha Beav », sur www.i24news.tv, (consulté le )
  4. « Heurts entre policiers israéliens et Palestiniens sur l'esplanade des Mosquées », sur TV5MONDE, (consulté le )
  5. (en) « The Temple Mount », sur Jewish Virtual Library
  6. Le , plus de 400 000 musulmans ont assisté à la prière du vendredi . Voir aussi
  7. « [...] en dépit du nom de « mosquée d'Omar » qui lui est souvent attribué, il ne s'agit pas d'une mosquée et on ne peut, en aucune façon, l'attribuer au calife Omar ou plutôt 'Umar (634-644), qui fut le deuxième des califes ayant succédé à Mahomet comme ses remplaçants à la tête de la plus ancienne communauté musulmane. » Rosen-Ayalon, Myriam. Art et archéologie islamiques en Palestine. Paris : PUF, « Islamiques », 2002, p. 27
  8. Le Dôme du rocher : Mosquée El Aqsa ou Mosquée d'Omar ?, sur Huffpost Maghreb, 16-12-2017 : « le Dôme du rocher n'a pas été conçu pour être une mosquée ».
  9. L’Esplanade des mosquées, un lieu saint disputé, La Croix, 16 septembre 2015.
  10. « Les premières étapes de la construction remontent au calife Omar bin al-Khattab (r. 13-23 H / 634-644 J.-C.) qui éleva un mihrab et une petite mosquée sur le site de l'édifice actuel. Moujir al-Din (m. 928 H / 1521 J.-C.), historien qui fait autorité sur l'histoire de l'architecture à Jérusalem, mentionne que c'est le calife Omar qui, en dégageant le Haram de divers vestiges, découvrit le rocher sacré. Il prit plusieurs avis sur la position idéale de la mosquée et reçut le conseil de la construire au nord du rocher, ce qu'il refusa en disant : “Mais c'est sa façade qui doit servir de qibla, comme le prophète de Dieu a fait qibla les façades de nos mosquée.” » Article mosquée al-Aqsa sur le site Discover Islamic Art
  11. (en) Simone Ricca, « Heritage, Nationalism and the Shifting Symbolism of the Wailing Wall », Institute of Jerusalem Studies (consulté le )
  12. (en) « Masjid al-Buraq - IslamicLandmarks.com », sur IslamicLandmarks.com, (consulté le ).
  13. Jérôme Bourdon, Le récit impossible : Le conflit israélo-palestinien et les médias, De Boeck Supérieur, (lire en ligne), p. 88
  14. Bourdon, Jérôme, « Le Lieu de la Critique », Questions de communication, Presses universitaires de Nancy, no 9, , p. 163–180 (ISBN 978-2-86480-869-5, ISSN 1633-5961, lire en ligne, consulté le ).
  15. https://cbc.radio-canada.ca/fr/ombudsman/revisions/2017-08-10

Articles connexes

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