Pont de Crimée

Le pont de Crimée (en russe : Крымский мост, Krimsky Most ; en ukrainien : Кримський міст, Krimsky Mist) est un pont traversant le détroit de Kertch, entre la péninsule de Kertch, en Crimée, à l'ouest, et la péninsule de Taman, dans le kraï de Krasnodar, en Russie, à l'est. Avec ses 18 km de long, c'est le plus long pont de Russie et d'Europe[1].

Pour le pont de Paris, voir pont levant de la rue de Crimée.

Pont de Crimée

Les deux arches du pont de Crimée, avec la section ferroviaire au sud et la section autoroutière au nord
Géographie
Pays Russie
Sujets fédéraux Kraï de Krasnodar, République de Crimée
Commune Kertch
Coordonnées géographiques 45° 14′ 50″ N, 36° 35′ 03″ E
Fonction
Franchit Détroit de Kertch
Fonction Pont routier et ferroviaire
Caractéristiques techniques
Longueur 18,1 km (pont ferroviaire)
16,9 km (pont routier) m
Hauteur 80 m
Hauteur libre 35 m
Construction
Construction 2016-2019
Inauguration
Mise en service (section routière)
(section ferroviaire)

Le pont est inauguré en deux temps par le président russe Vladimir Poutine, le pour la section routière et le pour la section ferroviaire.

Histoire

Pendant la Seconde Guerre mondiale

Une pile du pont construit après la libération de Crimée (1944).

Le , Hitler ordonne la construction d'un pont routier et ferroviaire au-dessus du détroit de Kertch, qui doit être édifié en 6 mois. L'organisation Todt commence les travaux en , mais dès le , de puissants bombardements forcent l'arrêt des travaux. Seul un tiers de l'ouvrage prévu avait alors été construit. Dans le cadre de la retraite allemande, le pont est alors dynamité.

Un premier pont sur ce détroit est construit durant l'été 1944, après la libération de la Crimée par l'Armée rouge, en utilisant en partie les matériaux laissés par l'Organisation Todt. Ce pont est détruit par la glace lors de la débâcle six mois après sa mise en service, faute d'épis lors de sa construction.

Projets ultérieurs

Si plusieurs propositions sont faites sous l'URSS, notamment dans les années 1960, aucune n'est sérieusement étudiée.

L'idée d’un pont sur le détroit de Kertch resurgit entre la Russie et l'Ukraine post-soviétiques. Le , les chefs d'État ukrainien Viktor Ianoukovytch et russe Dmitri Medvedev signent un accord autorisant la construction du pont du détroit de Kertch : « Ce pont doit constituer un élément important d'une autoroute qu'il est prévu de construire autour de la mer Noire[2]. ». La Russie souhaite que le projet soit achevé avant les Jeux olympiques de 2014 qui se déroulaient à Sotchi[2].

Selon le projet initial présenté en 2010, le pont doit être long de 4,2 km, large de 22 mètres et d'une hauteur de 50 mètres[3]. Il doit être doté d'une autoroute, d'une ou deux voies ferrées et de trottoirs pour piétons[3].

Le rejet de l'accord d'association Ukraine-Union européenne en entraîne un regain d'intérêt pour le projet de pont. À la fin de , les gouvernements ukrainien et russe décident qu'une nouvelle société conjointe devrait être chargée de la construction et la société russe Rosavtodor (russe : Росавтодор) de son exploitation. On estime alors la durée des travaux de construction à 5 ans pour un prix compris entre 1,5 et 3 milliards de dollars.

Construction

En mars 2014, à la suite de la crise de Crimée et du rattachement de la Crimée à la Fédération de Russie, la Russie annonce son intention de construire le pont. Le projet est doté d'un budget plafonné à 228,3 milliards de roubles, soit environ 2,9 milliards d'euros ou 3 milliards de dollars[4],[5]. Le chantier est confié le [5] à Stroïgazmontaj, une entreprise russe spécialisée dans la construction et dirigée par Arkadi Rotenberg.

La construction du pont  routier à 2 × 2 voies[6] et ferroviaire à deux voies , commence en [7]. Malgré les sanctions internationales, les travaux progressent rapidement[8] et son achèvement est prévu pour 2019. Ce pont est également un projet symbolique, destiné à matérialiser le rattachement de la Crimée à la Russie ; les ouvriers y travaillent par rotations 24 heures par jour afin de tenir les délais, et la construction se veut entièrement russe[6].

La traversée, qui passe notamment par l'île de Touzla, a une longueur de 19 km, pour une hauteur du tablier maximale de 35 mètres[7].

À partir de , l'Union européenne et les États-Unis décident de sanctions en lien avec la crise de Crimée, étendues depuis aux entreprises participant à la construction du pont de Crimée[9]. En septembre 2017, l'annonce que deux sociétés néerlandaises ont contribué à la construction du pont fait débat[10]. Selon les juristes spécialistes du domaine, la participation, même indirecte, d'une entreprise néerlandaise à la construction de ce pont est en effet une violation des sanctions[11]. Le parquet néerlandais ouvre en une enquête visant sept entreprises nationales soupçonnées de violation des sanctions[12].

En , le service de presse du pont annonce que la découverte d'un site archéologique hellénique sur le trajet de la voie ferroviaire projetée nécessite de dévier le tracé dans les environs de Kertch afin de protéger le site[13].

Ouverture

Le pont routier est inauguré le par Vladimir Poutine, président de la fédération de Russie[14]. L’ouverture à la circulation routière a lieu le lendemain () pour les véhicules légers et les bus, et en pour les poids lourds[15].

L’inauguration de la partie ferroviaire du pont a eu lieu le [16].

Infrastructures

L’autoroute de Tauride d’une longueur totale de 258 km dont la mise en service complète est prévue en 2023 reliera le pont de Crimée à Sébastopol, via Kertch, Feodosia, Belogorsk, Simferopol et Bakhtchissaraï[17].

Conséquence sur le trafic maritime

Les arches du pont de Crimée ne permettent pas le passage de navires ayant plus de 33 mètres de tirant d'air[18]. Cette limitation exclut les navires de type Panamax dépassant cette hauteur qui représentaient auparavant 20 % du trafic vers les ports ukrainiens de Berdyans et de Marioupol par lesquels transitent une grande partie des exportations céréalières et quasiment tout le trafic sidérurgique provenant du Donbass, le cœur économique de l'Ukraine[19]. En 2018, le port de Marioupol a vu son trafic diminuer de 27 %.

Galerie

Notes et références

  1. « Pont de Crimée », sur Le Monde, (consulté le ).
  2. « Moscou-Kiev : construction d'un pont reliant la Crimée au Caucase », RIA Novosti, 26 octobre 2010.
  3. « Pont entre Russie et Ukraine : un projet onéreux, mais nécessaire (Medvedev) », RIA Novosti, 15 octobre 2013.
  4. « Ukraine. Un pont reliant la Crimée et la Russie à 3 milliards de dollars », ouest-france.fr, 19 mars 2014.
  5. « Russie : la construction du pont reliant la Crimée confiée à Stroïgazmontaj », sur ville rail transport, (consulté le ).
  6. Étienne Bouche, « Crimée: projet de pont du détroit de Kertch, symbole du rattachement à la Russie », sur RFI, .
  7. Le pont de Kertch : derrière la prouesse technique, le geste politique , Céline Bayou, Regard sur l'Est, 20 septembre 2016.
  8. « En Crimée, le « pont Poutine » se construit en un temps record », sur La Croix (consulté le ).
  9. « Les États-Unis placent le pont de Crimée sous sanctions », sur Le Courrier de Russie, (consulté le ).
  10. (nl) « Nederlandse bedrijven bouwen mee aan omstreden brug naar de Krim », sur NPO radio, (consulté le ).
  11. (nl) Rob Berends, « 'Hele brug naar Krim valt onder sancties EU' », sur gelderlander.nl, (consulté le ).
  12. « Des firmes néerlandaises soupçonnées d'avoir violé les sanctions européennes contre la Russie », sur Paris Match, (consulté le ).
  13. rbth découverte d'un site antique au pont de Crimée
  14. Agence France Presse, « Poutine inaugure le pont reliant la Crimée à la Russie », sur Le Point, (consulté le ).
  15. « La Russie révèle quand le pont de Crimée sera ouvert à la circulation », sputniknews, 21 mars 2018.
  16. https://fr.sputniknews.com/russie/201912231042645941-poutine-inaugure-la-partie-ferroviaire-du-pont-de-crimee---video/
  17. https://baumannjoelnachshon.wordpress.com/2020/08/29/le-senateur-tsekov-a-apprecie-limportance-de-lautoroute-de-tavrida-pour-le-developpement-de-la-crimee-nouvelles/
  18. https://www.theglobeandmail.com/opinion/article-putins-bridge-over-troubled-waters/
  19. Benoît Vitkine, « Ukraine : emprise russe en mer d’Azov », Le Monde.fr, , p. 12-15 (lire en ligne, consulté le )

Liens externes

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