Planète (revue)

Planète est une revue bimestrielle française éditée entre 1961 et 1971 qui reprenait les différents thèmes abordés dans l'ouvrage de Jacques Bergier et Louis Pauwels, Le Matin des magiciens, et qui se présentait comme l'organe du mouvement du réalisme fantastique.

Pour les articles homonymes, voir Planète (homonymie).

Planète

Les divers ouvrages de la revue Planète

Périodicité bimestrielle
Date de fondation 1961
Date du dernier numéro 1971

ISSN 1250-5374

Histoire

Le succès inattendu et rapide du Matin des Magiciens[1] incite ses auteurs, Jacques Bergier et Louis Pauwels, à créer une revue consacrée entièrement aux thèmes évoqués dans cet ouvrage. Ce sera la revue Planète, dont le slogan était « Rien de ce qui est étrange ne nous est étranger ! ». Après deux années passées dans les locaux exigus de l'éditeur Victor Michon, au 8 rue de Berri à Paris VIIIe, le siège de la revue s'installe dans un immeuble cossu de l'avenue des Champs-Élysées.

Lancée en 1961 (premier numéro en octobre-novembre), la revue Planète contient en moyenne 150 pages et paraît à un rythme bimestriel. Elle est imprimée en noir et blanc dans un format carré (17 x 17 cm) car « destinée aux masses les plus larges » selon Louis Pauwels, qui en explique le concept dans son ouvrage Question de, paru en 1972 immédiatement après la disparition de Planète.

Le premier numéro de Planète, initialement tiré à 5 000 exemplaires, a eu cinq retirages. Le pic des ventes dépasse 100 000 exemplaires par numéro. Les ambitions de la revue, qui rassemble des textes de science-fiction, des articles ésotériques et insolites et des essais d'écrivains, visent plus à un objectif de remue-méninges qu'à empiéter sur les plates-bandes de revues classiques de vulgarisation scientifique, même si un sondage a révélé que 44 % des lecteurs de Planète sont aussi lecteurs du mensuel Science & Vie.

Planète sera édité dans une douzaine de langues étrangères avec des déclinaisons en Europe et en Amérique du Sud (Pianeta, Horizonte, Planeta, Bres, Planet, etc.), ainsi qu'une édition en langue arabe en 1969[2].

La revue s'interrompt, d'abord en août 1968 après 41 numéros, avant de reparaître quelques mois plus tard sous le titre Le Nouveau Planète (23 numéros de à ). Le titre sera définitivement arrêté en 1972, Pauwels souhaitant s'orienter vers d'autres entreprises, avec entre autres le trimestriel Question de... dont le premier numéro paraît en  ; Question de... est repris par Marc de Smedt en 1981. Un éphémère Nouveau Nouveau Planète, ou « Planète grand format », dirigé par Marc de Smedt, paru entre fin 1971 et , sous le titre Planète et en faisant explicitement référence à Louis Pauwels comme fondateur, est abandonné après trois numéros.

Contenu

La revue Planète abordait différents domaines :

Parmi les auteurs-phare apparaissaient Aimé Michel, Rémy Chauvin, George Langelaan, Bernard Heuvelmans, Charles Noel Martin, Jean-Émile Charon, Raymond de Becker, Gabriel Véraldi, François de Closets, Marc Gilbert, Jacques Mousseau (rédacteur en chef, et futur concepteur de l'émission télévisée Temps X), René Alleau, Henri Laborit, Jacques Lecomte et Guy Breton. Plusieurs dessinateurs et peintres de renom y firent leurs classes : Roland Topor, Jean Gourmelin, René Pétillon, Pierre Clayette, Pierre-Yves Trémois, etc. La secrétaire de rédaction était Arlette Peltant.

Controverses

Le succès de la revue divise l'opinion publique des années 1960 : imposture intellectuelle et scientifique pour les uns, révélations inédites pour les autres, elle se distingue par son anticonformisme et ses innovations rédactionnelles et graphiques. Des philosophes, sociologues et écrivains tels Mircea Eliade, Edgar Morin, Odile Passeron, Jean-Bruno Renard, Umberto Eco ou Jean d'Ormesson se penchent sur ce phénomène éditorial dans divers articles et essais[3].

Un succès incontestable de cette revue est d'avoir révélé au très grand public des auteurs comme Jorge Luis Borges, Robert Sheckley, Fredric Brown, Daniel Keyes, Howard Phillips Lovecraft alors que le premier n'était connu que dans un cercle de passionnés de littérature et que les suivants ne l'étaient que des habitués des magazines de science-fiction ou de fantastique.

Le groupe surréaliste, via Robert Benayoun, dénonce la ligne rédactionnelle de la revue.

Planète et ses satellites

La revue a publié à partir de 1963 trente-neuf numéros hors-série d'environ 250 pages dans la collection « Encyclopédie Planète » et seize suppléments, dans la série « Anthologie Planète », qui regroupent des textes d'auteurs sur un sujet donné sous la responsabilité de l'écrivain de science-fiction Jacques Sternberg.

En complément, la rédaction a lancé des éditions à thèmes (« Présence Planète », « Planète Action », « Planète Plus », « Planète Histoire »...), édité une édition œcuménique de la Bible en trois volumes, dans la collection des « Trésors spirituels de l'humanité », et une épopée des civilisations humaines à travers les 16 ouvrages de la série « Métamorphoses de l'humanité ».

Louis Pauwels créa à cette occasion un petit groupe de presse, les éditions Retz, qui publia une revue bimestrielle d'humour et d'érotisme masculine, Plexus, et une revue féminine, Pénéla.

Par l'intermédiaire de François Richaudeau et de Pierre Chapelot, la ligne éditoriale du groupe s'articulait autour des éditions Denoël, avec les déclinaisons des éditions Retz, du Club de la Femme, du Club des Amis du Livre ou du CELT (Culture-Art-Loisirs), perpétuant en quelque sorte l'ébauche culturelle tentée juste après guerre avec Travail et Culture puis La Bibliothèque Mondiale de Victor Michon, Louis Pauwels et ce même François Richaudeau. Aujourd'hui, certains ouvrages des éditions du Rocher peuvent être considérés dans l'esprit des thèmes abordés par les membres de Planète.

L'héritage de Planète

Durant les années 1960, Robert Laffont tente d'imiter le style (et le succès) de Planète avec sa revue Janus, dont les thèmes et le format se rapprochent du modèle original[4], qui est un échec. Planète contenait très peu de publicité, et l'intérieur celle-ci était souvent d'allure austère, noir et blanc oblige, cependant que François Richaudeau assurait un réglage typographique assez novateur[évasif].

Deux revues anglophones ont par la suite reflété une partie de l'« esprit Planète » : Omni et Wired Magazine. Cependant il s'agit de luxueux magazines en couleurs, alors que Planète était en noir et blanc et de format moyen et carré. Marc de Smedt et Patrice Van Eersel, anciens de Planète, imagineront une formule identique pour leur revue Nouvelles Clés. Enfin, la revue Science Frontières, de Jean-Yves Casgha, rédacteur en chef de l'émission Rayons X, se rapproche des précédentes.

Voir aussi

Notes et références

  1. Ventes francophones cumulées : 2 000 000 d'exemplaires
  2. Les éditions néerlandaise et italienne sont toujours produites
  3. Voir la bibliographie
  4. La couverture de Janus était cependant en couleurs

Liens externes

Bibliographie

Principale :

  • Gabriel Veraldi, Planète (bandeau : « Planète revient »), éd. du Rocher, 1996. Livre commémoratif, 25 ans après la disparition de la revue.
  • Politica Hermetica, no 10, 1996, p. 152 à 174 (éd. L'Âge d'Homme). Article du sociologue Jean-Bruno Renard, « Le mouvement Planète : un épisode important de l'histoire culturelle française ».
  • Clotilde Cornut, La revue Planète (1961-1968). Une exploration insolite de l'expérience humaine dans les années soixante, éd. de l'Œil du Sphinx, coll. « Les dossiers du Réalisme Fantastique no 1 », .
  • « La revue Planète », émission radiophonique de France-Culture le 09/09/2006.

Sur le phénomène Planète et ses critiques :

  • Le Masque et la Plume, émission radiophonique du  : critique littéraire du Matin des Magiciens par Luc Estang (INA).
  • Le Courrier Rationaliste, . Article d'Evry Schatzman : « Le Matin des Magiciens, ou le monde à l'envers ».
  • Nouvelle Revue Française, no 98, 1961. Article « Deux magiciens de la persuasion », p. 332-337.
  • Sauve qui doit, le  : tract surréaliste "anti-Planète" de sept pages, signées par Robert Benayoun, Roger Blin, André Breton, André Pieyre de Mandiargues, Charles Estienne, Edouard Jaguer, José Pierre, Jean Schuster, etc. se concluant par ces mots Les robots ne passeront pas !
  • Internationale situationniste, no 7 - p. 46 : Si vous lisez "Planète" à haute voix vous sentirez mauvais de la bouche !
  • Fiction no 104, . Article de Sartene G. : « Réalisme fantastique ou fantastique idéalisme ? (à propos de Planète) ».
  • France-observateur, . Article de François Herbault : « Planète, une revue qui avance à reculons ».
  • Arts et Spectacles, hebdomadaire du 27/02/1963. Article de Jean d'Ormesson : « Voici le temps des mystificateurs ».
  • Arts et Spectacles, hebdomadaire du 24/04/1963. Article de la sociologue Odile Passeron : « Neuf Planète au microscope ». Republié dans Le crépuscule des Magiciens.
  • Arts et Spectacles, hebdomadaire du 24/04/1963. Article d'André Parinaud : « Qui est malhonnête ? » (id.).
  • « La mystique de Planète ». Article de Umberto Eco de 1963, repris dans La guerre du faux, éd. Le Livre de Poche, 1985.
  • Maintenant (Canada), n° XXIX, . Article d'Henri Dallaire : « Louis Pauwels et sa Planète ».
  • Le Petit Écrasons, no 3, 1965. Article de José Pierre : « Les fausses cartes transparentes de Planète, ou l'érotisme des laborantins qui chantent. Avec une petite contribution surréaliste au dossier de la confusion planétaire » (complément tiré à part de la revue La Brèche). Repris dans Le Terrain Vague, éd. Eric Losfeld, 1966.
  • Arts et Spectacle, hebdomadaire du 24/04/1965. Article de Jean Servier : « Les faussaires de la science » (suite aux articles d'André Parinaud, Louis Pauwels et Jean Servier dans Arts et Spectacles du 10/03/1965).
  • Le Monde. Articles d'Edgar Morin, « Planète et anti-Planète », 1er Le phénomène et sa critique »), 2 (« Les thèmes de Planète ») et  Le drapeau planétaire ») 1965.
  • Fiction no 142, . Article de Bruno Wauters : « Faut-il brûler les anthologies Planète ? ».
  • Yves Galifret et al., Le crépuscule des Magiciens. Le réalisme fantastique contre la culture, éd. de l'Union Rationaliste, 1965 (avec Evry Schatzman, Jean-Claude Pecker...).
  • Guy Gauthier, Le lendemain des Magiciens, dans « Europe » n° d'avril-
  • Mircea Eliade, « Modes culturelles et histoire des religions ». Article de 1965, repris lors d'un cours à l'université de Chicago en 1967, et dans Occultisme, sorcellerie et modes culturelles, éd. Gallimard, 1978.
  • Planète, no 35, juillet-. Article de Jean Lignel : « Lecteurs de Planète, qui êtes-vous ? ».
  • L'Unité, hebdomadaire no 184, . Article de Pascal Ory : « Nos ancêtres les crétins » (critique du "Matin des magiciens").
  • Radioscopie de Jacques Chancel, le , consacrée à Louis Pauwels, qui commente alors « l'aventure Planète ».
  • Jacques Mousseau, « Planète 20 ans après », Communication et langages, no 50, 3e-4e trimestre 1981, p. 89-97 (lire en ligne).
  • Problèmes politiques et sociaux, no 450-451, 1982. Article de Jean-Claude Pecker : « Le Débat sur les phénomènes paranormaux », avec extraits de textes de Planète : « La planète des Magiciens », p. 23-30.
  • Michel Winock, Chronique des années soixante, éd. du Seuil, 1987, p. 74 à 77: « Le phénomène Planète ».
  • Elisabeth Vonarburg, étude Retour au Matin des Magiciens, revue Solaris no 109, 1994; rééd. revue Dragon et Microchips no 15, (rubrique "Les Études du Dr Armitage")
  • Pierre Lagrange, « Renaissance d'un ésotérisme occidental (1945-1960) », dans Claudie Voisenat et Pierre Lagrange (dir.) (préf. Daniel Fabre), L'ésotérisme contemporain et ses lecteurs : entre savoirs, croyances et fictions, Paris, Bibliothèque publique d'information, Centre Pompidou, coll. « Études et recherche / Bibliothèque publique d'information », , 407 p. (ISBN 2-84246-092-8, lire en ligne), p. 45-96.
  • Maxime Prévost, « La rédemption par les ovnis : lectures croisées de Vol 714 pour Sydney et de la revue Planète », Études françaises, vol. 46, no 2, , p. 101-117 (DOI 10.7202/044537ar, lire en ligne).
  • Alexandre Moatti, « Science et théories scientifiques au prisme de la revue Planète », Politica Hermetica, L'Âge d'Homme, no 28, , p. 59-69 (lire en ligne).

Curiosités :

  • Les Magiciens démasqués. Santé et prospérité des pseudo-savants, ouvrage de Martin Gardner, 1966, éd. Presses de la Cité: paru initialement antérieurement au mouvement Planète, aux États-Unis (titre original Fads and fallacies in the name of science, Dover Publications, 1957, New York), l'éditeur français devant juger le nouveau titre plus "porteur", en termes de ventes espérées à l'époque.
  • Le retour des Magiciens. Le cri d'alarme d'un scientifique, Remy Chauvin, éd. JMG, 2002: plaidoyer indirect pour le mouvement de pensée Planète, plus de 30 ans après sa disparition.
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