Mirlande Manigat

Mirlande Manigat, née Mirlande Hyppolite le à Miragoâne, est une constitutionnaliste et une femme politique haïtienne, épouse de Leslie Manigat, qui fut brièvement Première dame de la République d'Haïti quand son mari était président du au , avant d'être renversé par les militaires.

Mirlande Manigat

Mirlande Manigat en 2019.
Fonctions
Secrétaire générale du Mouvement patriotique de l'Opposition démocratique
En fonction depuis le
(6 ans, 5 mois et 14 jours)
Présidente du Rassemblement des démocrates nationaux progressistes

(9 ans et 22 jours)
Prédécesseur Leslie Manigat
Successeur Éric Jean Baptiste
Sénatrice de la République d'Haïti

(4 ans, 11 mois et 27 jours)
Élection

(9 ans, 5 mois et 19 jours)
Élection
Réélection
Première dame d'Haïti

(4 mois et 13 jours)
Prédécesseur Gisèle Namphy
Successeur Gisèle Namphy
Biographie
Nom de naissance Mirlande Hyppolite
Date de naissance
Lieu de naissance Miragoâne (Haïti)
Parti politique RDNP (depuis 1979)
MOPOD (depuis 2015)
Conjoint Leslie Manigat
Profession Constitutionnaliste

Élue sénatrice en 1991, elle se présente à l'élection présidentielle de 2010-2011 comme candidate du Rassemblement des démocrates nationaux progressistes (RDNP). Arrivée en tête du premier tour avec 31,37% des voix, devant Michel Martelly, elle est battue au second tour par ce dernier qui remporte largement le scrutin le [1].

Présidente du RDNP de 2006 à 2015, elle est membre d'honneur de la coalition Mouvement patriotique de l'Opposition démocratique (MOPOD) depuis 2015[2]. Le 6 mai 2015, elle se désiste de l'élection présidentielle de 2015 et soutient la candidature de Samuel Madistin.

Jeunesse et études

Fille d’un ancien officier de l’armée d’Haïti qui a fini sa carrière avec le grade de colonel, Mirlande Hyppolite est issue d’une famille de 5 enfants. Elle a débuté ses études classiques à l’Institution Ste-Rose de Lima avant de s'inscrire à l’École normale supérieure d'Haïti. Trois ans plus tard elle part étudier le Droit en France. Diplômée en sciences sociales, Mirlande Hyppolite est titulaire d'un doctorat en science politique à la Sorbonne. Elle poursuit une carrière dans l'enseignement supérieur, notamment comme professeur constitutionnaliste à l'université Simón Bolívar de Caracas à partir de 1978.

Au cours de ces quarante année de carrière universitaire, elle a écrit plusieurs ouvrages[3] : Plaidoyer pour une nouvelle Constitution; Traité de Droit Constitutionnel Haïtien en 2 Volumes; Être femme en Haïti hier et aujourd'hui; Le regard des Constitutions, des Lois et de la société; Manuel de Droit Constitutionnel; Entre les normes et les réalités; Le Parlement haïtien etc.

Mariage

Leslie Manigat lors d'une conférence de presse le 16 juin 1988.

En 1970, elle épouse l'historien haïtien Leslie Manigat. Ce dernier milite pour l'opposition à la Famille Duvalier de l'extérieur et crée en 1979, à Caracas, un nouveau parti politique, le Rassemblement des démocrates nationaux progressistes (RDNP). Ce nouveau mouvement se réclame de la démocratie chrétienne. Ainsi, après le départ de Jean-Claude Duvalier, Manigat se porte candidat aux élections qui devaient avoir lieu le . Il est par ailleurs un contributeur régulier au quotidien Le Nouvelliste.

Première dame

Après la fin du règne des Duvalier, une junte militaire dirigée par le général Henri Namphy prit le pouvoir. Les élections du furent empêchées par l’intervention d’un groupe armé. L’armée organisa en janvier 1988 des élections qui furent boycottées.

Candidat à l'élection présidentielle de 1988, Leslie est élu dès le premier tour et investi le 7 février. Son épouse, Mirlande, devint la nouvelle Première dame. Arrivé au pouvoir, Manigat a limogé puis mis aux arrêts son prédécesseur, le général Henri Namphy, proche des milieux duvaliéristes, pour cause d'insubordination. Cet acte audacieux marqua également la fin de sa présidence. Dans la nuit du 19 au , le président est renversé par un coup d'État organisé par certains membres des Forces armées d'Haïti qui remirent, une nouvelle fois, à Henri Namphy les rênes du pouvoir exécutif. Le couple Manigat s'exila pour ne revenir qu'à la veille des élections de 1990.

Les débuts en politique

De retour d'exil à la veille des élections générales de 1990, Mirlande Manigat fut désignée candidate par son mari pour les élections sénatoriales sous l'étiquette du RDNP. Le 20 janvier 1991, elle est élue sénatrice de la République[4]. Seule représentante de son parti au Sénat, elle est réélue lors des élections générales de 1995. Son mandat s'achève le 9 juillet 2000.

En 2006, pendant la campagne présidentielle de son époux, Mirlande Manigat est directrice en chef de la communication du parti. Malgré l'échec de son mari à la présidence, elle est élue pour un troisième mandat au Sénat[5]. À la suite de cet échec, Leslie Manigat démissionne de la présidence du RDNP, laissant le poste à son épouse élue à l'unanimité par les militants.

Campagne présidentielle de 2010

Mirlande Manigat pendant la campagne présidentielle de 2010.

En raison du tremblement de terre du 12 janvier 2010, l'élection présidentielle a été reportée indéfiniment[6], bien que le 28 novembre ait ensuite été décidé comme date pour la tenue du premier tour. Après le tremblement de terre, l'instabilité dans le pays suscitait des inquiétudes et les élections ont eu lieu dans un contexte de pression internationale sur l'instabilité politique[7]. L'élection a été qualifiée dans les médias de "sismique". Il s'agit de la troisième élection démocratique de l'histoire haïtienne depuis la chute du régime duvaliériste.

La liste des candidats à l'élection présidentielle devait être officialisée le 17 août après que le conseil électoral provisoire de neuf membres ait annoncé les critères d'éligibilité[8]. Cependant, la commission électorale a reporté sa décision au 19 août en raison d'un désaccord sur la loi électorale qui stipule que les candidats doivent détenir un passeport haïtien et avoir cinq années consécutives de résidence en Haïti. Cela empêche ainsi les candidatures de Wyclef Jean et de Leslie Voltaire[9]. L'absence du parti Fanmi Lavalas (FL) était notable en raison de son soutien populaire[10].

Le jour du premier tour de scrutin, Mirlande Manigat et le candidat centriste Michel Martelly, ainsi que la plupart des autres candidats, ont dénoncé les résultats comme invalides à midi, avant même la fin du vote. Une exception notable à cette dénonciation a été pour le candidat d'Unité patriotique, Jude Célestin.

À la suite de manifestations et d'exigences de la part de l'opposition de tenir des élections dans le cadre d'un appel au Parlement pour qu'il puisse prolonger son mandat du 7 février, le président sortant René Préval a publié des décrets ordonnant au conseil électoral provisoire d'organiser l'élection. Certains se sont demandé si Haïti était prêt à tenir des élections après le tremblement de terre qui a laissé plus d'un million de personnes dans des camps de fortune et sans papiers d'identité. Le gouvernement craignait également que les élections ne plongent le pays dans une crise politique en raison d'un manque de transparence et de fraude électorale[11]. Le Canada avait également fait pression sur Haïti pour l'organisation d'élections, comme le stipulait la constitution[12]. Après une visite de la secrétaire d'État des États-Unis Hillary Clinton, Manigat et Martelly ont convenu d'accepter les résultats du premier tour de scrutin.

Hillary Clinton et Mirlande Manigat en 2011.

Lors du premier tour, deux personnes ont été tuées dans un échange de tirs entre des partisans de partis rivaux à Aquin.

Les résultats du premier tour sont annoncés le 3 février 2011 avec un second tour prévu pour le 20 mars. Contrairement aux sondages, Mirlande Manigat s'impose largement en tête du premier tour de scrutin avec 336 878 voix soit 31,37% face aux deux autres favoris, Martelly et Célestin, tous deux à 21%. Finalement c'est Michel Martelly qui se qualifie de justesse au second tour contre Manigat[13].

La campagne pour le deuxième tour de l'élection présidentielle a officiellement commencé le jeudi 17 février. Alors que Mirlande Manigat a discuté de ses projets futurs pour Haïti dans un hôtel avec des journalistes, Martelly est descendu dans les rues de Cap-Haïtien, la deuxième plus grande ville du pays, où lui et ses partisans ont dansé et chanté dans les rues. Martelly est même allé jusqu'à faire campagne à Miami aux États-Unis, auprès des nombreux expatriés haïtiens ayant le droit de vote. Le 17 février, Wyclef Jean a annoncé son soutien à Martelly.

Lors du vote pour le deuxième tour, certains bureaux de vote n'ont pas pu s'ouvrir à temps faute de matériel et de documents nécessaires.

Malgré un fort score lors du premier tour, Manigat perd l'élection face à une victoire écrasante de Martelly qui est élu président avec 67,57% des suffrages exprimés contre 31,74% pour Manigat.

Opposition

Après l'élection de Martelly, Manigat s'engage dans l'opposition face à son adversaire, préparant déjà le terrain pour l'élection présidentielle de 2015. Le , le président Michel Martelly nomme Garry Conille comme Premier ministre[14]. Ce choix est approuvé à l'unanimité à la Chambre par les 89 députés haïtiens le [15] et confirmé le au Sénat par 17 voix sur 29 (3 contre, 9 abstentions)[15]. Il entre en fonction le 18 octobre suivant. Opposé au gouvernement de Conille, Manigat appel à sa démission dans la presse tandis que ses partisans organisent des manifestations. L'opposition remet en cause la constitutionnalité de sa nomination, arguant qu'il n'a pas voté aux élections présidentielles de 2006 et 2011, et qu'il n'a pas résidé assez longtemps sur le territoire haïtien[16]. Le sénateur Jean Charles Moïse l'accuse de posséder les nationalités américaine et italienne, alors que le pays ne reconnait pas la double nationalité[17]. Conille démissionne quatre mois plus tard, le [18], mais reste en fonction jusqu'à l'investiture de son successeur, Laurent Lamothe, le .

Candidature de 2015

En 2015, Manigat intègre son parti dans la coalition Mouvement patriotique de l'Opposition démocratique (MOPOD) et en devient membre d'honneur. Désignée par le mouvement comme candidate à l'élection présidentielle, Manigat tarde à faire une déclaration officielle sur sa candidature.

Le 6 mai 2015, dans une note signée rendue publique, elle annonce : « Je suis obligée, avec regret, de vous faire savoir qu’avec l’approbation des membres du comité exécutif national du parti, je fais le retrait de ma candidature à la présidence »[19]. Quelques jours plus-tard le 15 mai, elle démissionne de son poste de présidente du RDNP laissant la place à l'homme d'affaires Éric Jean Baptiste. Néanmoins, elle conserve le poste de secrétaire générale au sein du MOPOD.

Propositions de gouvernements

Mirlande Manigat en 2017.

Après la fin du mandat de Michel Martelly, le , le président du Sénat Jocelerme Privert est élu président provisoire de la République d'Haïti par le Sénat de la République et la Chambre des députés réunis en Assemblée nationale le suivant au deuxième tour du scrutin[20]. Son mandat est limité à cent vingt jours, selon les termes d’un accord signé quelques heures avant la fin du mandat du président Martelly[21]. Il démissionne dans la foulée de son siège de sénateur et de président du Sénat[21]. Le , il annonce les noms de six candidats au poste de Premier ministre, qui sont Mirlande Manigat, Edgard Leblanc Fils, Fritz Jean, Jacques Sampeur, Joanas Gay et Simon Dieuseul Desras[22].

Mirlande Manigat a été reçue en audience le 16 février par le président Privert. Elle est sortie satisfaite de cette rencontre consacrée tout naturellement à la conjoncture politique. L’ancien candidat à la présidence sous la bannière de la Plateforme JISTIS, Michel André, présent à la rencontre au palais national, a proposé au président provisoire le choix de Mirlande Manigat comme Premier ministre. Ce dernier a demandé à Privert de faire auditer la gestion de l’administration Martelly, la formation d’une commission de vérification des élections, et la signature d’un nouvel accord avec les forces politiques.

Le , Privert nomme finalement Fritz Jean[23] à l'issue d'une consultation conjointe avec le président de la Chambre des députés, Cholzer Chancy, et le vice-président du Sénat de la République, Ronald Larêche.

Le , soit à peine six mois après sa nomination, le premier ministre Jean-Henry Céant, fragilisé comme son prédécesseur par une succession de violences et manifestations, est renversé lors du votre d'une motion de censure par le vote de 103 députés (93 pour le renvoi du premier ministre et de son gouvernement, 13 contre et 6 abstentions). Jean-Henry Céant soutient que son éviction est la conséquence de sa volonté de faire la lumière sur les nombreuses affaires de corruption (notamment le scandale PetroCaribe qui a donné lieu à un rapport de la Cour des Comptes haïtienne). Cette nouvelle crise s'ouvre exactement six mois après un vote de confiance qui avait été accordée au premier ministre par la chambre des députés, c'est-à-dire juste après l'expiration du délai d'interdiction d'une telle motion de défiance (constitution, art 129-6) après un vote de confiance obtenu par un premier ministre[24]. Après l'échec de Céant, Manigat se dit « disponible et disposée » pour le président Jovenel Moïse afin de former un gouvernement de coalition[25].

Notes et références

  1. « Michel Martelly élu président d'Haïti », Libération, 5 avril 2011
  2. « Haïti - Élections : Le MOPOD et Mirlande Manigat veulent tout négocier, y compris la démission du Président Martelly - HaitiLibre.com : Toutes les nouvelles d’Haiti 7/7 », sur HaitiLibre.com (consulté le )
  3. « Mirlande Manigat, l’intellectuelle posée », sur hpnhaiti.com (consulté le )
  4. « Mirlande Manigat, une femme très politique », sur TV5MONDE, (consulté le )
  5. « Mirlande Manigat: une ex-Première dame au seuil de la présidence d'Haïti », sur La Presse, (consulté le )
  6. Patricia Zengerle, « INTERVIEW-Haitian president says Feb. 28 elections postponed », Reuters, (lire en ligne)
  7. « November polls for Haiti - Americas », Al Jazeera English, (consulté le )
  8. Trenton Daniel, « At least 20 candidates file to run in Haiti's presidential elections - Haiti », MiamiHerald.com, (consulté le )
  9. « Haiti presidential list delayed - Americas », Al Jazeera English (consulté le )
  10. « Haiti 2010: Exploiting Disaster 2010 - Haiti » (consulté le )
  11. « Haiti presidential poll concerns - Americas », Al Jazeera English, (consulté le )
  12. The Canadian Press, « CBC News - Montreal - Canada presses for Haitian elections », Cbc.ca, (lire en ligne, consulté le )
  13. « Government-Backed Candidate Out of Haiti's Election », Fox News, (lire en ligne)
  14. Haïti : Conille nommé premier ministre, Le Figaro, 17 septembre 2011.
  15. Rulers
  16. « Garry Conille, l’expérience de l’international au service d’Haïti », sur France24.com,
  17. « Démission du Premier ministre Garry Conille, nouvelle crise politique », sur France24.com,
  18. Haïti : le premier ministre a démissionné, Le Figaro, 24 février 2012
  19. « Mirlande Hyppolite Manigat déclare forfait mais demeure en réserve de la République », sur Le Nouvelliste (consulté le )
  20. AFP, « Haïti: Jocelerme Privert élu président provisoire », Le Figaro, (lire en ligne).
  21. AFP, « Haïti : Jocelerme Privert élu président provisoire », Le Monde, (lire en ligne).
  22. « Haïti - FLASH : 6 candidats au poste de Premier ministre - HaitiLibre.com : Toutes les nouvelles d’Haiti 7/7 », sur HaitiLibre.com (consulté le )
  23. Lefigaro.fr avec Reuters, « Élections/Haïti: nomination d'un premier ministre », sur Le Figaro (consulté le )
  24. « Haïti: le Premier ministre renversé par les députés - Amériques - RFI », sur RFI (consulté le )
  25. « Formation du gouvernement : Mirlande Manigat est disponible et disposée », sur Le Nouvelliste (consulté le )

Lien externe

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