Mirko Beljanski

Mirko Beljanski ( à Turija (Srbobran) - à Paris) est un biologiste français d'origine yougoslave. Il est quelquefois présenté comme un découvreur incompris de remèdes d'origine naturelle contre le cancer et le sida, mais ces découvertes sont controversées, et son épouse a été condamnée pour exercice illégal de la pharmacie à la suite de la commercialisation de ses produits.

Pour les articles homonymes, voir Beljanski.

Biographie

D'origine modeste, Mirko Beljanski naît à Turija. Après ses études à Novi Sad, il combat l'Allemagne nazie au sein des Partisans. Ayant obtenu une bourse de la part du gouvernement yougoslave, il choisit de poursuivre ses études en France où il s'installe en 1945. Il acquiert la nationalité française le [1].

À l'Institut Pasteur (1948-1978)

Il entre dans le service du Pr Machebœuf à l'Institut Pasteur en 1948 mais sa bourse arrive à expiration, l'obligeant à revenir travailler en Yougoslavie. Il rejoint l'Institut pasteur en 1949 après avoir obtenu une bourse de l'OMS. En 1951, il devient Docteur ès sciences et épouse Monique, fille du Pr René Lucas, qui devient sa collaboratrice à l'Institut. La même année il entre au CNRS où il est successivement attaché, maître, directeur de recherches, et enfin directeur de recherches honoraire à sa retraite en 1988[2].

Le Pr Machebœuf étant décédé en 1952, la direction de son service à l'institut Pasteur est reprise par Jacques Monod[3] qui est en désaccord avec lui sur la question de l'ARN, ce qui marque sans doute le début de la méfiance de Beljanski pour les institutions de la recherche biologique[4].

De 1956 à 1958, Beljanski travaille également en association avec le prix Nobel S. Ochoa ; ils publient conjointement plusieurs articles sur la synthèse de protéines in vitro grâce à des fractions de cellules bactériennes[5],[6],[7].

Il obtient en 1960 le premier Prix Charles-Léopold Mayer[8], partagé avec Roger Monier, pour son travail sur le rôle de l’ARN dans le processus de synthèse des protéines.

En 1965, Beljanski est le premier[9] à démontrer qu’un ARN extrait d’un virus de plante (le TYMV - Turnip Yellow Mosaic Virus, ou Virus de la mosaïque du navet) forme un complexe avec les acides aminés[10].[11][réf. incomplète]. Beljanski présente ses travaux sur la transcriptase inverse au 6e Symposium de Biologie Moléculaire de Baltimore en 1972[12] et publie dans les Comptes-rendus de l'Académie des sciences en 1973[13], ainsi que plusieurs articles dans le même sens[14],[15],[16].

Ces travaux diffèrent de la découverte et l’isolement en 1970 par Howard Temin[17] et David Baltimore[18],[19] de la transcriptase inverse (enzyme capable de fabriquer un brin d'ADN complémentaire à partir d'un brin d'ARN, c'est-à-dire dans le sens inverse ARN→ADN ) chez des virus infectieux également impliqués dans l'oncogenèse, du poulet pour Tremin et de la souris pour Baltimore. Tous deux recevront le prix Nobel en 1975 pour cette découverte[20]. H. Temin a reconnu la priorité de Beljanski pour la découverte de la transcriptase inverse chez les bactéries dans une « retrocitation » publiée le 7-12-1989 dans la revue « Nature » volume 342, p. 624[21]. Temin précise que son attention a été attirée par les publications de Beljanski sur la transcriptase inverse chez les bactéries, que ce travail a été confirmé dans plusieurs publications soviétiques avant 1989 et qu’il serait intéressant de voir si les activités décrites sont liées aux « retrons » (famille de rétroéléments découvert chez les bactéries)[22].

Quelques années plus tard Beljanski met en évidence la transcriptase inverse chez les champignons[23] (1977) et les poissons[24] (1988).

En 1974, Mirko Beljanski adresse à J. Monod et à L. Chambon, sous-directeur de l’Institut Pasteur, des projets de recherche afin d'étendre les résultats de ses expériences sur les galles des plantes à la lutte contre les cancers des mammifères. En 1976, il met au point l'Oncotest, qu'il présente, en 1979, comme une méthode rapide, économique et efficace permettant de détecter des tissus carcinogènes en observant la différence dans la structure secondaire d'ADN entre les tissus sains et les tissus cancéreux[25]. L’Oncotest est présenté comme un outil fiable à 100 % pour cibler les agents cancérigènes, capable de distinguer les ADN des cellules cancéreuses de celui des cellules saines et permettant ainsi de tester des molécules susceptibles de détruire un ADN cancéreux. L'Oncotest, trop « sensible », n'a pas été reconnu par la communauté scientifique comme une méthode fiable capable de mettre en évidence l'action d'un cancérogène ou les propriétés anti-cancérigènes d’une molécule.

Il est licencié en 1978 de l’Institut Pasteur : « M. Beljanski est un chercheur travailleur et enthousiaste, mais il a trop tendance à prendre ses rêves pour des réalités. Il manque totalement d'esprit critique, pour ce qui concerne ses propres travaux » écrit un directeur de cet Institut[26].

Chercheur indépendant

Il trouve un poste de recherche à la faculté de Pharmacie de Châtenay-Malabry (Université de Paris XI) jusqu'à sa retraite en 1988, où il travaille avec son épouse Monique et trois autres personnes. Il publie dans des revues internationales comme tout chercheur.

Mirko Beljanski affirme que les propriétés malignes ne sont pas conditionnées par des modifications de la séquence de la chaîne des nucléotides, mais par une rupture sur une certaine distance des liaisons hydrogène reliant les bases azotées complémentaires (appelé structure secondaire par Mirko Beljanski). Cette disparition des « barreaux de l’échelle » bien connue reliant les brins de l’ADN modifierait les propriétés biochimiques de l’ADN ayant pour conséquence d'activer les gènes impliqués dans l’oncogenèse. Mirko Beljanski appelle ce mécanisme de changement de conformation de l’ADN : « la déstabilisation progressive et cumulative de l’ADN cellulaire » et la cellule qui en est victime : « cellule déstabilisée ». Les molécules d'ADN sont effectivement appariées via des liaisons hydrogène entre leurs bases azotées pour former la double hélice d'ADN. Mais la déstabilisation progressive de l’ADN dans l’origine des cancers n’a été retrouvée par aucun chercheur depuis qu’elle a été émise par Beljanski, et son rôle dans l’activation ou la répression de certains gènes reste obscure.

Mirko Beljanski étudie des galles végétales qu’il considère comme des cancers végétaux ayant la même origine que les cancers animaux, c'est-à-dire une déstabilisation de l’ADN. À cet effet, il étudie la bactérie agrobacterium tumefaciens qui a la particularité de produire sur des dicotylédones des tumeurs appelées Crown Gall (galle du collet) à la faveur d’une blessure. Or, ces tumeurs ne sont pas produites par une rupture des liaisons hydrogène reliant les bases azotées de l’ADN, mais par le transfert d’un fragment de l’ADN de la bactérie vers la cellule blessée. L’élément génétique (plasmide Ti) responsable de cette infection avait été identifié par un consortium de chercheurs en 1974 sous la direction de Joseph Schell et Marc Van Montagu, puis le fragment génétique dénommé ADN-T, fut isolé du plasmide en 1977 par une équipe américaine dirigée par E. Nester. Ce fragment d’ADN est exprimé dans le végétal et conduit à une surproduction d’hormones de croissance (auxine, cytokinine) entrainant une multiplication anarchique des cellules végétales.

Après 1988, il continue ses recherches dans un laboratoire installé dans un garage, rue Gaston Picard à Ivry-sur-Seine, le CERBIOL (Centre de recherches biologiques) et mis à sa disposition par Pierre Silvestri, homme d'affaires lyonnais (ingénieur des Mines épris d'occultisme et de parapsychologie) qui s'est pris de passion pour les travaux de Beljanski[27]. C'est dans ce laboratoire qu'il va produire et diffuser ses premiers médicaments sans disposer d'une autorisation de mise sur le marché. Une association de soutien dénommée COBRA (Centre Oncologique et Biologique de Recherche Appliquée) est mise en place, présidée par Pierre Silvestri[28]. L’association COBRA disparaît, pour être remplacée par le CIRIS (centre d’innovation, de recherches et d’informations scientifiques), basé à Saint-Prim dans l'Isère. Lorsque des poursuites sont engagées contre l’association, Pierre Sylvestri démissionne en et se volatilise[28]. Quant à Mirko Beljanski, il continue ses recherches notamment sur la flavopéréirine, un alcaloïde du Pao pereira qui inhibe la transcriptase inverse[29],[30]. De 1990 à 1993 Une étude aurait été réalisée sur des patients à l'hôpital Lapeyronie de Montpellier où figure le nom de Mirko Beljanski dans le groupe de personnes ayant suivi le contrôle ainsi que le laboratoire CERBIOL[31][Information douteuse]Les résultats montreraient selon le Dr Morton Walker (qui consacra un livre aux découvertes de Mirko Beljanski), que le virus ne développerait pas de résistance au traitement, et que tous les indicateurs de sa présence diminueraient de 50 %[32]. Les résultats de cette étude furent publiés en 1994 dans un journal d'oncologie à comité de lecture[33]. Mais cette référence est peu crédible pour les raisons suivantes :

  • l'expérimentation effectuée à Montpellier n'est pas référencée dans PubMed. Dans cette publication on constate que l'expérimentation a été réalisée seulement sur deux patients âgés de 65 et 77 ans souffrant de lymphome malin non-hodgkinien et elle n'a pas été réalisée en double aveugle avec groupe témoin ;
  • le livre de Morton Walker n'est pas un rapport scientifique et il est écrit par un docteur et journaliste qui se proclame lui-même comme étant un « leader mondial spécialisé en médecine holistique ».

Mirko Beljanski met au point le RLB (Remonte Leucocytes Beljanski), à base de fragments particuliers d'ARN qui aurait la particularité de régénérer les plaquettes sanguines et les leucocytes. Ce stimulant leucocytaire breveté par Beljanski (FR 2385399 (A2) ayant pour titre "Polyribonucleotides ayant une activité dans la Genèse des leucocytes et des plaquettes sanguines", 1978-10-27) permettrait de réduire les effets des chimiothérapies[31],[34] sur la lignée hématopoïétique. Le RLB a fait l'objet d'un essai clinique aux États-Unis qui confirmerait ses propriétés[35]. Ce contrôle entrepris notamment par l'University of Illinois at Chicago, a été financé par la société Natural Source International (gérée par la fille de Mirko Beljanski). Cet essai est entaché de biais (pas de groupe témoin, transfusion de sang chez les patients à chaque fois que le niveau de globules rouges tombait en dessous de 3x10-6 cellules/ml, pas de vérification de la présence des ARN dans la circulation sanguine attestant qu'ils auraient passé la barrière intestinale, pas de comparaison avec les facteurs de croissances utilisés couramment en médecine conventionnelle comme le neurogen qui démontrerait sa supériorité…)[35].

Mirko Beljanski meurt d'une leucémie myéloïde aiguë en [36], sans avoir pu utiliser ses propres produits dont la production avait été arrêtée par la justice[réf. souhaitée].

L'accueil de ces travaux

Beljanski a écrit 133 publications scientifiques et deux livres. Son premier ouvrage The Regulation of DNA Replication and Transcription a été republié chez Demos Medical.

Un livre collectif, Cancers : guide pratique d'évaluation de traitement et de surveillance, écrit en 1997 par Jean-Marie Andrieu, Pierre Colonna et Raphaël Lévy, résume l’opinion de la grande majorité des cancérologues sur les travaux de Beljanski. Les auteurs ont écrit dans ce livre : « Les théories de Beljanski et ses applications thérapeutiques restent totalement discutables et la documentation présentée comporte de nombreux points obscurs et non convaincants ». Par exemple, ces théories ne cadrent pas avec l'aneuploïdie très fréquente dans l'oncogénèse, le rôle des facteurs de croissance et la surexpression d'oncogènes à la suite de mutations. En outre, ces ruptures des ponts hydrogène décrites par M. Beljanski ont peu de chance d’être conservées quand l’ADN est répliqué en supposant que ces anomalies ne bloquent pas le cycle cellulaire. Les cellules cancéreuses, comme les cellules saines, utilisent les mêmes processus de réplication de l'ADN sous le contrôle du réplisome. La réplication commence toujours par l’action de l’ADN topoisomérase, puis d’hélicases qui ont pour fonction de briser les ponts hydrogènes afin de séparer les deux brins d’ADN et former un œil de réplication. Cette séparation des brins d’ADN ferait donc disparaître par la même occasion les ruptures accidentelles des ponts hydrogène décrites par M. Beljanski avant la synthèse des brins complémentaires par les ADN-polymérases.

À l'inverse, en 2008, son collègue à l'Institut Pasteur, Luc Montagnier, spécialiste du sida et prix Nobel de physiologie ou médecine, mentionne dans son livre Les Combats de la Vie son estime pour Beljanski, les gros tracas juridiques que celui-ci a subis en France, et l'action thérapeutique du Pao pereira, qu'il attribue à un pouvoir immunostimulant et antioxydant[37].

Plusieurs livres ont été écrits sur les travaux de Mirko Beljanski par sa femme, ou par ses admirateurs, par exemple en 2012 Cancer's Cause, Cancer's Cure: The Truth about Cancer, Its Causes, Cures, and Prevention par Dr Morton Walker[32].

Les produits, les controverses sur ces produits, les condamnations

Beljanski a déposé 11 brevets entre 1976 et 1992 ; après 1991 il cédera 5 d'entre eux à la FERM (Suisse) et à Abraxas Biolab[38] dont il est le principal actionnaire par l’intermédiaire de la société Rosera Ltd ayant son siège social dans un paradis fiscal, l’ile de Jersey. En 1988, il dépose un brevet[39] pour le Bioparyl, une préparation à partir de Gingko biloba[40]. En plus du RLB mentionné plus haut, Beljanski a produit également le BG-8, qui bloquerait la croissance des cellules cancéreuses et tumorales[38] et serait particulièrement actif en synergie avec la chimiothérapie ou la radiothérapie.

Il a commercialisé des produits dont le PB100, à base d'extraits de plantes notamment le Pao pereira, mis au point pour la lutte contre le cancer et le SIDA[41]. En réalité, les premiers travaux sur le Pao Pereira remontent à 1959[42]. Les extraits de Pao pereira sont connus en pharmacologie pour leur utilisation ancienne comme un substitut de la quinine qui, elle-même, était prescrite en Afrique Centrale et Occidentale pour ses propriétés antipaludiques et antipyrétiques[43]. Le principe actif de la quinine appartient à la famille des intercalants qui ont la propriété d’interférer avec la double hélice d’ADN au niveau de deux bases complémentaires : la cytosine et la guanine, provoquant l’arrêt du cycle cellulaire[44]. Ces alcaloïdes font partie des centaines de milliers de substances provenant du monde végétal connues pour leurs propriétés antinéoplasiques et abandonnées en cancérologie en raison de leur trop grande toxicité et/ou de leur efficacité insuffisante... Un dérivé de la flavopéréine du pao pereira (dihydroflavopereirine) et la sempervirine (expérimentée par Mirko Beljanski) ont fait l’objet en 1986 d’un contrôle expérimental publié dans les Annales pharmaceutiques françaises montrant que dans certaines conditions expérimentales, un certain degré antimitotique a été démontré lié à la structure moléculaire ; donc, rien d'extraordinaire pour ces alcaloïdes qui ne se sont pas montrés supérieurs aux traitements anticancéreux conventionnels[45],[46].

En 1994, François Mitterrand, président de la République française, très affaibli par son cancer de la prostate et son traitement, commence à prendre du PB-100. Les produits Beljanski sont ainsi davantage connus du grand public, en particulier par des articles qui mettent en avant les nombreux remèdes miracles utilisés sans résultat par le président[47],[48].

L'absence d'autorisation de mise sur le marché (AMM) des produits Beljanski quand ils étaient fabriqués en France, a suscité plusieurs procès pour exercice illégal de la pharmacie[49]. La demande d’AMM a été rejetée par les autorités sanitaires françaises en 1995, le dossier étant incomplet, faute de présentation d'essais cliniques dans les normes précisant les bénéfices et les risques.

Sur dénonciation par lettre anonyme, le à 6 h, le GIGN intervient pour perquisitionner à Saint-Prim en Isère où Mirko Beljanski poursuit ses recherches, un lieu qui abrite aussi différentes structures de soutien comme le COBRA (Centre oncologique et biologique de recherche appliquée) et le CERBIOL. Mirko Beljanski et plusieurs de ses collaborateurs sont arrêtés puis placés en garde à vue, dans le cadre d'une enquête diligentée par un juge de Créteil et ramenés à Paris où Monique Beljanski subit aussi une perquisition à leur domicile. Une soixantaine de perquisitions et saisies se font dans toute la France au domicile de malades ; certains, même âgés, sont interrogés au commissariat[50].

Cette enquête se termine par un jugement en première instance dans lequel Monique Beljanski, sa femme sera condamnée à une forte amende pour exercice illégal de la pharmacie. Plusieurs chefs d'inculpation seront retenus contre les prévenus : le jugement de première instance rendu le par la 17e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Créteil a condamné une quinzaine de personnes pour exercice illégal de la pharmacie, absence d’autorisation d’un établissement de fabrication de médicaments, absence d’autorisation de mise sur le marché d’un produit présenté comme médicament, publicité illégale de médicaments, trompeuse ou de nature à porter atteinte à la protection de la santé publique, publicité illégale pour un médicament à usage humain non autorisé, non enregistré ou non conforme à l’autorisation de mise sur le marché, publicité auprès du public pour un médicament à usage humain sans visa de publicité, tromperie sur une marchandise entraînant un danger pour la santé de l’homme, et complicité de ces délits[51].

Selon un rapport de l'agence nationale de recherche sur le SIDA du , celui-ci serait même inefficace et dangereux[52]. L'AMM n'est toujours pas accordée.

Les produits de Mirko Beljanski sont désormais commercialisés par la société Natural Source International Ltd implantée à New York et dirigée par sa fille, Sylvie Beljanski. Ils sont présentés comme des compléments alimentaires et ils n'ont pas été évalués par la FDA et conformément à la loi ont fait l'objet d'un notification à la FDA. Cet organisme de contrôle n'a pas pour vocation d'effectuer des tests mais elle a le pouvoir de rendre un médicament ou un complément alimentaire commercialisable aux États-Unis. Les propriétés médicinales d'un complément alimentaire doivent être appuyées par une documentation scientifique reconnue par des instances compétentes comme l'académie des sciences et les supports marketing à destination du marché Americain doivent doivent porter la mention qu'il n'est pas destiné à diagnostiquer, traiter, guérir ou prévenir une maladie quelconque, et c'est le cas des produits de Mirko Beljanski vendus sur le site internet de Natural Source International Ltd dans sa version américaine, mais non présent dans la version française.

Le jugement de la cour d'appel de Paris, rendu le , a condamné plusieurs prévenus, notamment Monique Beljanski, à des amendes pour exercice illégal de la pharmacie[53]. En revanche, la Cour européenne des droits de l'homme à Strasbourg a rendu un arrêt en confirmé définitivement en , condamnant l’État français pour la durée excessive de la procédure judiciaire, mais ne se prononçant pas sur le fond du dossier[54],[55].

Enfin, l’Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé de la Belgique, a rappelé, dans une note du , les raisons d’un « arrêté royal portant interdiction de la délivrance des médicaments à base de certaines plantes y compris le “Pau Pereira” »[56]. Il est précisé dans ce document qu’il existe différentes espèces de plantes dénommées Pau Pereira ou Pao Pereira dont certaines apocynacées, et parmi eux le Gerssospermum laeve utilisé par Mirko Beljanski dans ses préparations pharmaceutiques. Or les apocynacées sont des plantes susceptibles de contenir des alcaloïdes pyrrolizidiniques connus pour leur propriétés génotoxiques et mutagènes ; ils sont surtout inducteurs reconnus de tumeurs hépatiques.

Cette note précise également :

  • « D’autre part, certaines des plantes précitées contiennent des alcaloïdes qui, par insertion au niveau de l’ADN des cellules, peuvent avoir des effets tératogènes ou mutagènes ;
  • Il s’ensuit que l’utilisation de « Pau pereira » présente un risque pour les patients, en particulier pour les femmes en âge de procréer ;
  • Il n’existe en outre pas d’extraits de plantes, dénommées « Pau pereira », qui soient suffisamment caractérisés en ce qui concerne la préparation et la composition ;
  • Vu le risque de confusion entre les différentes plantes précitées, il est actuellement impossible de garantir la qualité et la sécurité des matières premières et préparations qui contiennent des extraits de plantes dénommées « Pau pereira » ;
  • La délivrance de « Pau pereira » sous forme de matière première ou de préparation magistrale ou officinale contenant du « Pau pereira », est interdite. » (en gras dans la note)

Des publications américaines[57], confirment l'effet anti-cancer du Pao pereira et du Rauwolfia vomitoria. Toutefois, ces publications sont relatives à des essais in vitro et in vivo. Ils ne sont donc pas suffisamment probants faute d’avoir été confirmés par des essais cliniques destinés à établir les bénéfices/risques. Ces contrôles sont indispensables pour déterminer la dose d’efficacité optimale chez l’homme, l’inventaire des risques toxicologiques[58], et si l’effet synergique constaté lors de ces essais où ont été introduits d’autres antinéoplasiques comme le Gem (gemcitabine), sont supérieurs aux protocoles déjà utilisés en pratique clinique courante. Ces résultats ne sauraient justifier pour les mêmes raisons, leur emploi dans certaines préparations en vente libre et dont le risque de toxicité est rappelé, le , dans la note de l’Agence fédérale belge des médicaments et des produits de santé.

Une nouvelle étude écrite par les professeurs Jun Yu, Jeanne Drisko, Qi Chen, Inhibition of pancreatic cancer and potentiation of gemcitabine effects by the extract of Pao Pereira[59] parait en , confirmant l'action thérapeutique du Pao Pereira combiné au Gem dans le cancer du pancréas.

Notes et références

  1. Mirko Beljanski – Chercheur “maudit”.
  2. Les apprentis sorciers du sida, L'Express.
  3. Beljanski, la reconnaissance.
  4. Nicolas Dodier, Leçons politiques de l'épidémie de sida, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales,, , p. 144.
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  6. (en) Beljanski M, Ochoa S. « Protein biosynthesis by a cell-free bacterial system » IVe Congrès Intern. Biochim. Vienne, 1958, p. 49 - Résumés des communications.
  7. (en) Beljanski M, Ochoa S. « Protein bio-synthesis by a cell-free bacterial system. II-Further studies on the amino acid incorporation enzyme » Proc. Nat. Acad. Sci. USA 1958;44(12):1157-61. PMID 16590327
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  44. (en) Juan Aymami, « The antimalarial and cytotoxic drug cryptolepine intercalates into DNA at cytosine-cytosine sites - PubMed », Nature structural biology, vol. 9, no 1, , p. 57–60 (ISSN 1072-8368, PMID 11731803, DOI 10.1038/nsb729, lire en ligne, consulté le ).
  45. http://hdl.handle.net/2268/41371
  46. dihydroflavopereirine and sempervirine (β-carbolinium alkaloid) on cancer cells in culture. Ann Pharm Fr. 1985;43:83–8
  47. Pégard et Meeus 2000.
  48. Guichard 1996.
  49. Un premier procès aura lieu en 2001. Entre-temps, la France sera condamnée par la Cour européenne des droits de l'Homme (Requête no 44070/98) pour la durée excessive de la procédure judiciaire, mais ne se prononcera pas sur le reste du dossier.
  50. Nexus, janvier-février 2015
  51. « Contre Beljanski, pour les malades »
  52. Beljanski c/ France, Cour européenne des droits de l'homme, Requête no 44070/98, 7 février 2002
  53. Le Monde 2001.
  54. « AFFAIRE BELJANSKI c. FRANCE », sur le site de la Cour européenne des droits de l'homme
  55. Le Monde 2002.
  56. « AVIS RELATIF À : l’ «Arrêté royal portant interdiction de la délivrance des médicaments à base de certaines plantes, y inclus le Pau pereira» »
  57. « Anti-prostate cancer activity of B-carboline alkaloid enriched extract for Rauwolfia vomitoria » (International Journal of Oncology 29:1065-1073 2006) ou « B-Carboline Alkaloid-Enriched Extract from the Amazonian Rain Forest Tree Pao Pereira suppresses Prostate Cancer Cells » Journal of Society Integrative Oncology 7 (2) 59-65 2009
  58. http://www.leem.org/essais-cliniques-pourquoi-ils-sont-indispensables
  59. (en) étude subventionnée par les laboratoires Beljanski Inhibition of pancreatic cancer and potentiation of gemcitabine effects by the extract of Pao Pereira

Voir aussi

Ouvrages

  • Jacques Lebeau, L'affaire Beljanski : l'argent du cancer et du sida, Rocher, 1998
  • (en) Dr Morton Walker, Cancer's Cause, Cancer's Cure: The Truth About Cancer, Its Causes, Cures, and Prevention, Hugo House Publishers, 2012.
  • Monique et Mirko Beljanski, La Santé confisquée, Paris, G. Trédaniel, , 299 p. (ISBN 2-84445-487-9, OCLC 417579789, notice BnF no FRBNF39121689)
  • Pierre Lance, Savants maudits, chercheurs exclus, vol. 1, Paris, G. Trédaniel, coll. « Survivants illégaux, guérisons interdites », , 359 p. (ISBN 2-84445-457-7, OCLC 492810978, notice BnF no FRBNF37709392)
  • (en) Jean-Marie Abgrall, Healing Or Stealing?: Medical Charlatans in the New Age, Algora Publishing, , 136– p. (ISBN 978-1-892941-28-2, lire en ligne).

Articles

  • Annie Kouchner, « Les apprentis sorciers du sida. », L'Express, (lire en ligne).
  • Anne Jeanblanc et Sophie Coignard, « L'Etrange cas du professeur Beljanski . », Le Point, (lire en ligne).
  • Marie-Thérèse Guichard et Sophie Coignard, « 14 ans d'intrigues à l'Élysée. », Le Point, (lire en ligne).
  • Marie-Thérèse Guichard, « Beljanski sur ordonnance. », Le Point, (lire en ligne).
  • Rédaction Le Monde, « Le professeur Mirko Beljanski. », Le Monde, (lire en ligne).
  • Catherine Pégard et Carl Meeus, « Mitterrand et ses magiciens . », Le Point, (lire en ligne).
  • Rédaction Le Monde, « Justice : Monique Beljanski a été condamnée pour « exercice illégal de la pharmacie ». », Le Monde, (lire en ligne).
  • Rédaction Le Monde, « Justice : la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France pour la durée excessive de la procédure judiciaire de l'affaire Beljanski », Le Monde, (lire en ligne).
  • Dominique Vialard, « Beljanski : On a tout fait pour que vous ayez peur », Alternative santé, (lire en ligne).

Articles connexes

Liens externes

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