Michel Pinçon

Michel Pinçon, né le à Lonny dans les Ardennes, est un sociologue français, ancien directeur de recherche au CNRS rattaché à l'Institut de recherche sur les sociétés contemporaines (IRESCO) de l'université Paris VIII.

Pour les articles homonymes, voir Pinçon.

L'essentiel de son œuvre, écrit en collaboration avec sa femme, Monique Pinçon-Charlot, est consacré à l'étude de la haute bourgeoisie et des élites sociales.

Biographie

Michel Pinçon naît le [1],[2] dans la commune de Lonny (Ardennes)[3], dans une famille d'ouvriers[4]. Il se marie en 1967, avec une étudiante en sociologie, Monique Charlot ; le couple a un fils[4]. Le mariage permet à son épouse de le suivre pendant la période de service national en coopération, au Maroc, où ils enseignent le français, tirant de cette expérience un mémoire supervisé par Jean-Claude Passeron. À leur retour, ils terminent leur formation à l'université libre de Vincennes. Ils ont ensuite la possibilité d'entrer au CNRS. Lui travaille sur le monde ouvrier, son épouse sur la ségrégation urbaine[5].

Un de ses premiers ouvrages, Désarrois ouvriers, familles de métallurgistes dans les mutations industrielles et sociales, est consacré aux évolutions de l'industrie métallurgique dans la vallée de la Meuse et à leurs conséquences sociales. Les travaux et ouvrages suivants sont généralement l'œuvre du couple. Ils s'intéressent notamment aux normes sociales, aux dynasties, bourgeoises ou nobles, aux nouveaux entrants dans le monde de la richesse, ainsi qu'aux loisirs et aux us et coutumes des familles fortunées. Ils arrivent à pénétrer ce milieu à partir de 1986 grâce à Paul Rendu (directeur de leur laboratoire, le Centre de sociologie urbaine), lui-même issu de cette classe[4]. Une synthèse de leurs travaux a été publiée sous le titre Sociologie de la bourgeoisie. À travers ces différents éclairages, leur ambition est de construire une anthropologie des privilégiés de la société française contemporaine[6],[3],[7],[8],[9].

Retraités en 2007, ils publient depuis des ouvrages plus engagés – étant « libérés de leur neutralité scientifique » – et qui sont des succès en matière de ventes[4].

Engagement politique

En 2011, il soutient publiquement Jean-Luc Mélenchon candidat du Front de gauche à l'élection présidentielle de 2012[10],[11]. Comme son épouse, il prend par la suite ses distances, « ayant compris que "c’est un nouveau Mitterrand" »[4].

Critiques

Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon, en 2019.

Le couple Pinçon-Charlot a fait l'objet de critiques quant à la qualité scientifique de ses travaux.

Dans l’article qu’il signe pour le magazine Sciences Humaines, Nicolas Walzer (Université de La Réunion) soutient que Gérald Bronner (Université Paris-Diderot) et Etienne Géhin (Université de Nancy II), dans leur livre Le danger sociologique, considéreraient le couple Pinçon-Charlot comme faisant partie de ces sociologues qui masquent un militantisme politique derrière des travaux prétendument scientifiques (sans que leur noms soient formellement cités dans l’ouvrage en question) [12]. Par ailleurs, Julien Damon (professeur à l'IEP de Paris), dans Le Point, estime qu'« en faisant fi de toute méthodologie, le couple de sociologues porte atteinte à la discipline ». Il juge leurs travaux « frauduleux »[13].

Dans un entretien pour Atlantico, Nicolas Lecaussin (directeur de l'Institut de Recherches Economiques et Fiscales) affirme qu'« il est absurde de considérer comme les Pinçon-Charlot que les riches font le malheur des pauvres » et que « leur analyse est faite en fonction de leurs croyances et non pas en fonction des réalités ». Il considère que les Pinçon-Charlot éprouvent une haine injustifiée pour les riches : « Pour ces auteurs, le riche est un délinquant en puissance ! Faut-il donc rester pauvre ? ». Pour Lecaussin, les Pinçon-Charlot accusent les riches de tous les maux et omettent de mentionner leur contribution au bien commun : « en France, en 2011, les 30 % des foyers déclarant les plus hauts revenus ont réglé 87 % de l’impôt sur le revenu avant application des crédits et réductions divers et 95 % de l’impôt net, de leur côté les 10 % des plus riches ont payé environ 70 % du total de l’impôt sur le revenu »[14].

Sur France 2, Natacha Polony tance Monique Pinçon-Charlot à propos de son livre La violence des riches. Selon Polony, les termes de « riches » et « dominants » ne sont jamais clairement explicités et définis ce qui nuit à la qualité de l'analyse. Par ailleurs, Polony rappelle que le capital, et non seulement la valeur travail, contribue également à la production de la richesse, contrairement à ce qu'affirme Pinçon-Charlot. Enfin, la journaliste estime que les analyses du livre tendent assez facilement à la caricature sociale et à l'exagération[15]. De son côté et à la suite, le chroniqueur Aymeric Caron prend pourtant le contre-pied de sa consœur en qualifiant sa posture critique de « caricaturale »[16]. Finalement, en conclusion de cet entretien avec la sociologue, et sous les applaudissements du public à l’endroit de Monique Pinçon-Charlot, Laurent Ruquier recommande la lecture de ce livre « instructif »[16].

Les Echos reproche aux Pinçon-Charlot une vision caricaturale de la société et une critique simpliste des riches : « Deux célèbres sociologues retraités du CNRS combinent allègrement sabir sociologisant et convictions militantes pour attiser une certaine richophobie ambiante. [...] On a le droit de ne pas aimer les riches. Encore faudrait-il un minimum de rigueur et limiter l'invective. »[17].

Le Monde critique les Pinçon-Charlot pour l'absence de rigueur scientifique dans leur ouvrage Le Président des ultra-riches : « les Pinçon-Charlot croient observer l’assurance imperturbable et le goût de l’entre-soi d’une bourgeoisie coupée du reste de la société et s’efforçant de maintenir étanche cette frontière invisible. La thèse en vaut une autre. Mais de quelle scientificité peut-elle se réclamer quand, face à la réalité sociale, ses défenseurs n’emploient aucune procédure d’investigation, et qu’au bout du compte ils l’observent en badauds ? ». Leurs travaux ne peuvent ainsi en aucun cas être qualifiés de travaux sociologiques honnêtes : « ils ne cessent de prétendre les étayer « par des moyens sociologiques », ce qui est inexact, et que l’intense promotion médiatique du livre se fait au nom de cette supposée expertise, censée s’imposer, par un argument d’autorité, à la rationalité du lecteur, dont on ne sollicite en fait que les passions politiques. Monique Pinçon-Charlot, soutenue par le Parti communiste, a été candidate à la députation en 2017 et cela, en revanche, n’est pas revendiqué. C’est d’ailleurs avec la même honnêteté flottante que les avis de l’économiste Liêm Hoang-Ngoc sont utilisés tout au long du livre pour garantir la rigueur de l’analyse des réformes macroniennes, sans qu’il soit jamais précisé qu’il a été, lui aussi, candidat aux législatives, sous les couleurs de La France insoumise. »[18].

Libération soulève, en , que les Pinçon-Charlot commettent une erreur grossière et confondent le taux marginal d'imposition avec le taux effectif d'imposition, ce qui leur permet d'affirmer à tort : « le plus mal payé des contribuables paie plus en impôts sur le revenu que le plus riche des actionnaires sur chaque euro de dividendes perçus »[19].

Ouvrages

  • Désarrois ouvriers, familles de métallurgistes dans les mutations industrielles et sociales, Éditions l'Harmattan, 1987 (ISBN 2-85802-807-9)

En collaboration avec Monique Pinçon-Charlot :

Radio

Michel Pinçon a été invité à plusieurs reprises sur la radio France Inter[21].

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Notice d'autorité personne sur le site du catalogue général de la BnF
  2. « Michel et Monique Pinçon », sur www.janinetissot.fdaf.org (consulté le )
  3. Philippe Mellet, « L'Ardennais qui épingle «le président des riches» », Le Huffington Post, 2010 = (lire en ligne)
  4. Frantz Durupt, « Michel et Monique Pinçon-Charlot, leur part du Gotha », liberation.fr, 21 septembre 2018.
  5. Pascale Nivelle, « Chez ces gens-là », Libération (journal), (lire en ligne)
  6. « Le Président des riches, enquête sur l'oligarchie dans la France de Nicolas Sarkozy », France Inter, (lire en ligne)
  7. Yves Michaud, « Les Pinçon-Charlot », Libération, (lire en ligne)
  8. N. D., « Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon. Les riches estiment qu’ils ont tous les droits », L'Humanité, (lire en ligne)
  9. Gilles Ferréol, Sociologie : Cours, méthodes, applications, Éditions Bréal, , 399 p. (lire en ligne), p. 166, 180, 272-284
  10. Mina Kaci, « Ils et elles votent Front de gauche », L'Humanité, (lire en ligne)
  11. Violaine de Montclos, « Ils sont contre les riches, tout contre », Le Point,
  12. Nicolas Walzer, « La sociologie est-elle en danger ? », sur Sciences Humaines, (consulté le )
  13. Julien Damon, « Julien Damon - Pinçon-Charlot, exercice frauduleux de la sociologie », sur Le Point, (consulté le )
  14. « Pourquoi il est absurde de considérer comme les Pinçon-Charlot que les riches font le malheur des pauvres », sur Atlantico.fr, (consulté le )
  15. « Monique Pinçon-Charlot », On n'est pas couché, (lire en ligne)
  16. On n'est pas couché - Monique Pinçon-Charlot [Divertissement], Serge Khalfon; Richard Valverde; Jean-Jacques Amsellem; Nicolas Druet, dans ONPC sur France 2 () 75907 Paris cedex 15, France : Tout sur l'écran et RUQ Productions. Consulté le . La scène se produit à 20:55 puis 22:46.
  17. « La richophobie en bande dessinée », sur Les Echos, (consulté le )
  18. Florent Georgesco, « Les Pinçon-Charlot, ex-sociologues », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
  19. Luc Peillon, « Le plus mal payé des contribuables paie-t-il plus d'impôt sur le revenu que le plus riche des actionnaires? », sur Libération.fr, (consulté le )
  20. Luc Arrondel et Cyril Grange, « Notice bibliographique de « Grandes Fortunes » », sur persee.fr, (consulté le )
  21. Passages de Michel Pinçon à France Inter, France Inter
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