Michel Gugenheim

Michel Gugenheim, né en 1950 à Paris, est un rabbin français. Rabbin de la synagogue Michkenot Israël depuis 1980 et directeur du Séminaire israélite de France (SIF) de 1992 à 2012, il est élu grand-rabbin de Paris, le . Le , il est désigné avec le rabbin Olivier Kaufmann, son successeur au SIF, pour assurer l'intérim du grand-rabbin de France, à la suite de la démission forcée de Gilles Bernheim et dans l'attente d'une nouvelle élection, fixée au , remportée par Haïm Korsia.

Pour les articles homonymes, voir Gugenheim.

Biographie

Michel Gugenheim, né en 1950, à Paris, est un des six enfants du grand-rabbin Ernest Gugenheim et de Claude-Annie Dalsace (décédée le [1] en Israël), pédagogue, directrice de la revue pédagogique juive HaMoré[2],[3],[4]. Il descend d'une longue lignée de rabbins depuis Samuel Sanvil Weil, rabbin de Haute-Alsace de 1711 à 1754[5], incluant son grand-père, le grand rabbin Max Gugenheim et son arrière-grand-père, le grand-rabbin Isaac Gugenheim[6]. Il grandit rue Vauquelin, dans le 5e arrondissement de Paris au Séminaire israélite de France, où son père enseigne et où la famille réside. Ce dernier est directeur du SIF en 1977, Mais il est alors atteint d'une tumeur du cerveau, dont il ne se remet pas.

Michel Gugenheim étudie à l'École Yabné où son père enseigne. Après l’obtention de son baccalauréat, il entreprend des études talmudiques dans des yechivot israéliennes. Il étudie à la yechiva de Beer Yaakov et à celle de Brisk, et s’attache à de prestigieux rabbins, entre autres le rabbin Shlomo Wolbe, le rabbin Moshe Shmuel Shapiro et le rabbin Yitzchok Hutner.

En 1977, il revient à Paris pour donner les cours de Talmud au SIF que son père malade ne peut plus assurer. Après le décès de celui-ci, en , il y poursuit son enseignement et passe les examens de sortie par dérogation sans avoir suivi les études du Séminaire Israélite de France. Il entreprend également des études universitaires, spécialisant ses recherches sur la Halakha et la bioéthique.

Depuis les années 1980, il est rabbin de la synagogue Michkenot Israël, dans le 19e arrondissement parisien. Il devient directeur du SIF en 1992, poste qu'il occupe jusqu'à son élection comme Grand-rabbin de Paris, en 2012.

Michel Gugenheim est membre consultant au Comité consultatif national d'éthique de 2002 à 2006[7] et a été fait chevalier de la Légion d'honneur[8].

Il publie en 2009 Et tu marcheras dans ses voies, un ouvrage sur l'éthique juive[9].

Le , il est élu grand-rabbin de Paris[10].

Pour lui succéder au SIF, Gilles Bernheim, grand-rabbin de France, et Joël Mergui, président du Consistoire nomment le rabbin Olivier Kaufmann, le .

Du au , il assure avec le rabbin Olivier Kaufmann l'intérim du grand-rabbin de France, à la suite de la démission forcée de Gilles Bernheim.

Le , il s'indigne des défilés avec des banderoles antisémites à Paris, en concluant « c'est un tabou qui tombe »[11].

La bioéthique

Il participe aux débats en 2005 sur la loi de bioéthique, dite Loi Leonetti.

Sur l'euthanasie, il souligne que « La Torah compte 365 interdits dont 362 peuvent être l’objet de transgressions quand les circonstances et le respect de la vie l’exigent. L’interdit de tuer, étendu aux atteintes indirectes à la vie ne souffre pas d’exception, sauf le fait justificatif de la légitime défense. La souffrance ne constitue pas une exception. » Cependant il refuse l’acharnement thérapeutique : « le refus de l’acharnement thérapeutique, en lui-même excusable. Si la vie peut être prolongée, elle ne doit pas l’être au prix d’une obstination déraisonnable »[12].

Il approuve la recherche sur les embryons surnuméraires[13],[14]

Il approuve les procédés de procréation médicalement assistée : « La maîtrise de la procréation de l'homme ne va pas à l'encontre de la foi, car toutes les techniques de procréation existant aujourd'hui utilisent la nature[15],[16]. »

Élu grand-rabbin de Paris

Le ont lieu les élections pour le grand-rabbinat de Paris. Michel Gugenheim est élu au troisième tour.

Il bénéficie du soutien de Joël Mergui.

Au premier tour Michel Gugenheim reçoit 24 voix, le rabbin Chalom Lellouche 9 voix, le rabbin Alain Sénior 5 voix et le rabbin Raphaël Banon 4 voix.

Le rabbin Banon se retire.

Au deuxième tour Michel Gugenheim ne gagne qu'une voix pour un total de 25, Chalom Lellouche ne progresse pas avec 9 voix et le rabbin Sénior reçoit 3 voix de plus avec 8 voix.

Au troisième tour, Michel Gugenheim reçoit les 8 voix de Sénior et Lellouche ne progresse pas avec toujours 9 voix.

Gugenheim est élu avec 33 voix sur 42 voix, avec 78,57 % des voix contre 21,42 % pour Lellouche.

Michel Gugenheim élu pour 7 ans déclare ne pas briguer un second mandat[17].

Il est réélu le pour 7 ans de plus[18].

L'affaire Gilles Bernheim et ses conséquences

Ni Michel Gugenheim, ni Joël Mergui, président du Consistoire central, ne soutiennent Gilles Bernheim dans l'affaire qui mène à sa démission forcée[19].

L'égalité homme-femme dans le judaïsme

Les rapports en Homme et Femme dans le judaïsme sont sujets de débats entre les différentes mouvances du judaïsme français contemporain.

Le prédécesseur de Michel Gugenheim, Gilles Bernheim et sa femme Joëlle Bernheim, très impliquée dans l'égalité entre hommes et femmes, veulent s'attaquer à ce problème[20]. Il est pour cela vivement contesté par la partie ultra conservatrice du judaïsme[21].

L'équipe de direction actuelle, principalement Michel Gugenheim qui cumule trois postes importants, est considérée comme plus conservatrice voire « réactionnaire » que ses prédécesseurs[22]. Cette nouvelle direction n'a pas renouvelé « la journée des agounot » instaurée en 2012 par Gilles Bernheim[23].

Dans les années 2000, le Conseil des rabbins européens invite les rabbinats européens à adopter un accord prénuptial standardisé ainsi que les enjoignant à refuser tout service religieux aux maris récalcitrants. Michel Gugenheim refuse de relayer cette résolution à l’échelle locale[24].

Certains le taxent de misogynie : Il s'oppose, par exemple, à la célébration publique des bat-mitsvot des jeunes filles dans les synagogues du consistoire[25] car à partir de 3 ans, elles ne doivent plus être entendues de chanter car la voix féminine correspond une « erva » (nudité)[26]. Il répond « Cela me scandalise, car c’est tellement faux. C’est de la désinformation dans le seul but de nuire à la Torah et à ceux qui la représentent. Ceux qui me connaissent savent quelle haute opinion j’ai des femmes. Ceux qui me lisent savent l’importance que les femmes ou la femme occupent dans mes articles et ouvrages. Je mets cela sur le compte de la malveillance de certains qui ne me connaissent pas vraiment[27]. » Il s'oppose également à la lecture de la Torah par des femmes dans un minian de femmes[28].

En 2008, Michel Gugenheim préface un guide de l'association Wizo où il traite le cas des refus de guett par le mari. Ce guide explique, de manière didactique, comment le Beth din procède pour conduire l'ex-époux, divorcé civilement, à accepter de donner le guett[29].

Concernant l'homosexualité masculine, il écrit : « La personne qui commet le péché de l'homosexualité masculine ne le fait que pour irriter Dieu »[30],[31]. Il conçoit l'homosexualité comme un mauvais penchant (Yetser hara), qui n'a rien à voir avec le concept d'orientation sexuelle et contre lequel l'individu doit lutter[32].

L'affaire du chantage au divorce religieux

Le rabbin Moché Lewin, directeur exécutif de la Conférence des rabbins européens, propose d'« instaurer les mesures préconisées au Congrès de Berlin en , telles que la rédaction d'un contrat prénuptial ou des sanctions religieuses contre les maris récalcitrants. Mais le rabbin Gugenheim s’y oppose »[33]. Ces solutions sont pourtant appliquées au Royaume-Uni, en Israël, au Canada[34].

Au printemps 2014 éclate en France une affaire concernant un divorce religieux. Dans la tradition juive, le divorce est soumis à l'autorisation du mari qui doit par un acte écrit, le guett, permettre le divorce. En l'absence de ce document, la femme, dite agounah, ne peut se remarier religieusement.

Le rabbin Michel Gugenheim est accusé d'avoir, avec le groupe de rabbins chargés du traitement des divorces au consistoire, servi d'intermédiaire à un mari demandant 90 000 euros (avec une promesse de reçu CERFA) à sa femme pour donner le guett[35]. Dans un enregistrement effectué à son insu et rendu public, il demande à cette femme de revenir sur son témoignage effectué lors du divorce civil[35].

Ces faits causent un émoi dans la communauté juive française et la société française en général[36], le rabbin Gugenheim dénonce alors « une manipulation grossière visant à nuire à l'institution consistoriale »[37].

Cette affaire secoue les instances religieuses juives, un an après la démission forcée du grand rabbin Gilles Bernheim, à la suite d'accusations de plagiat, et un mois avant l'élection de son successeur[38], Michel Gugenheim, dont la candidature est attendue, décide, en conséquence, au début du mois de , de ne pas se présenter à cette élection[39],[40].

Bibliographie

  • (en) Letters from Mir. A Torah World in the Shadow of the Shoah. The Correspondence of Ernest Gugenheim. Edited by Claude-Annie Gugenheim. Associate Editor: Martine Bendavid. Traduction de l'ouvrage paru en France sous le titre Lettres de Mir... d'un monde de Tora effacé par la Shoah. Traduit en anglais par Ken Ritter. OU Press, New York, 2014. (ISBN 978-1879016569)

Notes et références

  1. Elle est inhumée le même jour, vendredi 20, juin 2014, veille de Shabbat
  2. Voir, Hommage au grand rabbin Daniel Gottlieb. Hamodia. 6 novembre 2013.
  3. La revue Hamoré est la revue trimestrielle des enseignants juifs. Le premier rédacteur en chef est Lucien Lazare, en novembre 1957. Voir, Hamoré. Revue trimestrielle des enseignants juifs.
  4. Voir, Claire Dana-Picard. Disparition de la Rabbanite Claude-Annie Gugenheim. chiourim.com 21 juin 2014.
  5. Les Juifs de Saverne
  6. Regards nouveaux sur les juifs d'Alsace, Raphaël, F. et Weyl, R., 1980, Librairie Istra
  7. http://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/ccne_0.pdf
  8. http://www.akadem.org/conferencier/Gugenheim-Michel-631.php
  9. http://livre.fnac.com/a2735379/Michel-Gugenheim-Et-tu-marcheras-dans-ses-voies
  10. « Michel Guggenhheim, Grand rabbin de Paris », sur RCJ
  11. Le Parisien, 29 janvier 2014
  12. Journal du Sénat mars 2005
  13. Rapport de Sénat en 2005
  14. L'embryon surnuméraire Par Emmanuelle Dhonte-Isnard page 160
  15. Le grand-rabbin Michel Gugenheim : « La technique ne contrecarre pas le plan divin »
  16. Réflexion sur l'éthique juive : "Et tu marcheras dans ses voies…", actualité Individu et société
  17. Voir, Serge Golan. Le grand rabbin Michel Gugenheim élu grand rabbin de Paris. Hamodia.fr, 4 avril 2012.
  18. « Consistoire | Election du Grand Rabbin de Paris », sur www.consistoire.org (consulté le )
  19. Voir Grégoire Leménager et Marie Lemonnier, Gilles Bernheim, rabbin désagrégé. Le Nouvel Observateur. 13 avril 2013.
  20. Huffingtonpost
  21. René Guitton, la France des intégristes, Flammarion 2013 page 201 à 203
  22. L'Express, 15 mai 2014, le rabbinat français est conservateur voire réactionnaire
  23. Consistoire 13 mai 2012
  24. Agounot : le Consistoire français rétrograde ? | JPost | Israel News
  25. Samuel Sandler note que Michel Gugenheim vient à deux reprises à la Synagogue de Versailles, un dimanche, assister à la Bat Mitsva de deux petites cousines. Voir, Samuel Sandler. La Bat Mitzva. Hakeshet. Regards juifs de Versailles. No. 47. mars 2014.
  26. Centre Communautaire Laïc Juif
  27. Hamodia, le 14 mai 2014, Le grand rabbin Michel Gugenheim : « La défense des femmes agounot est pour moi un devoir sacré »
  28. Voir le cas de Neuilly-sur-Seine. La femme juive: larbin oui, rabbin non… JForum.fr. mardi 30 octobre 2012.
  29. Guide du divorce, 22 août 2008
  30. Michel Gugenheim, HaMoré, Revue des enseignants et éducateurs juifs, no 157, décembre 1999, page 267
  31. Le fait que Gugenheim condamne avec force l'homosexualité masculine mais n'évoque pas l'homosexualité féminine découle de la différence de traitement de ces deux types de sexualité dans la halakha. Le rapport anal masculin est considéré comme une abomination (toeva) dans la torah. La condamnation de l'homosexualité féminine n'y est pas mentionnée directement et découle des interprétations rabbiniques. Walter Homolka, Das jüdische Eherecht, Walter de Gruyter, 2009 p. 207. Sur les différences entre les règles issues de la torah et du corpus rabbinique voir De'oraita and derabanan)
  32. Pierre Hurteau, « Homosexualités masculines et religions du monde », Éditions L'Harmattan.
  33. Chantage au divorce religieux : quel rôle ont joué les rabbins ? - Le Nouvel Observateur
  34. L'express 31 mai 2014 , divorce-juif-la-guerre-du-guet_1547028.html
  35. Le Grand rabbin de France par intérim au cœur d'un scandale financier - L'Express
  36. Le Monde, 13 mai 2014 Interview de Delphine Horvilleur, est rabbin du Mouvement juif libéral de France (Paris). Elle est l'auteur d'« En tenue d'Ève. Féminin, pudeur et judaïsme », Grasset, 2013
  37. Le Monde, 15 mai 2014, les instances religieuses juive accusées d'avoir cautionné un chantage au divorce
  38. France Info le 16 mai 2014
  39. actuj.com
  40. Voir, Martine de Sauto. Le grand-rabbin de France par intérim dans la tourmente. La Croix. 12 mai 2014.

Liens externes

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