Marie Lenéru

Marie Lenéru, née à Brest le et morte à Lorient le , est une dramaturge et diariste française.

Biographie

Elle est née dans une famille d'officiers de marine rue de Siam à Brest. Son père Alfred Lenéru (1843-1876), lieutenant de vaisseau, chevalier de la Légion d'honneur, ancien élève de l'Ecole navale (1861-63), était un homme très cultivé, mais il mourut alors qu'elle n'avait que dix mois. Il était le fils de parents hôteliers à Paris. Il avait épousé à Brest en 1872 Marie Dauriac, fille du contre-amiral Alexandre Dauriac (1812-1878), grand officier de la Légion d'honneur, et d'Augustine Hollard. Marie était la petite-fille du capitaine de vaisseau Alexandre Dauriac (1771-1853), officier de la Légion d'honneur, chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, et la nièce du commissaire général de la Marine Charles Dauriac (1817-1892), commandeur de la Légion d'honneur, et du capitaine de vaisseau François Dauriac (1813- ?), officier de la Légion d'honneur. Elle avait aussi un frère, Lionel Dauriac (1847-1923), ancien élève de l'Ecole normale supérieure (1867-70), professeur de philosophie à la faculté des lettres de Montpellier, chevalier de la Légion d'honneur.[1]

En , à onze ans, à la suite d'une rougeole, elle devint sourde et aveugle. Sa mère poursuivit son éducation avec beaucoup de patience simplement par le toucher[2].

Elle demeura sourde, mais sa vue s'éclaircit assez pour lui permettre de correspondre par écrit et de lire à la loupe. Elle mourut le à Lorient, à la suite de l'épidémie de grippe espagnole.

Œuvres

En 1908, elle envoie une nouvelle, intitulée La Vivante, à un concours littéraire organisé par Le Journal. Le prix qu'elle gagne est son premier succès littéraire. Catulle Mendès, Fernand Gregh et Rachilde saluent avec enthousiasme le talent de cette jeune fille inconnue[2]. On pourra lire, dans le Journal littéraire de Paul Léautaud au , les conditions d'organisation de ce concours.

Sa première pièce de théâtre, Les Affranchis, est écrite en 1908 et envoyée à Catulle Mendès qui ne va cessé de la défendre. Elle reste cependant trois ans sans être jouée, bien qu'elle obtienne le prix de 1000 francs pour une œuvre inédite, attribué par la « Vie heureuse »[3] à l'occasion de sa publication[4] par l'éditeur Hachette en 1910, avec une préface de Fernand Gregh, qui rappelle que cet honneur aurait dû revenir à Catulle Mendès s'il n'était mort l'année précédente. Quelques-uns des amis de Marie Lenéru, dont le plus zélé est Léon Blum, entreprennent de lui trouver un théâtre[2]. Finalement Antoine décide de programmer cette pièce à l'Odéon pour la saison 1910-1911. En 1914 l'Académie française lui attribue le Prix Emile Augier. En 1927, après la mort de l'auteur, cette pièce sera reprise à la Comédie-Française, après avoir été rééditée l'année précédente (1926) par l'éditeur Georges Crès.

Marie Lenéru nous est surtout connue par la thèse que lui a consacrée une autre sourde, Suzanne Lavaud, en 1932[5]. Marie se passionne pour des personnalités exceptionnelles : elle publie une étude sur Saint-Just, qui lui vaut des compliments de Maurice Barrès. Un chapitre en est publié dans le Mercure de France[6] sous le pseudonyme d'Antoine Morsain[7]. Avec Le Cas de Miss Helen Keller, Marie Lenéru nous fait imaginer les difficultés rencontrées par une jeune Américaine sourde, muette et aveugle, qui démontra au monde entier qu’un handicap ne signifie pas être inférieur et devint la première personne handicapée à obtenir un diplôme[8].

Après le succès des Affranchis, plusieurs de ses pièces se succédent : Le Redoutable en 1912 à l'Odéon encore ; La Triomphatrice en 1917 à la Comédie Française ; La Paix en 1920 à l'Odéon. Elle a laissé d'autres pièces non jouées : La Maison sur le roc, Le Bonheur des autres, Les Lutteurs, Le Mahdi. Ce théâtre, auquel on a reproché d'être froid et intellectuel, montre des couples qui se brisent contre des valeurs comme la religion, la famille, la charité[9].

Elle a également laissé un journal intime, tenu de 1893 jusqu'à sa mort en 1918. Elle y confie d'une âme stoïque, ses souffrances et l'appétit de beauté et de perfection intérieure qui la tourmente. Sa foi religieuse s'obscurcit peu à peu, remplacée par une sorte de sérénité païenne et par une exaltation passionnée de la vie, qui se satisfait en écrivant. Ce journal, édité par G. Crès en 1922 (en deux volumes), avec une préface de François de Curel, a été réédité en 1945 par Grasset (avec une préface de Fernande Dauriac) et en 2007 aux éditions Bartillat (sans les premières années)[10].

Notes et références

  1. Dossiers de Légion d'honneur sur la base Léonore : cotes LH/669/6 (Alexandre II), LH/669/5 (Alexandre I), LH/669/16 (Charles) et LH/669/15 (Lionel).
  2. La Petite Illustration n° 358, théâtre n° 194 du 19 novembre 1927, présentation de la pièce les Affranchis
  3. « Les Lettres », L'Intransigeant, (lire en ligne)
  4. Marie Lenéru, Les Affranchis (Pièce en trois actes), Paris, Librairie Hachette et Cie, , XIV + 227 p.
  5. Suzanne Lavaud, Marie Lenéru, sa vie, son journal, son théâtre, Paris Edgar Malfère, 1932.
  6. Antoine Morsain, « Un professeur d'énergie, Saint-Just », Mercure de France, , p. 488-501 (lire en ligne, consulté le )
  7. Colette Cosnier, Le silence des filles, Fayard, (lire en ligne), p. 145
  8. Littérature audio
  9. François Le Guennec, in La Belle époque des femmes ? Paris, l'Harmattan 2013, p. 189-201.
  10. Marie Lenéru Journal

Liens externes

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