Louis-Jacques Rondeleux

Louis-Jacques Rondeleux (né le et mort le ) est un artiste lyrique (baryton) français.

Biographie

Après des études supérieures éclectiques (Mathématiques, Histoire, Philosophie et Théologie) Louis-Jacques Rondeleux s'oriente vers une carrière cléricale. Il entre au Grand Séminaire de Paris (1941-1944) puis après une courte période où il s'engage dans l'armée ( - ) il entame un noviciat chez les moines dominicains. Après neuf mois passés chez les dominicains il renonce définitivement à une carrière ecclésiastique (1946).

C'est au début des années 1950 que Louis-Jacques Rondeleux décide de devenir chanteur professionnel. Il fait, dans les années 1950-1960, une carrière au cours de laquelle il eut l’occasion d’explorer tous les répertoires, de la musique médiévale (chansons de trouvères et troubadours) à la création contemporaine, en passant par la musique baroque[1] ou les mélodies.

Puis, de 1970 à 1989 il fut professeur de chant.


L'artiste lyrique (1951-1970)

À la fin des années 40 Louis-Jacques Rondeleux fut l'élève de Jane Bathori, mezzo-soprano, créatrice de la plupart des mélodies de Maurice Ravel. Elle lui transmettra son art dans l'interprétation des mélodies[2].

Sa carrière de chanteur professionnel démarre en 1951, comme choriste dans les chœurs Élisabeth Brasseur ou comme chantre d'église (notamment à l’église de la Trinité). En , il chante pour la première fois en soliste sous la direction d' André Cluytens lors d' un concert à Paris au Théâtre des Champs-Élysées (Requiem de Maurice Duruflé, Psaume de Florent Schmitt). Il fera très vite la connaissance de nombreux compositeurs et chefs d'orchestre avec qui il contribuera à faire connaître la musique contemporaine (Henri Sauguet, Darius Milhaud, Marcel Landowski, Míkis Theodorákis, Henri Cliquet-Pleyel, Manuel Rosenthal, Frank Martin, Henri Tomasi, Pierre Boulez…).

En 1954 il participe - encore comme choriste - à deux créations musico-théatrales de la compagnie Renaud-Barrault:

  • à Paris, au théâtre Marigny, dans une adaptation du Livre de Christophe Colomb (Livret de Paul Claudel)sur une nouvelle musique de Darius Milhaud.
  • dans le cadre du Festival de Bordeaux, en , dans L’Orestie (d’après Eschyle) sur une musique de Pierre Boulez , dont ce sera d'ailleurs la seule musique de scène[3].

Le à Aix-en-Provence, il est soliste lors de la création de l'opéra d' Henri Sauguet Les Caprices de Marianne[4].

En 1957, il enregistre son 1er disque avec des œuvres de Darius Milhaud et Henri Sauguet (Visions infernales).

En 1960, il crée deux œuvres :

Dans la saison 60/61 de l'association lorraine de musique de chambre Louis-Jacques Rondeleux redonna la cantate L’Oiseau a vu tout cela à la Salle Poirel avec l’Orchestre de la Sarre dirigé par Karl Ristenpart.

La même année, il fait une tournée au Maroc avec les Jeunesses Musicales de France (JMF).

Il fait aussi son 1er enregistrement télévisé dans « la Traviata » (diffusion le 9 décembre 1960)[6].

En 1963 il collabore, sous la direction de Pierre Boulez , au disque-Hommage à Igor Stravinsky (concernant l'ensemble de la discographie voir la notice sur le site de la BNF) [7].

Il crée le au festival de Strasbourg, avec l'orchestre radio-lyrique de l'ORTF, sous la direction Charles Bruck une œuvre d’ Henri Tomasi « le Silence de la mer », d’après Vercors (cf. Site de l’association Henri Tomasi [8]); ce drame lyrique donnera lieu à plusieurs représentations, sera recréé le 4 novembre 1964 aux semaines musicales internationales de Paris – Orchestre radio-lyrique de l’ORTF, direction Pierre-Michel Le Conte, dans une mise en scène de Jean Doat etdes décors de Georges Levy et enregistré pour la télévision (diffusé le 7 février 1965) .

En 1964 il enregistre également un disque pour le label Harmonia Mundi : Cantigas et Chansons de Troubadours ( cf illustration ci-dessous). Dans ce disque il inaugure un regain d'intérêt pour la musique du Moyen Âge qui n'était plus chantée depuis plusieurs siècles.

Henry Barraud lui confie en la création de son Pange Lingua (hommage à Rameau), cantate pour soprano, baryton, chœurs et orchestre[9].

Henri Sauguet écrit de Louis-Jacques Rondeleux : « Une voix, une âme : c’est bien en cela que l’art de Louis-Jacques Rondeleux apparaît si particulièrement attachant et dissuasif. Comme il en est ainsi de tous ceux pour lesquels la musique n’est pas seulement la musique, n’est pas seulement un but, mais le moyen d’exprimer des sentiments, une communication humaine. Cette voix, puissante et chaude, aux brillants reflets cuivrés, il sait en conduire la grande étendue avec une souplesse et une intelligence qui lui permettent d’accéder aux répertoires vastes et variés de la musique de chambre, de l’opéra, de la comédie lyrique, de l’oratorio profane ou sacré. Il semble bien que se soient incarnées en lui les nobles vertus qui font d’un chanteur, pendant sa vie, l’interprète prédestiné, nécessité par la permanence de la musique, non seulement d’un temps, ou d’une époque, d’un style ou d’un genre, mais de tous et de tous les temps, jusqu’au sien, en lui donnant le sens et l’opportunité dans le choix et l’utilisation des moyens qui confèrent à ses interprètes leur évidence et leur authenticité.

Une voix, une âme ? Oui : ce sont bien la voix et l’âme de la musique qui se reflètent en Louis-Jacques Rondeleux. » Henri Sauguet Paris [10].

Le pédagogue (1966 -1989)

À partir de 1966 Louis-Jacques Rondeleux commence une seconde carrière, consacrée à l’enseignement. Il travaille d'abord à temps partiel comme professeur de chant au Conservatoire de Montreuil (1966-1969).

En 1970, il rejoint Maurice Béjart à Bruxelles lors de la création de Mudra, un nouveau centre pluridisciplinaire de formation des danseurs, où il sera responsable de la technique vocale.

En Belgique, il travaillera ensuite (en 1973) avec Henri Pousseur au Centre de recherches musicales de Wallonie (devenu Centre Henri Pousseur, à Liège). Il y monte des ateliers de travail vocal spécifiquement tournés vers le chant.

En 1974, Jacques Rosner - qui vient d'être nommé à la direction du Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris - lui demande d' y enseigner le chant aux futurs comédiens. Louis-Jacques Rondeleux y sera professeur de 1975 à 1989, année où il est mis à la retraite[9].

Soucieux de transmettre au plus grand nombre le fruit de son expérience, il publie en 1977 un livre intitulé "Trouver sa voix" aux éditions du Seuil. "Trouver sa voix" est un livre pratique, dans lequel Louis-Jacques Rondeleux met à jour une technique de travail de la voix essentiellement tournée vers une sensibilisation au schéma corporel et à une prise de conscience de la mécanique du souffle. Mais tout au long des exercices proposés, plus encore que la voix, c'est nous-mêmes que nous construisons car « c'est par la voix que le conscient s'ouvre à l'inconscient, et l'homme à lui-même et à l'Autre ». (Denis Vasse, L'Ombilic et la Voix).

Plusieurs fois réédité, cet ouvrage a connu un vif succès. Entre expérience phoniatrique et théâtrale, il est reconnu auprès des amateurs comme des professionnels.

L'écriture et la maladie de parkinson

Au tout début des années 1950, Louis-Jacques Rondeleux collabore au secrétariat de rédaction de la revue Esprit (1951 à 1953). Très engagé dans les débats idéologiques à l'intérieur de l'église Catholique, il participe par l'écriture à certains de ces débats. Cet engagement l'amènera à publier deux ouvrages, Isaïe et le Prophétisme (1961) aux éditions du Seuil et Jean Steinmann[11] (1969) aux éditions Fleurus.

Aux côtés de son ami Georges Suffert il participe à la création d'une revue, les Mal Pensants[12], qui se voulait un lieu d'expression pour les catholiques "de gauche"; il y écrit notamment - dans le premier numéro - l'éditorial sous le titre "Qui sommes nous?"

Il collaborera également à l'établissement d'un répertoire de chants dédié au culte. Avec Marcel Frémiot il publie certains chants liturgiques sur des textes tirés de la Bible et traduits par lui (St Jacques du Haut-Pas); 1965. Extraits édités dans Chanter pour Dieu, ed. du Seuil Paris 1966). Avec Jean Bonfils et Michel Fustier il contribue à la même collection Chanter pour Dieu (éd. du Seuil, 1967).

La maladie de Parkinson diagnostiquée au début des années quatre-vingt va profondément bouleverser ses 15 dernières années d'existence. Dans un article paru dans une revue spécialisée[13], il explique comment certains symptômes de cette maladie (tremblements, rigidité musculaire, hyper-émotivité, bégaiement…) peuvent être combattus par un travail ciblé sur la voix et le souffle, travail du corps et de l’esprit.

L'écriture d'un troisième livre, pour les éditions du Seuil - resté inédit - lui donnera l'occasion de livrer un témoignage personnel sur les différentes phases d'évolution de son combat contre la maladie de Parkinson entre 1981 et 2000[14].

Notes

  1. Le « phénomène baroque » impulsé dans les années 1970 est issu des recherches d’Antoine Geoffroy-Dechaume, organiste et musicologue, qui publie en 1964 Les Secrets de la musique ancienne : recherches sur l'interprétation, XVIe-XVIIe-XVIIIe siècles. L-J. Rondeleux donnera avec cet organiste un concert enregistré le à l’église Saint-Sulpice de Favières, et diffusé le 1er octobre 1962. Au programme : Pérotin - Lully
  2. Linda Laurent, Jane Bathori : Andrée Tainsy, correspondance 1935-1965,, Paris, Riveneuve Éditions, , 436 p. (ISBN 978-2-36013-360-4)
  3. Jean Roy, Présences contemporaines Musique française, NED (Nouvelles éditions Debresse), , p.305 (Henri Sauguet) p461(Pierre Boulez)
  4. « Les caprices de Marianne », sur ina.fr, (consulté le )
  5. « Les amants captifs - Spectacle - 1960 », sur data.bnf.fr (consulté le )
  6. Institut National de l’Audiovisuel – Ina.fr, « La Traviata », sur Ina.fr
  7. « Bibliothèque Nationale de France », sur http://data.bnf.fr/11922530/louis-jacques_rondeleux/ (consulté le )
  8. « Site officiel de l'association Henri Tomasi », sur www.henri-tomasi.fr (consulté le )
  9. Institut National de l’Audiovisuel – Ina.fr, « Carole Bouquet au Conservatoire », sur Ina.fr,
  10. Archives personnelles de l'artiste pour son "Book"
  11. http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb331583989/
  12. Olivier Chevrillon, « "Commentaire (n°140)" », "Mensuel", "avril 2012", p. 1157 (lire en ligne)
  13. Louis-Jacques Rondeleux, La voix, le chant et la maladie de Parkinson, rééducation orthophonique, Vol 30, sept 1992, n°171, pp. 285-291.
  14. Tapuscrit inédit, dont le titre était dans sa dernière version : " un Dieu sensible au cœur - S/titre : De l'Église à Jésus en passant par l'Inde". Dans cette dernière version, proposée à l'éditeur en aout 2000, L-J Rondeleux explique qu'il a commencé à écrire sur Parkinson en 1995. (sources familiales)

Bibliographie

  • Moscou des rêves, Revue Esprit, n°10, (archive)
  • Isaïe et le Prophétisme, Seuil, Collection Maîtres spirituels n°24, 1961 (notice BNF).
  • Jean Steinmann, éd. Fleurus, 1969 (notice BNF en ligne sur numilog.com).
  • La mécanique vocale, la Recherche, 1974, Vol 5, no 48, pp. 734-743.
  • La voix, les registres et la sexualité, juillet-, Revue Esprit, pp. 46-54 (archive)
  • Préface introductive à L'Art du chant, de Manuel Garcia (1847), rééd. Minkoff, 1985.
  • Trouver sa voix : contrôler sa respiration, enrichir son timbre, élargir son registre vocal, Seuil, 1re éd 1977, dernière éd 2004 -   (ISBN 2020639815 et 9782020639811)

Discographie

Quelques-uns de ces enregistrements ont été réédités avec les CD BNF Collection, et la plupart sont disponibles sur le site de musique en ligne qobuz.com cf : http://www.qobuz.com/fr-fr/search?q=rondeleux&i=boutique

  • La Marseillaise, in : Histoire de France par les chansons, vol. 9 : La Révolution en marche (Mono) , BNF Collection, Chanson française et francophone
  • André Campra : Les femmes & Nicolas Bernier: Bacchus, deux cantates françaises, Orchestre de chambre Pierre Menet, Denise Gouarne, 1962
  • Michel Richard Delalande, Te Deum, orch de chambre de Versailles, dir Gaston Roussel.
  • Claude Debussy, Mélodies : Trois chansons de France - Trois Ballade de François Villon - Le promenoir des deux amants - Fêtes galantes. Piano J-Cl Ambrosini.
  • Cantigas et chansons de troubadours, Jose Luis Ochoa, tenor / Louis Jacques Rondeleux, baryton, Roger Lepauw, vièle , Serge Depannemaker, tambourin,  Harmonia Mundi (HMO 30.566),
  • Les Trouveurs du Moyen-Âge, Bernard de Ventadour, Adam de La Halle, Tanhauser. Louis Jacques Rondeleux (baryton), Roger Lepauw (alto/vièle), Raoul W Coquillat (tambourin). Coll Musique de Tous les Temps n°36,  Notice BNF FRBNF38071933
  • Alfred Bruneau - Emile Zola, Lazare, Oratorio en un acte, Orchestre Radio Symphonique de Paris dir Eugène Bigot, René Alix, Louis-Jacques Rondeleux, Jean Giraudeau, Hélène Bouvier, Gisèle Desmoutier, Claudine Collard https://www.amazon.fr/Lazare-oratorio-acte/dp/B07YNRLZ31
  • Henri Sauguet Les caprices de Marianne, Orchestre Radio-Lyrique dir Manuel Rosenthal, Andrée Esposito (Marianne), Camille Maurane (Octave), Michel Sénéchal (Cœlio), Louis-Jacques Rondeleux (Claudio), Gérard Friedmann (Tibia), Irma Kolassi (Hermia), Paul Derenne (l'aubergiste), Claude Genty (le chanteur de sérénade), Agnès Disney (la duègne) — Disques FY et du Solstice, 2 CDs [P] 1993 (912098), enregistrement Paris, 27 et

Web, notices et Vidéos

Vidéos

  • Portail de la musique classique
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.