John Fletcher Moulton

John Fletcher Moulton, dit Lord Moulton (né le 18 novembre 1844 à Madeley, dans le Shropshire – mort le 9 mars 1921[1]) est un avocat et député Libéral anglais, qui poursuivit une activité scientifique en marge de sa carrière au service de la Couronne. Il a notamment contribué, aux côtés de la France, à l'adoption du premier Système international d'unités électriques.

John Fletcher Moulton, Baron Moulton, vers 1913
Portrait-charge dans le magazine Vanity Fair (octobre 1900). La légende porte sobrement: « Brevets. »

Biographie

Années de jeunesse

Moulton est l'un des six enfants d'un pasteur instruit de l'Église Méthodiste, James Egan Moulton. Ses parents l'envoyèrent à l'âge de 11 ans au lycée de Kingswood School où il excella. Il se classa dans les premiers aux concours d'admission à Oxford et à Cambridge, et obtint une bourse pour poursuivre ses études à St John's College (Cambridge). Il s'y classa Senior Wrangler en 1868 et fut lauréat du Smith's Prize[2]. Il était membre des Cambridge Apostles.

L'homme politique

Après ces brillants débuts scientifique à Cambridge, couronnés par son élection au poste de professeur associé (fellow), Moulton devint un grand avocat londonien spécialisé dans la propriété industrielle. Il épousa la veuve d'un riche industriel (Robert William Thomson, l'inventeur du pneumatique), Clara Thomson (née Hertz) le 24 avril 1875 (elle devait mourir en 1888). Simultanément, il poursuivait des expériences en électricité et fut élu membre de la Royal Society. Grand promoteur de la recherche médicale, on lui confia la première chaire du Conseil de la recherche médicale. Les autorités françaises lui décernèrent la Légion d'honneur pour son implication dans la définition d'unités internationales en électricité[3].

Militant du parti Libéral, Moulton fut successivement député de Clapham (1885–86), de South Hackney (1894–95) et de Launceston[2] (1898–1906). À ce titre, il soutint la politique irlandaise de Gladstone consistant à promouvoir le Home Rule. En 1906, Moulton fut nommé Lord juge près la Cour d'appel d'Angleterre et du pays de Galles et Conseiller de la Couronne. En 1912, il était reçu à la Chambre des Lords et fait pair à vie avec le titre, crée pour lui le 1er octobre, de baron Moulton de Bank, dans le Comté de Southampton[4].

Moulton a aussi correspondu avec Charles Darwin[5].

Homme-clef de l'industrie de guerre britannique

Pourtant sa carrière allait connaître un nouveau tournant avec le déclenchement de la Première guerre mondiale : dès 1914, il reçut la présidence de la commission consultative de fourniture en explosifs : c'était là une mission délicate, car l'industrie chimique du Royaume-Uni, tournée vers l'exploitation des ressources minières de son immense empire colonial, enregistrait plusieurs lacunes dans le domaine de la chimie organique. Il ne fallut pas longtemps pour que Moulton soit nommé Président-directeur général du Département des Explosifs, d'abord subordonné au Bureau de la Guerre puis au Ministère des Munitions. Là, il sut s'entourer d'une équipe pluridisciplinaire de gestionnaires et de savants qui réussirent l'exploit de multiplier la production d'explosifs par plus de 20, au point que le pays stockait davantage de mélange explosif qu'il ne pouvait fabriquer d'obus en bronze : les surplus furent convertis en engrais, puis en 1917 l'industrie de guerre reçut l'ordre de produire des gaz de combat[6]. Moulton appliqua docilement cette injonction en dépit de ses convictions personnelles sur l'application des conventions de La Haye.

Tout au long de ces quatre années de guerre, Lord Moulton s'affaira dix heures par jour et ne prit au total que dix jours de repos. Chaque week-end, il partait en tournée d'inspection dans les usines de munition du pays, tout en prospectant les possibilités d'implanter de nouvelles usines. En reconnaissance de ces services, il fut élevé au rang de chevalier Commandeur de l'ordre du Bain[2] en 1915, puis Grand Croix de l'Ordre de l'Empire britannique[2] en 1917. Les puissances alliées n'étaient pas en reste : la France lui décerna l'Ordre de l'Étoile noire pour la défense des colonies d'Afrique Occidentale ; la Belgique, l'Ordre de Léopold. Enfin, Lord Moulton fut le dernier récipiendaire de l'Ordre de l'Aigle blanc avant la chute de la monarchie en Russie.

Dernières années

Après la guerre, en dépit des demandes qui lui étaient faites de poursuivre l'expansion de l'industrie chimique britannique, il préféra se consacrer à sa passion : le droit. Au mois de juillet 1924, le journal The Atlantic publia le texte d'une allocation qu'il avait donnée, quelques années avant sa mort, à l'Authors' Club de Londres : Law and Manners[7], où il examine le dilemme du consentement face à des injonctions inapplicables.

Notes

  1. « Death of Lord Moulton », The Times, Londres,
  2. Moulton, John Fletcher dans (en) J. Venn et J. A. Venn, Alumni Cantabrigienses, Cambridge, Angleterre, Cambridge University Press, 1922–1958 (ouvrage en 10 volumes)
  3. H. Fletcher Moulton, The Life of Lord Moulton, Londin, Nisbet, (lire en ligne)
  4. « Friday, 4th October, 1912 », sur London Gazette, , p. 7291
  5. Darwin Correspondence Project
  6. William Van der Kloot, « Lord Justice of Appeals John Fletcher Moulton and explosive production during World War I : 'the mathematical mind triumphant'. », Notes Rec. R. Soc. Lond., vol. 68, no 2, , p. 171–186 (PMID 24921109, PMCID 4006157, DOI 10.1098/rsnr.2013.0056)
  7. Law And Manners

Voir également


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