Eadwig

Eadwig, ou parfois Edwy, né vers 940 ou 941, mort le , surnommé « le Beau » (« All-fair » en anglais, « Pankali » en grec), est roi d'Angleterre de 955 à sa mort. Son court règne est marqué par des relations difficiles avec l'aristocratie du royaume et avec l'Église, notamment l'abbé Dunstan et l'archevêque Oda.

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Eadwig

Eadwig dans une généalogie royale du XIIIe siècle.
Titre
Roi d'Angleterre
Prédécesseur Eadred
Successeur Edgar
Biographie
Dynastie Maison de Wessex
Date de naissance vers 940-941
Date de décès
Lieu de décès Gloucester
Père Edmond Ier
Mère Ælfgifu de Shaftesbury
Conjoint Ælfgifu

Biographie

Famille et avènement

Eadwig est le fils aîné du roi Edmond par sa première femme Ælfgifu de Shaftesbury (morte en 944). Il a un frère cadet, Edgar, né en 943. À la mort de leur père, en 946, c'est leur oncle Eadred qui monte sur le trône d'Angleterre, probablement en raison du jeune âge des fils d'Edmond.

Eadred meurt le et Eadwig lui succède. Il est couronné au début de l'année 956, peut-être le . Ce couronnement se déroule vraisemblablement à Kingston upon Thames[1].

Un début de règne troublé

L'incident relaté dans la Vita S. Dunstani vu par le peintre britannique William Hamilton en 1793.

Le nouveau roi ne tarde pas à se brouiller avec les conseillers de son oncle, et notamment avec l'abbé de Glastonbury Dunstan. Selon la Vita S. Dunstani, une hagiographie de Dunstan rédigée vers l'an 1000 par un moine uniquement connu sous le nom de « B. », la brouille entre les deux hommes serait due à un incident survenu le jour du couronnement d'Eadwig. Après la cérémonie, le roi aurait quitté le banquet pour aller prendre du bon temps avec une mère et sa fille. Choqué, l'archevêque Oda de Cantorbéry aurait envoyé Dunstan et l'évêque Cynesige de Lichfield morigéner le jeune roi et le ramener de force au banquet. Que cet événement ait réellement eu lieu ou qu'il ne s'agisse que d'une invention de l'hagiographe visant à discréditer Eadwig, Dunstan s'exile peu après en Flandre et Cynesige semble être tombé en disgrâce, n'apparaissant que rarement comme témoin sur les chartes du nouveau roi[2].

Eadwig épouse à une date inconnue Ælfgifu, fille d'Æthelgifu, qui sont la mère et la fille de l'anecdote rapportée par « B. ». L'origine d'Ælfgifu n'est pas claire, mais elle semble être la sœur de l'historien Æthelweard, lequel affirme descendre du roi Æthelred de Wessex. Æthelweard dépeint d'ailleurs le règne d'Eadwig sous un jour positif dans son Chronicon : c'est lui qui rapporte son surnom de « Pankali », dû à sa grande beauté[3],[4]. Une autre hypothèse fait d'Ælfgifu une descendante de l'ealdorman Æthelfrith de Mercie, qui pourrait être le mari d'une nièce par alliance du roi Alfred le Grand.

Une charte de 956 du roi « Eadwig rex Deo fauente Anglorum » (S 594).

Vers le début de son règne, Eadwig procède à de nombreuses promotions et donations : on connaît une soixantaine de chartes royales pour l'année 956, un nombre inhabituellement élevé[5]. Les scribes auteurs de ces chartes font preuve d'une grande variété quant aux titres prêtés à Eadwig, qui y est appelé « roi des Anglo-Saxons », « roi des Anglais », « roi de toute la Bretagne » ou même « roi d'Albion » ; il faut remonter au roi Æthelstan pour retrouver une telle diversité[6]. Le nouveau roi distribue les terres confisquées à Dunstan et à sa grand-mère Eadgifu et nomme des nouveaux venus à des postes importants : le thegn Ælfhere devient ealdorman de Mercie en 956 en n'étant apparu que sur deux chartes jusqu'alors, tandis que Byrhtnoth devient ealdorman d'Essex sans jamais avoir témoigné sur une charte[7]. L'auteur de la Vita S. Dunstani affirme qu'Eadwig est mal conseillé par des individus aux intentions égoïstes, mais il est plus probable qu'il cherche à s'assurer des soutiens fidèles face aux conseillers de ses prédécesseurs[8].

La division du royaume

Monnaie frappée sous le règne d'Eadwig et portant son nom.

En 957, le royaume d'Angleterre est partagé entre Eadwig et son frère Edgar, alors âgé de quatorze ans : ce dernier obtient la Mercie et la Northumbrie, tandis qu'Eadwig conserve le Wessex et le Kent. La Tamise sépare les domaines des deux frères. Malgré le récit de la Vita S. Dunstani, qui parle d'une révolte armée contre Eadwig, il semble que cette division se soit faite pacifiquement : Eadwig reste « rex Anglorum », tandis que son frère n'est que « roi des Merciens », et les monnaies continuent à porter le nom d'Eadwig dans toute l'Angleterre. Il est possible que ce partage soit issu d'un accord antérieur entre les deux frères. La version [D] de la Chronique anglo-saxonne situe même l'avènement d'Edgar à la tête de la Mercie au même moment que celui de son frère à la tête du Wessex, en 955[9].

La situation profite nécessairement aux adversaires d'Eadwig. Edgar rappelle notamment Dunstan de son exil sur le continent et le fait évêque de Worcester en 957, puis de Londres l'année suivante[10].

Au début de l'année 958, l'archevêque Oda annule le mariage d'Eadwig pour cause de consanguinité, une décision vraisemblablement plus politique que religieuse. En effet, un enfant issu de ce couple aurait certainement eu des droits sur le trône supérieurs à ceux d'Edgar, ce qui ne peut que gêner Oda et Dunstan, voire Edgar lui-même[11]. Après la mort d'Oda, le , Eadwig choisit d'abord pour lui succéder l'évêque Ælfsige de Winchester, un proche de la famille d'Ælfhere de Mercie, mais il meurt de froid dans les Alpes en se rendant à Rome pour y recevoir le pallium des mains du pape[12]. Eadwig choisit ensuite l'évêque Byrhthelm de Wells[13].

Mort et damnatio memoriae

Eadwig meurt dans des circonstances inconnues le , âgé de seulement 17 ou 18 ans. Il est inhumé à l'abbaye New Minster de Winchester[1]. Il ne laisse pas d'enfants, ce qui permet à Edgar de réunifier le royaume d'Angleterre. Sa veuve Ælfgifu semble s'être réconciliée avec le nouveau roi, qui lui fait plusieurs donations dans les années 960[14].

La réputation posthume de souverain débauché et incompétent qui reste attachée à Eadwig est façonnée par les hagiographes de Dunstan et Oda à partir du XIe siècle. À l'exception notable de Henri de Huntingdon, les chroniqueurs des XIIe siècle et XIIIe siècle décrivent à leur tour Eadwig comme un mauvais roi. Son histoire fait l'objet de plusieurs pièces de théâtre durant la seconde moitié du XVIIIe siècle, et des peintres historiques comme William Dyce ou Richard Dadd le prennent comme sujet jusqu'au milieu du XIXe siècle[4].

Références

  1. Keynes 2014, p. 536.
  2. Yorke 1988, p. 74-75.
  3. Yorke 1988, p. 76-77.
  4. Keynes 2004.
  5. Miller 2014, p. 155.
  6. Scragg 2008, p. 6-7.
  7. Scragg 2008, p. 84-86.
  8. Scragg 2008, p. 89.
  9. Yorke 1988, p. 78.
  10. Yorke 1988, p. 78-79.
  11. Yorke 1988, p. 77-78.
  12. Scragg 2008, p. 85.
  13. Scragg 2008, p. 86.
  14. Scragg 2008, p. 102.

Bibliographie

  • (en) Simon Keynes, « Eadwig (c.940–959) », dans Oxford Dictionary of National Biography, Oxford University Press, (lire en ligne).
  • (en) Simon Keynes, « Appendix I: Rulers of the English, c.450–1066 », dans Michael Lapidge, John Blair, Simon Keynes et Donald Scragg (éd.), The Wiley Blackwell Encyclopedia of Anglo-Saxon England, Wiley Blackwell, , 2e éd. (ISBN 978-0-470-65632-7).
  • (en) Sean Miller, « Eadwig », dans Michael Lapidge, John Blair, Simon Keynes et Donald Scragg (éd.), The Wiley Blackwell Encyclopedia of Anglo-Saxon England, Wiley Blackwell, , 2e éd. (ISBN 978-0-470-65632-7).
  • (en) D. G. Scragg, Edgar, King of the English, 959-975 : New Interpretations, Woodbridge, Boydell & Brewer, coll. « Publications of the Manchester Centre for Anglo-Saxon Studies » (no 8), , 274 p. (ISBN 978-1-84383-399-4, lire en ligne)
  • (en) Barbara Yorke, « Æthelwold and the Politics of the Tenth Century », dans Barbara Yorke (éd.), Bishop Æthelwold: His Career and Influence, Woodbridge, The Boydell Press, (ISBN 9780851157054), p. 65-88

Liens externes

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