David Rousset

David Rousset, né le à Roanne (Loire) et mort le à Paris, est un résistant, déporté, écrivain et homme politique français.

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Biographie

Fils d'un ouvrier métallurgiste devenu cadre de maîtrise et petit-fils de deux grands-pères pasteurs, l'un à Annonay, l'autre à Roanne. À 14 ans, à la suite d'un accident de tennis, il perd un œil.

David Rousset fait des études de philosophie et de littérature à la Sorbonne, élève de Georges Dumas, professeur de psychopathologie à l'hôpital Sainte-Anne. Entre 1931 et 1936, il voyage en Allemagne et en Tchécoslovaquie. Il rejoint, dès 1931, les étudiants socialistes. Enseignant, il se rapproche de Léon Trotski, qu'il rencontre lors du séjour de celui-ci en France, et il est de ce fait exclu de la SFIO en 1935. L’année suivante, il est l'un des fondateurs du Parti ouvrier internationaliste (POI). Il se consacre alors à l’action contre le colonialisme en Algérie et au Maroc. En 1938, il est correspondant des revues américaines Fortune et Time. En 1939, il épouse Susie Elisabeth Elliot, avec qui il a trois fils.

La déportation

Durant l’Occupation, il participe à la reconstitution du POI clandestin. Il est arrêté par un inspecteur français et deux allemands le 16 octobre 1943 pour avoir entrepris des démarches politiques en direction des soldats de la Wehrmacht, le « travail allemand ». Il est torturé rue des Saussaies pendant toute une journée, emprisonné à Fresnes, puis déporté à Buchenwald et envoyé ensuite aux camps de Porta Westfalica et de Neuengamme.

Devant l'avancée des Alliés, il est déplacé avec les déportés survivants plus au Nord. Cette dernière « marche de la mort » se termine pour lui dans le kommando de Wöbbelin, près de Schwerin, avec les déportés déplacés du camp de Neuengamme.

Au soir du 3 mai 1945, le kommando de Wöbbelin est abandonné par les nazis, ce qui lui permet, avec Albert Rohmer, de partir à la rencontre des Alliés. Ils sont reçus à la mairie de Ludwiglust par le général James M. Gavin (commandant la 82e division aéroportée américaine). Le lendemain matin 4 mai, l'armée britannique se déplace grâce à leurs indications en direction des derniers kommandos de Neuengamme pour les libérer.

Description et dénonciation des systèmes concentrationnaires

Après la guerre, il publie L'Univers concentrationnaire, ouvrage fondamental sur les camps nazis qui obtient le prix Renaudot en 1946. Le livre est considéré comme la première fresque descriptive du phénomène concentrationnaire répressif. En 1947, il publie un roman de huit cents pages, Les Jours de notre mort, fondé sur ses souvenirs mais aussi sur d'autres témoignages sur les camps de la mort nazis.

En 1949, il publie dans Le Figaro littéraire un appel « aux anciens déportés des camps nazis et à leurs organisations ». Il y dénonce le travail correctif existant en URSS, un système général alimenté par les internements de masse sur simple décision administrative. Il propose la création d'une commission internationale d'enquête composée d'anciens déportés ayant pour but de vérifier sur place si le travail forcé est une composante du régime soviétique[1]. Il est alors traité par le député communiste Virgile Barel d'« écrivain hitlérien »[1]. Pierre Daix l'accuse, dans Les Lettres françaises, d'avoir « accolé à un faux primitif de vulgaires transpositions de ce qui s'est passé dans les camps nazis »[1]. Claude Bourdet lui suggère de « balayer devant notre porte » tandis que Jean-Paul Sartre et Maurice Merleau-Ponty désapprouvent l'usage que Rousset fait du document soviétique[1].

La troisième force

Il reprend son combat contre les guerres coloniales en Indochine et en Algérie. David Rousset est l'un des fondateurs, en 1957, du comité Maurice-Audin, du nom d'un jeune mathématicien communiste enlevé et exécuté par l'armée française en Algérie. Dans la même période, il s'éloigne du trotskisme et, avec Jean-Paul Sartre, en 1948, crée le Rassemblement démocratique révolutionnaire (RDR), parti composite qui veut réunir « dans l’action tous ceux qui ne pensent pas que la guerre et le totalitarisme sont inévitables ». Le RDR se situe dans une double opposition au PCF et au RPF gaulliste et ne survit qu'un an : Sartre se rapproche du PCF tandis que David Rousset cherche une « troisième force ».

Après la sortie en 1947 du livre de Victor Kravtchenko J'ai choisi la liberté et du procès intenté par l'auteur à l'hebdomadaire Les Lettres françaises, journal littéraire proche du PCF, Rousset crée en octobre 1950 la Commission internationale contre le régime concentrationnaire (CICRC), qui entreprend des enquêtes sur les situations espagnole, grecque, yougoslave et soviétique. Pour la première fois en France, il utilise le terme de Goulag pour désigner le système concentrationnaire soviétique. Ceci lui vaut d'être traité de « trotskiste falsificateur » par Les Lettres françaises, à qui il intente un procès[2] qu'il gagne en 1951. Sa dénonciation des camps soviétiques lui vaut aussi des accusations, calomnieuses selon lui, de l'amicale de Buchenwald, présidée par le colonel Manhès[3].

David Rousset sera parmi les premiers à dénoncer d'abord le Goulag puis le laogai chinois[4]. De 1952 à 1956, il enquête sur la situation pénitentiaire en République populaire de Chine et rédige un Livre blanc. En mai 1957, le CICRC fait l’examen de la politique répressive menée en Algérie.

Au début des années 1960, pour divers journaux, dont Le Figaro et Le Monde, David Rousset réalise des interviews de personnalités du Tiers monde : Gamal Abdel Nasser, Ahmed Ben Bella et Che Guevara. Son soutien à la décolonisation de l'Algérie par Charles de Gaulle le conduit à soutenir, en 1965, la candidature de celui-ci lors de l’élection présidentielle. Il devient un « gaulliste de gauche ». Il est élu député UDR de l’Isère, en juin 1968. Il s'éloigne de l'UDR après la mort du général, fonde l'Union travailliste et termine son mandat comme non-inscrit.

Grand reporter au Figaro littéraire, il collabore aussi à France Culture, publie La Société éclatée, Sur la guerre et Fragments d’autobiographie.

En 1973, après l'assaut donné par les militants de la Ligue communiste contre un meeting de l'extrême droite, le 21 juin 1973, qui entraîna sa dissolution en même temps que celle de plusieurs organisations d'extrême droite, David Rousset fut contacté pour une médiation auprès du ministère de l'Intérieur, qui permit à ce mouvement de se reconstituer sous le nom de Ligue communiste révolutionnaire, à la condition expresse de dissoudre l'essentiel de son service d'ordre, qui comptait alors des milliers de membres entraînés sous la responsabilité de la Commission très spéciale (CTS), à la tête de laquelle son fils Pierre Rousset (ornithologue) avait succédé à Henri Weber, avec Daniel Bensaïd.

Œuvres

  • L'Univers concentrationnaire, éditions du Pavois, Paris, 1946 ; réédition éditions de Minuit, 1965. Prix Renaudot 1946.
  • Les Jours de notre mort, éditions du Pavois, Paris, 1947 ; réédition éditions Ramsay, Paris, 1988 ; réédition Fayard Pluriel, 2012.
  • Entretiens sur la politique, avec Gérard Rosenthal et Jean-Paul Sartre, Gallimard, Paris, 1949.
  • Le Pitre ne rit pas, éditions du Pavois, Paris, 1948.
    • Recueil de textes « puisés dans les archives secrètes du troisièmes Reich », comme le dit page 243, les "notes sur les textes publiés".
  • Pour la vérité sur les camps concentrationnaires. Un procès antistalinien à Paris, avec Théo Bernard et Gérard Rosenthal, éditions du Pavois, Paris, 1951.
  • Le Monde concentrationnaire nazi dans Histoire controversée de la deuxième guerre mondiale d'Eddy Bauer, tome VII, 1967.
  • La Société éclatée. De l'échec de la révolution bolchévique à l'espérance socialiste d'aujourd'hui, Bernard Grasset, Paris, 1973.
  • Sur la guerre. Sommes-nous en danger de guerre nucléaire ?, éditions Ramsay, Paris, 1987.
  • David Rousset, Une vie dans le siècle. Fragments d’autobiographie, avec la collaboration d’Émile Copfermann, Plon, Paris, 1991.
  • La Fraternité de nos ruines : Écrits sur la violence concentrationnaire 1945-1970, édition établie et présentée par Grégory Cingal, Fayard, Paris, 2016.

Mandat

Mandat parlementaire

Notes et références

  1. Emile COPFERMANN, Les communistes, le goulag et la «salade confite», liberation.fr, 12 décembre 1997
  2. Frédéric Verger, « Les lumières et le goulag » dans la Revue des deux mondes, no 1, janvier 2011, p. 133.
  3. David Rousset, Lettre au révérend père Riquet, 6 décembre 1949; reproduite dans David Rousset, La Fraternité de nos ruines : Écrits sur la violence concentrationnaire (1945-1970), Fayard, 2016, consultable sur Google livres.
  4. Pierre Boncenne, Le Parapluie de Simon Leys, Philippe Rey, 2015.

Voir aussi

Articles connexes

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