Cimex lectularius

Morphologie

C'est la punaise des lits la plus courante et la mieux adaptée aux environnements humains[1],[2]. On la retrouve dans les climats tempérés à travers le monde et elle est connue depuis des temps très anciens.

Les punaises des lits adultes sont de couleur brun-rouge, avec un corps ovale et aplati. Elles n'ont pas d'ailes et possèdent des poils microscopiques qui leur donnent un aspect rayé.

Les punaises des lits adultes mesurent 5 à 8 mm de long et ne se déplacent pas suffisamment rapidement pour échapper à la vue d'un observateur attentif. Les nymphes sont translucides et de couleur plus claire. En devenant adultes, elles deviennent de plus en plus foncées et opaques. À l'âge adulte, on les compare souvent à des lentilles ou à des pépins de pomme.

Comportement

Le mode de reproduction de la punaise de lit est dit traumatique, puisque le mâle n'utilise pas les voies de reproduction naturelles de la femelle lors de l'accouplement[3]. Bien qu'elle soit pourvue de voies de reproduction naturelles, celles-ci ne serviront que lors de la ponte des œufs[3]. Le mâle, doté d'un appareil reproducteur en spicule[4] (c'est-à-dire acéré comme une aiguille), perfore l'abdomen de la femelle de façon à accéder au spermalège. Il injecte ensuite son sperme dans cet organe paragénital[3].

Ce mode d'accouplement plutôt rare chez les insectes se nomme insémination extragénitale traumatique. Il n'est pas sans risque, puisqu'au moment de la pénétration, le mâle peut introduire des micro-organismes pathogènes dans la femelle, l'exposant à des affections potentiellement létales[3].

Conséquences pour l'être humain

La morsure est indolore, mais peut être suivie de petites taches maculaires, qui peuvent ensuite évoluer en papules accompagnées d'intenses démangeaisons[5]. Certains patients présentent une éruption érythémateuse ou un urticaire généralisé. Le délai entre la piqûre et les premiers symptômes peut atteindre dix jours, mais tend à être de plus en plus bref pour atteindre quelques secondes avec les piqûres successives[6]. Des éruptions bulleuses ne sont pas rares, secondaire à une vascularite[7] et des cas d'anaphylaxie ont été rapportés, quoique rarement[5]. Des cas de réactions asthmatiques ont aussi été rapportés[5].
Au début des années 2000, Il n'y avait pas encore de preuve que les punaises de lit transmettent des agents pathogènes pour l'homme[5],[8], mais elles sont assurément responsables de détresse psychologique importante[9], et peuvent causer une anémie quand les morsures sont abondantes[5]. Depuis on pense qu'elle peut (au moins dans les régions méditerranéennes) transmettre à l'Homme des pathogènes, dont Bartonella quintana [10];

Il existe toujours un risque de surinfection des lésions, avec formation, par exemple, d'un impétigo[11].

Le médecin traite généralement les symptômes avec des antihistaminiques et des corticoïdes, et veille à ce que les punaises soient effectivement éliminées de l'environnement du patient. Des années 1960 à 2008, un large éventail de traitements empiriques, y compris par des antibiotiques, antihistaminiques, corticoïdes topiques et oraux, et l'adrénaline, ont été utilisés pour des réactions à des morsures, avec des résultats variables[8].Il ne faut pas sous-estimer les conséquences psychologiques de l'infestation par des punaises dans une famille. Une consultation psychiatrique peut être nécessaire et conduire un traitement dans certains cas.[9].

De plus, des punaises de lit transportant des Staphylococcus aureus testés antibiorésistants (en l'occurrence résistant à la méthicilline (SARM)) et des Enterococcus faecium résistant à la vancomycine (VRE) ont été détectés[12].

Les options de traitement de réactions cutanées et systémiques aux piqûres de punaises des lits n'ont pas été évaluées et qu'il n'existe aucune preuve que les résultats diffèrent sensiblement selon qu'on ait ou non reçu un traitement[8].

Retour d'un parasite indésirable

Une punaise des lits au stade de nymphe se nourrissant d'un hôte.
Cimex lectularius nourries de sang (notez la différence de couleurs en fonction de la digestion du repas de sang).

Cimex lectularius, avait pratiquement disparu de France dans les années 1950 mais depuis la fin des années 1990, on observe une résurgence des punaises de lit (C. lectularius et C. hemipterus) dans le monde[13].
En 2016, une première enquête a en France métropolitaine interrogé les services municipaux d'hygiène et de sécurité (MHSS) et les acteurs privés de la lutte antiparasitaire sur leurs connaissances, leur attitude et leurs pratiques face aux pullulations de punaises de lit[13]. Les 68 réponses des MHSS et 51 des privés montrent que tous les départements de France métropolitaine ont connu au moins une invasion, le plus souvent confirmée par observation directe des punaises. La plupart des privés mixent des méthodes non chimiques et chimiques, et appliquent deux traitements[13].

Depuis le milieu des années 1990[5], les infestations de maisons, gîtes, hôtels, trains de nuit sont en forte augmentation, dans le monde entier, et le nombre de patients se présentant à leur médecin avec des réactions allergiques à des morsures est également en augmentation.
Plusieurs explications semblent expliquer cette recrudescence d'un insecte qui avait fortement régressé dans le 3e quart du XXe siècle :

  • Après la Seconde Guerre mondiale, une meilleure hygiène domestique et surtout un recours massif aux insecticides avaient permis d'éradiquer la plupart des punaises de lit. Mais, dans les années 1970, bien des produits se sont révélés nocifs pour la santé et/ou l'environnement (dont le DDT), d'où un emploi limité ;
  • Des souches de plus en plus résistantes à certains pesticides sont apparues ;
  • Les punaises profitent de la mondialisation et du nombre croissant de voyageurs internationaux et interrégionaux. Les bagages transportent clandestinement ces insectes dans le monde entier. L'année 2009 a par exemple connu une véritable infestation sur l'itinéraire traditionnel des chemins de Compostelle amenant de nombreux partenaires, associations et hébergeants à se réunir et à réfléchir à une démarche commune qui a abouti à la mise en place d'une véritable campagne intitulée « Je ne marche pas avec la punaise ». Cette campagne permettra en 2010 (année jacquaire) de combiner l'effort des hébergeants et des transporteurs de bagages, qui s'engagent à traiter préventivement avec des produits bio et sans danger pour l'homme, avec celui des pèlerins et marcheurs, qui vont disposer d'un spray individuel, « naturel » lui aussi, pour traiter leurs propres affaires et sacs à dos ;
  • Le manque de communication entre les parties lors d'une infestation aggrave le problème. Certains locataires ne divulguent pas l'historique d'infestation aux punaises aux nouveaux arrivants, et certains locataires n'en parlent pas aux locataires voisins par honte ou crainte de manque à gagner financier.

Les insecticides sont efficaces mais peuvent, en cas d'usage excessif, faire plus de mal que de bien, ou favoriser l'apparition de souches résistantes[8]. La lutte contre ces ravageurs et leur éradication est rendue difficile en raison d'une résistance croissante aux insecticides, du manque de produits efficaces, et des problèmes de santé induits par la pulvérisation de matelas avec des pesticides[8].

Dans les pays chauds, le hamac est peut-être moins susceptible d'invasion par les punaises.

Moyens de lutte

Des pesticides (insecticides) sont fréquemment utilisés (ex. : chlorfenapyr[14]), mais des résistances sont décrites, en particulier aux pyréthrinoïdes, causées par des mutations[15] et deviennent de plus en plus fréquentes[16]. Le seul moyen chimique relativement fiable serait la fumigation du bâtiment / véhicule entière sous bâche avec le fluorure de sulfuryle. Ce gaz est commercialisé comme Vikan aux États-Unis et Profume en Europe, mais n'est pas homologué en France pour la désinsectisation des habitations.

Si plusieurs appartements d'un immeuble sont infestés, seul le traitement intégral a des chances d'être efficace.

Dans certaines situations, un chien détecteur de punaises est utilisé pour détecter les zones infestées et cibler les traitements de désinsectisation. Très souvent utilisée aux États-Unis et au Canada, cette méthode de détection existe également en France. En revanche, cette technique n'a pas encore fait ses preuves d'efficacité dans une étude scientifique contrôlée[17].

Un dispositif interceptant les punaises (à placer sous les pieds de lits) a été mis au point et testé[14]. Lors d'une expérience faite aux États-Unis dans un immeuble dont les appartements étaient infestés de punaises, ces dispositifs se sont avérés les plus performants pour piéger ou compter les punaises (219 ±135 punaises interceptées par lit et par appartement pour 10 semaines d'observation avec application de deux traitements insecticides différents selon les appartements)[14]. Pour juger de l'efficacité des telles isolations, il ne faut pas oublier que les punaises peuvent tomber sur le lit du plafond, si elles trouvent un moyen d'y monter.

Parmi ses prédateurs naturels qui fréquentent également les habitations humaines, on compte la Scutigère véloce (Scutigera coleoptrata)[18] et les araignées.

Il existe des moyens de lutte comme la température (congélation ou vapeur très chaude). Le repassage scrupuleux avec un fer à repasser vapeur est un moyen efficace contre les œufs et les punaises de lit adultes (à condition que les derniers ne s’échappent pas au cours de la procédure) cachés dans le linge ou les vêtements. Ainsi, le lavage des vêtements à 60 °C suffit à détruire les punaises adultes et les œufs, un simple trempage étant inefficace sur ces derniers[19]. Pour le même résultat, un repassage à vapeur est plus rapide qu'un lavage. Finalement, pour être complètement sûr du résultat, ou sur des objets plus épais, l'ébullition pendant 10-30 min dans une marmite est préférée, bien qu'elle puisse abîmer certains objets désinsectisés. L'aspirateur passé dans la pièce et dans la literie diminue significativement la population de punaises. Les œufs sont également aspirés. Il faut utiliser un aspirateur muni d'un sac qui doit être enlevé immédiatement après l'aspiration, placé dans un sac en plastique fermé, avant de l'éliminer. [20]C'est la combinaison des traitements thermiques et chimiques qui augmente la probabilité d'une éradication réussie.

Une fois désinsectisés, les objets doivent être préservés d'une re-contamination. Pour cela, des sacs plastiques transparents à fermeture étanche doivent être utilisés (sacs de congélation pour petits objets ou similaires pour des objets plus grands). Pour protéger les objets de façon efficace, il est nécessaire de faire un test d'étanchéité à l'air au préalable, de fermer les trous éventuels avec du scotch, et évidemment de bien fermer les sacs. Un marquage des sacs : objets propres / objets infestés peut également être utile.

Les meubles infestés jetés doivent être déposés directement aux déchetteries ou au moins marqués comme infestés par punaises de lit et donc dangereux, afin d'éviter la contamination de ceux qui peuvent éventuellement les reprendre.

Notes et références

  1. Pascal Delaunay, Jean-Michel Berenger, Dr Arezki Izri, Pr Olivier Chosidow, « Les punaises de lits — Cimex lectularius et Cimex hemipterus : biologie, luttes et santé publique », Riviera Scientifique, Centre hospitalier universitaire de Nice, Conseil général des Alpes-Maritimes, Muséum d'histoire naturelle de Nice, association des naturaliste de Nice et des Alpes- Maritimes, no 94, , pp. 91-106 (présentation en ligne, lire en ligne [PDF])
  2. (en) Arnaud Cannet, Mohammad Akhoundi, Jean-Michel Berenger, Gregory Michel, Pierre Marty et Pascal Delaunay, « A review of data on laboratory colonies of bed bugs (Cimicidae), an insect of emerging medical relevance », Parasite, vol. 22, , p. 21 (ISSN 1776-1042, PMID 26091944, DOI 10.1051/parasite/2015021, lire en ligne)
  3. J.M. Berenger, P. Delaunay et F. Pagès, « Les punaises de lit (Heteroptera, Cimicidae) : une actualité « envahissante » », Médecine tropicale, no 68, , p. 565 (lire en ligne [PDF])
  4. « Les Punaises », sur solutionsmaison.info (consulté le )
  5. Doggett SL, Russell R. ;Bed bugs - What the GP needs to know ; Aust Fam Physician. 2009 Nov;38(11):880-4. (Résumé en anglais)
  6. (en) Reinhardt K, Kempke D, Naylor RA, Siva-Jothy MT, Sensitivity to bites by the bedbug, Cimex lectularius, Med Vet Entomol, 2009;23:163-6
  7. (en) DeShazo RD, Feldlaufer MF, Mihm MC Jr, Goddard J, Bullous reactions to bedbug bites reflect cutaneous vasculitis, Am J Med, 2012;125:688-94
  8. (en) Goddard J et deShazo R. ; Bed bugs (Cimex lectularius) and clinical consequences of their bites ; Revue JAMA. 2009 Apr 1;301(13):1358-66. (Résumé en anglais)
  9. (en) Jerome Goddard et Richard de Shazo, « Psychological Effects of Bed Bug Attacks (Cimex lectularius L.) », The American Journal of Medicine, vol. 125, no 1, , p. 101–103 (DOI 10.1016/j.amjmed.2011.08.010, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) R.N. Charrel, J.-M. Berenger, M. Laroche et N. Ayhan, « Neglected vector-borne bacterial diseases and arboviruses in the Mediterranean area », New Microbes and New Infections, vol. 26, , S31–S36 (PMID 30402241, PMCID PMC6205580, DOI 10.1016/j.nmni.2018.08.015, lire en ligne, consulté le )
  11. (en) Jerome Goddard, « Bed Bugs (Cimex lectularius) and Clinical Consequences of Their Bites », JAMA, vol. 301, no 13, , p. 1358 (ISSN 0098-7484, DOI 10.1001/jama.2009.405, lire en ligne, consulté le )
  12. (en) Lowe CF, Romney MG, Bedbugs as vectors for drug-resistant bacteria, Emerging Infect Dis, 2011;17:1132-4
  13. Frédéric Jourdain, Pascal Delaunay, Jean-Michel Bérenger et Yvon Perrin, « The Common bed bug ( Cimex lectularius ) in metropolitan France. Survey on the attitudes and practices of private- and public-sector professionals », Parasite, vol. 23, , p. 38 (ISSN 1776-1042, PMID 27605306, PMCID PMC5018931, DOI 10.1051/parasite/2016038, lire en ligne, consulté le )
  14. (en) Wang C, Gibb T, Bennett GW. J ; Evaluation of two least toxic integrated pest management programs for managing bed bugs (Heteroptera: Cimicidae) with discussion of a bed bug intercepting device. Med Entomol. 2009 May; 46(3):566-71. (Résumé en anglais)
  15. (en) Zhu F, Wigginton J, Romero A et al. Widespread distribution of knockdown resistance mutations in the bed bug, Cimex lectularius (Hemiptera: Cimicidae), populations in the United States, Arch Insect Biochem Physiol, 2010;73:245-57
  16. (en) Tawatsin A, Thavara U, Chompoosri J et al. Insecticide resistance in bedbugs in Thailand and laboratory evaluation of insecticides for the control of Cimex hemipterus and Cimex lectularius (Hemiptera: Cimicidae), J Med Entomol, 2011;48:1023-30
  17. (en) Richard Cooper, Changlu Wang et Narinderpal Singh, « Accuracy of Trained Canines for Detecting Bed Bugs (Hemiptera: Cimicidae) », Journal of Economic Entomology, vol. 107, no 6, , p. 2171–2181 (DOI 10.1603/ec14195, lire en ligne, consulté le )
  18. http://www.bestioles.ca/invertebres/scutigeres.html
  19. (en) Naylor RA, Boase CJ, Practical solutions for treating laundry infested with Cimex lectularius (Hemiptera: Cimicidae), J. Econ Entomol, 2010;103:136-9
  20. New England Journal of medicine du 4 juin 2020 N Engl J Med 2020; 382:2230-2237https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMcp1905840?query=TOC

Voir aussi

Liens externes

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