Chartreuse de Portes

La chartreuse Notre-Dame de Portes (Cartusia Beatae Mariae Portarum) est un monastère de Chartreux implanté dans les montagnes du Bugey, à 1 000 mètres d'altitude environ, dans le département français de l'Ain et la commune de Bénonces.

Chartreuse
Notre-Dame de Portes
Présentation
Culte catholique
Type Rite cartusien
Rattachement chartreux
Début de la construction XIIe siècle
Autres campagnes de travaux XVIIe siècle
Protection  Inscrit MH (1947, Façades et toitures)
Géographie
Pays France
Région Auvergne-Rhône-Alpes
Département Ain
Ville Bénonces
Coordonnées 45° 51′ 48″ nord, 5° 28′ 58″ est
Géolocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Ain

Elle est la troisième chartreuse en termes d'ancienneté, la deuxième en France après la Grande Chartreuse. Elle est aussi appelée la Chartreuse des Saints car plusieurs des moines qu'elle abrita furent béatifiés ou canonisés.

L'ensemble formé par les façades et les toitures fait l’objet d’une inscription partielle au titre des monuments historiques depuis le [1].

Historique

Moines chartreux de Notre-Dame de Portes, lors du spaciement hebdomadaire.

La chartreuse fut fondée en , sur le site actuel, par deux moines noirs (c'est-à-dire bénédictins), Bernard et Ponce, originaires de l'antique et vénérable abbaye d'Ambronay. Désireux de vivre la vie érémitique, ils se retirèrent dans la montagne des Portes, "accompagnés de nombreux clercs et laïcs qui les suivaient"[2].

Le monastère s'éleva rapidement, mais l'église de la Maison Haute ne fut consacrée qu'en 1125, par l'archevêque de Lyon Humbald, assisté de l'évêque de Genève, Humbert de Grammont. Le fondateur et premier prieur, Bernard d'Ambronay, demanda très tôt à Guigues de rédiger une règle de vie, les futures coutumes des Chartreux ; ce même Bernard participa au premier chapitre général de l'Ordre, en 1140, puis au deuxième en 1155. Il eut un rayonnement spirituel important et marqua fortement l'Ordre naissant par sa personnalité.

L'église actuelle fut construite en 1660. À la Révolution, les bâtiments furent transformés en ferme avec plus ou moins de réussite, ce qui conduisit à leur ruine. Toutes les cellules du cloître, sauf une, furent démolies, afin d'en récupérer les pierres.

L'ordre des Chartreux racheta le domaine d'environ 210 hectares en 1855 et remit le tout en état selon les plans d'origine. Au début du XXe siècle, elle fut à nouveau abandonnée, les religieux étant expulsés de France par les lois anticléricales de la Troisième République, et reprise par un propriétaire laïc.

Durant les années 1930 elle abrita une hostellerie réputée pour son cadre, sa cuisine et sa cave, particulièrement fréquentée par une clientèle lyonnaise !

En 1951, les Chartreux rachetèrent Portes et restaurèrent les bâtiments conventuels conservés. C'est aujourd'hui une petite chartreuse comportant douze cellules autour du cloître qui renferme le cimetière, où reposent plusieurs centaines de moines. La chartreuse, qui ne se visite pas, est toujours en activité. Les moines vivent de l'exploitation des forêts de hêtres qui l'entourent.

La Correrie, ancien monastère des frères convers, est située deux kilomètres plus bas ; transformée en ferme lors de la suppression des correries par les Chartreux au XVIIe siècle, elle abrite encore les vestiges de l'ancienne église, consacrée en 1128, identifiée par un panneau d'information.

À proximité se trouve le calvaire de Portes, situé au sommet du mont Frioland, qui offre une belle vue panoramique sur toute la chaîne des Alpes du Nord.

Panoramique de la chartreuse de Portes, vue du nord-est.

"La chartreuse des Saints"

Porte fortifiée (XVIIe), dans l'angle sud de la clôture.

La chartreuse de Portes est appelée la chartreuse des Saints car certains de ses moines furent béatifiés ou canonisés.

Un premier groupe est constitué par les moines ayant officiellement reçu un culte dans l’Église. Ils sont au nombre de quatre :

Un second groupe concerne les moines qui sont morts en odeur de sainteté, mais ne reçurent pas officiellement de reconnaissance de culte. Cependant leur réputation de sainteté est attestée par de nombreux témoins contemporains.

  • Bernard II de Portis, (c. 1100-1152), prieur de Portes (1147), évêque de Belley (1136-1141). Il fut l'ami de Saint Bernard et reçut de lui les premiers Sermons sur le Cantique des Cantiques, à l'Avent 1135. Il ne faut pas le confondre avec le fondateur et premier prieur, Bernard d'Ambronay.
  • Bernard d'Ambronay, Bernard I de Portes, (1085-1158), fondateur et premier prieur. Ami de saint Bernard de Clairvaux et de saint Pierre le Vénérable, illustre abbé de Cluny, il fut prieur de Portes depuis la fondation en 1115 jusqu'en 1147. Il dut, malgré son grand âge, reprendre le gouvernement de son monastère entre 1150 et 1157. Ses vertus suscitèrent de nombreuses vocations parmi la noblesse des environs. C'est lui qui attira St Arthaud, le Bx Ayrald et St Anthelme, pour ne citer que les plus connus ; il les dirigea dans les voies de la sainteté. Sa piété amena à Portes un grand nombre de personnages importants qui venaient lui demander conseil et recommander leurs intentions aux prières d’une communauté très fervente. Sa réputation de sainteté était très grande. Après sa mort, miracles et guérisons fleurirent près de son tombeau[6]. Le biographe de saint Anthelme, Guillaume de Portes, a laissé un beau portrait de « dom Bernard, dont beaucoup de grandes œuvres saintes tant au spirituel qu’au temporel attestent combien fut grand son mérite auprès de Dieu et de quel souvenir il est digne : je veux dire l’acquisition du lieu et de terres considérables et suffisantes, la construction de la maison, sa direction énergique et sa richesse en biens abondants, le soin attentif des religieux et la discipline régulière, de bonnes habitudes et une religion pure dans toute la maison, une main libérale dans le Christ et tendue pour donner. « À d’autres monastères qui ne se suffisaient pas, il accordait aussi lui-même de nombreux et grands bienfaits. Car certaines maisons saintes, qui n’auraient pas tenu, subsistent grâce à l’aide qu’il leur fournit alors. Il donnait généreusement aux indigents, surtout aux religieux, et ce qui était donné l’était abondamment. Dieu lui avait fait cette grâce que tous ceux qui l’avaient vu ou même avaient entendu parler de lui l’aimaient d’une affection étonnante, tant de loin que dans le voisinage, en sorte que, même dans les régions lointaines, ils avaient plaisir à obéir à sa volonté quoi qu’il leur demandât de faire. En effet, dans la foule nombreuse des pêcheurs convertis à la pénitence par son conseil, on ne compte pas ceux qui furent, sur ses recommandations, placés dans diverses maisons religieuses lointaines et proches. « Déjà accablé de vieillesse, il demanda à se reposer du travail des affaires extérieures pour s’occuper de Dieu avec plus d’attention et, en même temps, se jugeant indigne d’être toujours le maître, il aima mieux pour une fois enfin être inférieur plutôt que supérieur. Aussi, après avoir abandonné le titre de prieur, avec l’adroite prévoyance d’un homme prudent dans le Seigneur et ne voulant pas mettre son espoir dans quelque chose d’incertain, il eut soin de mettre à sa place un homme sous la main duquel l’Ordre longtemps gardé dans la ferveur ne s’attiédit pas »[7]
  • Jean de Montemedio (c. 1090-1161), considéré pendant sa vie comme un maître spirituel apprécié et reconnu, que l’on aimait consulter. Il laissa plusieurs écrits sous forme de lettres[8].
  • Étienne de Chalmet (c. 1110-1177), prieur de Portes (1159-1177), frère cadet de Jean de Montemedio, il entra à Portes sur les instances de ce dernier, en 1135. Il écrivit aux novices cisterciens de Saint-Sulpice pour les encourager à la persévérance. En outre, d'après le RP Chifflet sj[9], « il composa plusieurs petits traités de dévotion et écrivit plusieurs lettres pleines d’une suave odeur de sainteté ». Ces écrits n'ont pas encore été retrouvés.
  • Hugues II (c. 1080-1157), moine de Chartreuse, évêque de Grenoble (1132-1147), archevêque de Vienne (1147-1153), moine de Portes. Il fut choisi en 1130 par saint Hugues, évêque de Grenoble et ami de saint Bruno, comme évêque coadjuteur de Grenoble, avec droit de succession.
  • Bernard de la Tour (1201-1258), prieur de Portes (1229-1247 puis 1249-1253), treizième général de l'Ordre des Chartreux. (1247-1249 puis 1253-1257)

Économie

La subsistance des moines, qui assurent l’entretien du monastère, est assurée par un petit artisanat réalisé dans les cellules, dont la confection des emballages en bois des bouteilles de liqueur de Chartreuse et par divers travaux forestiers[10].

Bibliographie

  • Lettres des premiers chartreux : (II) les moines de Portes, Bernard, Jean, Étienne (texte critique, traduction et notes par ‘un chartreux’), coll. Sources chrétiennes No 274, Paris, Ed. du Cerf, 1980, 240 pages.
  • Dubois (Jacques), "L'implantation monastique dans le Bugey au Moyen Âge", Journal des savants, 1971, no 1, p. 15-31. article

Références

  1. « Chartreuse Sainte-Marie-des-Portes », notice no PA00116312, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  2. Charte de l'abbé Didier d'Ambronay, 1115. Archives départementales de l'Ain, série H, liasse 218, cahier 1
  3. Chanoine Léon Joly, « Le bienheureux Ayrald, évêque de Maurienne, moine de Portes (chartreuse). » Dans : Bulletin de la Société Gorini (1934) p. 121 ss.
  4. Chanoine Léon Joly, « Saint Étienne de Châtillon (O.Cart.), prieur de Portes. » Dans : Le Bugey no 27, (1933), p. 350-394.
  5. Jean Picard, Saint Antelme de Chignin, Vie par son chapelain. Belley, 1978, 85 + 115 p.
  6. Dom Ambroise-Marie Bulliat & chanoine Léon Joly, La chartreuse Sainte Marie de Portes, Analecta Cartusiana 67/1 et 67/2, Salzbourg, 2001, in-8, 2 vol., p. 45-49 ; 77-91 ; 125-131.
  7. Guillaume de Portes, Vita Antelmi, § 10-11 éditée par Jean Picard, Saint Antelme de Chignin, Vie par son chapelain, Belley, 1978, p. 12-13.
  8. Un chartreux, Lettres des premiers chartreux, II, Les moines de Portes Bernard-Jean-Étienne. Sources Chrétiennes, no 274, Cerf, Paris, 1980.
  9. (la) Pierre-François Chifflet s.j., Manuale solitariorum ex veterum Patrum cartusianorum cellis depromptum. Dijon, Chavance, 1657, p. 26.
  10. http://www.chartreux.org/fr/maisons/portes/

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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