Cheikh Boumaza

Cheikh Boumaza (en arabe : الشيخ بومعزة ; en berbère : ⵛⵉⵅ ⴱⵓⵎⵄⵣⴰ) dont le nom véritable est Mohammed ben Ouadah (en arabe : محمد بن وضاح ; en berbère : Muḥend n Widaḥ), né vers 1822 dans le Ouarsenis-Dahra durant la Régence d'Alger (actuel Algérie), mort exilé après 1879[1] sans aucune information moindre au sujet de son lieu de décès exact, peut-être en Anatolie ottomane (actuel Turquie) ou à Baghdad lorsqu'il était dans la vilayet de Bagdad (actuel Irak) sous l'Empire ottoman, était un résistant Algérien très actif durant la conquête de l'Algérie par la France puis durant la colonisation française. Il change son nom pour Mohammed ben Abdallah (en arabe : محمد بن عبد الله ; en berbère : Muḥend n ʔˤbdla), auquel il tient, pendant ses années de guerre, puis d'internement en France.

Pour les articles homonymes, voir Boumaza.

(fr)Cheikh Bouma‘âza
(ar) الشيخ بومعزة
(ber)ⵛⵉⵅ ⴱⵓⵎⵄⵣⴰ
Portrait du Cheikh Bouma‘âza en 1847.
Nom de naissance (fr)Muhammad Ibn Waddah
(ar)محمد بن وضاح
Alias
Abû Mā’zâ
Naissance
Ouarsenis-Dahra, Régence d'Alger
Décès
Baghdad, Vilayet de Bagdad
Nationalité Algérienne
Activité principale
Ascendants
Sîdî Waddâh ‘Âssam al-Miknâsî Chérifien de la branche des Sûlāymanîdes
Famille
Waddâh ibn 'Abd al-Lâh (père)
'Îshâ bint Bû Hannî (mère)
'Abd al-Lâh (frère)
'Abd al-Qâdir (frère)
'Umar (frère)

Les habitants du Dahra le surnomment très rapidement Bou Maza (Abû Mā’zâ, en arabe veut dire : « l'homme à la chèvre ») et les Français reprennent systématiquement ce surnom que l'intéressé refuse longtemps. Il est le chef de la résistance populaire à la colonisation française qui embrase principalement le Dahra, la vallée du Chélif et l'Ouarsenis entre 1845 et 1847.

Prépotence et Témoignage

Bouma‘za prétendait descendre de la famille chérifienne des Idrissides. Depuis 1845, il entretenait l'agitation la plus vive dans la subdivision d'Orléansville. Il dépose les armes et se constitue prisonnier en 1847[2].

La physionomie pleine de feu et d'audace de ce jeune homme, à peine âgé de vingt-cinq ans, les témoignages du respect empressé qu'il reçoit des Arabes au milieu même des nos camps prouvent que Boumaza avait une position beaucoup plus forte qu'on ne le croyait[2]. Son sens aigu du secret lui permettra de protéger sa famille et ses alliances contre les représailles de l’armée coloniale[2].

Internement en France et évasion

Après sa reddition, en 1847, Cheikh Boumaza sera enfermé au Château de Ham d’où il tentera de s’évader. Rattrapé, il écrira une lettre à Napoléon III qui l’autorisera à s’exiler dans l'empire ottoman. Il séjournera de nombreuses années à Bagdad, où il prend le nom d’Ahmad ben Ahmad[3].

Biographie

Il est originaire de la tribu des Awlâd Khu'îddam, dans la vallée du Chélif, entre le Dahra et le Ouarsenis et il appartient à la fraction des Awlâd Sîdî Waddâh et, effectivement, jouit d'une ascendance idrisside (fraction des Sûlāymanîdes du Ouarsenis, descendant du chérifien Slimane Ier), prestigieuse et reconnue[3].

Cependant, certains Berbères avaient l'habitude de falsifier leur généalogie pour s'anoblir, en faisant semblant de descendre du prophète. La nisba (appartenance tribale) de son ancêtre, Sidi Waddah, est al-Miknasi. Cela veut dire que c'est un Berbère de la tribu berbère zenète des Meknassa.

D'innombrables lettrés de Nédroma appartenant à la famille ar-Rahâl, les Cheikhs Abû ar-Râs, premier et second du nom, l'insurgé Cheikh Abû Ma'za, le Cheikh as-Snûssî (fondateur de l'illustre confrérie as-Sânûssîyyâ ainsi que de la dynastie al-Sânûssî libyenne)[4].

Politiquement, dans le cadre nouveau de la domination française, la « zâwiyya des Awlâd Sîdî Waddâh » relève de l’aghalîk des Beni-Ouragh, dirigé par leurs chef l'Agha chérifien Muhammad bel-Hâjj[5]. Il passe pour être membre de la confrérie de Mawley-Taïeb, mais sans certitude, car il est tout aussi probable qu'il appartienne à la Confrérie des Derqaoua ou comme il le clame lui-même à celle de Sidi Abd-el-Kader el-Djilani[1]. Il mène pendant trois ans la vie austère des derviches. Au moment où Abd el-Kader s'est réfugié au Maroc, il se proclame le Mulay Saâ (en arabe «le Maître de l'heure») et appelle les habitants à la guerre sainte[6].

Histoire

En avril 1845, il réunit une armée dans le Dahra, prêche la révolte contre les Français et regroupe des partisans de plus en plus nombreux. Le 20 avril 1845, la révolte gagne les environs de Ténès où des insurgés attaquent un camp de travailleurs sur la route de Ténès à Orléansville. De son côté, Bû Ma'za assiège sans succès ce dernier centre d'occupation français. Ses troupes sont battues à plusieurs reprises, mais il réussit à donner de l'ampleur au mouvement[6]. Mais ses tentatives ayant connu des revers, font qu'il s'éclipse à partir du milieu de juin, moment où prend place notamment l'épisode des Enfumades des grottes des Oulad Riah[1]. ll réapparaît par un coup d'éclat : le 17 juillet, il attaque l'Agha Hadj-Ahmed, qui est tué près de Mazouna.

Harcelé par les colonnes mobiles, parties d'Orléansville, de Mostaganem, Ténès et Miliana qui font à ses alliés une guerre sans relâche, il finit par trouver asile chez les Flittas. Différents chefs de guerre surgissent alors sur divers points de l'Algérie, prenant le nom du chérif Bou-Maza, et plusieurs d'entre eux sont pris et tués[6]. Le 21 septembre, Bû Ma'za attaque dans les défilés de Flittas, la colonne du général de Bourjolly et la réduit à la défensive derrière la basse Mina[6].

Rentré du Maroc, Abd el-Kader reprend l'offensive en septembre 1845 avec ses troupes, des contingents des Trara, des Hautes Plaines jusqu'en Basse-Kabylie. L'entreprise commence par la retentissante victoire de Sidi-Brahim, amenant la destruction de la colonne du lieutenant-colonel de Montagnac. Bou-Maza continue la lutte, souvent en concertation avec l'émir, voire en le secondant sans rechigner, mais sans en accepter véritablement la suprématie[1]. Battu une première fois le 30 septembre par la cavalerie française, il est repoussé à Mostaganem le 18 octobre et doit se réfugier dans le Dahra. D'une grande mobilité, il propage le mouvement de résistance dans la deuxième phase de l’insurrection[7] qui dure de juillet 1845 à juillet 1846[1].

Mais, la guerre, implacable depuis le début, entame nombre de ses partisans. Beaucoup sont tués dans les combats[1]. Quelques-uns commencent à se détacher de lui. Il est battu le près de Tadjena par le colonel Canrobert et perd son meilleur appui, le caïd des Beni Hidja. Le 15 mars, il réussit à reprendre la campagne avec un millier d'hommes du bas Dahra. Atteint, sur l'Oued-Ksob, par le colonel colonel Saint-Arnaud en avril 1846, il est blessé d'une balle et perd pour longtemps l'usage d'un bras. Il parvient encore une fois à se soustraire aux poursuites des Français et rejoint Abd el-Kader à Stettin : tous deux fuient au Maroc. Abd-el-Kader ne supporte pas la rivalité du chérif et lui fait subir de nombreuses vexations. Se sentant menacé dans son existence même, Bû Ma'za parvient à rentrer en Algérie[1]. Le , il soutient dans l'oasis des Ouled Djellal un combat meurtrier contre le général Herbillon. À bout de ressources, rentré dans le Dahra, il décide de se rendre le 13 avril au colonel Saint-Arnaud[6].

Emmené en France, il est interné à Paris, où on lui donne un appartement aux Champs-Élysées, près de l'hôtel de la princesse Belgiojoso, qui se charge de son éducation ; il reçoit du gouvernement une pension de 15 000 francs et ne tarde pas à devenir tout à fait à la mode. Il est question de lui donner le commandement d'un corps « indigène » en Algérie, mais les actes de cruauté qu'on lui reproche, sans preuves, font abandonner cette hypothèse. Il s'enfuit de Paris dans la nuit du à la faveur de la révolution de 1848, mais est arrêté à Brest et enfermé au fort de Ham. Il est remis en liberté le , par le prince Louis-Napoléon, qui lui rend même sa pension. En 1854, il quitte définitivement la France et commande un corps de bachi-bouzouks dans la campagne d'Anatolie. Il reçoit au mois d'août 1855 le grade de colonel dans l'armée ottomane. Il séjourne plusieurs années à Bagdad, et meurt après 1879[8].

Liens externes

Notes et références

  1. Aziz Sadki, « HISTOIRE DE L'ALGERIE », sur HISTOIRE DE L'ALGERIE (consulté le )
  2. Revue des deux mondes: R2M 1847, p. 428.
  3. Histoire de l'Algérie, overblog
  4. L'intérieur du Maghreb: XVe-XIXe siècle, Jacques Berque et GALLIMARD 1978, p. 21.
  5. Histoire de l'Algérie, mouvement chérifien, overblog.
  6. William Duckett (Cette notice est intéressante mais comporte beaucoup d'erreurs : Bû Ma'za n'est pas originaire de la région entre Tlemcen et Mascara ; il n'a aucun lien avec l'événement de Sidi-Bel-Abbès ; ce n'est pas un soulèvement de Kabyles dans le sens que prend cet ethnie aujourd'hui...), Dictionnaire de la conversation et de la lecture, vol. 3, Firmin Didot, (présentation en ligne)
  7. Rozet et Carette (Ces auteurs évoquent la période de novembre 1845 à juillet 1846), L'univers, histoire et description de tous les peuples : Algérie, Paris, Firmin-Didot, (présentation en ligne)
  8. El Watan, 23 juin 2013 Yacine Alim (L'article n'est pas une source véritable puisqu'il reprend le résultat des recherches historiques menées sur Bû Ma'za par Aziz Sadki.), « journal », El Watan,
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