Bataille financière

Une bataille financière, ou bataille boursière, survient à la suite d'une offre publique, en général d'achat ou d'échange, hostile. Elle débute lorsqu'une société cible fait appel à des sociétés, dites alliées, à qui elle peut livrer ses titres ou fusionner pour empêcher la société hostile d'en prendre le contrôle.

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Illustrations

1968 : BSN/Saint-Gobain

En France, la première grande bataille boursière a lieu en 1968-1969, du fait d'une tentative avortée de prise de contrôle de Saint-Gobain par BSN[1]. Il s'agit de la troisième offre publique ayant lieu en France, après celle de Fiat sur Simca en 1966 et celle de Béghin sur Say en 1967, toutes deux passées inaperçues dans la presse et auprès du public[2]. En 1968, BSN, groupe relativement récent, a un chiffre d'affaires d'1 milliard de francs, contre 7 milliards pour Saint-Gobain, qui est par ailleurs la plus vieille entreprise de France. Antoine Riboud, PDG de BSN, décide tout de même de lancer une offre, sur les conseils de la banque Lazard[2], qui juge Saint-Gobain fragile en raison de sa situation de trésorerie et d'une crise de succession à sa tête. Les banques Neuflize Schlumberger Mallet et Paribas partagent son analyse[2]. L'offre est lancée le 21 décembre 1968, sous la forme d'une OPE, les actionnaires de Saint-Gobain se voyant proposer des obligations convertibles, un produit alors tout à fait inconnu du grand public[3]. La veille, Antoine Riboud, qui mise sur l'effet de surprise, estimait, devant les représentants d'Havas, pouvoir se passer de publicité dans cette affaire[3]. Arnaud de Vogüé, PDG de Saint-Gobain, riposte en s'appuyant sur les grands industriels, et en particulier Jacques Georges-Picot, président de Suez, et Roger Martin, de Pont-à-Mousson, qui envisage un temps une contre-OPA[2]. Il a recours à la communication, et plus particulièrement à Publicis, pour moderniser l'image du groupe, intéresser le grand public à l'affaire, et mobiliser les petits porteurs à ses côtés[2]. Il sollicite enfin, dans le plus grand secret, des banques étrangères pour qu'elles fassent remonter le cours de l'action, de sorte à ce que l'OPE perde de son attrait financier pour les petits porteurs, qui préféreront encore vendre leurs titres plutôt que d'attendre le remboursement des obligations proposées[2]. Arnaud de Vogüé essaie enfin, mais avec moins de succès, de mobiliser le gouvernement à ses côtés, prétendant que BSN est contrôlée de l'étranger, argument écarté par le Premier ministre, Maurice Couve de Murville[4]. Le 24 janvier 1969, BSN n'a obtenu que 843 000 actions sur un total de 3 millions nécessaires pour prendre le contrôle, et se retire[2] ; son offre hostile a échoué. Les deux groupes entament une profonde mue stratégique, et la place de Paris entre véritablement dans l'ère des OPA.

1998 : BNP/Paribas/Société générale

Une autre bataille boursière a lieu en 1998-1999, lorsque la Société générale lance une offre amicale sur Paribas. La BNP lance alors une OPE inamicale sur ces deux banques, qui aboutit au rachat de Paribas et à la formation du groupe BNP Paribas[1]. Au même moment, Total et Elf s'affrontent par offres successives[5].

2006 : Arcelor/Mittal

C'est encore le cas en 2006, avec les sociétés Arcelor et Mittal Steel Company, respectivement premier et second producteurs d'acier mondiaux. Lakshmi Mittal, PDG de la compagnie qui porte son nom, dévoile son intention, le , d'entrer dans le capital de la holding européenne au-delà des 33 %, seuil au-dessus duquel la société est obligée de lancer une OPA. Celle-ci est bien sûr refusée par Guy Dollé, Directeur Général d'Arcelor, et devient donc hostile. La Bataille financière débute lorsque Guy Dollé fait appel à Alexeï Mordachov, PDG de Severstal, compagnie russe, et lui propose une fusion. L'accord est signé le . Cet acte dans une bataille financière est appelé Contre-OPA.

2014 : Club Méditerranée

En 2014-2015, le Club Méditerranée est l'objet des convoitises du groupe Fosun contre d'Andrea Bonomi ; ce dernier finit par céder après l'intervention de la justice et de l'AMF[6].

En mai 2013, Fosun lance une OPA amicale sur le Club Méditerranée, au prix de 17 euros par action, avec le soutien du fonds Ardian. Le groupe se heurte à l'Association de défense des actionnaires minoritaires et à CIAM, qui contestent la régularité de l'offre[7]. Le temps ainsi gagné permet à Andrea Bonomi et à sa société Global Resorts d'acheter au fil de l'eau des actions du Club Méditerranée. Il finit par faire une contre-offre à 21 euros l'action, qui lance une surenchère[7]. Elle est remportée le 19 décembre 2014 par Fosun, à 24,60 euros l'action.

2020 : Veolia/Suez

En 2020-2021, l'offre amicale, puis hostile, de Veolia sur Suez déclenche une bataille qui met aux prises Veolia, Engie, ainsi que les fonds Ardian et Antin[8],[9].

Articles connexes

Références

  1. Dominique Plihon, « Compte rendu dans la revue historique de juillet 2018 sur l'ouvrage d'Hubert Bonin & Bertrand Blancheton, Crises et batailles boursières en France aux XXe et XXIe siècles », sur http://hubertbonin.fr, (consulté le )
  2. « BSN - Saint-Gobain : l'OPA qui ébranla le capitalisme français », sur Les Echos, (consulté le )
  3. « Il y a vingt ans...BSN-Saint-gobain », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
  4. « Quand Saint-Gobain résista à Antoine Riboud (1969) », sur Franceinfo, (consulté le )
  5. « Les batailles boursières n'ont plus la cote », sur Les Echos, (consulté le )
  6. « L'interminable bataille boursière autour du Club Med », sur Challenges (consulté le )
  7. « Les dessous de la bataille boursière du Club Med », sur LExpansion.com, (consulté le )
  8. « Comment Engie a stoppé les ambitions d’Ardian sur Suez », sur BFM BUSINESS (consulté le )
  9. « Suez : les fonds Ardian et Antin toujours aux aguets », sur Les Échos, (consulté le )
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