Barrage d'Itaipu

Le barrage d'Itaipu correspond à la centrale hydroélectrique d'Itaipu ; il est situé sur le rio Paraná, à la frontière entre le Brésil et le Paraguay, construit par les deux pays entre 1975 et 1982. La centrale est aujourd'hui la seconde au monde en puissance installée et reste la première en quantité cumulée d'énergie produite. Son nom signifie : « la pierre qui chante » en guarani et fait référence à la petite île située sur le fleuve avant les travaux.

Pour les articles homonymes, voir Itaipu (œuvre symphonique).

Le lac de retenue a une superficie de 1 350 km2, allant de Foz de Iguaçu au Brésil à Ciudad del Este au Paraguay, jusqu'à Guaíra et Salto del Guairá 150 km au nord.

Le premier turbo-alternateur est entré en service en  ; le dix-huitième, le . Deux nouveaux groupes ont été mis en service en 2006 portant la puissance totale installée à 14 000 MW. Les vingt groupes de 700 MW sous une hauteur de chute nominale de 118 m, produisent annuellement plus de 90 térawatts-heures (TWh). Quatre-vingt-dix pour cent de la production de la centrale est consommée au Brésil. En 2013, la centrale a établi un record de production de 98,6 TWh, subvenant alors à 90 % de la demande d'électricité paraguayenne et à 19 % de la consommation brésilienne[1].

Actuellement, la centrale hydroélectrique d'Itaipu détient le record mondial de production cumulée d'électricité et ce, grâce à son ancienneté et aux conditions hydrauliques optimales du site.
La centrale du barrage des Trois-Gorges en Chine détient le titre de plus grande centrale hydroélectrique du monde en puissance totale installée.

Le barrage d'Itaipu a induit un lourd impact sur l'environnement, inondation de 1 500 km2 de forêts et de terres agricoles, le déplacement de populations, l'engloutissement de la cascade des Sept Chutes  également connu sous le nom Salto de Sete Quedas , qui était non seulement un site touristique et naturel important en Amérique du Sud mais aussi les plus importantes chutes d'eau du monde en volume.

Cependant le barrage d'Itaipu est selon l'American Society of Civil Engineers (Association américaine des ingénieurs en génie civil) l'une des sept merveilles du monde moderne.

Historique

Négociations entre le Brésil et le Paraguay

La construction de l'aménagement hydroélectrique est le résultat de longues négociations entre les deux pays dans les années 1960. Le Ata do Iguaçu (accord d’Iguaçu) a été signé par les ministres des affaires étrangères des deux pays, Juracy Magalhães et Sapena Pastor, le . Cet accord était une déclaration jointe d’un intérêt commun à étudier l’exploitation des ressources hydriques partagées par les deux pays à la naissance du rio Paraná ; des chutes de la cascade des Sept Chutes à l'embouchure du rio Iguaçu. Le traité lançant officiellement le projet fut ratifié en 1973.

Les termes du traité, qui expire en 2023, sont l’objet d’un mécontentement général au Paraguay. Le gouvernement du président Fernando Lugo promit de renégocier les termes du contrat avec le Brésil, qui resta longtemps hostile aux négociations[2].

En 2009, le Brésil accepta un paiement de l’électricité au Paraguay plus équitable, autorisant le Paraguay à vendre directement l’énergie aux sociétés brésiliennes, au lieu de passer par la société brésilienne ayant le monopole[3],[4].

Début de la construction

En 1970, le consortium constitué des sociétés IECO (États-Unis) et ELC Electroconsult S.p.A (Italie) remporte l’appel d’offre international concernant les études de faisabilité et l’élaboration du projet de construction. Les études commencent en février 1971.

Le , le Brésil et le Paraguay signent le traité d'Itaipu.

Le , l’entreprise Itaipu Binational est créée pour diriger la construction de la centrale. Les travaux commencent en janvier 1975.

La construction fait appel à 40 000 travailleurs directs, 12 500 000 m3 de ciment, soit l'équivalent de 212 fois le stade Maracanã, et une quantité d'acier équivalente à 380 fois la tour Eiffel.

En comparaison du tunnel sous la Manche, Itaipu a utilisé quinze fois plus de ciment et creusé un volume huit fois supérieur. Une opération appelée Mymba Kuera, qui signifierait « prend l'animal » en tupi-guarani, fut mise en place avant la formation du réservoir dans la zone engloutie. Des équipes du secteur de l'environnement d'Itaipu se sont efforcées de sauver des centaines d'exemplaires des espèces animales de la région.

Itaipu de nuit.

Détournement du rio Paraná

Le , le lit du rio Paraná est détourné afin d’en assécher une partie pour pouvoir y construire le barrage.

Accord entre le Brésil, le Paraguay et l’Argentine

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Le , les trois pays signent un accord établissant les règles concernant le niveau de la rivière à respecter, ainsi que les seuils de changement sur celui-ci lors des déversements. Ces trois pays étaient alors régis par des dictatures militaires. L’Argentine est conviée à ces discussions car, en cas de conflit, le Brésil pouvait ouvrir les canaux de décharge, augmentant le niveau de l’eau dans la rivière Plata et noyant ainsi la ville de Buenos Aires.

Formation du lac

Le remplissage du réservoir du barrage commence le , lorsque les travaux du barrage sont terminés. Le à 10 heures, l’eau atteint une hauteur de cent mètres et parvient à hauteur des déversoirs de crues. Ce remplissage rapide fait suite aux importantes pluies de l’époque.

Début de la production

La première unité de production électrique est mise en service le . Les dix-huit premières unités furent installées à raison de deux ou trois par an. Les deux dernières unités entrèrent en service en 1991.

Les chutes englouties.

Effet sur la société

Au lancement de la construction du barrage, 10 000 familles vivant au bord du rio Paraná ont été déplacées. Nombre de ces familles ont trouvé refuge dans la ville de Medianeira, non loin du point de confluence des rivières Iguaçu et Paraná. De plus, la zone a été submergée, détruisant une partie de la faune et de la flore. On remarque aussi l'inondation de la cascade des Sept Chutes, qui étaient alors les plus grandes chutes du monde par leur volume.

Impact sur l'environnement

Après la fermeture des écluses du barrage, presque 1 500 km2 de forêts et terres agricoles sont engloutis. La cascade des Sept Chutes, en portugais : Salto de Sete Quedas ou encore en espagnol Saltos del Guairá (c'est-à-dire une des plus fascinantes formations naturelles de la planète) disparut. L'opération Mymba Kuera permit à des volontaires de sauver 4 500 animaux (singes, porcs-épics, lézards, araignées, tortues...) qui furent amenés dans une région voisine à l'abri de l'eau.

Impact social

L'installation de la centrale a engendré le déplacement de 42 444 personnes dont 38 440 travaillaient la terre, vivaient de l'agriculture locale[5]. De nombreux problèmes sociaux firent surface. Une grande partie des familles délogées vivaient en marge du fleuve Paraná. Certaines familles se réfugièrent à Medianeira une ville pas très éloignée du confluent du Paraná avec son affluent l'Iguaçu. Quelques familles se sont finalement jointes au mouvement social le plus important au Brésil : le MST ou Mouvement de travailleurs ruraux sans terre. Le miroir d'eau de l'usine a noyé diverses propriétés d'habitants de l'extrême ouest de l'État du Paraná. Les indemnités ont permis aux agriculteurs de racheter de nouvelles terres. Des milliers ont émigré vers le Paraguay attirés par des prix moins élevés et créant le phénomène des Brasiguaios : Brésiliens et leurs familles qui résident au Paraguay à la frontière brésilienne. 148 ouvriers travaillant sur le chantier sont morts durant les travaux : 144 directement sur le chantier et quatre en se rendant à leur lieu de travail.

Merveille du monde moderne

En 1994, l'American Society of Civil Engineers a élu le barrage d'Itaipu comme l'une des sept merveilles du monde moderne.

Il a par ailleurs inspiré la symphonie Itaipu de Philip Glass, qui a visité l'ouvrage en 1988.

Panorama du barrage d'Itaipu.

Augmentation de la capacité de production en 2006

Les deux dernières des vingt unités de production électrique démarrèrent respectivement en septembre 2006 et mars 2007, amenant la puissance de production à 14 000 MW et achevant la centrale. L’augmentation de la capacité permet désormais de conserver 18 unités en production en permanence pendant que 2 autres sont arrêtées pour maintenance. À cause d’une clause dans le traité signé entre le Brésil, le Paraguay et l’Argentine, le nombre d’unités en production simultanément est limité à 18.

La puissance nominale de chaque unité génératrice (turbine + générateur) est de 700 MW. Mais, à cause d’une hauteur d’eau entre le réservoir et le lit de la rivière en aval plus importante aujourd’hui qu’à la conception du barrage, cette puissance est désormais de 750 MW (durant la moitié du temps pour chaque unité génératrice).

En comparaison, toute l’eau des chutes d'Iguazú ne fournirait assez de puissance que pour alimenter 2 des 18 unités génératrices du barrage.

Transmission de l’énergie

Sur les 18 unités génératrices installées, 9 d’entre elles produisent en 50 Hz, la fréquence utilisée au Paraguay, les 9 autres en 60 Hz, la fréquence utilisée au Brésil. Un convertisseur de fréquences est également présent au Brésil pour transformer l’électricité non utilisée par le Paraguay de 50 Hz en 60 Hz.

Statistiques

Construction

  • Le cours du septième plus grand fleuve du monde a été déplacé, ainsi que l’ont été 50 millions de tonnes de terre et de roche.
  • Le béton utilisé pour la construction du barrage aurait permis de réaliser 210 stades Maracanã.
  • Le fer et l’acier utilisés dans cette construction auraient permis de réaliser 380 Tours Eiffel.
  • Le volume de terre et de roche extrait pour la construction du barrage est 8,5 fois plus important que celui extrait lors de la construction du tunnel sous la Manche ; 15 fois plus de béton a également été utilisé.
  • Environ 40 000 personnes ont travaillé à la construction.

Station de production et barrage

  • La longueur totale du barrage est de 7 235 m. Son point le plus haut culmine à 225 m.
  • Le débit maximum des 14 canaux de décharge est de 62 200 mètres cubes par seconde, ce qui correspond à 40 fois le débit des chutes d'Iguazú.
  • Le débit nécessaire à deux unités génératrices (700 m3 s−1 chacune) correspond au débit moyen de ces chutes.
  • Le barrage fait économiser au Brésil 434 000 barils (69 000 m3) de pétrole par jour.
  • Le réservoir du barrage est le septième plus grand en taille du Brésil, mais il est celui qui a le meilleur rapport entre la quantité d’électricité produite et la surface inondée. Pour une puissance de 14 000 MW, 1 350 km2 ont été inondés. Le second plus puissant barrage du Brésil, « Tucurui », a requis l’inondation de 2 430 km2 pour produire 8 000 MW.
Cavité à l'intérieur du barrage.
Production annuelle d’énergie[6]
Année Nombre d’unités
installées
GWh
1984 0–2 277
1985 2–3 6 327
1986 3–6 21 853
1987 6–9 35 807
1988 9–12 38 508
1989 12–15 47 230
1990 15–16 53 090
1991 16–18 57 517
1992 18 52 268
1993 18 59 997
1994 18 69 394
1995 18 77 212
1996 18 81 654
1997 18 89 237
1998 18 87 845
1999 18 90 001
2000 18 93 428
2001 18 79 307
2002 18 82 914
2003 18 89 151
2004 18 89 911
2005 18 87 971
2006 19 92 690
2007 20 90 620
2008 20 94 684
2009 20 91 651
2010 20 85 970
2011 20 92 245
2012 20 98 287
2013 20 98 630
20142087 795
20152089 215[7]
201620103 098[8]
Total202 415 789

Lien externe

Voir aussi

Notes et références

  1. (en) « Energy », sur le site officiel du barrage.
  2. (en) Andrew Nickson, « Paraguay: Lugo versus the Colorado Machine », sur Open Democracy, (consulté le ).
  3. (en) « Why Brazil gave way on Itaipu dam », sur BBC news, (consulté le ).
  4. (en) Alexei Barrionuevo, « Energy Deal With Brazil Gives Boost to Paraguay », New York Times, (lire en ligne, consulté le ).
  5. (en) Bogumil Terminski, Development-Induced Displacement and Resettlement : Theoretical Frameworks and Current Challenges, Genève, (lire en ligne).
  6. « Production annuelle d'électricité », sur Itaipu Binacional (consulté le ).
  7. (es) « Itaipu superó a represa china en producción de energía », sur ABC.
  8. (es) « Brasil retiró casi 92 millones MWh de la producción récord de Itaipú », sur ABC.


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