Syndrome de sécrétion inappropriée d'hormone anti-diurétique

Le syndrome de sécrétion inappropriée d'hormone anti-diurétique (SIADH), ou syndrome de Schwartz-Bartter, est un syndrome responsable d'hyponatrémie de dilution. Il se caractérise par une libération excessive d'hormone antidiurétique (ADH ou vasopressine) de l'hypophyse postérieure [1].

Syndrome de sécrétion inappropriée d'hormone anti-diurétique
Spécialité Endocrinologie
Symptôme Hyponatrémie
CIM-10 E22.2
CIM-9 253.6
DiseasesDB 12050
MedlinePlus 003702
eMedicine 246650
eMedicine emerg/784  med/3541 ped/2190
MeSH D007177

Mise en garde médicale


Historique

Ce syndrome a été décrit pour la première fois par des chercheurs de Boston, Massachusetts et Bethesda, Maryland (dont le Dr Bartter) dans le cas de patients atteints de cancer du poumon[2].

Vue tridimensionnelle de l'hypophyse (en rouge)

Physiopathologie

L'hormone anti-diurétique (ADH) contrôle la concentration osmolaire de l'organisme autour de 285 mOsm/kg d'eau (Posm = [Na+ x 2] + Glycémie (mmol/L)) [3]. Elle maintient une concentration osmolaire stable par l'intermédiaire du volume d'eau contenu dans le corps humain. L'ADH entraîne une réabsborption d'eau « pure » au niveau du tube collecteur en stimulant l'insertion d' aquaporines de type 2[4], diminuant ainsi la diurèse. L'eau retenue permet de diluer les osmoles en trop et donc d'arrêter la stimulation de la sécrétion d'ADH. On a donc une hyponatrémie hypo-osmolaire normovolémique[5].

Les mécanismes de sécrétion d'ADH en dehors de ses contrôles habituels sont imparfaitement élucidés. Des tissus deviennent capables de sécréter une hormone semblable à l'ADH en grande quantité ; c'est le cas des cancers et infections broncho-pulmonaires.


Clinique

Il n'y a pas de signe spécifique de ce syndrome. Les signes majeurs sont ceux de l'hyperhydratation intracellulaire ou hyponatrémie ; nausées, vomissements, troubles du comportement et confusion. Dans les cas d'hyponatrémie sévère, le coma et les convulsions sont fréquentes. Nous pouvons tout de même noter une corrélation entre la natrémie et les signes cliniques[5]:

  • >125 mmol/L: la/le patient-e peut-être asymptomatique ou présenter:
    • anorexie, nausée, vomissement voire des troubles de l'attention et de la marche.
  • entre 120 et 125 mmol/L: confusion, crampes, céphalées, troubles de l'équilibre et cognitifs. Il est intéressant de noter que le risque de chute et de fracture est augmenté à cause de l'ostéoporose et de la rhabdomyolyse favorisées par l'hyponatrémie chronique.
  • entre 115 et 120 mmol/L: stupeur, troubles psychiatriques divers.
  • <115 mmol/L: convulsions, coma.

Les signes cliniques sont d'autant plus importants que l'installation de l'hyponatrémie est rapide.

Biologie

De nombreux critères biologiques permettent de définir le SIADH[5]:

  • hyponatrémie (inférieure à 135 mmol/L), ainsi qu'une osmolalité plasmatique inférieure à 275 mosm/kg.
  • osmolarité urinaire anormalement élevée (supérieure à 100 mosom/kg).
  • natriurèse supérieure à 30 mmol/L avec un apport normal en sodium (au moins 6g de sel par jour[6]) .
  • euvolémie clinique, c'est-à-dire une absence d’œdème ou de pli cutané.
  • absence d'insuffisance rénale, surrénale, thyroïdienne.
  • non utilisation de diurétique dans la semaine précédente.
  • uricémie<40 mg/L.
  • azotémie<0,1 g/L.

Si la natrémie est à la limite inférieure de la norme, un test de surcharge hydrique est réalisé en milieu spécialisé. Une personne non atteinte de SIADH excrétera alors 75 % des 20 ml d'eau ingérés dans les 4 heures suivant l'ingestion.


Diagnostics différentiels

Face aux hyponatrémies

Hyponatrémie normo-osmolaire et hyperosmolaire

L'hyponatrémie normo-osmolaire, aussi appelée pseudo-hyponatrémie est généralement causée par une hypertriglycéridémie. L'hyponatrémie hyperosmolaire est plus souvent liée à une hyperglycémie importante[5].

Hyponatrémie hypo-osmolaire hypovolémique

Nous retrouvons donc une perte de sel (osmolalité urinaire élevée) et une déshydratation extracellulaire (cliniquement évaluable par un pli cutané). Les pertes de sels peuvent être d'origine digestive (diarrhées, vomissements, etc.), rénale (diurétiques, insuffisance rénale aiguë, etc.), cutanée (brûlures, sudation importante, etc.), et rarement cérébral (par hémorragies sous-arachnoïdiennes).

Le traitement passe par une perfusion de sérum salé isotonique par voie intraveineuse[5].

Hyponatrémie hypo-osmolaire hypervolémique

Cette situation se rencontre avec la présence d'œdèmes dus à une cirrhose décompensée, un syndrome néphrotique ou une insuffisance cardiaque. Le corps dans son ensemble présente donc une hypervolémie (les œdèmes), mais la volémie dite efficace (c'est-à-dire fonctionnelle pour perfuser les organes) est diminuée. Il y a donc une sécrétion d'ADH qui est adaptée à cette volémie fonctionnelle, bien qu'elle soit inadaptée à l'osmolalité plasmatique[5].

Hyponatrémie hypo-osmolaire normovolémique

Il s'agit de l'état du SIADH, il est alors important d'écarter une insuffisance en glucocorticoïdes et l'hypothyroïdie[5].

Insuffisance corticotrope

Elle sera dépistée en mesurant le taux de cortisol plasmatique ainsi que l'ACTH à 8h ou en urgence. [5] Pour rappel, le cortisol a pour effet (entre autres) d'augmenter la glycémie ainsi que la tension artérielle, et l'ACTH de freiner la sécrétion d'ADH.

Ainsi, une insuffisance en ACTH et cortisol aura pour effet:

  • tendance à l'hypoglycémie qui stimule à l'état physiologique la sécrétion d'ADH.
  • hypotension artérielle qui diminuera la filtration glomérulaire qui stimulera ainsi logiquement la sécrétion d'ADH.
  • la levée du frein à la sécrétion d'ADH. [5]

Insuffisance surrénale aiguë

Le déficit en minéralocorticoïdes (l'aldosterone) induit une perte rénale de sel. S'ensuit alors une déshydratation extracellulaire ainsi qu'une hyperhydratation intracellulaire par hypersécrétion de vasopressine[5].

Hypothyroïdie proto-thyroïdienne

Cette situation ne s'accompagne d'hyponatrémie que dans les formes sévères, avec une TSH très élevée. Il y a alors une diminution de la filtration glomérulaire ainsi qu'une tendance à l'hypovolémie entraînant une augmentation de la synthèse d'ADH. On pourra noter cliniquement un myxœdème[5].

Hypopituitarisme antérieur

Plusieurs lignées pituitaires antérieures sont touchées: ACTH et TSH notamment. Il en découle -entre autres- une hyponatrémie. C'est pour cela que l'on dosera le taux de cortisol dans le sang, la TSH ainsi que la T4l. On peut alors traiter ces déficits par opothérapie substitutive[5].

Etiologies

Pratiquement toutes les atteintes neurologiques peuvent induire un SIADH. On peut le voir notamment lors d'intervention par voie trans-sphénoïdale d'adénomes corticotropes. Il faut alors faire particulièrement attention au relargage d'ADH et à l'hyponatrémie survenant vers le 7e jour[5].

Traitement

La normalisation de la natrémie doit toujours se faire prudemment sous risque de déclencher une myélinolyse centropontine[7] qui donne un tableau d'accident vasculaire cérébral pseudobulbaire.

Indications

Un traitement est indiqué dans différentes situations:


Traitement généraux

De manière générale, une hyponatrémie menaçante (<115 mmol/L et/ou avec des signes neurologiques) nécessite un traitement urgent à base de perfusion de chlorure de sodium hypertonique[5]. La vitesse de correction de la natrémie ne doit cependant pas dépasser les 12 mmol/24 heures pour éviter la myélinolyse centropontine[5].

Le traitement de la cause du SIADH est évidemment important.

Quand traiter

Les situations où l'on traitera un SIADH sont les suivantes:

  • Des symptômes cliniques sévères ou apparus depuis moins de deux jours: coma, convulsion, détresse respiratoire. La première ligne de traitement sera alors le serum salé hypertonique à 20 %[5].
  • Si les symptômes sont plus modérés ont pourra utiliser le serum salé hypertonique ainsi que le tolvaptan[5].
  • S'il y a peu ou pas de symptômes, ou s'il y a des troubles cognitifs discrets, il est préférable de mettre en place une restriction hydrique associée au tolvaptan.

Restriction hydrique

Son efficacité dépend essentiellement de la rigueur de la restriction, souvent mal supportée par les malades. Elle doit donc être réévaluée tous les jours en fonction du ionogramme sanguin. Par exemple, une hyponatrémie inférieure à 120 mmol/L doit conduire à une restriction hydrique à 100 cm³ par 24h[5].

Déméclocycline

Il s'agit d'une tétracycline induisant un diabète insipide néphrogénique. Le patient aura alors une soif intense ainsi qu'une excrétion de grande quantité d'urine diluée[5].

Il y a cependant des contre-indications à ce traitement:


Aquarétiques

Ce sont des antagonistes non peptidiques des récepteurs V2 de la vasopressine[1] aussi testés dans le traitement des cirrhose et de l'insuffisance cardiaque[5]. Le principal médicament est le tolvaptan[5].

Effets indésirables

Le tolvaptan expose à différents effets indésirables [8]:

Ce traitement peut aussi occasionner des atteintes hépatiques graves, parfois mortelles [8] .

Il est donc important de surveiller la fonction hépatique et de limiter la durée du traitement à un mois maximum [8].

Notes et références

  1. Heng, A-E. et al. « Syndrome de sécrétion inappropriée d'hormone antidiurétique: diagnostic et prise en charge » Réanimation 2006;15(6):490-496.
  2. (en) Schwarts WB, Bennett W, Curelop S, Bartter FC, « A syndrome of renal sodium loss and hyponatremia probably resulting from inappropriate secretion of antidiuretic hormone », Am J Med, vol. 23, no 4, , p. 529–42 (PMID 13469824, DOI 10.1016/0002-9343(57)90224-3) cité dans (en) Schwartz WB, Bennett W, Curelop S, Bartter FC, « A syndrome of renal sodium loss and hyponatremia probably resulting from inappropriate secretion of antidiuretic hormone. 1957 », J Am Soc Nephrol, vol. 12, no 12, , p. 2860–70 (PMID 11729259, lire en ligne)
  3. « Collège de néphrologie » (consulté le 22 mars 2017)
  4. « Mises Au Point en Anesthésie Réanimation » (consulté le 22 mars 2017)
  5. « Société française d'endocrinologie » (consulté le 22 mars 2017)
  6. « Faculté de médecine de Pierre et Marie Curie » (consulté le 22 mars 2017)
  7. « Annales françaises d'anesthésie et de réanimation » (consulté le 7 avril 2017)
  8. La Revue Prescire Juillet 2014/Tome 34 N°369

Voir aussi

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