One health
L’initiative One Health (« une seule santé ») est un mouvement créé au début des années 2000[1] qui promeut une approche intégrée, systémique[2] et unifiée de la santé publique, animale et environnementale aux échelles locales, nationales et planétaire. Elle vise notamment à mieux affronter les maladies émergentes à risque pandémique[1].
Cette approche accorde un rôle majeur aux vétérinaires et propriétaires ou gestionnaires d’animaux ainsi qu'aux personnes en contact régulier avec les faunes domestique et sauvage et l’environnement (et en particulier : éleveurs mais aussi pêcheurs, chasseurs, forestiers et gestionnaires d'espaces protégés). Pour l'OIE, sa mise en œuvre passe par « de nouveaux mécanismes amenant tous ces acteurs à s’informer mutuellement et à agir d’une manière concertée, en liaison avec les gestionnaires de la santé publique qui travaillent le plus souvent dans nos pays membres sous l’égide des ministères de la Santé, qu’ils soient fonctionnaires de l’État, personnels de collectivités ou médecins libéraux »[3].
Histoire
Cette initiative est née en réaction à un risque écoépidémiologique croissant, mais aussi en réaction à l’hyperspécialisation médicale et au morcellement des disciplines de santé (animale et vétérinaire).
Il repose aussi sur le constat que 60% environ des maladies humaines infectieuse connues ont une origine animale[4] et qu'au moins 70 % des maladies émergentes ou réémergentes graves sont depuis un siècle presque toujours des maladies zoonotiques[5] ou à vecteurs (comme la maladie de Lyme[6]), qui peuvent être favorisées par des déséquilibres écologiques et/ou climatiques[7],[8]. En outre 80 % des pathogènes utilisables pour le bioterrorisme sont aussi d'origine animale[4].
« Que ce soit par transmission alimentaire (maladie de la vache folle, salmonelloses), par transmission vectorielle (fièvre du Nil occidental, fièvre de la vallée du Rift, encéphalites à tiques), ou encore par simple contact (rage), les possibilités de transmission interspécifique sont multiples et demandent une approche collaborative entre les secteurs de la santé animale et de la santé humaine pour prévenir et contrôler ces infections »[4].
Cette initiative promeut donc une vision holistique et intégrée de « La santé » (c'est-à-dire sans isoler la santé humaine, de la santé animale et de celle de l'environnement, et en cherchant à mieux comprendre et utiliser les interactions complexes qui existent entre ces trois domaines). Elle encourage une collaboration transdisciplinaires ou multidisciplinaire (à co-égalité) et une communications interdisciplinaires entre les domaines vétérinaires et médicaux (en incluant les médecins ostéopathes, dentistes, la santé mentale, etc.) ainsi qu'avec d'autres scientifiques concernés par la santé, les soins et l’environnement (santé environnementale) et avec des éthologues, anthropologues, économistes, sociologues, etc.
Elle s’appuie sur une alliance entre 3 entités de l'ONU (Organisation mondiale de la santé ou OMS, Organisation des Nations unies pour l’Agriculture et l’Alimentation ou FAO et Organisation mondiale de la santé animale ou OIE) ainsi que sur de grandes institutions, dont en Amérique du Nord :
- the American Medical Association,
- American Veterinary Medical Association,
- American Academy of Pediatrics,
- American Nurses Association,
- American Association of Public Health Physicians,
- the American Society of Tropical Medicine and Hygiene,
- the Centers for Disease Control and Prevention (CDC),
- the United States Department of Agriculture (USDA)
- L'U.S. National Environmental Health Association (NEHA).
...et plus de 850 éminents, scientifiques, médecins et vétérinaires du monde entier l'ont approuvé à titre personnel.
Sous ce nom (One Health), ce mouvement est né aux États-Unis et récemment ; mais l’idée d’une vision unifiée de la santé et de l’importance de l’environnement a des racines ancienne, remontant au moins à l’antiquité grecque et notamment à Hippocrate[9]
Ce mouvement s'est d'abord désigné par l’expression « One Medicine » (une seule médecine) et a évolué en intégrant les notions de santé environnementale et d’écoépidémiologie pour finalement être rebaptisé One World-One Health[10],[11],[12],[13],[14],[15],[16],[17] puis One Health.
Son premier colloque s'est tenu en 2011[18]. Cette même année au mois d'aout, à l'issue d'une consultation interministérielle pilotée par le ministère des Affaires étrangères et européennes, la France a officiellement validé ce concept dans un document intitulé Position française sur le concept « One Health/Une seule santé » : Pour une approche intégrée de la santé face à la mondialisation des risques sanitaires[4]
En 2016, un think tank dénommé One Health Global Think-Tank for Sustainable Health & Well-being – 2030 (GHW-2030) a été créé pour aider à intégrer la santé environnementale dans l’horizon 2013 de l’Agenda de l’ONU pour le développement soutenable[19].
En Europe
L'agence française Anses a annoncé le 24 octobre 2017 qu'elle allait à partir de janvier 2018 coordonner l’EJP One Health. Ce projet conjoint européen de recherche portera sur les zoonoses alimentaires[20]. Il est centré sur les risques d'intoxication microbienne zoonotique d'origine alimentaire, y compris par des toxines naturelles et/ou via les réservoirs animaux domestiques ou encore via d'éventuelles importations illégales de produits animaux[21]. Les agents biologiques étudiés seront les virus, les bactéries, les parasites, les champignons, les prions et les séquences de nucléotides / matériel génétique conférant la résistance aux antimicrobiens[21]. Ce consortium et issu d'un réseau européen préétabli (NoE, FP6) qui a été élargi à plus de 40 partenaires venant de 19 États-membres sera soutenus par la Commission européenne et travailleront autour du concept One Health. Ils doivent améliorer la connaissance des zoonoses alimentaires, de l'antibiorésistance et de divers risques émergents[21]. De 2004 à 2009, l'Anses avait déjà coordonné un réseau d’excellence dans le cadre du 6e programme cadre de recherche et de développement (PCRD) de la Commission européenne. Elle a aussi aidé à créer l'association Med-Vet-Net qui en regroupant des instituts de recherche en santé publique et vétérinaire a préfiguré l'EJP One Health[20]. Les partenaires font déjà partie d'une réseau organisé de communautés de chercheurs et de laboratoires de référence travaillant sur les zoonoses alimentaires, l'antibiorésistance et des risques émergents. Ce programme One Health doit produire des données destinées à mieux caractériser, évaluer et hiérarchiser les risques sanitaires par les agences nationales et européennes[21]. Il soit aussi faciliter et accélérer la validation et diffusion des données au sein de la communauté scientifique, faciliter l'éducation et la formation, la gestion des connaissances, l'accès aux bases de données, mais aussi aux souches vivantes, aux biobanques, à certaines installations encore expérimentales[21]. Le projet pourra aussi contribuer à harmoniser et standardiser certains protocoles et tests[21], en lien avec deux institutions européennes pertinentes pour des domaines : l'EFSA et l'ECDC (European Centre for Disease Prevention and Control)[21].
Les partenaires français seront outre l’Anses, l’INRA, l'Institut Pasteur et Santé publique France.
Objectifs
Le mouvement One Health souhaite développer des synergies qui feront – selon lui – mieux progresser les soins de santé au 21e siècle ainsi que la recherche biomédicale, tout en améliorant l'efficacité des dispositifs de santé publique, grâce notamment un à élargissement et meilleur partage des connaissances scientifiques, l'amélioration de la formation médicale et de l’efficacité des soins cliniques.
Les porteurs de ce projet estiment que s’il est correctement mis en œuvre, il épargnera des millions de vies dans la génération actuelle et pour les générations futures.
Trois premiers thèmes prioritaires sont :
- la rage (maladie tuant encore près de 70 000 personnes par an) ;
- les différents variants de l’influenza (par exemple ceux qui provoquent certaines grippes aviaires) ;
- l’antibiorésistance.
Principes et méthode
Sept principes définissent les moyens que l’organisation souhaite mettre en œuvre :
- efforts éducatifs communs entre les écoles de médecine humaine, vétérinaire, de santé publique et les formations concernant l'écologie et l’environnement ;
- efforts conjoints de communication sur ces sujets, via des revues, des conférences, et via des réseaux de santé ;
- efforts conjoints dans le domaine des soins cliniques, via l'évaluation, le traitement et la prévention de la transmission de maladies susceptibles de passer d’une espèce à l’autre (dont zoonoses) ;
- surveillance et contrôle épidémiologique et écoépidémiologique partagé des pathogènes à transmission « inter-espèces » dans le cadre de la santé publique ;
- efforts conjoints de meilleure compréhension de phénomènes de transmission inter-espèces de maladies par la médecine comparative (la branche de la médecine qui compare les effets d’un pathogène chez différentes espèces pour mieux le connaitre et potentiellement mieux le gérer [22] et la recherche environnementale ;
- efforts conjoints pour développer et évaluer de nouvelles méthodes et outils de diagnostic, et l’efficacité et les effets des médicaments et des vaccins en termes de prévention et contrôle des maladies qui passent d’une espèce à l’autre ;
- efforts conjoints d’information, formation et sensibilisation des dirigeants politiques et du secteur public, via notamment des publications ciblées.
Médecine comparative
Cette discipline tient une place particulière dans l’approche One Health s’appuie sur le fait que certains animaux souffrent d'un grand nombre de maladies bactériennes, virales, parasitaires aigües ou chroniques (maladies cardiovasculaires, cancer, diabète, asthme, arthrite..) que les humains et que certaines de ces maladies peuvent passer de l’animal à l’homme et réciproquement (grippe, tuberculose par ex.). Certaines maladies ont même été détectées et étudiées chez l’animal bien avant d’être reconnue chez l'homme (l’insuffisance cardiaque induite par le stress en élevage ou dans la faune sauvage a été décrite une trentaine d'années avant d’être reconnue chez l'homme[23]. Des médecins et anatomistes de l’antiquité avaient bien compris que la dissection et l'étude des animaux malades pouvait aider à comprendre les maladies humaines[24], notamment pour les troubles musculo-squelettiques. De Galen à William Harvey, l’anatomique comparative et les études physiologiques utilisant des animaux ont permis des progrès importants en médecine (c’est par exemple ainsi que Frederick Banting et Charles Best ont découvert l'insuline[25]).
Voir aussi
Articles connexes
- Association santé environnement France
- Comité de la prévention et de la précaution
- École de santé publique de l'Université libre de Bruxelles
- Écologie, toxicologie, écotoxicologie
- Perturbateurs endocriniens
- Plan national santé environnement (France)
- Pollution
- Santé, santé publique, santé reproductive
- Société française de santé et environnement (SFSE)
Liens externes
- One Health Newsletter (Florida State Department of Health publication) ; http://www.doh.state.fl.us/Environment/medicine/One_Health/OneHealth.html
- One Health One Medicine Foundation http://www.onehealthonemedicine.org/
- The Pandemic Network http://www.pandemicnetwork.com/promed.htm
- One Health Network - http://www.onehealthnet.be/Grey.html
- One Health Academy - http://www.onehealthacademy.org/_Links.html
Bibliographie
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- Dvorak, G., Roth, J.A., Gray, G.C. Kaplan, B. Zoonoses – Protecting People and Their Pets: 1st Edition, 2013. Iowa State University College of Veterinary Medicine. Ames, Iowa. (ISBN 978-0-9846270-3-5).
- Frank, D. (2008). One world, one health, one medicine. The Canadian Veterinary Journal, 49(11), 1063 (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2572090/ résumé]).
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Notes et références
- Gibbs E.P.J (2014) The evolution of One Health: a decade of progress and challenges for the future. Veterinary Record, 174(4), 85-91.
- Zinsstag, J., Schelling, E., Waltner-Toews, D., & Tanner, M. (2011). From “one medicine” to “one health” and systemic approaches to health and well-being. Preventive veterinary medicine, 101(3), 148-156.
- Page intitulée "Une seule santé", sur le site de l'OIE, consulté le
- Position française sur le concept « One Health/Une seule santé » : Pour une approche intégrée de la santé face à la mondialisation des risques sanitaires French Position on the One Health Concept: For an Integrated Approach to Health in View of the Globalization of Health Risks Document de travail stratégique Strategic Working Document Août 2011, PDF, 32 pages
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- L’Anses coordonnera l’EJP « One Health », un projet européen de recherche sur les zoonoses alimentaires ; Communiqué de presse de l'ANSES, publié à Maisons-Alfort le 24 octobre 2017
- 2016 Projet MED.VET.EJP EJP Co-fund "One health: zoonoses - Emerging Threats", projet construit dans le cadre de la construction de l'Espace Européen de la Recherche (MRSEI)
- Natterson-Horowitz, MD., Barbara; Bowers, Kathryn (2012). Zoobiquity, What Animals Can Teach Us About Health and the Science of Healing. New York: Alfred A. Knopf. p. 44. (ISBN 978-0-307-59348-1).)
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