Yanick Lahens

Yanick Lahens, née le à Port-au-Prince en Haïti, est une écrivaine haïtienne, lauréate de l'édition 2014 du prix Femina pour son roman Bain de lune. Elle est titulaire de la chaire « Mondes Francophones » au Collège de France et a prononcé sa leçon inaugurale intitulée « Urgence(s) d’écrire, rêve(s) d’habiter » le .

Biographie

Jeunesse

Yanick Lahens grandit à Port-au-Prince au sein d’une famille élargie, cohabitant entre autres avec son arrière-grand-mère et sa grand-mère qu’elle considère comme la garante, dans la maison, d’une culture venue de la province[2].

La transmission de la culture traditionnelle haïtienne est un élément central de son éducation familiale et ce à une époque où elle était décriée par les classes dominantes. Sa mère, cuisinière et pâtissière, a contribué à la revalorisation de la cuisine paysanne haïtienne en lui donnant ses lettres de noblesse dans les sphères bourgeoises et d’élites du pays. L’apprentissage de la danse haïtienne a grandement ancré son sentiment d’appartenance à une culture traditionnelle qui imprégnera son œuvre par la suite[2]. C’est auprès de sa grand-mère qu’elle apprend à lire[2].

Elle grandit sous le régime dictatorial de Duvalier[3]. Sa famille a brièvement hébergé un dissident politique. Elle a alors 4 ans. Elle garde un souvenir marquant de toute cette période.

Paris

Yanick Lahens s’installe à Paris à l’âge de quinze ans[2]. Elle y poursuivra ses études supérieures de lettres à l’université Paris-Sorbonne. En 1976, elle soutient son mémoire de maîtrise, « Lecture d’une œuvre de Fernand Hibbert : Les Thazar », dont elle publie une partie dans la revue haïtienne Conjonction[4].

Son expérience parisienne marque un tournant décisif dans son engagement culturel, social et politique. Elle y découvre que des pans entiers de l’Histoire de la France avec Haïti sont passés sous silence et qu’il n’y a aucune étude sur la Révolution Haïtienne[2]. Sa surprise s’étend également au domaine universitaire des littératures francophones dont Haïti est alors la grande absente. Cela sera le point de départ d’un travail et d’un engagement mis au service d’une Histoire décentralisée. Elle souhaite « décoloniser le savoir »[5]. A la francophonie elle oppose une conception plurielle des mondes francophones.[5]

Engagement social et culturel en Haïti

Après ses années parisiennes, elle s'installe en Haïti où elle enseigne à l’École normale supérieure jusqu'en 1995[6],[1] ; Dans le cadre de l’Institut pédagogique national, elle participe à l’élaboration de la réforme qui introduira le créole dans le système éducatif haïtien[7].

Elle a contribué au lancement de la revue haïtienne Chemins critiques.

En 1996-1997 elle a fait partie du cabinet du ministre de la culture haïtien, Raoul Peck[7].

Très impliquée dans la vie associative d'Haïti, elle est cofondatrice de l'Association des écrivains haïtiens[8] (depuis supprimée) qui lutte contre l’illettrisme en organisant des événements autour de la littérature dans les écoles haïtiennes.

En 2008 elle a créé la fondation « Action pour le changement » qui a notamment permis la construction de quatre bibliothèques et propose différents types de formations telles que des ateliers audiovisuels. [7]

Elle a également collaboré avec la fondation « Culture et Création » qui a fondé une bibliothèque à Saint-Louis-du-Nord[9]

Elle est présente lors du séisme de 2010[10],[11] et en témoigne, notamment dans son ouvrage Failles publié la même année.

Œuvre littéraire

Les figures féminines tiennent une place majeure dans ses romans.[2]

Toute sa production littéraire tend à dresser un portrait d’Haïti qu’elle saisit en y faisant dialoguer la grande Histoire et la petite histoire[5].

Son œuvre recèle une dimension socio-spatiale importante[2]. Haïti en est le point d’ancrage et la multitude d’espaces explorés dans ses romans et essais, recoupe les différentes strates sociales de la société haïtienne.

Les personnages étrangers dans sa littérature lui permettent également de caractériser les enjeux des relations Nord - Sud dont elle dit qu’Haïti est un centre et une matrice[12].

Œuvres

  • L'Exil : entre l'ancrage et la fuite, l'écrivain haïtien (essai), Port-au-Prince, éditions H. Deschamps 1990, (notice BnF no FRBNF36963222), 79 p.
  • Tante Résia et les Dieux (nouvelle), Paris, éditions de L'Harmattan, coll. « Lettres des Caraïbes », 1994 (ISBN 2-7384-2578-X), 141 p.
  • Dans la maison du père (roman), Monaco-Paris, Le Serpent à Plumes, coll. « Fiction. Domaine français. », 2000 (ISBN 2-84261-181-0), 155 p.
  • La Petite Corruption (nouvelle), Montréal, éditions Mémoire d’Encrier, 2003 (ISBN 978-2-923153-05-6), 101 p.  ; rééd. Legs édition, coll. « Voix Féminines », 2014, (ISBN 978-14973-67-81-4), 106 p.
  • La folie était venue avec la pluie (nouvelle), Port-au-Prince, Éditions Presses nationales d'Haïti, coll. « Souffle nouveau », 2006, (ISBN 99935-37-31-4),111 p. ; rééd. Legs édition, coll. « Voix Féminines », 2015 (ISBN 978-99970-86-08-2), 132 p.
  • La Couleur de l'aube (roman), Paris, Sabine Wespieser Éditeur, 2008 (ISBN 978-2-84805-063-8), 218 p.[13]
  • Failles (récit), Paris, Sabine Wespieser Éditeur, 2010 (ISBN 978-2-84805-090-4), 160 p.[14]
  • Guillaume et Nathalie (roman), Paris, Sabine Wespieser Éditeur, 2013 (ISBN 978-2-84805-143-7), 176 p.
  • Bain de lune (roman), Paris, Sabine Wespieser Éditeur, 2014, 280 p. (ISBN 978-2-84805-117-8)[15]prix Fémina 2014
  • Douces déroutes (roman), Paris, Sabine Wespieser Éditeur, 2018 (ISBN 978-2-84805-280-9), 232 p.
  • L'Oiseau Parker dans la nuit et autres nouvelles, Paris, Sabine Wespieser Éditeur, 2019 (ISBN 978-2-84805-321-9), 312 p.

Prix et distinctions

Notes et références

  1. Yanick Lahens sur le site de l'Université de la Ville de New York.
  2. « Yanick Lahens, écrire Haïti », émission A voix nue, France Culture, novembre 2019.
  3. JSTOR, “Haitian Literature After Duvalier: An Interview With Yanick Lahens”, Clarisse Zimra, The Johns Hopkins University Press, 1993
  4. Lahens, Yanick Jean-Pierre. « Le paraître féminin, sa structure, sa stratégie, dans le roman de Fernand Hibbert : “Les Thazar” ». Conjonction, nos 136‑137, février 1978, pp. 45‑55.
  5. émission « La Grande table culture », France Culture, avec Olivia Gesbert, Mars 2020
  6. « Yanick Lahens — internationales literaturfestival berlin », sur Internationales literaturfestival berlin (consulté le )
  7. OpenEdition Books, « LITTÉRATURE HAÏTIENNE : URGENCE(S) D’ÉCRIRE, RÊVE(S) D’HABITER  | Yanick Lahens », Antoine Compagnon, Collège de France, 2019, Introduction
  8. « Lahens Yanick », sur Étonnants-Voyageurs (consulté le )
  9. John Smith Sanon, « Deux bougies pour la Bibliothèque Yanick Lahens », sur Le Nouvelliste, (consulté le )
  10. Yanick Lahens, « Haïti ou La santé du malheur », sur www.liberation.fr, (consulté le )
  11. « Haïti un an après le séisme : les écrivains témoignent », sur ARTE, (consulté le )
  12. OpenEdition Lectures « Yanick Lahens, Littérature haïtienne. Urgence(s) d'écrire, rêve(s) d'habiter », Lectures [En ligne], Les comptes rendus, 2020, mis en ligne le 16 janvier 2020
  13. Jérôme Goude, « La Couleur de l’aube - Yanick Lahens », Le Matricule des Anges,
  14. Guylaine Massoutre, « Sortir de l'impasse avec Yanick Lahens », Le Devoir, (lire en ligne)
  15. Marianne Payot, « Bain de lune à Haïti avec Yanick Lahens », L'Express,
  16. « Yanick Lahens », sur prix-litteraires.net (consulté le )
  17. « Le prix Femina attribué à Yanick Lahens », Le Soir, (lire en ligne)
  18. « La 6e édition du Marathon du livre à Petit-Goâve ce week-end », Le Nouvelliste, (lire en ligne)

Liens externes

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