Volker Schlöndorff
Volker Schlöndorff, né le à Wiesbaden (Allemagne), est un cinéaste allemand. Il est l'un des représentants majeurs du nouveau cinéma allemand des années 1960-1970 et l'un des fervents défenseurs du cinéma d'auteur européen[1].
Naissance |
Wiesbaden, Allemagne |
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Nationalité | allemande |
Profession | Réalisateur |
Films notables |
Les Désarrois de l'élève Törless L'Honneur perdu de Katharina Blum Le Coup de grâce Le Tambour Un amour de Swann Le Roi des aulnes |
Biographie
Enfance et jeunesse
En 1956, Volker Schlöndorff, dont le père est médecin, quitte l'Allemagne de l'Ouest pour s'établir à Vannes en Bretagne dans un internat jésuite, le lycée Saint François-Xavier. Le système des équipes prôné par ce lycée (ateliers à thème que les lycéens suivent un après-midi par semaine toute l'année) révélera sa passion pour l'art théâtral et cinématographique. Deux ans plus tard, en 1958, Schlöndorff obtient le premier prix de philosophie du concours général alors qu'il est élève au lycée Henri-IV à Paris[2]. Il est diplômé de l'Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC) et commence sa carrière en France comme assistant d'Alain Resnais (L'Année dernière à Marienbad), de Jean-Pierre Melville (Le Doulos, Léon Morin, prêtre) et de Louis Malle (Le Feu follet).
Débuts dans le cinéma
En 1966, encouragé par Louis Malle, dont il a été l'assistant réalisateur lors du tournage de Viva Maria !, il réalise à vingt-six ans son premier long métrage, Les Désarrois de l'élève Törless, tiré du roman homonyme de Robert Musil. Il y révèle sa maîtrise d'une forme fluide, l'acuité de son étude psychologique et son sens du récit[1]. Le film obtient le Prix de la Critique internationale au 20e Festival de Cannes[1], ainsi que l'une des plus importantes distinctions ouest-allemandes, le Ruban d'argent.
Trois ans plus tard, il adapte Michael Kohlhaas de Heinrich von Kleist, ainsi que Baal (1969)
Années 1970 : reconnaissance internationale
En 1971, il épouse l'actrice, réalisatrice et scénariste allemande Margarethe von Trotta, dont il divorce en 1991.
Il réalise divers films qui obtiennent un petit succès en Allemagne sans néanmoins franchir les frontières du pays : La Soudaine Richesse des pauvres gens de Kombach (de) (1971), Feu de paille (1972) et Une nuit au Tyrol (1973).
Schlöndorff s'impose en Allemagne comme l'un des chefs de file du nouveau cinéma allemand grâce à son adaptation, en 1975, réalisée en compagnie de Margarethe von Trotta, du roman de Heinrich Böll (Prix Nobel de littérature 1972), L'Honneur perdu de Katharina Blum, critique acerbe de l'Allemagne des années de plomb. Lui succède Le Coup de grâce, d'après Marguerite Yourcenar[1].
En 1977, il s'unit à plusieurs personnalités artistiques ouest-allemandes, parmi lesquelles Heinrich Böll, A. Muge, Rainer Werner Fassbinder, pour réaliser un documentaire politique relatant les évènements tragiques survenus en Allemagne de l'Ouest. en , de l'enlèvement de Hanns-Martin Schleyer à la mort d'Andreas Baader : L'Allemagne en automne.
Le cinéaste obtient la reconnaissance internationale avec Le Tambour, tiré du livre d'un autre prix Nobel allemand, Günter Grass. Cette fresque dramatico-bouffonne délirante qui revisite de manière anticonformiste l'histoire de l'Europe centrale, de l'Allemagne et du nazisme à travers le parcours d'un garçon qui décide de ne plus grandir à l'âge de trois ans, est récompensée par la Palme d'or à Cannes en 1979 (ex æquo avec Apocalypse Now de Francis Ford Coppola)[1]. Elle gagne également l'Oscar du meilleur film étranger à Hollywood, l'année suivante[1].
Années 1980 : le cinéma d'auteur
Le succès planétaire du Tambour lui ouvre toutes les portes. Il reste d'abord fidèle à un mode de production indépendant et à un cinéma d'auteur européen, porteur d'une certaine noblesse culturelle tant par le choix varié des langues de tournage (allemand, français, anglais) que par une inspiration puisée dans le patrimoine littéraire[1]. Il réalise ensuite quelques films aux États-Unis avant de revenir en Europe. Il est souvent le producteur des films qu'il réalise et collabore ponctuellement avec la télévision pour boucler ses budgets[1]. Il a par ailleurs mis en scène plusieurs téléfilms.
Adaptant régulièrement des monuments de la littérature (Marcel Proust, Max Frisch, Arthur Miller, Michel Tournier etc.), Schlöndorff reste, en France, en Allemagne et aux États-Unis, lié à un certain intimisme et à des thèmes tels que les heures sombres de l'histoire, les vicissitudes du pouvoir, la frustration, la révolte et la répression : Un amour de Swann, Le Faussaire, Mort d'un commis voyageur, Colère en Louisiane, The Voyager, Le Roi des aulnes, Les Trois Vies de Rita Vogt, Le Neuvième Jour[3]...
Années 1990 : la direction des Studios Babelsberg
Dans les années 1990, il accepte la direction des Studios Babelsberg, dans la banlieue est de Berlin, l'ex-siège du Hollywood allemand lorsque l'UFA y était installée dans la première moitié du XXe siècle et propriété de la Compagnie générale d'immobilier et de services. Il enseigne également le cinéma et la littérature à l'école européenne de Saas-Fee (Suisse), notamment lors de séminaires estivaux.
En 1996, il réalise Le Roi des aulnes, avec John Malkovich dans le rôle d'Abel.
Années 2000
Durant les années 2000, Volker Schlöndorff réalise notamment Les trois vies de Rita Vogt (2000), The enlightment (2002), Le Neuvième Jour (2004), L'héroïne de Gdansk (2006) et Ulzhan (2007).
Le Neuvième Jour permet au cinéaste allemand de retrouver un certain succès critique. Inspiré de l'histoire vraie du père Jean Bernard, prêtre luxembourgeois, le film se déroule pendant la Seconde Guerre mondiale : l'abbé résistant Henri Kremer (Ulrich Matthes), prisonnier à Dachau, se voit accorder neuf jours de sortie afin de convaincre son évêque d'abandonner sa politique d'opposition face au régime. Si Kremer parvient à convaincre l'évêque, il en sera récompensé par une liberté définitive. En cas de tentative de fuite, Kremer mettra en danger non seulement la vie des déportés de Dachau, mais aussi celle de sa famille. Déchiré entre les souvenirs insoutenables de l'horreur du camp et sa conviction de chrétien, Kremer est pris dans un dilemme d'autant plus éprouvant que Gebhardt, lui-même diacre, use d'arguments théologiques pour l'amener à trahir.
Dans la revue La Règle du jeu, Laurent Dispot écrit que « Le Neuvième Jour, en 2004, aura été une réplique du meilleur cinéma au piètre Amen de Constantin Gavras en 2002, paresseuse resucée du tract de propagande qu’est Le Vicaire, pièce de théâtre de Rolf Hochhuth. [...] chaque moment, chaque écho, chaque allusion du Neuvième Jour de Volker Schlöndorff, tout ce qui fait ce film, et qui le porte, le rendent exceptionnel. Il est la vérité, alors que tout y est création, réalité recomposée ; rien de moins fictif que cette fiction. Sa substance est toute de substances : de nappes, comme on dit du pétrole, qui sont en dessous. Il faut y accéder, ce film est « impossible » sans réflexion, sans le commentaire, sans le réfléchir, sans le re-projeter, pour soi-même et les autres. Sur une scène intime et en en parlant[4] ».
En 2009, Schlöndorff met en scène la dernière pièce de Léon Tolstoï, Et la lumière luit dans les ténèbres (espace scénique : Mark Lammert), au château de Neuhardenberg avec Angela Winkler. Un film consacré à la conférence de Berlin (1885) est par ailleurs à l'étude[5].
Années 2010 : Verdun, Bruxelles et États-Unis
En 2011, le cinéaste allemand réalise La Mer à l'aube qui raconte les dernières heures de Guy Môquet (Léo Paul Salmain).
En , Volker Schlöndorff dirige une scénographie à l'ossuaire de Douaumont pour célébrer le centenaire de la bataille de Verdun. Le spectacle met en scène des milliers de jeunes figurants, vêtus de tee-shirts multicolores, courant au milieu des tombes des soldats[6], accompagnés par les Tambours du Bronx, un groupe de percussions urbaines de la Nièvre, dont la musique consiste à frapper violemment sur des bidons. La mort qui frappa ces 300 000 soldats, est représentée par un personnage juché sur des échasses[7].
Le Daily Mail et plusieurs journaux de la presse britannique, dont le pays perdit aussi environ un million de soldats, parlent d'un outrage[8]. En France, la population est divisée[9]. Certaines personnalités politiques expriment leur désapprobation devant ce qu'elles considèrent être un manque de respect envers les victimes de cette bataille[10]. Une vidéo de ce spectacle publiée sur YouTube par la chaînes CNews est désapprouvée par 94% des internautes ayant exprimés leur opinion sur cette vidéo[11], un score exceptionnellement bas pour une vidéo sur cette plateforme.
En 2016, il est l'invité d'honneur du Brussels Film Festival : une rétrospective de sa filmographie y est organisée, introduite par une masterclass du cinéaste.
En 2017, Retour à Montauk est sur les écrans. Il s'agit d'une adaptation du roman Montauk, de Max Frisch. Ce drame raconte l'histoire de Max (Stellan Skarsgård), écrivain allemand qui a rencontré, lors d'un séjour à New York, une jeune femme (Nina Hoss) avec qui il eut une brève mais intense relation amoureuse. Une vingtaine d'années plus tard, il retourne aux États-Unis à l'occasion de la sortie du roman qui raconte cette histoire. L'écrivain, pris de regrets, espère retrouver son amour passé[12].
Le , Horschamp - Rencontres de Cinéma lui rend hommage lors d'une soirée au Gaumont les Fauvettes.
Filmographie
Cinéma
- 1966 : Les Désarrois de l'élève Törless (Der junge Törless)
- 1967 : Vivre à tout prix (Mord und Totschlag)
- 1969 : Michaël Kohlhaas (Michaël Kohlhaas, der rebell)
- 1971 : La Soudaine Richesse des pauvres gens de Kombach (de)
- 1972 : Feu de paille (Strohfeuer)
- 1975 : L'Honneur perdu de Katharina Blum (Die verlorene Ehre der Katharina Blum oder: Wie Gewalt entstehen und wohin sie führen kann) en collaboration avec Margarethe von Trotta
- 1976 : Le Coup de grâce (Der Fangschuss)
- 1977 : Rien que pour le plaisir, rien que pour le jeu (Nur zum Spaß, nur zum Spiel) (documentaire)
- 1978 : L'Allemagne en automne (Deutschland im Herbst)
- 1979 : Le Tambour (Die Blechtrommel)
- 1980 : Le Faussaire (Die Fälschung)
- 1980 : Der Kandidat (documentaire)
- 1984 : Un amour de Swann
- 1987 : Colère en Louisiane (A Gathering of Old Men)
- 1990 : La Servante écarlate (The Handmaid's Tale)
- 1991 : The Voyager (Homo Faber)
- 1996 : Le Roi des aulnes (Der Unhold)
- 1998 : Palmetto
- 2000 : Les Trois Vies de Rita Vogt (Die Stille nach dem Schuß)
- 2004 : Le Neuvième Jour (Der neunte Tag)
- 2006 : L'Héroïne de Gdansk (Strajk - Die Heldin von Danzig)
- 2008 : Ulzhan
- 2014 : Diplomatie (également coscénariste)
- 2017 : Retour à Montauk (Rückkehr nach Montauk)
Télévision
- 1970 : Baal (téléfilm)
- 1971 : La soudaine richesse des pauvres gens de Kombach (Der plötzliche Reichtum der armen Leute von Kombach (de))
- 1985 : Mort d'un commis voyageur (Death of a Salesman)
- 2012 : La Mer à l'aube (Das Meer am Morgen) (téléfilm)
Prix et distinctions
- 1966 : Prix de la Critique internationale au Festival de Cannes pour Les Désarrois de l'élève Törless
- Sélection à la Mostra de Venise 1972 pour Strohfeuer[13]
- 1979 : Palme d'or au Festival de Cannes pour Le Tambour
- 1980 : Oscar du meilleur film en langue étrangère pour Le Tambour
- 1984 : Membre de l'Académie des arts de Berlin[14]
- 2002 : Officier de la Légion d'honneur
- 2009 : Prix littéraire du syndicat français de la critique de cinéma pour Tambour Battant
- 2011 : Grand Prix des Médias du Prix Franco-Allemand du Journalisme (PFAJ)
- 2012 : Festival du film de télévision de Luchon : Prix du meilleur réalisateur pour La Mer à l'aube
- César du cinéma 2015 : César de la meilleure adaptation pour Diplomatie
Nominations et sélections
- Sélection officielle au Festival des Busters 2017 pour Le Tambour
Hommages
Le , Horschamp - Rencontres de Cinéma rend hommage au réalisateur le temps d'une soirée À Paris au Gaumont les Fauvettes, en présence de nombreux de ses amis et collaborateurs.
Voir aussi
Bibliographie
- Propos de Volker Schlöndorff recueillis par Pierre Loubière et Gilbert Salachas, « La production des films n'est plus assurée par des producteurs de cinéma mais par des banquiers », Téléciné no 154, Paris, Fédération des Loisirs et Culture Cinématographique (FLECC), , p. 1-4, (ISSN 0049-3287).
- Volker Schlöndorff (trad. de l'allemand par Jeanne Etoré et Bernard Lortholary), Tambour battant : Mémoires de Volker Schlöndorff [« Licht, Schatten und Bewegung. Mein Leben und meine Filme »], Paris, Éditions Flammarion, , 430 p. (ISBN 978-2-08-122394-3)
- Volker Schlöndorff, La Mer à l'aube : Les dernières heures de Guy Môquet, Paris, http://www.edsaintsimon.com/livre-detail.php?id=78 Éditions Saint-Simon, , 192 p. (ISBN 978-2-915134-58-2)
Notes et références
- Volker Schlöndorff sur le site de l'Encyclopædia Universalis.
- Émission À voix nue de France Culture le 31 mars 2015.
- (fr) Article de l'encyclopédie Larousse sur Volker Schlöndorff, consulté le 03 novembre 2012.
- Laurent Dispot, « L’aura du film de Volker Schlöndorff "Le Neuvième Jour" », La Règle du jeu, no 43, (ISBN 978-2246741275, lire en ligne).
- Après Hitler, Volker Schlöndorff s’attaquera à Léopold II - Le Soir, le
- La chorégraphie surprenante de 3 400 jeunes Français et Allemands en hommage aux morts de Verdun
- Verdun : le spectacle n'est pas du goût de tous
- Outrage as thousands of children run over the graves of fallen soldiers from WWI’s Battle Of Verdun in stunt organised by German filmmaker during 100th anniversary commemorations in France
- Running tragique entre les tombes à Verdun, Daniel Schneidermann, rue89.nouvelobs.com, 30 mai 2016
- La cérémonie de la bataille de Verdun indigne la droite et le FN
- « 3.400 jeunes à la nécropole de Douaumont, temps fort du centenaire de Verdun - YouTube », sur www.youtube.com (consulté le )
- « Return to Montauk (2017) », sur IMDB (consulté le )
- « Ouverture du Festival de Venise », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
- (de) Volker Schlöndorff - Von 1984 bis 1993 Mitglied der Akademie der Künste, Berlin (West), Sektion Film- und Medienkunst. Seit 1993 Mitglied der Akademie der Künste, Berlin, Sektion Film- und Medienkunst sur le site de l'Akademie der Künste
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