Valeurs particulières de la fonction zêta de Riemann

En mathématiques, la fonction zêta de Riemann est une fonction en analyse complexe, dont l'importance est notable en théorie des nombres. Elle est nommée d'après le mathématicien Bernhard Riemann et on la note souvent ζ(s). Pour un s réel supérieur à 1, elle est définie par

Elle peut également servir pour des séries numériques convergentes, comme celle derrière le problème de Bâle . Plusieurs formules explicites ou numériques efficaces existent pour le calcul de ζ(s) pour des valeurs entières, qui ont toutes des valeurs réelles, dont l'exemple cité. Cette page liste ces formules avec des tables de valeurs, ainsi que des séries tirées de la dérivée de ζ ou de compositions avec d'autres séries.

La même équation en s reste vraie si s est un nombre complexe dont la partie réelle est supérieure à 1, assurant la convergence. Ainsi, elle peut être prolongée au plan complexe par prolongement analytique, sauf au pole simple en s = 1. La dérivée complexe existe dans cette région plus large, faisant de la fonction zêta une fonction méromorphe. Cependant, l'expression de définition n'est plus valable pour toutes ces valeurs de s, où la sommation diverge. Par exemple, la fonction zêta existe en s = 1 (et y a donc une valeur finie), mais la série correspondante est 1 + 2 + 3 + ..., dont les sommes partielles divergent grossièrement.

Les valeurs de la fonction zêta listées ici incluent les valeurs de la fonction aux nombres entiers négatifs pairs (s = 2, 4, etc.), pour lesquels ζ(s) = 0 qui forment les zéros trivaux de la fonction. L'article consacré à la fonction détaille l'importance des zéros non triviaux pour la théorie des nombres.

La fonction zêta de Riemann en 0 et 1

En zéro, on a

En 1 il y a un pole, alors ζ(1) n'est pas fini mais les limites à gauche et à droite le sont :

Comme il y a un pole du premier ordre, il a un résidu

Entiers positifs

Entiers positifs pairs

Les valeurs exactes de la fonction zêta aux entiers positifs pairs peut être exprimée à partir des nombres de Bernoulli :

Le calcul de ζ(2) est connu comme le problème de Bâle. La valeur de ζ(4) est liée à la loi de Stefan-Boltzmann et la loi de Wien en physique. Les premières valeurs sont données :

On peut en déduire que .

Valeurs choisies aux entiers pairs
Valeur exacte Approximation décimale Source
ζ(2) 1,644 934 066 848 226 436 4... A013661
ζ(4) 1,082 323 233 711 138 191 5... A013662
ζ(6) 1,017 343 061 984 449 139 7... A013664
ζ(8) 1,004 077 356 197 944 339 3... A013666
ζ(10) 1,000 994 575 127 818 085 3... A013668
ζ(12) 1,000 246 086 553 308 048 2... A013670
ζ(14) 1,000 061 248 135 058 704 8... A013672

La relation entre la fonction zeta aux entiers pairs positifs et les nombres de Bernoulli peut s'écrire

avec An et Bn sont entiers pour tout n pair. On obtient ainsi les suites d'entiers A002432 et A046988, dans l'OEIS. On donne certaines valeurs :

Coefficients
n A B
1 6 1
2 90 1
3 945 1
4 9450 1
5 93555 1
6 638512875 691
7 18243225 2
8 325641566250 3617
9 38979295480125 43867
10 1531329465290625 174611
11 13447856940643125 155366
12 201919571963756521875 236364091
13 11094481976030578125 1315862
14 564653660170076273671875 6785560294
15 5660878804669082674070015625 6892673020804
16 62490220571022341207266406250 7709321041217
17 12130454581433748587292890625 151628697551

Si on note ηn = Bn/An le coefficient devant π2n comme vu avant,

alors on peut poser la relation de récurrence,

Cette récurrence peut être déduite des nombres de Bernoulli.

Il y a une autre relation de récurrence :

qui peut être prouvée en utilisant la dérivée de la fonction cotangente

Les valeurs de la fonction zêta aux entiers pairs positifs ont pour fonction génératrice :

Puisque

la formule permet de déduire

Entiers positifs impairs

La somme de la série harmonique est infini.

La valeur ζ(3) est aussi connue comme la constante d'Apéry et apparait dans le rapport gyromagnétique de l'électron. La valeur ζ(5) apparait dans la loi de Planck. On donne les premières valeurs :

Premères valeurs aux entiers impairs
Valeur exacte Approximation décimale Source
ζ(3) 1,202 056 903 159 594 285 3... A02117
ζ(5) 1,036 927 755 143 369 926 3... A013663
ζ(7) 1,008 349 277 381 922 826 8... A013665
ζ(9) 1,002 008 392 826 082 214 4... A013667
ζ(11) 1,000 494 188 604 119 464 5... A013669
ζ(13) 1,000 122 713 347 578 489 1... A013671
ζ(15) 1,000 030 588 236 307 020 4... A013673

Il a été prouvé que ζ(3) est irrationnel (théorème d'Apéry) et qu'une infinité de nombres de la forme ζ(2n + 1) : n ∈ ℕ , sont irrationnels[1]. Il existe des résultats sur l'irrationalité de valeurs de la fonction zêta de Riemann sur les éléments de certains sous-ensembles d'entiers impairs positifs ; par exemple au moins une des valeurs parmi ζ(5), ζ(7), ζ(9), ou ζ(11) est irrationnel[2].

Les valeurs de zeta aux entiers impairs positifs apparaissent en physique, plus spécifiquement dans les fonctions de corrélation des chaines de spin XXX antiferromagnétiques[3].

La plupart des identités suivantes viennent de Simon Plouffe. Elles sont remarquables pour leur convergence rapide (au moins trois chiffres par itération) et donc utiles dans les calculs de haute précision.

Calcul de ζ(5)

Plouffe donne les identités suivantes

Calcul de ζ(7)

On peut écrire la somme sous forme d'une série de Lambert.

Calcul de ζ(2n+1)

En définissant les quantités

une série de relations peut être donnée sous la forme

avec An, Bn, Cn et Dn sont des suites d'entiers positifs. Plouffe donne une table de valeurs :

coefficients
n An Bn Cn Dn
3 180 7 360 0
5 1470 5 3024 84
7 56700 19 113400 0
9 18523890 625 37122624 74844
11 425675250 1453 851350500 0
13 257432175 89 514926720 62370
15 390769879500 13687 781539759000 0
17 1904417007743250 6758333 3808863131673600 29116187100
19 21438612514068750 7708537 42877225028137500 0
21 1881063815762259253125 68529640373 3762129424572110592000 1793047592085750

Ces constances entières peuvent être exprimées à partir des nombres de Bernoulli, comme donné dans (Vepstas, 2006).

Un algorithme facile pour le calcul de la fonction zêta de Riemann en tout entier est donnée par E. A. Karatsuba[4],[5],[6]

Entiers négatifs

En général, pour tout entier négatif, on a

Les zéros "triviaux" sont aux entiers pairs négatifs (par sommation de Ramanujan) :

Les premières valeurs aux entiers négatifs

Cependant, comme les nombres de Bernoulli, ils restent petits à mesure qu'on va plus loin dans les entiers négatifs. On pourra regarder l'article 1 + 2 + 3 + 4 + ⋯.

Ainsi ζ(m) peut être utilisé comme définition pour tous les nombres de Bernoulli (dont ceux aux indices 0 et 1).

Dérivées

La dérivée de la fonction zêta aux entiers pairs négatifs donne :

Les premières valeurs sont :

On a aussi :

avec A est la constante de Glaisher–Kinkelin.

En partant de la dérivée logarithmique de l'équation fonctionnelle,

Dérivées choisies
Valeur Approximation décimale Source
−0,198 126 242 885 636 853 33... A244115
−0,937 548 254 315 843 753 70... A073002
−0,918 938 533 204 672 741 78... A075700
−0,360 854 339 599 947 607 34... A271854
−0,165 421 143 700 450 929 21... A084448
−0,030 448 457 058 393 270 780... A240966
+0,005 378 576 357 774 301 144 4... A259068
+0,007 983 811 450 268 624 280 6... A259069
−0,000 572 985 980 198 635 204 99... A259070
−0,005 899 759 143 515 937 450 6... A259071
−0,000 728 642 680 159 240 652 46... A259072
+0,008 316 161 985 602 247 359 5... A259073

Séries impliquant ζ(n)

Les sommes suivantes peuvent être dérivées de la fonction génératrice :

ψ0 est la fonction digamma.

Ainsi, on a :

Il existe des séries utilisant la constante d'Euler-Mascheroni (notée γ) :

et utilisant la valeur principale

qui n'impacte que la valeur en 1, ces formules peuvent être écrites comme :

et montrent qu'elles dépendent de la valeur principale de ζ(1) = γ .

Zéros non triviaux

Les zéros de la fonction zêta de Riemann sauf les entiers pairs négatifs sont appelés "zéros non triviaux". Il reste un problème complexe de la théorie des nombres. Voir le site d'Andrew Odlyzko pour les tables et les bibliographies.

Rapports

Si évaluer des valeurs particulières de la fonction zêta peut être difficile, on peut déterminer les valeurs de certains rapports entre deux valeurs données en utilisant astucieusement les valeurs particulières de la fonction Gamma d'Euler et sa formule de réflexion :

On obtient pour deux valeurs demi-entières :

D'autres exemples suivent pour des évaluations plus poussées et des relations de la fonction Gamma. Par exemple, une conséquence de la relation

permet d'obtenir

AGM désigne la moyenne arithmético-géométrique. De façon similaire, il est possible d'obtenir des relations avec des radicaux, telles que

la relation analogue impliquant zeta est

Références

  1. T. Rivoal, « La fonction zeta de Riemann prend une infinité de valeurs irrationnelles aux entiers impairs », Comptes Rendus de l'Académie des Sciences, Série I, vol. 331, , p. 267–270 (DOI 10.1016/S0764-4442(00)01624-4, Bibcode 2000CRASM.331..267R, arXiv math/0008051)
  2. W. Zudilin, « One of the numbers ζ(5), ζ(7), ζ(9), ζ(11) is irrational », Russ. Math. Surv., vol. 56, no 4, , p. 774–776 (DOI 10.1070/rm2001v056n04abeh000427, Bibcode 2001RuMaS..56..774Z)
  3. H.E. Boos, V.E. Korepin, Y. Nishiyama et M. Shiroishi, « Quantum correlations and number theory », J. Phys. A, vol. 35, , p. 4443–4452 (DOI 10.1088/0305-4470/35/20/305, Bibcode 2002JPhA...35.4443B, arXiv cond-mat/0202346).
  4. (en) E.A. Karatsuba, « Fast calculation of the Riemann zeta function ζ(s) for integer values of the argument s », Probl. Perdachi Inf., vol. 31, no 4, , p. 69–80 (Math Reviews 1367927, lire en ligne)
  5. (en) E. A. Karatsuba, « Fast computation of the Riemann zeta function for integer argument », Dokl. Math., vol. 54, no 1, , p. 626.
  6. (en) E. A. Karatsuba, « Fast evaluation of ζ(3) », Probl. Inf. Transm., vol. 29, no 1, , p. 58-62.

Sources

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  • Arithmétique et théorie des nombres
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