Tentative de coup d'État de 2019 au Gabon

La tentative de coup d'État de 2019 au Gabon fait référence à une tentative ratée de coup d'état par des factions dissidentes des Forces armées gabonaises contre le président Ali Bongo qui a eu lieu le .

Tentative de coup d'État de 2019 au Gabon
Véhicules de l'armée pendant la tentative de coup d'État.
Informations générales
Date
Lieu Libreville, Gabon
Issue Échec du coup d'État
Belligérants
Gabon
Forces armées gabonaises
Gabon
« Conseil national de restauration » (Forces armées gabonaises dissidentes)
Commandants
Ali Bongo Ondo Obiang Kelly (capturé)
Pertes
2 morts
7 prisonniers

Violences post-électorales de 2016 au Gabon

Contexte

Le , alors que sont dévoilés les résultats officiels des élections législatives de 2018, largement remportées par le parti au pouvoir, Ali Bongo est hospitalisé à Riyad, en Arabie saoudite, officiellement pour une « fatigue sévère » due à du surmenage. De nombreux journaux de la presse internationale avancent qu'il a été victime d'un accident vasculaire cérébral ou d'un œdème cérébral[1],[2],[3]. Les semaines suivantes voient la propagation dans les médias de débats quant à la nature de la transition politique à mettre en œuvre en cas d'incapacité du chef de l'État[4]. De multiples fausses annonces de son décès se répandent également. La confusion s'accentue avec la diffusion à la télévision d'État d'une présumée intervention de l'ambassadeur du Gabon en France, Flavien Enongoué, annonçant la mort du président, une intoxication montée de toutes pièces par le trucage de la voix du diplomate, dont une prise de parole était alors attendue[5]. L’opposant Jean Ping lance pour sa part un appel à reconnaître sa légitimité à la présidence, lors d'une conférence qui est perçue comme un souhait de voir le président destitué[6].

Après son hospitalisation de plus d'un mois à Riyad, Ali Bongo est transféré le à l'hôpital d’instruction militaire Mohammed V, à Rabat, au Maroc[7]. Dans une vidéo diffusée le par le palais royal marocain, il apparaît aux côtés du roi du Maroc Mohamed VI[8]. Dans cette vidéo, il est filmé uniquement de profil, ce qui ne met pas fin aux spéculations vis-à-vis de son état de santé[9]. Il quitte l’hôpital militaire le pour poursuivre sa convalescence dans une résidence privée à Rabat[10]. Le , en déplacement à Franceville, le vice-président gabonais, Pierre Claver Maganga Moussavou, laisse fortement entendre qu'Ali Bongo a fait un accident vasculaire cérébral[11].

Événements

Le , le commandant-adjoint de la Garde Républicaine, le lieutenant Ondo Obiang Kelly, prend la tête d'un commando à Libreville, capitale gabonaise, et tente de renverser le régime du président Ali Bongo[12],[13]. Cet événement arrive seulement quelques jours après que le président s'est adressé depuis le Maroc à la population pour la première fois depuis son hospitalisation en Arabie saoudite[14].

En guise de déclenchement du coup, des militaires ont déclaré l'établissement d'un Conseil national de restauration a la télévision nationale. Cependant, le lieutenant Kelly est arrêté le jour même[14]. Parmi les autres organisations ayant participé au coup se trouve le Mouvement patriotique des jeunes des forces de défense et de sécurité du Gabon, qui a diffusé l'annonce des militaires sur les réseaux sociaux[15].

Le lendemain, le gouvernement annonce avoir interpellé sept des meneurs du coup et que des interrogatoires sont en cours. Le gouvernement annonce aussi que deux mutins ont été tués[16].

Kelly Ondo Obiang, le principal instigateur

Le lieutenant Kelly Ondo Obiang, né le à Mitzic est le principal instigateur de la tentative du coup d’État du 7 janvier[17]. Il fait ses études primaires à Libreville. Pendant ses études primaires il réside chez un de ses oncles. L'un d'eux, son modèle, est officier supérieur au 1er Régiment parachutiste gabonais (1er RPG). A la fin de ses études primaires, il lui conseille de passer le concours du prytanée militaire de Libreville qu'il réussi avec brio pour y entrer en juillet 2002. Dans cette école qui forme l'élite de l’armée gabonaise, le jeune Kelly Obiang apprend le métier des armes et les arts martiaux. Elève doué, il est à douze ans chef de section. Kelly Ondo Obiang reçoit de nombreux prix, mais certains de ses enseignants le jugent «trop curieux»[18]. Après une période préparatoire, il est admis à l’école des Forces Armées de Yamoussoukro en Côte-d'Ivoire dont il sort diplômé en 2015[19]. Kelly Ondo Obiang est par ailleurs breveté du Centre d’entraînement commando en foret équatoriale du Gabon et titulaire d’un brevet de parachutiste. Kelly Ondo Obiang, intègre la Garde Républicaine avec le grade de sous lieutenant, il est rapidement affecté à la garde d’honneur un bataillon interarmes chargé de rendre les honneurs au président de la République et aux hautes personnalités en visite au Gabon. Kelly Ondo Obiang ne cache pas son admiration pour Charles N'Tchoréré, Charles de Gaulle et pour le Colonel Djoué Dabany (militaire respecté disparu dans un mystérieux accident d’Hélicoptère en 1978). Selon un de ses collègues à la Garde d’honneur, sa tentative de putsch est née de la crise post-électorale en 2016.

Réactions internationales

  • Afrique du Sud : Le ministère des Relations internationales déclare : « L'Afrique du Sud réaffirme à l'Union africaine le principe du rejet total de tout changement de chef d'état de manière extraconstitutionnelle »[20]
  • Égypte : Le ministre des Affaires étrangères de l'Égypte Sameh Choukri condamne fortement la tentative de coup d'État[21]
  • France : Le Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a déclaré : « Nous condamnons toute tentative de changement de régime extraconstitutionnel. La stabilité du Gabon ne peut être assurée que dans un strict respect des dispositions de sa Constitution »[22].
  • Nigeria : Le président Muhammadu Buhari a déclaré « Les officiers militaires au Gabon doivent comprendre que l'ère des coups d'État militaires sur des gouvernements en Afrique et dans le monde entier est révolue »[23]
  • Turquie : Le Ministère des Affaires étrangères turc condamne la tentative de coup d'État : « La Turquie s'oppose à toutes les tentatives de renversement illégal de gouvernements élus démocratiquement »[24]

Procès

Le procès des « pieds nickelés » de Libreville a finalement abouti le 1er juillet 2021 à des peines moins lourdes que prévues par la loi gabonaise. Les juges étant partagés entre consternation et commisération, ils n’ont pas vraiment pris au sérieux la « tentative de coup d’État » du lieutenant Kelly Ondo et de ses comparses, les adjudants Estimé Bidima Manongo et Dimitri Nze Minko. Ces trois militaires peu connus au sein de la troupe, n’avaient été suivis ni par les autres forces ni par la population. L’affaire s’était terminée en quelques heures, par la reddition des mutins. Après cinq jours de débats, la Cour spéciale militaire a rendu son verdict. Accusé de délits d’association de malfaiteurs, séquestration arbitraire et atteinte à la sûreté intérieure de l’État, l’instigateur du putsch écopé de 15 ans de réclusion criminelle[25], au lieu de la perpétuité demandée par le procureur et par l’avocat de l’État. En sus de sa radiation de l’armée, le meneur, Kelly Ondo Obiang devra également s’acquitter d’une amende de 31 millions de F CFA.

Références

  1. Gabon : victime d’un AVC, Ali Bongo demeure hospitalisé en Arabie saoudite
  2. Etat de santé d’Ali Bongo: les Gabonais toujours dans l’attente d’informations
  3. Gabon, Ali Bongo : AVC, œdème cérébral ou mort ?
  4. Paru sur le Gabon : «Ali Bongo, le début de la fin»
  5. Vidéo : Ali Bongo annoncé mort sur Gabon 24
  6. Gabon : Jean Ping cherche-t-il à destituer Ali Bongo ?
  7. « Gabon : Ali Bongo Ondimba est arrivé au Maroc pour y poursuivre sa convalescence », sur JeuneAfrique.com, (consulté le )
  8. « Gabon : premières images du président Ali Bongo hospitalisé au Maroc », sur TV5MONDE, (consulté le )
  9. Franck Koffi, « Gabon : la preuve qu'Ali Bongo est... paralysé », sur Afrik.com, (consulté le )
  10. « Maroc : Ali Bongo Ondimba sort de l’hôpital et poursuit sa convalescence à Rabat », sur JeuneAfrique.com, (consulté le )
  11. « Gabon: le quasi aveu du vice-président sur l’état de santé d’Ali Bongo - RFI », sur RFI Afrique (consulté le )
  12. « Gabon : qui est le lieutenant Kelly Ondo Obiang, instigateur présumé de la tentative de coup d’État ? », sur JeuneAfrique.com, (consulté le )
  13. « Gabon, Kelly Ondo Obiang, officier brillant, mais soldat perdu », sur Mondafrique, (consulté le )
  14. « Coup d'État avorté au Gabon: le chef du commando arrêté ».
  15. « Coup d'État avorté au Gabon : sept putschistes arrêtés, deux autres tués ».
  16. « Tentative de coup d’État au Gabon : Internet rétabli, l’interrogatoire des mutins en cours ».
  17. « Gabon, Kelly Ondo Obiang, officier brillant, mais soldat perdu », Mondafrique, (lire en ligne).
  18. « Gabon, Kelly Ondo Obiang, officier brillant, mais soldat perdu », Mondafrique, (lire en ligne).
  19. « Gabon : qui est le lieutenant Kelly Ondo Obiang, instigateur présumé de la tentative de coup d’État ? », Jeune Afrique, (lire en ligne).
  20. (tr) « South Africa, Chad condemn coup attempt in Gabon », sur yenisafak.com, gzt.com, (consulté le ).
  21. « Egypt slams coup attempt in Gabon », sur EgyptToday (consulté le ).
  22. « Gabon – Putsch manqué  : la réaction de la France - Bénin Web TV », sur Bénin Web TV, (consulté le ).
  23. (en) John Owen Nwachukwu, « Coup : Buhari reacts to failed military takeover in Gabon », sur dailypost.ng, Daily Post Nigeria, (consulté le ).
  24. (es) « Turquía condena la intentona de golpe de estado en Gabón / TRT Español », sur net.tr (consulté le ).
  25. « Putsch raté de 2019 au Gabon: 15 ans de prison pour trois militaires », L'Express, (lire en ligne).

Voir aussi

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