Suzanne de Dietrich

Suzanne de Dietrich, née le à Niederbronn-les-Bains (Bas-Rhin) et morte le à Strasbourg, est une théologienne protestante d'origine alsacienne, engagée en faveur de l'œcuménisme. Elle a participé à la fondation en 1939 de La Cimade, Comité inter-mouvements auprès des évacués.

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Jeunesse et formation

Les origines alsaciennes

Château familial de la famille de Dietrich.

Suzanne de Dietrich est la fille de Charles de Dietrich et d'Anne von Türcke, et la petite-fille d'Albert de Dietrich. La famille de Dietrich est une famille emblématique d'industriels alsaciens, dont plusieurs membres ont été ammestres ou maires de Strasbourg, notamment Philippe-Frédéric, commanditaire du Chant de guerre pour l’armée du Rhin, composé par Claude Rouget de Lisle, le , tandis que la famille maternelle de Suzanne appartient à la noblesse de Saxe-Meiningen.

La piété luthérienne

Sa famille alsacienne est luthérienne, enracinée dans la tradition de foi du Ban de la Roche, marquée par les pasteurs Jean-Frédéric Oberlin et Tommy Fallot[1].

Études scientifiques et formation biblique à Lausanne

Elle perd ses parents quand elle est jeune, et son oncle, Eugène de Dietrich, devient son tuteur. Suzanne est destinée par sa famille à devenir ingénieure, «pour prendre sa place dans l'entreprise familiale»[2] et, dans cette perspective, elle est envoyée à Lausanne, dans un univers francophone, où elle obtient un baccalauréat scientifique, en 1909, puis intègre l'école d'ingénieurs rattachée à l'université de Lausanne et obtient un diplôme d'ingénieure en électricité, en 1913. Durant son cycle d'études à Lausanne, elle participe activement aux programmes de l'Association chrétienne d'étudiants (ACE). Elle s'y implique notamment en développant les études bibliques en petits groupes.

Retour en Alsace

Suzanne de Dietrich se retire en 1979 à la maison des Diaconesses de Strasbourg, où elle meurt deux ans plus tard. Elle est enterrée au cimetière de Windstein, près de Niederbronn (Bas-Rhin), où se trouvent aussi plusieurs tombes de la famille de Dietrich[3].

La vie professionnelle

À la tête de fédérations pour la jeunesse

Dès les années 1939-1940, confrontée à la détresse des évacués alsaciens et lorrains, Suzanne de Dietrich s'engage auprès des populations déplacées dans le sud-ouest de la France. Elle adresse un rapport au Comité inter-mouvement (CIM), instance qui coordonne les organisations de jeunesse protestantes en partenariat avec la FUACE (Fédération universelle des associations chrétiennes d'étudiants/ World Student Christian Federation'' ), les UCJ (Unions chrétiennes de jeunes gens et jeunes filles, ou YMCA) et l’EU (Fédération des Éclaireurs et Éclaireuses unionistes). Elle avait été présidente de la Fédération française des éclaireuses de 1929 à 1933, au titre de la section unioniste de ce mouvement. Voir Fédération des Éclaireurs et Éclaireuses unionistes.

Accueil des réfugiés et fondation de la Cimade

En , lors d'une rencontre à Bièvres de dirigeants des mouvements de jeunesse, autour de la situation des Alsaciens et des Lorrains, la CIM décide d'une nouvelle orientation et décide d'agir « auprès des évacués », adoptant le sigle de Cimade, dans le double but de « témoigner de l’Évangile auprès de la jeunesse française éprouvée par la guerre », tel qu'il apparaît lors de la publication des objectifs de l’œuvre, dans le Journal officiel du .

Les thèses de Pomeyrol

En 1941, Suzanne de Dietrich participe à la rédaction des thèses de Pomeyrol[4], par des pasteurs, Willem Visser 't Hooft, Georges Casalis, Roland de Pury, Jean Cadier, Paul Conord et plusieurs autres, et des laïcs, Madeleine Barot notamment. Ces thèses, rédigées lors d'une rencontre à Pomeyrol, dans une maison située à Saint-Étienne-du-Grès[5], les 16 et , s'inscrivent dans l'inspiration de la Déclaration de Barmen, texte de l'église confessante allemande qui prônait une résistance théologique à l'égard de l'idéologie nazie[6].

Une laïque engagée

Suzanne de Dietrich est connue pour son engagement œcuménique, pour le rapprochement des Églises chrétiennes, et pour son travail de bibliste. Elle a découvert l'œuvre du théologien réformé suisse, Karl Barth, diffusée en France à travers la revue Foi et Vie par le pasteur Pierre Maury (1890-1956)[7]. Par ailleurs, elle est également un membre très actif du mouvement des « Volontaires du Christ » créé et constitué en majeure partie par des étudiants en théologie[8].

L'engagement en faveur de l'Œcuménisme

Elle participe aux débuts de l'Institut œcuménique de Bossey, fondé par Willem Visser 't Hooft, et appartient à la première équipe qui le dirige[9]. Elle assure la direction des études de 1946 à 1954, et s'occupe particulièrement des cours bibliques pour laïcs. En 1948, elle fait partie de l'équipe de préparation «Le dessein de Dieu et le témoignage de l’Église», pour la première assemblée plénière du Conseil œcuménique des Églises, à Amsterdam. Pendant l'Assemblée, elle est consultante du comité sur «l'importance des laïcs» dans l'Église[10].

L'animation biblique

Son livre le plus connu est Le Dessein de Dieu, publié en 1948, qui constitue un itinéraire biblique.

Hommages

Suzanne de Dietrich est docteur honoris causa de la Faculté de théologie protestante de Montpellier.

Œuvre écrite

  • C'était l'heure de l'offrande / Notes en marge de l'Évangile, Éditions du Semeur, 1935.
  • Le Dessein de Dieu / Itinéraire biblique, Delachaux & Niestlé, Paris, 1945. Dernière réédition Cerf 1992.
  • La Fédération universelle des associations chrétiennes d'étudiants (1895-1945), Paris, éditions du Semeur, 1948.
  • Les Lettres johanniques, Labor et Fides, 1964.
  • Le renouveau biblique, hier et aujourd'hui. Tome 1 : Qu'est-ce que la Bible ? ; Tome 2 : Comment lire la Bible ?, coll. « Foi vivante », Delachaux et Niestlé, 1969.

Notes et références

  1. Suzanne de Dietrich (1891-1981), Musée virtuel du protestantisme, consulté en ligne le 5 mars 2015.
  2. Antoinette Spindler, "Suzanne de Dietrich (1891-1091)", p. 179-191, in Marc Spindler & Annie Lenoble-Bart (dir.), Spiritualités missionnaires, Paris, Khartala, 2007.
  3. Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français, tome 155, avril-mai-juin 2009, p. 515
  4. Thèses de Pomeyrol, en ligne
  5. Les thèses de Pomeyrol, Musée virtuel du protestantisme, consulté en ligne le 5 mars 2015.
  6. Christine Prieto, Les «thèses de Pomeyrol», une position protestante méconnue, Autres temps, 63, 1999, p. 99-113.
  7. Pierre Maury (1890-1956), Musée virtuel du protestantisme, consulté en ligne le 6 mars 2015.
  8. (Klauspeter Blaser, Nicolas Monnier, 1995, p. 96)
  9. Notice historique, Institut œcuménique de Bossey, consultée en ligne le 5.03.15
  10. Bulletin de la SHPF

Annexes

Bibliographie

  • Christian Barbery, « Suzanne de Dietrich (1891-1981) : quelques repères biographiques », in Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français, 1991, tome, 137, p. 599-610
  • Klauspeter Blaser et Nicolas Monnier, La théologie au XXe siècle : histoire, défis, enjeux, Paris, L'âge d'homme, , 514 p. (ISBN 978-2-8251-0670-9, lire en ligne)
  • Pierre Bolle, « Suzanne de Dietrich », dans André Encrevé (dir.), Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine. 5 Les Protestants, Paris, Beauchesne, (ISBN 2701012619), p. 174-175.
  • Hélène Georger-Vogt et Jean-Pierre Kintz, « Suzanne de Dietrich », in Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne, vol. 8, p. 657
  • Marc Lienhard, « L'engagement œcuménique de Suzanne de Dietrich », in « Des femmes qui œuvrent sur le plan religieux, social, culturel voire politique », in Les Saisons d'Alsace, hors-série, hiver 2016-2017, p. 58
  • Marc Lienhard, « Dietrich, Suzanne Anne (de) », in Patrick Cabanel et André Encrevé (dir.), Dictionnaire biographique des protestants français de 1787 à nos jours, tome 2 : D-G, Les Éditions de Paris Max Chaleil, Paris, 2020, p. 198 (ISBN 978-2-84621-288-5)
  • Reconnaissance à Suzanne de Dietrich, Pairault, Lezay, 1971, 224 p. (numéro hors série des Cahiers bibliques, )
  • Suzanne de Dietrich : une théologienne alsacienne... une personnalité internationale..., 1891-1981, exposition réalisée à l'occasion du dépôt de ses manuscrits à la BNUS, BNU, Strasbourg, 1990, 5 p. (également publié dans L'Outre-forêt : revue d'histoire de l'Alsace du Nord, 1990, no 71, p. 28-34)
  • (en) Michael Kinnamon et Brian E. Cope, The ecumenical movement : an anthology of key texts and voices, Wm. B. Eerdmans Publishing, , 548 p. (ISBN 978-0-8028-4263-3)
  • Hans-Rudi Weber, Suzanne de Dietrich 1891-1981, la passion de vivre, Olivétan, , 288 p. (ISBN 978-2-85304-117-1, lire en ligne)
  • Emmanuelle Steffek, « Suzanne de Dietrich », dans Béatrice Didier, Antoinette Fouque, Mireille Calle-Gruber (éd.), Le Dictionnaire universel des créatrices, Paris, Éditions des femmes, .

Articles connexes

Liens externes

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