Roger Degueldre
Roger Degueldre, né le à Louvroil (Nord) à quelques kilomètres de la frontière belge et fusillé au fort d'Ivry[1] (région parisienne), le 6 juillet 1962, est un lieutenant du 1er régiment étranger de parachutistes, déserteur à la suite du putsch des généraux en 1961 pour rejoindre l'Organisation armée secrète (OAS), et créateur des commandos Delta de cette organisation. Il est condamné à mort le par la Cour militaire de justice.
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Biographie
Né dans une famille ouvrière, d'un père cheminot et d'une mère au foyer, il fuit, avec sa famille, l'occupation allemande en 1940 pour se réfugier en zone libre dans le sud de la France. En 1942, le jeune Roger Degueldre remonte dans le nord de la France pour entrer clandestinement dans la zone occupée et s’engager dans le maquis, auprès des partisans communistes, dans les Francs-tireurs et partisans (FTP) aux côtés de Roger Pannequin, le « commandant Marc » sous l'occupation allemande.
À la Libération, il s'engage dans la 10e division d'infanterie motorisée qui participe à la réduction de la poche de Colmar en , puis dans la Légion étrangère, sous l'identité de Roger « Legueldre » né le à Gruyères, dans la Confédération suisse. Par décision ministérielle, il reprend son identité le .
Il gagne ses galons de sous-officier en Indochine (au 1er régiment étranger de cavalerie)[2] en étant décoré de la médaille militaire pour acte de courage (porte secours au capitaine de Blignières et au sous-lieutenant Boutot sous le feu de l'ennemi) pendant la guerre d'Indochine. Il est décoré de la croix de guerre des Théâtres d'opérations extérieurs[2].
Après la chute de Điện Biên Phủ, il est muté au 1er bataillon étranger parachutiste (ancêtre du 1er régiment étranger de parachutistes)[2] et il participe au conflit algérien, où il est fait officier et est nommé chevalier de la Légion d'honneur[2].
Pendant la semaine des barricades à Alger (janvier 1960) il est présent avec son régiment. Engagé dans la défense de l'Algérie française, il est alors soupçonné d’avoir participé au complot avorté de décembre 1960 contre le général de Gaulle peu après sa visite à Alger. Il est muté au 4e régiment étranger d'infanterie. Niant les faits et convaincu de la nécessité de la lutte armée, il passe alors dans la clandestinité le .
En 1961, il est le créateur et responsable des commandos Delta de l'Organisation armée secrète (OAS).
Plusieurs centaines de meurtres furent attribués à l'OAS. Selon Bertrand Le Gendre, journaliste au quotidien Le Monde, « Il est impossible de déterminer avec précision le nombre des victimes de l'OAS en Algérie. Le chiffre le plus fiable émane de la Sûreté nationale. Un décompte qui s'arrête au , le jour de l'arrestation de Salan, fait état de 1 622 morts dont 1 383 musulmans et 239 Européens. Et de 5 148 blessés dont 4 086 musulmans et 1 062 Européens. La proportion musulmans/Européens est de 85 % pour les morts. »
Par exemple, le 15 mars 1962, à 10 h 45 un « commando Delta », pénètre au centre social de Château-Royal dans la commune d'El-Biar, près d'Alger. Dans la salle de réunion étaient rassemblés six dirigeants des centres sociaux qui furent alignés contre un mur de la cour et assassinés à l'arme automatique. Ces victimes étaient :
- Marcel Basset, directeur du Centre de formation de l'éducation de base à Tixeraine (CSE d'Algérie) ;
- Robert Eymard, ancien instituteur et chef du bureau d'études pédagogiques aux CSE ;
- Mouloud Feraoun, directeur adjoint au chef de service des CSE, ancien instituteur et écrivain ;
- Ali Hammoutène, inspecteur de l'Éducation nationale, directeur adjoint aux CSE et ancien instituteur ;
- Max Marchand (né en 1911), inspecteur d'académie, chef de service aux CSE et ancien instituteur ;
- Salah Ould Aoudia, ancien instituteur et inspecteur des centres de la région Alger-Est.
Roger Degueldre a prononcé une phrase restée célèbre et reprise par des compagnons de l'OAS : qu'importe qu'on gagne ou qu'on perde, l'essentiel est de se battre !
Il est arrêté le , condamné à mort puis fusillé le au fort d'Ivry. Selon le récit fait par son avocat, une balle seulement sur les onze du peloton d'exécution l'aurait atteint[3]. Le sous-officier chargé de lui donner le coup de grâce s'y reprendra à six fois et devra aller chercher un second revolver avant que Degueldre ne meure[3]. Les trois premiers officiers ayant refusé l'ordre de former le peloton d'exécution, les capitaines Jean de Balby de Vernon, Michel Cabanes et Michel Martet, du 501e régiment de chars de combat de Rambouillet, sont sanctionnés, rayés des cadres et mis aux arrêts. Les officiers suivants qui ont refusé l'ordre ont également été sanctionnés.
Sa compagne Nicole Bésineau, fille du général Paul Gardy, condamnée à 15 ans de réclusion par contumace, épouse de Michel Bésineau[4], s'enfuit en 1963 avec toute la famille Gardy en Argentine[5]. L'Argentine leur offre alors des terres à Misión Tacaaglé, dans la région de Formosa, près du Paraguay [6].
Distinctions
Roger Degueldre est décoré à neuf reprises[7], parmi lesquelles :
- Croix de guerre des TOE (1 palme et 6 étoiles).
- Croix de la Valeur militaire (2 palmes).
- Legion of Merit, grade de commandeur.
Sa condamnation le prive de ses prérogatives en matière de décorations.
Discographie
Jean-Pax Méfret a édité aux Éditions REDI "Productions recherche - Exploitation des idées" (Réf. 423 E. P.) un LP 45t qui raconte sous le titre "Les derniers instants d'un officier français" l'exécution du lieutenant Degueldre. Le disque est accompagné de deux chansons chantées par Jean-Noël Michelet (Pseudo de Jean-Pax Méfret) :"L'erreur du Général" et "Je ne vous garde pas rancune, je vous plains " dont la conclusion est "la cour militaire d'injustice le 62 a donné ordre à sa milice d'assassiner ce valeureux".
Notes et références
- algerie-francaise.org, « Roger Degueldre, lieutenant au Ier REP, né le 19 mai 1925, fusillé au Fort d'Ivry le 6 juillet 1962 »
- « Degueldre Roger », Pieds-Noirs d'hier et d'aujourd'hui, no 154, juillet-août 2007
- Jean-Pax Méfret : 1962, l'été du malheur
- Michel Bésineau était capitaine de 1er régiment étranger de parachutistes
- Escadrons de la mort, l'école française - La Découverte Poche/Essais - Auteur : Marie-Monique ROBIN - Éditeur : LA DECOUVERTE, 2015 - (ISBN 2707186686 et 9782707186683) - Paragraphe 13 : Le putsh d'Alger et l'OAS - Les meilleurs élèves
- Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l'école française [détail des éditions], 2008, p. 180-183
- « Décorations de Roger Degueldre »
Bibliographie
- Jean-Philippe Ould Aoudia (introduction de Germaine Tillon, préface d'Emmanuel Roblès), L'assassinat de Chateau Royal - Alger : , éd. Tirésias-Michel Reynaud, Paris, 1992, 197 p. (ISBN 2908527103 et 978-2908527100)
- Jean-Pax Méfret, 1962, l'été du malheur, Paris, Pygmalion, , 213 p. (ISBN 978-2-7564-0131-7)
- Axel Nicol, La bataille de l'OAS, les sept couleurs, 1962, 218 p.
Articles connexes
- Commando Delta
- Organisation armée secrète
- Site internet ... http://adimad.info/galerie/DEGUELDRE
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