Première République (Tchécoslovaquie)
La République tchécoslovaque, a posteriori précisée Première République (en tchèque, První republika ou První československá republika, en slovaque, Prvá česko-slovenská republika), est le régime qu'a connu la Tchécoslovaquie entre sa création en 1918 et l'annexion des Sudètes par l'Allemagne nazie à la suite des accords de Munich en 1938. Elle est précédée de l'Autriche-Hongrie et suivie de la Seconde République tchécoslovaque, bref intermède encore démocratique qui dure du au , avant que ne soient instaurés le protectorat de Bohême-Moravie et la République slovaque.
Pour les articles homonymes, voir Première République et République tchécoslovaque.
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(19 ans, 11 mois et 3 jours)
Drapeau de la République tchécoslovaque à partir de 1920. |
Grandes armoiries de la République tchécoslovaque à partir de 1920 (en). |
Devise |
en tchèque : Pravda vítězí (« La vérité vaincra ») |
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Hymne |
Kde domov můj? (tchèque) |
Statut | République |
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Capitale | Prague |
Langue(s) |
« Tchécoslovaque » : de fait, tchèque (utilisé pour les actes officiels) et slovaque. Allemand, hongrois, polonais, romani, ruthénien et yiddish avaient un statut régional. |
Monnaie |
Couronne austro-hongroise (1918 – 1919). Couronne tchécoslovaque (à partir de 1919). |
Population (1938) | 14 800 000 hab. |
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Superficie (1938) | 140 800 km2 |
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Proclamation d'indépendance. | |
Adoption de la constitution. | |
Accords de Munich. |
1918 – 1935 | Tomáš Masaryk |
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1935 – 1938 | Edvard Beneš |
(1er) 1918 – 1919 | Karel Kramář |
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(Der) 1935 – 1938 | Milan Hodža |
Chambre haute | Sénat (cs) |
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Chambre basse | Chambre des députés |
Entités précédentes :
Naissance
La Tchécoslovaquie nait de la fragmentation de l'Autriche-Hongrie entérinée par le traité de Saint-Germain-en-Laye à l'issue de la Première Guerre mondiale, sur une base nationale promue par le Tchèque Tomáš Masaryk et le Slovaque Milan Rastislav Štefánik. Tomáš Masaryk devient, le , le premier président de la Tchécoslovaquie indépendante. Edvard Beneš, ministre des affaires étrangères, est l'une des principales personnalités politiques du pays[1]. Les Tchèques et les Slovaques y côtoient des minorités allemandes, ruthènes, hongroises, polonaises, juives germanophones et tziganes. Les Tchèques sont majoritaires en Bohême et Moravie, les Slovaques en Slovaquie. Les premières années de la Tchécoslovaquie indépendante sont marquées par des tensions nationalistes avec les Allemands et les Hongrois, jusque-là socialement dominants (seules leurs langues étaient officielles en Autriche-Hongrie) qui minent la vie politique malgré le bon fonctionnement de la démocratie parlementaire, d'autant que les minorités allemande et hongroise n'avaient pas été invitées à participer à l'élaboration de la constitution de la nouvelle république. Adoptée en 1920, celle-ci interdit l'irrédentisme avec l'Allemagne ou la Hongrie, alors que les Allemands revendiquent leur rattachement à l'Allemagne et à l'Autriche, et les Hongrois leur maintien en Hongrie selon la même base nationale dont bénéficient les Tchèques et les Slovaques (Droit des peuples à disposer d'eux-mêmes inclus dans les 14 points du président Woodrow Wilson). Ainsi, en 1919 les députés des provinces germanophones avaient voté en faveur d'un rattachement de leurs régions à la République d'Autriche ce que les Alliés interdirent par le traité de Saint-Germain-en-Laye.
Historique
Dans les premiers mois de son existence, la Tchécoslovaquie a du mal à assurer sa souveraineté face à la République démocratique hongroise qui refuse de céder le territoire de la Haute-Hongrie, qui correspond à la Slovaquie. Des troupes hongroises y restent stationnées et empêchent les agents du nouvel État tchécoslovaque de prendre leurs fonctions. En mai 1919 la victoire de la Hongrie bolchévique (qui a succédé à la République démocratique hongroise) sur les troupes tchécoslovaques permet la constitution d'une République slovaque des conseils sur le territoire de la Slovaquie, mais la défaite des Bolchéviks hongrois dans la guerre hungaro-roumaine de 1919 y met rapidement fin, et l'État tchécoslovaque finit par asseoir son autorité « d'Aš à Jasiňa » comme l'on disait à l'époque par référence aux localités situées aux « pointes » Ouest et Est du pays, à près de mille kilomètres l'une de l'autre.
Le traité de Versailles et le Traité de Saint-Germain-en-Laye achèvent de fixer les frontières tchécoslovaques. Les premières élections se déroulent le et, jusqu'à l'annexion allemande de 1938-1939, les populations de la République Tchécoslovaque seront invitées à participer aux différents scrutins en respectant le calendrier prévu par la Constitution.
Territoire et nationalités
D'après les statistiques de 1921, 13 613 172 habitants vivent sur le territoire de la république répartis[2] en :
- 51 % de Tchèques
- 23,4 % d'Allemands des Sudètes et d'Allemands des Carpates
- 14 % de Slovaques
- 5,5 % de Magyars
- 3,4 % de Ruthènes (Ukrainiens)
- 1,3 % de Juifs germanophones
- 1,4 % de minorités diverses : Polonais, Roumains, Roms et autres.
Elle intègre les territoires
- du royaume de Bohême (jusqu'alors dépendant de la couronne d'Autriche)
- de la Slovaquie et de la Ruthénie subcarpatique (jusqu'alors dépendantes de la couronne de Hongrie).
Cet état de fait est dénoncé par les minorités allemandes incluses dans le nouvel État et majoritaires dans certaines régions, il faut y envoyer la force armée pour y imposer la nouvelle république slave :
- Le Böhmerwaldgau (région des Forêts de Bohême), en Bohême du sud se déclare District (Kreis) du Land de Haute-Autriche ; administré par le Kreishauptmann (chef de district) Friedrich Wichtl (1872 - 1922) à partir du ,
- Le Deutschböhmen (la Bohême germanique), au nord-est de la Bohême se déclare partie entière du nouvel État autrichien et est administré par un Landeshauptmann : Rafael Pacher (1857-1936), du au puis par Rudolf Ritter von Lodgman von Auen (1877 - 1962) du au (sa capitale, Reichenberg, est la dernière à être conquise par l'armée tchécoslovaque mais son gouvernement continue en exil tout d'abord à Zittau en Saxe puis à Vienne, jusqu'au ),
- Le Sudetenland (la Région des Sudètes), au nord de la Moravie et en Silésie se déclare partie entière du nouvel État autrichien et est administré par le Landeshauptmann Robert Freissler (1877-1950) du au (date à laquelle les Tchécoslovaques occupent sa capitale, Opava),
- Le Deutschsüdmähren (la Moravie germanique du sud) se proclame District (Kreis) de la Basse-Autriche et est administré par le Kreishauptmann Oskar Teufel (1880 - 1946) du jusqu'en décembre de la même année quand les troupes tchécoslovaques reprennent la situation et les territoires en main.
La Tchécoslovaquie doit également faire face aux revendications autonomistes des Slovaques et des Allemands des Sudètes. Le principal mouvement autonomiste slovaque est dirigé par les prêtres catholiques Andrej Hlinka et Jozef Tiso.
L'opposition entre les Allemands et les Tchèques est latente tout au long des années 1920 et s'intensifie dans les années 1930. Les Sudètes d'abord autonomistes, expriment leur irrédentisme en 1933 avec la formation d'un Parti allemand des Sudètes emmené par son leader politique, Konrad Henlein, qui réclame, avec l'appui de l'Allemagne nazie, le rattachement au Troisième Reich et amplifie graduellement ses exigences. La crise éclate à la suite de l'Anschluss de l'Autriche et du Reich en 1938. Il est alors évident que la prochaine exigence de Hitler sera la réunification avec la Région des Sudètes.
Gouvernement et vie politique
Les institutions sont copiées sur celles de la IIIe République Française : deux assemblées, Chambre des députés et Sénat, toutes deux élues au suffrage universel, des deux sexes, président de la république élu pour sept ans par le parlement et disposant de pouvoirs importants (chef des armées, dissolution, veto). Le premier titulaire de la fonction, Tomáš Masaryk contribue à présidentialiser le régime. L'usage de la représentation proportionnelle présente de nombreux inconvénients : à la division entre Droite et Gauche, s'ajoute la division ethnique ; toutes les minorités ont leur parti. Il en résulte une instabilité ministérielle chronique, d'autant plus que beaucoup d'entre eux contestent la nature même du nouvel état. Ainsi, le parti communiste regarde vers Moscou, les partis sudètes vers Berlin, et les partis hongrois vers Budapest.
La prédominance politique, en Tchécoslovaquie, passe des sociaux-démocrates aux agrariens. Antonín Švehla, chef des agrariens, dirige plusieurs gouvernements de 1922 à 1926 puis de 1926 à 1929. Cette année-là, un gouvernement doit d'appuyer sur 9 partis différents ! Tomáš Masaryk élu en 1920 est réélu en 1927 et 1934. Il demeure président jusqu'en 1935, date à laquelle il se retire à l'âge de 87 ans et son dauphin, Edvard Beneš devient chef de l'État. Milan Hodža, dirigeant des agrariens, devient également premier ministre en 1935.
Événements
Le , la république tchécoslovaque conclut une alliance militaire, la Petite Entente, avec le Royaume de Yougoslavie et le Royaume de Roumanie. La Petite Entente ne survivra pas aux manœuvres du Troisième Reich. Edvard Beneš, premier ministre à partir de 1921, mise également sur la protection de la France pour assurer la sécurité du pays. La Tchécoslovaquie est un clou enfoncé dans le dos de l’Allemagne. C’est la vision stratégique vue par l’État-Major français. Aussi, l’armée du pays est au début financée et continuellement entraînée par des officiers français. Le chef d'État-Major de l'armée Tchécoslovaque sera jusqu'en 1924 un général français : Maurice Pellé puis Eugène Mittelhauser. Le , un accord militaire est trouvé, confirmé le par une promesse d’assistance militaire.
L'arrivée de Hitler au pouvoir en 1933 et l'Anschluss avec l'Autriche en 1938 fait craindre que la Tchécoslovaquie, avec ses trois millions d'Allemands des Sudètes concentrés sur les marges du pays bordant le Reich et menés par le SdP, le parti autonomiste de Konrad Henlein, ne soit la prochaine sur la liste. Les revendications du Troisième Reich sur le territoire des Sudètes poussent Beneš à conclure avec l'Union soviétique un pacte dirigé contre l'Allemagne[3]. Mais le danger allemand se précise avec l'Anschluss de , quand l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne place la Bohême en tenaille.
Les préparations militaires de Hitler contre la Tchécoslovaquie
La France et le Royaume-Uni incitent le gouvernement tchécoslovaque à négocier : sur l'initiative de Benito Mussolini, une conférence se tient à Munich en septembre 1938, Edvard Beneš n'y étant même pas invité. Les accords de Munich donnent satisfaction à l'Allemagne nazie et au Royaume de Hongrie, qui récupèrent les territoires peuplés de minorités allemandes et magyares. Edvard Beneš démissionne le , remplacé par Emil Hácha, et choisit l'exil. L'amputation territoriale met fin de facto à la première République tchécoslovaque, à laquelle succède l'éphémère seconde République tchécoslovaque. Le , c'est toute la partie tchèque qui est occupée et devient le protectorat de Bohême-Moravie alors que la Slovaquie déclare son autonomie sous la houlette de Mgr Tiso et que l'extrémité orientale de la République est occupée par la Hongrie de l'amiral Horthy. La France n'est pas intervenue pour défendre le pays, malgré des accords de défense mutuels.
C'est la fin d'une période qui, en dépit des incessants problèmes politiques (tensions nationalistes à l'intérieur, menace bolchevique aux marches orientales) et économiques (crise de 1929), est perçue comme un âge d'or par les Tchèques.
Notes et références
- Vratislav Preclík. Masaryk a legie (Masaryk and legions), váz. kniha, 219 str., first issue vydalo nakladatelství Paris Karviná, Žižkova 2379 (734 01 Karviná, Czechia) ve spolupráci s Masarykovým demokratickým hnutím (Masaryk Democratic Movement, Prague), 2019, (ISBN 978-80-87173-47-3), pp. 8 - 52, 57 - 120, 124 - 128, 140 - 148, 184 - 190
- Pavel Bělina, Petr Čornej, Jiří Pokorný, Histoire des Pays tchèques, Seuil, Paris, 1995, p.368
- Michel Mourre, Dictionnaire d'histoire universelle, article Tchécoslovaquie, Bordas, édition de 2004
Voir aussi
Article connexe
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