Parti colonial

Le parti colonial est issu du Comité de l'Afrique française fondé en 1890.

Historique

La nébuleuse appelée "parti colonial" a été créé par Eugène Étienne, républicain, et Auguste Louis Albéric d'Arenberg, député royaliste, en 1892. Il ne s'agit pas d'un parti politique mais d'un groupe d'influence extrêmement hétérogène composé de députés (près de 120 dès les élections de 1893) provenant de tous bords (extrême droite nationaliste, royalistes, républicains opportunistes et radicaux), mais aussi de scientifiques, de savants, de géographes.

Il a permis à Étienne, après avoir été évincé du sous-secrétariat d'État aux Colonies, de maintenir un certain pouvoir sur ces questions qui étaient primordiales pour lui. Lors de sa création, 48 députés l'intègrent, 113 à la suite des élections de 1893 et 200 en 1902.

Théophile Delcassé, ministre des Affaires étrangères de 1898 à 1905 souligne l'importance de ce groupe ainsi que le rôle majeur d'Étienne qui, malgré sa présence dans quelques cabinets, agit surtout par influences et réseaux : "Étienne a dans ses mains le sort du cabinet, écrivit Delcassé en 1903, son groupe constitue l’appoint qui est indispensable à celui-ci pour vivre. C'est Étienne qui fut à l'origine de la colonisation de Madagascar, de l'Entente cordiale et du protectorat sur le Maroc[1].

Le "parti colonial" s'appuie sur une presse qui tente de diffuser dans l'opinion le soutien au colonialisme. En 1928-1929, la presse coloniale voit ses tirages augmenter[2], deux ans avant une grande Exposition coloniale internationale qui a lieu à Paris du 6 mai au , à la porte Dorée et sur le site du bois de Vincennes. La Dépêche coloniale et maritime atteint son apogée en 1929 avec 20000 exemplaires diffusés[2] contre 13 000 en 1913[3], soit un doublement de son tirage en une quinzaine d'années. Elle se situe alors peu après d'autres publications coloniales spécialisées comme l'Effort colonial, qui tire à 25 000, et La Dépêche africaine, qui est à 30 000[2].

Certains leaders coloniaux comme Pierre Perreau-Pradier, vice-président de la commission de l'Algérie, des colonies et des protectorats, « prenant leurs désirs pour des réalités »[2],[3], estimèrent à partir de 1928 que « le miracle s'était réalisé : l'opinion était gagnée »[2]. Personnage important du "Parti colonial"[2], il déclara en 1928 que « ceux qui ont lutté en faveur de l'idée coloniale en France et combattu au Parlement, dans la presse, dans les milieux les plus divers pour propager la foi coloniale, sont singulièrement réconfortés de constater le plein épanouissement de leur utile propagande. Il a fallu certes beaucoup d'énergie pour remonter le courant d'indifférence qui faisait dériver l'opinion publique loin du nécessaire effort colonisateur »[2].

D'autres, comme le directeur de la Ligue maritime et coloniale, sont restés plus sceptiques en déclarant en juillet 1928: « placé à un poste favorable pour ausculter le pouls de l'opinion, qu'il me soit permis de ne pas partager tant d'optimisme »[2] et déplorait en particulier les résistances des professeurs et instituteurs à la propagande coloniale : « Le milieu qui a charge de former la mentalité c'est-à-dire le corps enseignant, est celui qui y est demeuré jusqu'à présent le plus étranger, à de rares exceptions près. », critiquait-il[2].

Notes et références

  1. « [Connaître l’histoire coloniale, combattre les racismes et l’antisémitisme] le « parti » colonial, par Charles-Robert Ageron », sur ldh-toulon.net (consulté le )
  2. "Les colonies devant l'opinion publique française (1919-1939)" par Charles-Robert Ageron, dans la revue Outre-Mers en 1990
  3. "Le « parti » colonial" par Charles-Robert Ageron en 2005

Bibliographie

  • Charles-Robert Ageron, France coloniale ou parti colonial ?, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Pays d'outre-mer » (no 2), , 302 p. (ISBN 2-13-035340-1, présentation en ligne), [présentation en ligne].
  • (en) Christopher Andrew et Alexander-Sydney Kanya-Forstner, « The French "Colonial Party" : Its Composition, Aims and Influence, 1885-1914 », The Historical Journal, vol. 14, no 1, , p. 99-128 (JSTOR 2637903).
  • (en) Christopher Andrew et Alexander-Sydney Kanya-Forstner, « The Groupe Colonial in the French Chamber of Deputies, 1892-1932 », The Historical Journal, vol. 17, no 4, , p. 837-866 (JSTOR 2638559).
  • Julie d'Andurain, « Le poids du comité du Maroc et du « parti colonial » dans la Société de l'histoire des colonies françaises (1903-1912) », dans Cent ans d'Histoire des Outre-Mers, Paris, Société française d’histoire des outre-mers, coll. « Publications de la Société française d'histoire des outre-mers » (no 9), , 664 p. (ISBN 978-2-8597-0052-2, lire en ligne), p. 311-323.
  • Julie d'Andurain, Colonialisme ou impérialisme ? Le Parti colonial en pensée et en action, Paris, Hémisphères Éditions, coll. « Zellige », , 439 p. (ISBN 978-2-914773-79-9, présentation en ligne).
  • Peter Grupp, « Le « parti colonial » français pendant la Première Guerre mondiale : deux tentatives de programme commun », Cahiers d'études africaines, vol. XIV, no 54, , p. 377-391 (lire en ligne).
  • Marc Lagana, Le parti colonial français : éléments d'histoire, Sillery, Presses de l'université du Québec, , VIII-188 p. (ISBN 2-7605-0470-0, présentation en ligne).

Lien externe

  • Claire Lemercier, « Julie d’Andurain, Le lobby colonial ou l’emboîtement des réseaux », Réseaux et Histoire, groupe RES-HIST, , lire en ligne.
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