Ne travaillez jamais
« Ne travaillez jamais »[Note 1] est un slogan écrit sur un mur parisien, rue de Seine en 1953, par le théoricien du mouvement situationniste Guy Debord.
Ce slogan fait partie des revendications révolutionnaires issues des courants marxistes et anarchistes liés à l'abolition du travail salarié et qui fut repris lors des événements de mai 68.
Origine
En 1953, Guy Debord, alors, âgé de 22 ans, écrit, à la craie, sur un mur de la rue de Seine à Paris, un slogan devenu célèbre : « Ne travaillez jamais ». Ce graffiti a disparu.
Signification
Le slogan ne s'exprime pas contre la valeur-travail mais au contraire « contre les inégalités au niveau de la répartition des fruits du travail »[1]. Selon le livre d'Alastair Hemmens, spécialiste de la critique du travail en France[2], cette formule est une synthèse « synthèse entre l’aspect ésotérique de la théorie marxienne et la critique artiste du travail ». Pour Guy Debord, philosophe marxiste, le travail humain, « transfiguré en travail-marchandise », se trouve à la « base d'un processus fétichiste d’accumulation, provoquant une situation d’aliénation totale »[2]. Dans "La Société du spectacle, Guy Debord explique que « la valeur d'échange est le condottiere de la valeur d'usage, qui finit par mener la guerre pour son propre compte. » [3].
Arthur Rimbaud mot à mot mais renversé
La phrase reprend mot à mot, en la renversant, la formule « Jamais je ne travaillerai »[4],[5] tirée d'Arthur Rimbaud dans le poème en prose Vierge folle inclus dans son recueil de 1873 Une saison en enfer. Dans un ouvrage d'analyse critique de la pensée de Guy Debord dont il est un spécialiste, l'écrivain et philosophe Anselm Jappe évoque notamment l'éventuelle influence de ce poème de Rimbaud[6].
Postérité
À l'occasion d'une exposition sur les œuvres de Debord, organisée en 2013 par la BnF, cette action est présentée par la journaliste littéraire Nathalie Crom comme le « premier acte symbolique d'une révolte politique et esthétique contre l'ordre établi »[7].
Ce slogan fut utilisé durant le mouvement de Mai 68, notamment par Les enragés, mouvement à tendance radicale créé autour de René Riesel, Gérard Bigorgne, Patrick Cheval, Pierre Carrère et Patrick Negroni[8].
Selon un article écrit par Mathieu Dejean dans les Inrocks qui cite l'écrivain et journaliste Jean-Michel Mension, « Ne travaillez jamais, était un mot d’ordre qui faisait absolument l’unanimité, et c’est l’un des premiers qui a réapparu à Nanterre en 68. »[9].
Notes et références
Notes
- quelquefois retranscrit avec un point d'exclamation.
Références
- " La gauche a mal à son entreprise", par Olivier Mathiot, en 2013, aux Editions Plon
- "Ne travaillez jamais. La critique du travail en France de Charles Fourier à Guy Debord" par Alastair Hemmens, compte-rendu de lecture par Éric David dans Crise & Critique en 2019
- "La Société du spectacle, par Guy Debord, aux Editions Gallimard
- Google livre "Guy Debord" par Anselm Jappe, page 141, consulté le 28 janvier 2019
- Google livre "120 poème d'Arthur Rimbaud", consulté le 28 janvier 2019
- "Guy Debord", par Anselm Jappe, aux Editions Via Valeriano, 1993, réédité par les éditions Denoël en 2011
- Site de Télérama, article de Nathalie Crom, publié le 22 mars 2013 "Guy Debord, un regard radical sur notre société", consulté le 28 janvier 2019
- Greil Marcus, Lipstick traces une histoire secrète du vingtième siècle, Allia, 1998, p. 493.
- Site le inrocks, article de Mathieu Dejean, publié le 30 janvier 2018 "Aux origines de l’esprit de Mai 68: l'histoire tumultueuse de l'Internationale lettriste", consulté le 20 janvier 2019
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Fonds Guy Debord sur le catalogue du Département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France, BnF, NAF28603
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