Mary Anning

Mary Anning () est une paléontologue autodidacte britannique. Ayant commencé par récolter des fossiles pour les revendre aux amateurs, elle est aujourd'hui reconnue comme une figure incontournable dans l’histoire de la paléontologie des vertébrés[1].

Pour les articles homonymes, voir Anning (homonymie).

Biographie

Les parents de Mary, Richard Anning, originaire de Colyton, et Mary ('Molly') Moore, se marient à Blandford Forum, ville d'origine de cette dernière, en [2]. Ils s'installent à Lyme Regis dans un quartier d'artisans et ont entre 9 et 10 enfants, mais tous, sauf Mary et Joseph, périssent[2].

À l'âge de 15 mois, elle vit une expérience hors du commun : Mary est la seule survivante de la foudre qui a frappé quatre personnes du village, dont l'infirmière qui la tenait dans ses bras[réf. nécessaire].

A partir de 8 ans, elle étudie à l'école dissidente où elle apprend que Dieu a créé la Terre en littéralement 6 jours tout en étant paradoxalement encouragée à étudier la géologie[2].

Son père, ébéniste, arrondit ses fins de mois en vendant des fossiles aux touristes[2]. Il participe en 1800 à des émeutes contre le prix du pain[2]. Il meurt en 1810 d'une tuberculose faisant suite à une chute[2]. La famille, endettée, vit alors de la charité, et il est supposé que Mary arrête l'école cette année-là[2]. Elle, sa mère et son frère Joseph commencent alors à rechercher les fossiles à plein temps[3]. Mrs Stocks, une propriétaire de Lyme Regis, aide financièrement la famille, offrant à Mary son premier livre de géologie[2]. Devant la situation financière désastreuse de la famille suite à une année sans découverte de fossile, Thomas James Birch, l'un de leurs clients réguliers, offre en 1820 d'organiser une vente de ses propres collections en leur faveur[2].

Mary intègre rapidement un cercle de paléontologistes et géologues, qui comprend notamment Henry de la Beche, Jean André Deluc, et William Buckland[2].

C'est un travail difficile, particulièrement en hiver, mais également dangereux et Mary manque d'y laisser sa vie en 1833 lors d'un glissement de terrain[réf. nécessaire].

Elle meurt à 47 ans d'un cancer du sein, alors qu'elle vient d'être élue membre honoraire de la Société géologique de Londres[3].

Découverte et identification de fossiles

La collection de fossiles est en vogue à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, d'abord comme passe-temps, à la manière d'une collection de papillons, puis elle s'est progressivement transformée en une science au fur et à mesure de la prise de conscience de l'importance des fossiles en géologie et en biologie. Mary Anning débute par l'aspect purement commercial, mais la communauté scientifique devient rapidement sa principale source de demande.

Découverte d'un ichtyosaure à 12 ans

La première cause de cet intérêt des scientifiques et de l'orientation de la carrière de Mary Anning est sa découverte, quelques mois après la mort de son père, d'un squelette complet d'ichtyosaure[4]. Son frère avait trouvé un crâne de ce qui semblait être un grand crocodile un an plus tôt[2]. Tout d'abord, le reste du squelette manque mais Mary, accompagnée de son frère, découvre le corps[2]. Cette espèce avait déjà été décrite en 1699, à partir de fragments découverts dans le pays de Galles, mais c'est le premier squelette d'ichtyosaure retrouvé complet[2]. Les Anning embauchent des ouvriers pour s'occuper de l'excavation du squelette, qui est d'abord vendu à Henry Hoste Enley puis offert à un musée[5]. Il s'agit d'une découverte importante qui est rapidement décrite dans Philosophical Transactions of the Royal Society. Mary est alors âgée de douze ans[2].

L'attention de Thomas Birch, un collectionneur aisé, est attirée sur Mary Anning, dont la réputation grandit. Perturbé par la pauvreté de Mary Anning et de sa famille, il organise une vente de ses propres fossiles et en remet le bénéfice aux Anning (environ 400 £)[4]. Débarrassée des soucis financiers pour la première fois, Mary continue sa collection même après que son frère décroche un emploi de tapissier.

Contributions majeures à la paléonthologie

Lettre de Mary Anning sur la découverte du Plesiosaurus

Sa découverte majeure sera une première : le squelette d'un plésiosaure en 1821[4]. Le spécimen découvert est un Plesiosaurus dolichodeirus, encore considéré de nos jours comme le spécimen type de cette espèce. En 1828, elle découvre un important fossile de ptérodactyle, un « Pterodactylus macronyx », le premier trouvé hors d'Allemagne[3]. Elle revend le fossile à William Buckland qui lui donnera le nom de Dimorphodon.

En 1829, elle met au jour un fossile de Squaloraja, que l'on suppose alors être un hybride entre le requin et la raie mais qui est ensuite reconnu comme le spécimen type d'une nouvelle espèce[3],[2].

Elle est la première à identifier la véritable nature des cophrolithes, à savoir des excréments fossilisés de lézards[2].

Dans les années 1830, elle reçoit une rente annuelle de la British Association for the Advancement of Science en récompense de ses efforts. Ses revenus sont complétés par les bénéfices des ventes de Duria Antiquior, la première représentation picturale d'une scène de vie des temps primitifs, créée en 1830 par Henry De la Beche et George Johann Scharf à partir des fossiles qu'elle a découverts.

Reconnaissance et postérité

Dans l'Histoire, elle est rarement crédité de ses découvertes, celles-ci étant souvent attribuées aux collectionneurs ayant acquis ses fossiles et en ayant fait don à diverses institutions. Toutefois, quelques scientifiques tels que le géologue Henry De la Beche ou le paléontologue Gideon Mantell reconnaissent ses apports dans leurs travaux[3].

Prises ensemble, les découvertes de Mary Anning sont une des clefs montrant l'évidence de l'extinction d'espèces suggérée à partir de la fin du XVIIIe siècle par des zoologues comme Georges Cuvier. Auparavant, il était en effet admis que Dieu avait créé tous les êtres vivants lors de la Création et il était impensable que des espèces puissent s'éteindre. Un squelette bizarre trouvé dans le sol était supposé appartenir à une espèce vivant encore dans une partie inexplorée de la Terre. La nature si étrange des squelettes découverts par Mary Anning et d'autres paléontologues de l'époque, comme Gideon Mantell, le « découvreur » des dinosaures, porte un coup sévère à ces arguments et prépare à une meilleure compréhension de la vie dans les périodes géologiques précédentes[6].

L'influence d'Anning se porte aussi sur le terrain de la géologie : ses découvertes forment les bases d'une révolution dans le domaine de la géochronologie, à savoir l'utilisation des fossiles pour reconstruire l'histoire de la Terre.

Impressionné par sa rencontre avec Mary Anning et sa complice Elizabeth Philpot, le naturaliste américano-suisse Louis Agassiz nommera deux espèces en son nom (Acrodus anningiae et Belenostomus anningiae). Cependant, après sa mort, le nom d'Anning tombera dans l'oubli.

Redécouverte ces dernières décennies, elle est maintenant honorée comme une figure importante de la paléontologie. Le moteur de recherche Google l'honore d'ailleurs d'un doodle, le , à l'occasion des 215 ans de sa naissance[7]. En 2010, la Royal Society la classe parmi les dix scientifiques les plus influentes de l'histoire britannique[3].

En 2019, une jeune fille de 11 ans de Lyme Regis, elle-même chasseuse de fossile, est choquée d'apprendre que Mary Anning n'a pas de statue honorant sa mémoire ; elle décide donc de contacter les autorités locales, qui acceptent de financer la création d'une statue en bronze réalisée par Hazel Reeves[8].

Biographie romancée et filmée

La romancière Tracy Chevalier a publié une biographie romancée de Mary Anning sous le titre Remarkable Creatures (HarperCollins, 2009), en français Prodigieuses créatures (Paris, éditions Quai Voltaire/ La Table ronde, 2010 traduction Anouk Neuhoff) En , une maison de production australienne acquiert les droits pour un film adapté du roman[9].

Le film britannique Ammonite de Francis Lee (2020) s'inspire de la relation de Mary Anning (interprétée par Kate Winslet) avec Charlotte Murchison (Saoirse Ronan) et Elizabeth Philpot (Fiona Shaw). Ce film choisit d'interpréter l'absence de relations hétérosexuelles de Mary comme une possibilité qu'elle ait eu des relations lesbiennes, choix qui provoque une polémique[10].

Bibliographie

  • Philippe Baraduc, Mary Anning, paléontologue (1799-1847)
  • Buffetaut Éric, «La Marquise, l'anatomiste et le crocodile» - p.73-76, dans la revue Espèces, revue d'histoire naturelle n°28-2018 - ISSN 2256-6384

Voir aussi

Notes et références

  1. Selon la notice que lui consacre la revue « Espèces », Hors-série n° 2, avril 2016, page 41.
  2. Patricia Pierce, Jurassic Mary : Mary Anning and the Primeval Monsters., History Press Limited, The, (ISBN 978-0-7509-5924-7 et 0-7509-5924-X, OCLC 913096209, lire en ligne)
  3. John P. Rafferty, « Mary Aming », sur britannica.com,
  4. « Mary Anning, paléontologue (1799-1847) – Femmes savantes, femmes de science », sur femmessavantes.pressbooks.com (consulté le )
  5. Patricia Pierce, Jurassic Mary : Mary Anning and the Primeval Monsters., History Press Limited, The, (ISBN 978-0-7509-5924-7 et 0-7509-5924-X, OCLC 913096209, lire en ligne)
  6. (en) « Mary Anning | English fossil hunter and anatomist », Encyclopedia Britannica, (lire en ligne, consulté le )
  7. Victoria Gairin, « Google fait de Mary Anning sa reine d'un jour ! », sur lepoint.fr, (consulté le ).
  8. (en-GB) « Mary Anning: Meet the girl getting a statue of her hero in Lyme Regis », BBC Newsround, (lire en ligne, consulté le )
  9. « The Galvanized Film Group Acquires Film Rights to Tracy Chevalier’s novel Remarkable Creatures », sur itsmemorabletv.blogspot.com (consulté le )
  10. (en) « Mary Anning biopic director defends film's lesbian romance storyline », the Guardian, (lire en ligne, consulté le )

Liens externes

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