Marie Gaulis

Marie Gaulis (Thonon-les-Bains, - La Chaux-de-Fonds, )[1], romancière, poète, essayiste et traductrice, est la fille de l’écrivain, dramaturge et comédien suisse Louis Gaulis et de son épouse, l’artiste-peintre française Henriette de Foras. Brillante et discrète, celle qui fut l’une des plumes francophones les plus talentueuses de sa génération meurt du cancer après une longue maladie [2],[3] à l’âge de 53 ans[4], non sans avoir marqué la littérature de son temps d’une empreinte délicate et indélébile.

Biographie

Après une enfance itinérante passée entre les montagnes savoyardes, les rives de la Méditerranée, New York et Paris, où elle passe son baccalauréat, Marie Gaulis, fille « d’un père qui ne tenait guère en place »[5], étudie le grec moderne à l’ Université de Genève sous l’égide du Professeur Bertrand Bouvier. Sa licence obtenue, puis assistante de grec moderne, elle s’intéresse à la diaspora grecque en Australie. Ses recherches sur deux écrivaines australiennes d’origine grecque la conduisent à Sydney et aboutissent à la rédaction d’une thèse de doctorat en 1998, intitulée Une littérature de l’exil. Vasso Kalamara et Antigone Kefala, deux écrivains grecs d’Australie, et publiée en 2001 aux Éditions Slatkine.  

Œuvre

Parallèlement à ses études de grec moderne, Marie ne cesse d’écrire et publie un premier recueil de poèmes, Le Fil d’Ariane, en 1993 aux Éditions de l'Aire à Genève. Après un second passage à Paris, elle retourne s’établir en Suisse, à la Chaux-de-Fonds, où elle consacre sa vie entièrement à l’écriture. Entre 1999 et 2004, elle publie coup sur coup trois volumes de Poèmes en prose aux Éditions Metropolis à Genève, recueils de textes brefs, entre carnets de voyages et méditations poétiques, dans lesquels elle arpente des terres proches et lointaines : Ligne imaginaire (1999)[6], Terra Incognita, (2002) et Le Cœur couronné (2004).

Elle traduit également et adapte des pièces du théâtre d’ombre grec, et publie Karaghiozis, le château des fantômes à Genève en 2005 aux Éditions Zoé. Suit un premier récit poignant, Lauriers amers (Zoé, 2009), à la frontière entre la fiction et le reportage, dans lequel elle retourne sur les traces de son père, Louis Gaulis, mort tragiquement au Sud-Liban en 1978 lors d’une mission pour le CICR, lorsque Marie était adolescente[7].

Dans Le Rêve des naturels (Zoé, 2012), un livre placé sous les auspices de Jean-Jacques Rousseau, elle revisite le continent australien, qui avait déjà inspiré les méditations de Terra Incognita et où elle continue à faire de fréquents voyages, et, en promeneuse solitaire, médite sur les paradis perdus et notre rapport au passé et à la nature: « Cette nature, que nous cherchons de plus en plus loin, en une paradoxale quête de virginité, nous la repoussons (…) dans ses derniers retranchements, et il ne reste, pour nos yeux las, éblouis ou déçus, que des fragments, des morceaux »[8].

Le Château de Thuyset, près de Thonon-les-Bains.

Après Poèmes de la distance et des songes, qui paraît en 2015 avec des linogravures de George Alexander, elle publie un troisième roman, Le Royaume des Oiseaux (Zoé, 2016), dans lequel la narratrice se souvient du château familial[9] de son enfance en Haute-Savoie et prête sa voix à ses habitants disparus[10].

Marie Gaulis collabore enfin à l’écriture et à la mise en scène de pièces de théâtre, comme Le Retour de Doudou, consacré au Frankenstein que Mary Shelley écrivit sur les bords du Lac Léman, et Vénus vagabonde, inspiré par les anagrammes de Ferdinand de Saussure.

Par la grâce de son écriture, ample et travaillée, et de son érudition légère, Marie Gaulis, invite ses lecteurs à voyager dans l’espace et le temps et, de livre en livre, construit, dans le sillage des grands écrivains-voyageurs de Suisse romande comme Blaise Cendrars (né à la Chaux-de-Fonds) et Nicolas Bouvier,  une œuvre au charme puissant et poétique, teintée de mélancolie et d’ironie douce. « Si le passé et l’invisible traversent ses livres, ils sont aussi habités par une force vive, un goût audacieux de la liberté et de l’ailleurs »[11].

Publications

Traductions

  • Antigone Kefala, The Island, L’île, Το νήσι,  Melbourne, 2002, avec Helen Nickas
  • Karaghiozis, Le château des fantômes avec deux autres pièces du théâtre d'ombres ; Le mariage de Barba Yorgos et ; Karaghiozis et les sept dragons, Éditions Zoé, Genève, 2005

Pièces de théâtre

Vénus vagabonde : pièce de théâtre en cinq tableaux, quatre interludes, un prologue et un épilogue, Presse vagabonde, 2014.

Articles et Essais

  • « Portrait de Cingria en pirate », Petites feuilles 26, 2004, p. 9
  • « 1982. Un goût de bière », Quand j’avais dix-sept ans Le Roman des Romands, 2013, pp. 67-71
  • « Exil et voyage dans l'œuvre en prose d'Antigone Kefala », XIVe Colloque international des Néo-Hellénistes. Rennes : Université de Rennes, 1997, pp. 235-242
  • « “Les soupirs de la sainte et les cris de la fée” : rêverie sur un poème de Georges Séféris », “Voukóleia” : mélanges offerts à Bertrand Bouvier, Belles-lettres, Genève, 1995, pp. 439-444
  • Manuscrits en quête d’éditeur, Métropolis, Genève, 2003, avec une préface de Michèle Stroun
  • « Les deux Ferdinand », Le Courrier,
  • « Damballah aux reins », dans: Pierre Lepori (éd.), Hétérographe : revue des homolittératures ou pas, numéro spécial, Éditions d’en Bas, Lausanne, 2013
  • « Sans chalet », Le Persil-Prilly 133-134, hiver 2016-2017, p. 6
  • « Villa Turque », Carnets ferroviaires : nouvelles transeuropéennes, Zoé, Genève, 2017, pp. 65-68

Références

  1. La cérémonie d'adieu a eu lieu le 25 septembre dans l'après-midi au Temple protestant de Dardagny.
  2. « Carnet », Le Monde, 22 septembre 2019, p. 22.
  3. Geneviève Bridel, "Chaux-de-Fonnière d’adoption, l’écrivaine genevoise Marie Gaulis s’en est allée" , Arcinfo.ch, 04.10.2019 (consulté le 12 février 2020).
  4. Eléonore Sulser, "Marie Gaulis s'en va, prématurément" Le Temps, 26 septembre 2019 (consulté le 10 février 2020).
  5. Marie Gaulis, « L'invitée du mois », (consulté le )
  6. Jean-Michel Olivier, "Hommage à Marie Gaulis (1965-2019)"
  7. Francis Richard, "Lauriers amers", de Marie Gaulis
  8. Marie Gaulis, Le Rêve des naturels, Éditions Zoé, Genève, 2012, p. 36.
  9. Le Château de Thuyset, près de Thonon-les-Bains, résidence d'Amédée de Foras.
  10. Francis Richard, "Le Royaume des oiseaux", de Marie Gaulis
  11. Éléonore Sulser, Le Temps, 26 septembre 2019

Liens externes

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